HISTOIRE

UN AUTRE REGARD SUR L' HISTOIRE

Articles écrits par Jean-Claude Steib

HENRIETTE CAILLAUX

Le 5 décembre 1874 est née Henriette Rainouard  à Rueil-Malmaison en Seine-et-Oise (actuellement Hauts-de-Seine). C’est une femme de la haute bourgeoisie parisienne.
En 1894, elle se marie avec le romancier Léo 
Clarétie avec qui elle aura deux enfants.
Mais à partir de 
1907, elle a une liaison avec le ministre des Finances de l’époque, Joseph Caillaux.
Si bien qu’en 1908, elle divorce 
puis se remarie le 21 octobre 1911 avec son amant.
C’est 
donc Madame Henriette Caillaux. On a là, un couple de la très haute bourgeoisie, plutôt fortunée.
Mais voilà que le 16 mars 1914, elle tue d’un coup de révolver, le journaliste Gaston Calmette, directeur du journal « Le Figaro ». Motif de ce crime par une dame « bien » ? Elle reproche à ce journal sa campagne de presse contre son époux. Elle avait noté que son mari, leader du parti radical, avait fait l’objet de 138 articles, pas vraiment élogieux, en 95 jours! Ce sont tout d’abord des articles concernant sa politique. Le journal lui reproche son attitude dans l’affaire d’Agadir de 1911 (canonnières allemandes installées dans le port d’Agadir au Maroc qui est un protectorat français). Il s’agit aussi d’une sombre histoire de message qui aurait dû rester secret et que Caillaux a failli dévoiler. Enfin, c’est la guéguerre entre un journal de droite et un homme politique plutôt à gauche. On connaît ça ! 
Mais c’est l’honnêteté de Joseph Caillaux qui est remise en cause par le journal. Pour financer 
sa campagne électorale, il a usé de son influence auprès de la justice pour faire libérer un escroc. Mais les méthodes du journal sont-elles plus « propres » ?
Par le biais de la femme de ménage, on a fait subtiliser les lettres de Joseph Caillaux à sa femme. Et ces lettres seront 
publiées dans le journal ! Henriette veut défendre la réputation de son époux et la sienne. 
Le 16 mars 1914, elle va chez un armurier et achète 
un pistolet automatique. Avec la voiture de son mari, elle se fait conduire au « Figaro » pour rencontrer Calmette qui accepte de la recevoir. Une fois dans son bureau, de son manchon, elle sort le pistolet et tire 6 balles à bout portant. Calmette s’effondre gravement blessé, mais encore conscient. En attendant les secours, il murmure : « J’ai fait mon devoir sans haine ».
Henriette Caillaux se rend sans 
difficulté et reconnaît les faits, pensant ne l’avoir que blessé. Calmette est transféré à l’hôpital de Neuilly/Seine (Seine-et-Oise), il meurt sur la table d’opération.
Mme Caillaux est incarcérée à la prison St-Lazare (devenue hôpital St-Lazare dans le Xème arrondissement) et inculpée « d’homicide volontaire avec préméditation ». Le procès a lieu à partir du 20 juillet 1916. Son avocat Me Labori plaide pour un crime passionnel. Devant un jury composé exclusivement d’hommes, il convainc que « c’est un réflexe féminin incontrôlé ». Sous entendu, ces pauvres femmes ne sont pas capables e se maîtriser !
Finalement, 
Henriette Caillaux est acquittée le 28 juin 1914 (jour de l’attentat de Sarajevo qui a déclenché la guerre).
Par conséquent, 
officiellement, elle n’est pas une criminelle et son casier judiciaire restera vierge. On peut imaginer que ce verdict a été critiqué.
Joseph Caillaux 
a largement usé de sa fonction de ministre pour influencer les décisions. Comme par hasard, le Procureur général a reçu la Légion d’honneur, juste avant le procès. Un de ses amis a été nommé ministre de la Justice en juin 1914. Le président de la Cour d’assise est un ami personnel du couple Caillaux. Un député corse a payé des truands pour acclamer ou huer les témoins selon leurs déclarations.
Evidemment, tout cela provoque un scandale qui amène Joseph Caillaux à démissionner. La presse de droite s’en donne à plume joie en dénonçant ce qu’elle considère comme une faillite morale. Ces histoires d’adultère et de divorces sont encore très mal acceptées en ce début de XXème siècle.
Ce qui ne 
l’empêche pas d’être réélu député le 17 mars 1915. Mais à ce moment-là, la France a d’autres préoccupations et l’affaire est quelque peu oubliée.
La guerre terminée, on repense aux Caillaux. Dans les années 20, le couple est surveillé par les services spéciaux dont un correspondant devient l’amant d’Henriette, c’était une rapide l’Henriette, aurait dit ma grand-mère. Ce qui n’empêche pas la jolie dame (elle était effectivement belle) de reprendre des études dans les années 30 pour être diplômée de l’Ecole du Louvre, dont la sélection est rigoureuse.
En 1935 sa thèse sur le sculpteur Jules Dalou est publiée et servira même de référence sur cet artiste.
En 1940, le couple s’installe à Mamers (Sarthe). L’été de cette année, il faut faire un choix : Joseph Caillaux sera de ceux qui ont voté les pleins pouvoirs à Pétain. Henriette meurt le 29 janvier 1943, à l’âge de 69 ans. Joseph ne lui survivra pas longtemps, il meurt l’année suivante.
La vie romanesque de Madame Caillaux a inspiré auteurs et historiens. Ainsi le réalisateur Yannick Andrei a créé une série en 4 épisodes sur sa vie.
De nombreux ouvrages et documentaires lui ont été consacrés.

Dans le calendrier révolutionnaire, le 5 décembre est le jour du chevreuil.

HÉLÈNE BOUCHER

Le 30 novembre 1934, Hélène Boucher, aviatrice, est morte accidentellement à Guyancourt (Yvelines). Elle était née à Paris le 23 mai 1908.
Quand la guerre éclate en août 1914, la famille quitte Paris pour aller à Boigneville, près d’Ermenonville en Seine-et-Oise (actuellement dans les Yvelines).
De retour à Paris, Hélène fait des études au lycée Montaigne. Elle a une passion: l’aviation : elle décore sa chambre avec des photos et des articles sur les aviateurs.
A 22 ans, elle décide d’être aviatrice : elle veut venger la mort d’un ami de son frère qui était pilote d’essai.
Elle commence par être une élève d’Henri Farbos, pilote fondateur de l’aéro-club de  Mont-de-Marsan (Landes).
C’est le 4 juillet 1930 qu’elle prend son baptême de l’air. En mars 1931, ce sont les premiers cours de pilotage. Trois mois plus tard, le 21 juin, elle obtient le brevet de pilote de tourisme. L’année suivante, elle accède à la qualification de pilote professionnelle de transport public.
Elle est la 4ème femme en France à avoir ce statut après des femmes aussi prestigieuses qu’Adrienne Volland, Maryse Bastié et Maryse Hilsz.
Elle parvient à s’acheter un avion d’occasion avec lequel elle participe au rallye aérien Caen – Deauville en 1932. Mais une panne le fait atterrir dans les branches d’un arbre. Par chance, elle en sort indemne.
Loin de se décourager, en 1933, elle envisage le raid Paris – Saïgon. Là, c’est une autre épreuve. Le 7 février 1933 à 7 heures 30 elle décolle. Le départ avait été différé
de quelques jours à cause de la météo. Elle compte rallier Saïgon, distant de 12 000 km par étapes : Rome, Athènes, Alep, Bassorah, Djask (dans le golfe d’Oman), Karachi, Allahabad (au sud de l’inde), Calcutta, Rangoun, Bangkok et enfin Saïgon. L’entreprise est particulièrement audacieuse quand on sait qu’il n’y a que quelques années que Charles Lindbergh a traversé l’Atlantique (21 mai 1927). Mais le moteur de son appareil ne tiendra pas le coup et elle n’ira pas au-delà de Bagdad. Ce qui n’est déjà pas si mal.
Infatigable, en juillet 1933, elle participe en duo aux 12 heures d’Angers (Maine-et-Loire). A l’arrivée, elle sera la première femme. Puis le 8 juillet 1934, ce sont à nouveau les 12 heures d’Angers où, en solo cette fois, elle termine 2ème. Entre temps, en septembre 1933, elle se lance dans l’acrobatie aérienne avec un biplan. Ca lui réussit tellement bien que son moniteur affirme : « Dans quelques mois, elle sera la meilleure acrobate du monde ». Si bien qu’elle décroche un contrat de pilote d’essai avec Caudron-Renault ce qui lui assure un bon salaire et par conséquent, l’indépendance financière.
Le 12 août 1933, elle avait battu le record du monde d’altitude pour atteindre 5 900 m. Mais elle ne s’arrête pas là et le 13 août 1934, elle bat le record de vitesse à 445 km/heure.
Sacrées performances quand on sait que l’aviation n’en est encore qu’à ses débuts. C’est avec la guerre qui suivra qu’elle franchira un grand pas.
La guerre, Hélène Boucher ne la verra pas. Le 30 novembre 1934, elle fait un simple vol d’entraînement à Guyancourt. Là, c’est l’accident. Défaillance technique ? Faute de pilotage qui peut arriver même aux meilleurs ? Quoi qu’il en soit, elle atterrit dans les arbres et cette fois, elle est grièvement blessée. Ceux qui assistaient à son entraînement sont vite sur les lieux. Elle est transférée d’urgence à Versailles mais elle décède durant le transport.
Celle qui fut une aviatrice audacieuse, a trouvé la mort à 26 ans. L’avion qui était sa raison de vivre, a été la raison de sa mort.
Hélène Boucher, à l’instar d’autres grandes aviatrices, fut aussi une grande féministe qui a milité pour le droit de vote des femmes.
Peu avant sa mort, elle avait été lauréate du prix Monique Berlioux (fondé en 1905) de l’Académie des sports. De nombreuses villes ont donné son nom à des rues, comme Nancy, Chaumont pour ne citer que les principales . A Reims, on a une place Hélène Boucher. A Paris, c’est un square (dans le XIIIème arrondissement) qui porte son nom.

Dans le calendrier républicain, le 30 novembre est le jour de la pioche.

MARIE CHAVANNES

Marie Chavannes est née à Lyon, le 23 novembre 1876. C’est une historienne, biographe féministe.
Son père est ingénieur dans les chantiers ferroviaires de la région lyonnaise, sa mère est la fille d’un industriel de la soie. 
C’est une famille protestante. Marie reçoit donc une éducation en conséquence.
Elle fait de brillantes études 
qui lui permettent d’obtenir l’agrégation d’histoire.
Elle se 
marie le 25 avril 1902 avec Octave Monod et devient Marie Octave Monod. Le couple aura deux enfants, dont Marie-Laure qui épousera Jean-Marcel Jeanneney, 
économiste et homme politique. 
En 1920, Marie Monod fonde avec Marie Bonnet (directrice de la Maison des étudiantes à Paris) la Société féminine de rapprochement universitaire (qui est devenue 
l’Association française des femmes diplômées d’université : AFFDU). Puis elle passe à la FIFDU (Fédération Internationale des Femmes Diplômées des Universités), dont elle devient la présidente en 1923. Elle y reste jusqu’en 1933 pour être ensuite présidente d’honneur.
Ces fondatrices estiment que l’éducation des filles est un facteur de paix et de 
promotion des femmes.
C’est justement en 1923 qu’elle organise le congrès de la FIFDU qui va 
rassembler 300 participantes venues de 17 pays.
Marie Monod fait de nombreuses publications, notamment dans le bulletin des femmes diplômées d’université et fait des traductions en anglais et en allemand.
Elle participe à 
l’attribution de bourses pour étudiantes françaises à l’étranger, une sorte d’Erasmus avant l’heure.
Pendant la 2de Guerre mondiale, elle aide à l’accueil d’intellectuelles étrangères en France, notamment des Tchèques, des Polonaises, des Scandinaves : elle leur permet de passer en zone libre, tant qu’il y en a une.
Au cours de sa vie, elle a eu de nombreuses activités éditoriales. Déjà en 1902, elle publie un mémoire sur le gouvernement de Lyon. En 1937, sous le pseudonyme Daniel Stern, elle écrit une biographie sur une femme de lettres, Marie d’Agoult.
En 1939, ce sera un lexique 
international des femmes universitaires.

Marie Monod ne s’est pas seulement intéressée aux intellectuelles. Elle a été très active au sein des foyers pour employées et ouvrières. Elle a accueilli des mères isolées et leurs bébés et lutté contre la prostitution.
Après la guerre, elle s’efforce de faire repartir l’association. Mais 
les temps auront changé : les femmes accèdent au droit de vote et plus facilement aux études.
Toutes ces activités lui vaudront d’être chevalière de la Légion d’honneur en 1958.

Elle s’éteint le 31 décembre 1966.
Des ouvrages lui ont été consacrés, notamment par sa fille Marie-Laure.

Dans le calendrier révolutionnaire, le 23 novembre est la journée de la chicorée.

MANON ROLAND

Le 8 novembre 1793, Manon Roland, née Jeanne-Marie Philipon le 17 mars 1754, a été guillotinée à Paris sur la Place de la Concorde à 39 ans. Elle était ce qu’on appelait une salonnière: elle recevait chez elle, dans son salon, des personnalités politiques du parti des Girondins. On les appelait ainsi parce qu’ils étaient d’origine plutôt de bourgeoisie provinciale (et peut-être aussi que Bordeaux a une réputation bourgeoise). Ce groupe était plutôt modéré et actuellement se situerait au centre droit. Face à eux les Montagnards – qui seraient à gauche – et appelés ainsi parce qu’à l’assemblée, ils siégeaient sur les gradins les plus élevés.
Manon Roland a été l’égérie des Girondins et une des figures de la Révolution. Manon est la fille d’un graveur aisé et d’une mère érudite. Elle se révèle être une enfant
pieuse et intelligente. Très tôt, elle se passionne pour la lecture et pas n’importe quels auteurs. Visez un peu : la Bible, des auteurs grecs comme Plutarque, des auteurs plus récents : Bossuet, Fénelon, les philosophes de son siècle : Montesquieu, Voltaire, Rousseau.
En 1765, elle entre au couvent des Augustins. Mais quelques années plus tard, en 1774, à Versailles, elle est témoin de l’arrogance et du mépris de la noblesse envers la bourgeoisie.
Manon Philipon est belle. On dit d’elle qu’elle a « un sourire tendre et séducteur » : les demandes en mariage ne manquent pas. Pour les éconduire, elle dicte elle-même à son père, les lettres de refus.
Mais en 
1776, elle rencontre Jean-Marie Roland de la Platière, député et économiste.
Finalement, le 4 février 1780, elle l’épouse même s’il a 20 
ans de plus qu’elle. Ce qui ne l’empêche pas de coopérer avec lui et l’aide à rédiger ses discours.
En 1781, le couple s’installe à Amiens et donne naissance à une fille Eudora Roland 
(1781 – 1858).
Pourtant, la vie de couple ne l’enchante guère. En 1784, ils s’installent à 
Villefranche/Saône.
C’est en 1791 qu’ils reviennent à Paris et la Révolution enthousiasme Manon qui trouve une nouvelle raison de vivre.
Elle adhère au club des Jacobins, club révolutionnaire installé dans 
l’ancien couvent des Jacobins.
Chez elle, elle crée un salon où elle reçoit des hommes 
politiques dont Robespierre.
Un peu grâce à ses rencontres, son mari est nommé ministre de l’Intérieur.
Malgré tout, elle 
lui reste fidèle tout en disant de lui : « Ce vénérable vieillard ». Ironique ou affectueux ? Allez savoir….
Par contre, elle est scandalisée par les massacres des 6 et 7 septembre 1792, 
perpétrés par les révolutionnaires les plus excités quand la famille royale a été incarcérée. De là sont nées des rumeurs – les fake news, ce n’est pas nouveau ! – que les royalistes allaient se venger et faire appel aux étrangers qui avaient déjà commencé à envahir le pays.
Alors, c’est 
par centaines qu’on sort les prisonniers pour les exécuter.
La princesse de Lamballe, amie de la 
reine, est martyrisée puis décapitée. On montre sa tête au bout d’une pique à la reine. Dans la violence, il n’y a plus de tabous et l’humain perd toute humanité
Cette violence révolte donc Manon Roland. Elle en veut surtout à Danton qui, selon elle, ne fait rien contre cette situation. Les Montagnards la détestent. Tandis que son mari démissionne de son poste de ministre, le 1er juin 1793 Manon est arrêtée et incarcérée à la Conciergerie.
C’est en prison qu’elle rédige ses mémoires.
Elle est jugée le 8 novembre 1793 et 
exécutée le jour même. En montant sur l’échafaud, on lui attribue cette phrase restée dans l’histoire :
« Ô, liberté, que de crimes on commet en ton nom ! ».
Il semble que ce sont des 
historiens qui la lui ont attribuée. Car elle serait plutôt de Lamartine au siècle suivant.
Deux 
jours après, son époux se suicide. Sa fille Eudora est récupérée par un ami et se mariera le 13 décembre 1796.
Après sa mort, Manon Roland devient une légende pour les grands auteurs du XIXème siècle comme Lamartine, Stendhal. Gita May, professeur de français à l’université de Columbia aux Etats-Unis a dit d’elle : « Une héroïne sans tache et sans reproche ».
Par contre, des historiens 
français ont dit qu’elle n’était qu’une petite bourgeoise intrigante et rancunière.
En 1989, le cinéaste Edouard Molinaro lui a consacré un film pour la télévision. Dans « Secrets d’histoire », Stéphane Bern l’a évoquée dans « Les femmes dans la Révolution ». Il nous reste de nombreux tableaux d’elle et ses lettres ont été publiées. Peu de rues sont à son nom. Curieusement, elles sont en Bretagne : à Nantes et Saint-Nazaire.

Dans le calendrier républicain, le 8 novembre est le jour de la dentelaire, plante autrefois utilisée contre le saturnisme. Elle est censée combattre les maladies de peau et les rhumatismes.

LE CONGRÈS DE VIENNE

Le 1er novembre 1814, c’est l’ouverture officielle du congrès de Vienne.
Il rassemble les vainqueurs de Napoléon : Royaume-Uni, Autriche, Prusse, Russie.
La France est aussi invitée, ainsi que 3 autres Etats européens : Espagne, Portugal, Suède. Il durera jusqu’au 9 juin 1815.
La bataille de Waterloo (18 juin 1815) n’a même pas encore eu lieu.
Les objectifs de ce congrès sont principalement de 5 ordres : 
– Signer la paix ;
– Déterminer les frontières ;
– Etablir un nouvel ordre pacifique ;
– Abolir la traite négrière (mais pas l’esclavage) ;
– Reconnaître la neutralité de la Suisse. 
A la fin de l’hiver 1814, la France est envahie et le 31 mars, Paris est occupé.
Le 15 mai suivant, la France se voit imposer le traité de Paris qui la ramène aux frontières de 1790 (avant les guerres révolutionnaires et les conquêtes de Napoléon) ; elle sera en bonne partie occupée jusqu’en 1818. Mais les frontières de l’Europe sont transformées. La partie flamande de la Belgique est attribuée aux Pays-Bas qui reçoit aussi le Luxembourg pour former le royaume du Bénélux. Les Pays-Bas perdent Le Cap en Afrique du Sud et la Guyane qui passe au Royaume-Uni (actuel Surinam). Le grand changement se situe dans les territoires allemands qui étaient très morcelés en une multitude de mini Etats. Il y en avait 350 en 1792. On passe à
39 en 1815. En fait, ils sont plus ou moins inféodés à la Prusse au nord et à l’Autriche au sud.
Le Congrès reconnaît l’indépendance et la neutralité de la Suisse. De grands changements s’opèrent aussi dans la péninsule italienne. L’Autriche obtient la Lombardie et la Vénétie. Au nord-ouest, la Maison de Savoie se voit attribuer le Piémont (région au pied est des Alpes), Nice et Gènes ce qui formera plus tard le royaume de Piémont-Sardaigne.
Le pape est aussi le chef des Etats Pontificaux qui occupent pratiquement tout le centre de la péninsule. Coincés entre les Etats pontificaux et la Lombardie, il reste de petits duchés (Parme, Modène) dominés par l’Autriche.
Au nord de l’Europe, le Danemark cède la Norvège à la Suède. Tandis que le Pologne est partagée entre Russie (qui contrôle Varsovie et le royaume de Pologne), la Prusse à l’ouest et l’Autriche au sud.
Quant au Royaume-Uni, il ne demande rien du moment qu’on le laisse maître des mers et océans. Il contrôle les îles des Caraïbes, Malte en Méditerranée (route des Indes). Un chant patriotique de 1740 ne disait-il pas : « Britannia rules the waves » (L’empire britannique règne sur les vagues).
La France, grâce à la diplomatie de Talleyrand n’a pas été trop mal traitée. Comme pays vaincu, elle aurait pu être partagée ou occupée. Elle ne le sera que partiellement
et seulement jusqu’en 1818. Pourtant lorsque le congrès se termine le 9 juin 1815, alors que la bataille de Waterloo n’a lieu que le 18 juin !
Le Congrès a été animé par le chancelier d’Autriche, Klemens Metternich. Celui-ci s’efforce de maintenir un équilibre entre les trois grandes puissances continentales, tout en veillant bien à ce que l’Autriche conserve son influence en Italie. Il sera le maître d’œuvre de la formation de la Sainte Alliance créée le 20 septembre 1815. Il s’agit d’une alliance entre les trois grandes puissances chrétiennes : Autriche catholique, Prusse protestante, Russie orthodoxe.
Par contre, au milieu de tout cela, les petits peuples ne sont pas invités à dire leur mot. Tchèques, Slovaques, Polonais, Hongrois, Moldaves, Serbes, Bosniaques, Slovènes, Croates, Macédoniens sont intégrés et parfois divisés de gré ou de force selon les intérêts stratégiques des trois « grands ».
Sont-ils heureux de cette soumission ? L’avenir le dira.
En attendant, le « Congrès s’amuse. Il ne marche pas, il danse» comme il a été écrit dans « Le Moniteur » (gazette française fondée au XVIIIème siècle) du 3 décembre 1814.
Toute l’Europe des chefs d’Etats, des rois, des princes sont réunis à Vienne pendant 7 mois.
Au fait, pourquoi Vienne ? C’est la capitale d’une grande puissance qui a l’avantage d’être dans une position centrale. En outre Vienne possède un patrimoine culturel inégalé à cette époque en Europe. C’est la ville de la gaité, de la joie de vivre. Ses fêtes sont célèbres. En tout cas, pendant ce congrès, l’ambiance est particulièrement festive. Il faut bien se détendre après les journées de discussions ! Une chanson avait même été écrite où il était dit : «L’empereur de Russie aime, le roi du Danemark boit, le roi de Wurtemberg mange, le roi de Bavière parle, l’empereur d’Autriche paie ».
On danse, on s’étourdit dans les fameuses valses (qui vient de Waltzer = tourner en rond) de Vienne que vient de créer la dynastie des Strauss : Johan et Josef.
Bien entendu, pour pimenter ces soirées, de grandes dames sont là, à la vertu moins grande. Et on ne se posait pas la question du consentement. C’était le congrès de Vienne où on a refait la carte de l’Europe en s’amusant. Quelques jours avant qu’on apprenne la défaite de Napoléon à Waterloo et qu’on envoie « l’ogre », là-bas loin, à Sainte-Hélène, île perdue au milieu de l’Atlantique sud.
Mais on vous dit : le congrès s’amuse !!!
Dans le calendrier républicain, le 1er novembre est le jour de la scorsonère (ou encore salsifis).

ROBERT CAPA

Le 22 octobre 1913, est né à Budapest Endre Ernö Friedman. Ce patronyme ne dit sans doute rien à beaucoup de monde. Pourtant c’est un personnage bien connu qui a pris comme pseudonyme Robert Capa.
C’était un célèbre photographe, reporter de guerre et co-fondateur de la coopérative photographique Magnum le 27 mai 1947 à New-York.
Ses photos ont été reprises dans bien des livres d’histoire.
Robert capa est originaire d’une famille juive (non pratiquante). Il est atteint de polydactylie, c’est-à-dire qu’il a un petit doigt supplémentaire. On dit que sa mère y a vu le signe d’une carrière hors du commun.
Adolescent, il fréquente les milieux communistes révolutionnaires de Budapest. Ce qui lui vaut d’être arrêté pour activités antifascistes.
Il est libéré mais à la condition de quitter la Hongrie.
Si bien qu’en juillet 1931, il a à peine 18 ans, il se retrouve à Berlin où il poursuit des études de sciences politiques pendant 2 ans.
Grâce à l’agence Dephot (Deutscher Photodienst), il a son premier appareil photo. Il l’utilise pour photographier Léon Trotski lors d’un meeting sur la révolution russe en novembre 1932. Son cliché paraîtra dans un film muet : « Der Welt Spiegel » (Le miroir du monde).
A l’arrivée d’Hitler au pouvoir en janvier 1933, il sent qu’il faut partir et va à Vienne, puis en 1934 à Paris où il rencontre un photo journaliste, Henri Cartier-Bresson. C’est là qu’il fait connaissance avec Gerda Taro, photo journaliste allemande, d’origine espagnole.
Ils deviennent amants.
Le magazine « Vu » (hebdomadaire d’informations illustrées qui existe depuis 1928) lui permet d’obtenir sa première carte de presse.
Au printemps 1935, il fait ses premiers reportages mais ses photos se vendent mal. Il lui est conseillé de prendre un pseudonyme non étranger : ce sera Robert Capa.
A partir de ce moment-là, ça va mieux. « Vu » et « Regards » (périodiques proches du parti communiste) publient ses photos en particulier celle du 14 juillet 1936 sur Léon Blum devenu Président du Conseil.
En août 1936, avec Gerda Taro, il couvre la guerre civile espagnole. Là, Robert Capa devient carrément antifasciste.
La photo en plein mouvement d’un républicain touché à mort, intitulée « Mort d’un soldat républicain », est publiée le 12 juillet 1937 et lui vaut un grand succès… et une grande polémique. On lui reproche d’avoir fait un montage photographique. La polémique rebondira bien des décennies après quand des historiens ont confronté l’image avec des récits de témoins.
Néanmoins, lors de l’exposition universelle de 1937 à Paris, ses photos sont exposées parmi des œuvres d’artistes célèbres tels que Miro ou Picasso. Mais voilà que son égérie et amante, Gerda Taro meurt le 26 juillet 1937, écrasée par un char. Pour atténuer son chagrin, en 1938, il devient salarié dans « Le Soir ». C’est à ce moment qu’il est envoyé par « Life » (hebdomadaire américain) dans la guerre sino-japonaise (1937 – 1945).
Le 3 décembre 1938, l’hebdomadaire photos britannique « Pictures » le proclame « plus grand photographe de guerre du monde ». Pas moins !
Fort de cette gloire, il émigre aux Etats-Unis en 1939 où il se marie avec un mannequin d’origine argentine Tini Schoessel.
Mais ses idées proches du communisme font qu’il est expulsé l’année suivante.
En 1942, Robert Capa couvre le front en Afrique du Nord, puis le débarquement des Alliés en Sicile.
Et ce sera le 6 juin 1944 où il fait des photos pour « Life ». Là encore, il y aura polémique sur l’authenticité des photos (il affirme être resté 2 heures sur la plage d’Omaha alors que des témoins parlent d’une ½ heure. Allez donc savoir). Mais il suit les troupes débarquées à travers la Normandie, puis celles de la 2ème DB du maréchal Leclerc qui libérera Paris le 25 août.
Mais avant que Paris soit libéré, il est passé par Chartres (Eure-et-Loir). Là les règlements de compte avaient déjà commencé. Des femmes soupçonnées – à tort ou à raison – de collaboration -principalement « horizontale »- ont été tondues.
Robert Capa est là pour cette photo qui fera le tour des documents d’histoire et intitulée « La tondue de Chartres ».
Ce cliché n’a donné lieu à aucune polémique et illustre très bien la situation de la France à la libération.
En 1946, Robert Capa est à Hollywood où il fait des photos de mode. Il y a moins de risques et c’est même plutôt agréable puisqu’il rencontre la célèbre actrice suédoise Ingrid Bergman.
Rencontre tellement proche qu’ils deviennent amants ! C’est donc en 1947 qu’il cofonde l’agence « Magnum ». Les sujets sont plus sociaux, politiques et sur les célébrités (on dirait « people » aujourd’hui)
Mais l’action, ça le démange et en 1948, il est en Israël lors de la création de l’Etat hébreux et de la déclaration de guerre qui a suivi par les voisins arabes. Il y est même blessé.
En 1954, « Life » l’envoie sur un autre champ de bataille : l’Indochine, colonie française que se bat pour s’affranchir de la tutelle coloniale.
Le 25 avril, il est au Tonkin, pendant que l’armée française est aux prises dans la cuvette de Dien Bien Phu.
Robert
Capa s’écarte du chemin balisé pour on ne sait quelle raison. Il marche sur une mine anti personnelle. Ca ne pardonne pas : il est tué. Même les baroudeurs les plus expérimentés peuvent toujours commettre une erreur. Celle-ci lui est fatale.
Il sera enterré dans un cimetière près de New-York : cimetière d’Amawalk.

Dans le calendrier républicain, le 22 octobre est le jour de la pomme.

« Mort d’un soldat républicain » pendant la guerre d’Espagne.
Cette photo semble saisissante de vérité et révèle la force du drame.
Mais elle a été très contestée car pour certains, elle n’est pas authentique.

 

Robert Capa était sur la plage d’omaha Beach le 6 juin 1944, la plus meurtrière.
Là, les soldats américains sortent d’une péniche de débarquement pour se lancer à l’assaut de la falaise surmontée par un bunker allemand.
Il y a fait de nombreux clichés.

« La tondue de Chartres ». 

Photo prise le 16 août 1944. Le pays n’est pas encore libéré que les règlements de compte commencent, en dehors de tout cadre juridique.

MAC MAHON 

Le 17 octobre 1893, l’ancien Président de la République Patrice Mac Mahon est mort.
Il s’appelait exactement Edme Patrice Maurice de Mac Mahon et né le 13 juin 1808 au château de Sully, en Saône-et-Loire, près d’Autun. Sa famille, d’origine irlandaise, s’était établie en Bourgogne en 1689, au moment où l’Angleterre vivait sa révolution. Il était le 16ème enfant de la famille.
En 1820, Il est inscrit au petit séminaire d’Autun puis passe au collège Saint-Louis (actuellement lycée Saint-Louis) à Paris. Le 23 octobre 1825, il entre à l’école militaire de Saint-Cyr (installée depuis 1808 à Saint-Cyr-l’Ecole dans le département des Yvelines, anciennement Seine-et-Oise). Il en sort 3ème pour être officier du 4ème régiment de hussards (cavalerie) en 1830 et participe à la conquête d’Alger.
Célèbre pour sa bravoure et son audace, il est récompensé en devenant Chevalier de la Légion d’honneur et promu capitaine en 1833.

Revenu en Algérie en 1836, il participe au siège de Constantine. De nouveau en France en 1840, il est encore promu, cette fois chef d’escadron, c’est-à-dire commandant dans l’artillerie.
En mai 1841, il est chef du 4ème bataillon d’infanterie dans les chasseurs à pied.
Le 25 mai, il combat Abd-el-Kader, chef religieux et militaire d’Algérie.
Le 31 décembre 1842, il passe lieutenant-colonel du 2ème régiment de la légion étrangère et s’illustre dans les combats en octobre 1844, dans le sud-ouest de l’Algérie (région de Tlemcen).
Il poursuit sa progression en devenant colonel d’infanterie puis général de division (2 étoiles).
Là, il épouse Elisabeth de La Croix de Castries. De cette union naîtront 4 enfants.
En 1865, c’est la guerre de Crimée où il est général de division (3 étoiles) et se montre audacieux devant Sébastopol et Malakoff. Lorsqu’un officier anglais (allié dans cette guerre) lui demande ce qu’il compte faire, on attribue à Mac Mahon, cette réponse restée célèbre : « J’y suis, j’y reste ! ».
A son retour en France, il est élu sénateur, puis repart en Algérie combattre une tribu berbère, les Kabyles, dans les montagnes du nord-est du pays.
En 1859, Napoléon III s’est engagé dans la guerre en Italie pour soutenir le Piémont-Sardaigne contre l’Autriche.
Là, Mac Mahon contribue à la victoire de Magenta. Si bien que l’Empereur le nomme maréchal et gouverneur de l’Algérie.
Il a franchi tous les échelons de la hiérarchie militaire.
En 1870, Napoléon III s’engage dans une nouvelle guerre, contre la Prusse, à laquelle participe Mac Mahon. Mais il est défait en Alsace et blessé et le 2 septembre, comme Napoléon III, il est fait prisonnier. Il sera libéré le 25 mars suivant.
A son retour, il est nommé chef de l’armée régulière. On entend par là, les « Versaillais », ceux à qui le Président de la République Adolphe Thiers a confié la tâche de réprimer les « Communards » (opposants à l’occupation allemande et au pouvoir).
Mac Mahon a tellement bien rempli sa mission qu’au cours de cette semaine du 21 au 28 mai 1871 qu’on a appelée
« sanglante », on dénombre environ 20 000 morts. Rien que ça !
Alors le 14 mai 1873, il est élu Président de la République.
Ce qui lui permet de bien afficher ses idées : comme Président du Conseil, il nomme un monarchiste, Albert De Broglie. Mais la 3ème restauration d’un roi échoue à cause du comte de Chambord qui aurait dû régner sous le nom d’Henri V (dernier
descendant de Louis XV) et qui exigeait le retour du drapeau blanc à la place du drapeau tricolore.
C’en était trop, si bien qu’aux élections législatives de 1876, on se retrouve avec une majorité républicaine, donc un gouvernement républicain. Au passage, c’est à ce moment-là que le mandat du Président passe à 7 ans.
Mais les vents de la politique font tourner la girouette. De mars 1875 à décembre 1879, on passe d’un gouvernement royaliste à un gouvernement de centre gauche, puis de gauche. François Ier avait fait écrire sur les murs de Chambord : « Toute femme varie, bien fol qui s’y fie ». S’il était encore là, il aurait pu faire écrire sur les murs de l’Assemblée législative :
« Toute assemblée varie, bien fol qui s’y fie ! ».
En janvier 1879, même au Sénat, la majorité passe à gauche. Mac Mahon n’a donc plus aucun soutien. « Le Président n’a que ce choix : se soumettre ou se démettre ». Non, ce n’est pas Mélenchon qui a dit ça (en tout cas pas en 1879), c’est Léon Gambetta, celui qui, le 4 septembre a proclamé la République, la IIIème qui durera jusqu’en 1940.
Et le 30 janvier 1879, Mac Mahon démissionne.
Malade, il meurt le 12 octobre 1893 à Montcresson (Loiret, près de Montargis).
Il est inhumé le 22 à Saint-Louis des Invalides (XIVème arrondissement). On lui fera des obsèques nationales.
C’est l’histoire d’une carrière militaire qui a franchi tous les échelons, jusqu’à la fonction suprême.
Mais la République n’a pas laissé une grande place à ce monarchiste. Tout au plus, trouve-t-on une avenue Mac Mahon dans le XVIIème arrondissement de Paris et une rue Mac Mahon à Nancy.
Mais la postérité retiendra cette formule particulièrement originale, lors d’une visite à Toulouse en 1875. Devant la Garonne en crue, il se serait exclamé : « Que d’eau ! Que d’eau ! ». Il n’y avait pas de micros pour enregistrer, mais elle a été notée par un journaliste de « La Gazette du Midi ».
En fait, cette phrase a été reprise par plusieurs journaux et appliquée – par dérision – à diverses inondations, telle celle de la Seine à Paris en 1910. 

Dans le calendrier républicain, le 17 octobre est le jour de l’aubergine.

BOUGHERA EL OUAFI le premier athlète africain à remporter une médaille aux J.O.

Le 15 octobre 1898 est né Boughera El Ouafi, en Algérie, à Ouled Djellal, près de Biskra. On est à une époque où l’Algérie est organisée en départements français depuis la conquête en 1830. Boughera El Ouafi est donc français. Et pour la France, il remporte la médaille d’or du marathon aux Jeux olympiques de 1928 à Amsterdam et c’est le premier athlète africain à remporter une médaille aux J.O.
Son service militaire se fait pendant la guerre. Il est intégré dans le 25ème régiment de tirailleurs….sénégalais.
Algériens, Sénégalais, c’est pareil, c’est de la bonne chair à canons!
Il a la chance d’en sortir indemne et en 1923, il participe à l’occupation de la Ruhr, région très industrielle de l’Allemagne, pour lui faire payer les désastres de la guerre.
Ses chefs ont repéré ses aptitudes à la course à pied malgré son aspect chétif. Il participe à des compétitions militaires. Cette fois, c’est un club civil qui le remarque. El Ouafi est donc engagé par le CASG : Club Athlétique de la Société Générale (il s’agit bien de la célèbre banque), club qui a été créé en 1903, dont le siège est au stade Jean Bouin, près du Parc des princes qui deviendra plus tard Roland Garros. A noter que déjà, pour ce stade, on a exproprié des jardins ouvriers !
En juin 1924, El Ouafi remporte le marathon de Paris en 2h51 (record actuel est de 2h). Avec un autre coureur de fond, Jean-Baptiste Manhès, il est qualifié pour participer au marathon des J.O. de Paris en 1924. Il termine 7ème de l’épreuve.
Mais voilà, Boughera est pauvre et la course à pied, à cette époque, ça ne fait pas vivre son homme. Il lui faut travailler pour vivre. Il trouve un emploi comme décolleteur chez Renault dans l’usine de Boulogne-Billancourt. Ce n’est pas l’idéal pour une préparation aux grandes compétitions. Néanmoins, le 8 juillet 1928, il remporte le marathon qui se déroule entre Maisons-Alfort et Melun. Il est donc retenu pour le marathon des J.O. d’Amsterdam qui auront lieu du 28 juillet au 12 août 1928. L’épreuve se déroule le 5 août. El Ouafi est loin d’être favori face aux stars de l’époque : l’Américain Joie Ray et le Japonais Komantsu. Il en est conscient et fait un départ prudent. Si bien qu’au km 21, il n’est que 7ème. Puis progressivement, il remonte et au km 32, il est 3ème. Et puis encore, il dépasse les favoris, partis plus vite, pour finalement remporter le titre olympique. Il est le seul Français et le premier Africain à recevoir une médaille d’or.
C’est aussi le constat pour la France que l’Empire est un réservoir d’athlètes!
Malheureusement pour lui, son exploit est peu médiatisé. Les Français des années 20 sont plus passionnés par le cyclisme et le foot. En plus, le modeste El Ouafi est peu préparé à la gloire et après son succès, il est vite abandonné à lui-même. Alors, lorsqu’il est invité aux Etats-Unis
pour participer à des meetings payés, il ne refuse pas. Il participe même à des courses contre des animaux (l’image du bon sauvage…). Seulement, rentré en France, il est exclu du Comité National Olympique et de la FFA (Fédération Française d’Athlétisme). Motif ? L’athlétisme doit rester amateur. Donc pas question de toucher de l’argent.
Avec ce qu’il a gagné aux Etats-Unis, il achète un café à Paris, avec un associé, près de la gare d’Austerlitz. Mais cet associé n’était pas fiable et El Ouafi doit trouver un boulot. Ce sera chez Alstom. Voilà qu’il est renversé par un bus et ne peut plus travailler. Il vit dans la misère et l’oubli, lui le champion olympique. Il lui faut attendre 1956, quand Alain Mimoun, d’origine algérienne lui aussi, vient de remporter le marathon olympique de Melbourne et est reçu par le Président de la République, René Coty. Grâce à son entremise, il lui trouve un emploi comme gardien de stade. Le quotidien sportif « L’Equipe » se réveille et lance une souscription pour l’aider à vivre.
Le 18 octobre 1961, Boughera El Ouafi est assassiné. Pourquoi ? Plusieurs versions.
Rappelons le contexte, c’est la guerre d’Algérie qui dure depuis 1954. La situation se radicalise et la violence augmente. La mort d’El Ouafi serait due à un mitraillage du FLN (Front de Libération Nationale) et il aurait été une victime collatérale.
Ou alors, est-ce à la suite d’une querelle familiale ?
Ou encore, a-t-il voulu s’interposer dans une rixe face à des tueurs qui en voulaient à sa sœur ? On ne le saura jamais. Son cas n’est pas apparu important à la justice qui avait d’autres chats à fouetter à une époque où De Gaulle était physiquement menacé.
Boughera El Ouafi a été enterré au cimetière musulman de Bobigny à côté de Paris.
Qu’a-t-il aissé à la postérité ?
Depuis 1998, la rue qui mène au stade de France à Saint-Denis, porte son nom. On a également donné son nom à un gymnase de La Courneuve et depuis 2022, à une piste sportive à Echirolles (Isère), ainsi qu’à une allée à Boulogne-Billancourt. Par contre, rien en Algérie sauf dans son village natal à Ouled Djellal.
Curieusement, la Corée du Nord a émis un timbre-poste à son effigie en 1978.
Quand même, l’historien Pascal Blanchard et le cinéaste algérien Rachid Bouchared ont fait un film « Champions de France » où il est question de lui.
Le commentaire est de Lilian Thuram qui a fait partie de l’équipe de France, championne du monde de football en 1998.
En 2018, Il est l’objet d’un documentaire sur Arte.
Enfin en 2021, Nicolas Debon lui a consacré une bande dessinée.
Il méritait bien au moins ça, Boughera El Ouafi.

Dans le calendrier républicain, le 15 octobre est le jour de l’amaryllis, plante bulbeuse à fleurs.

LE CORRIDOR DE SUWALKI

 Le 7 octobre 1920 est signé le traité de Suwalki.
Ce traité, sous l’égide de la SDN (ONU d’après la 1ère guerre mondiale) concerne la Pologne et la Lituanie.
Puis ces deux Etats devenus indépendants, se disputent une frontière de 85 km au point d’entamer une guerre à laquelle la SDN met fin.
A la suite d’un différent, le 28 août 1920, la Pologne envahit la Lituanie qui fait appel à la médiation de la SDN.
Le conflit se termine le 10 septembre 1920 et détermine la frontière dans une région de forêts et de marécages.
Puis, on n’en parle plus … jusqu’au 16 juin 1940 quand l’URSS occupe les Pays baltes et la Pologne, tandis que l’Allemagne nazie envahit l’ouest de la Pologne, conformément au pacte germano-soviétique d’août 1939.
Donc les communistes sont amis-amis avec les nazis ! C’est un de ces contre-pieds dont l’histoire a le secret.
Mais le 22 juin 1941, Hitler rompt ce fameux Pacte et envahit l’URSS dont fait partie la Lituanie et la libère du joug soviétique.
Trois ans plus tard, après que bien du sang et des larmes aient coulé, l’URSS « libère » les pays baltes du joug nazi et en fait 3 RSS (République Socialiste Soviétique) qui
viennent s’ajouter aux 12 autres.
La Pologne elle se voit imposer un régime communiste sur le principe de Moscou et est intégrée en 1949 dans le pacte de Varsovie (en réponse à la création de l’Otan à l’ouest de ce que Churchill a appelé le « Rideau de Fer »).
En août 1991, c’est la fin de l’URSS et les différentes Républiques qui la composaient, se déclarent indépendantes avec quelquefois des accrochages.
La nouvelle Russie accepte mal cette volonté de ses anciennes républiques, volonté de voler de leurs propres ailes.
On a dit aux pays baltes : « On vous a libérés en 1940 ». « Vous nous avez occupés en 1944 » ont-ils répondu. Et chacun disait vrai. Donc dialogue difficile…
De son côté, la Pologne s’émancipe et se tourne vers l’ouest en adhérant à l’OTAN le 12 mars 1999, puis à l’union Européenne le 1er mai 2004.
Quant à la Lituanie, elle adhère à l’OTAN le 19 mars 2004 et dans la foulée à l’UE, le 1er mai 2004 également.
Oui mais voilà, cette situation isole l’oblast (équivalent russe de nos départements) de Kaliningrad qui du temps de la Prusse s’appelait Königsberg, coincé entre Pologne et Lituanie.
Il est simplement ouvert sur la Baltique où les Russes viennent en villégiature l’été (les Russes supportent une eau inférieure à 20° pour se baigner). Cet oblast de Kaliningrad a une
superficie de 15 000 km2 (à peu près 1 fois et demie le département de la Gironde), autant dire peu de choses pour l’immense Russie et ses 17 millions de km2. Là vivent 1 million d’habitants.
La Lituanie voisine en a 2,9 millions. Etant donné sa situation géostratégique, Kaliningrad surarmé constitue un coin dans l’OTAN et l’UE ; isolé, mais pas totalement, puisque ce fameux
corridor de Suwalki le relie à la Biélorussie, amie et alliée de la Russie.
Une restriction quand
même : les véhicules militaires ne peuvent transiter par ce corridor. En principe….
Seulement voilà, le 24 février 2022, cette situation prend un tout autre relief : la Russie vient d’envahir l’Ukraine. Du côté des pays baltes, dont la Lituanie, on s’inquiète car les similitudes sont grandes.
Comme l’Ukraine, ils ont fait partie de l’URSS. Comme l’Ukraine, il y a de fortes minorités russes qui se disent menacées, au moins dans leur culture. Comme l’Ukraine, ils ont été envahis par les nazis en 1941, croyant être libérés du stalinisme. Comme l’Ukraine, ils ont été libérés du nazisme par l’Armée rouge en 1944 et ont été intégrés dans l’URSS.
Alors, la guerre en Ukraine inquiète la Lituanie, séparée du reste des Occidentaux par ce fameux corridor de Suwalki. C’est elle qui est coincée entre Kaliningrad et la Biélorussie.
D’ailleurs, du haut des dunes de l’arrière-pays lituanien, on aperçoit Kaliningrad. Avec un frisson dans le dos. Comme pour exorciser un passé de soumission, dans les forêts qui longent
ce corridor, les Lituaniens y ont rejeté tout ce qui rappelait le communisme : statues de Lénine, emblèmes, etc …
Aujourd’hui, la Lituanie et la Pologne qui ont oublié leur différent de 1920 sont amies et alliées, résolument tournées vers l’Occident.
Elles accueillent même des troupes de l’OTAN.
Mais elles sont séparées par cet étroit corridor. Que peut-il se passer face à un Poutine imprévisible et qui parle toujours de son arsenal nucléaire à des Occidentaux frileux?
L’histoire ne se conjugue pas au futur, encore moins au conditionnel.
Dans le calendrier révolutionnaire, le 7 octobre est le jour de la belle de nuit, fleur qui vient d’Amérique latine.

L'INCIDENT DE FACHODA

Le 19 septembre 1898, c’est l’incident de Fachoda. 

Cette localité se trouve à 650 km au sud de Khartoum (actuel Soudan)
C’est un poste militaire égyptien pour lutter contre des trafiquants arabes.
Fachoda est une localité sur la rive ouest du Nil Blanc (branche du Nil).
Elle est constituée de quelques constructions en terre sèche et elle est la capitale du peuple Silluk (peuple traditionnel). Cette région est aussi très convoitée par les puissances colonisatrices européennes : France, Royaume-Uni, Italie, Belgique. Elle est donc d’un grand intérêt stratégique.
La France possède le Sénégal sur la côte ouest de l’Afrique et à l’est, Djibouti à la sortie de la Mer Rouge. De leur côté, les Britanniques contrôlent l’Egypte au nord et possèdent l’Afrique du sud qui est la pointe méridionale du continent. On est à l’ère de la pleine expansion du chemin de fer. Les Français envisagent de relier Dakar à Djibouti par voie ferrée. Tandis que les Britanniques veulent en faire autant dans le sens nord-sud pour relier Le Caire au Cap.
Forcément, les deux lignes devraient se croiser. La Mer rouge est aussi d’un grand intérêt stratégique depuis l’ouverture du canal de Suez (1869). Le khédive (vice-roi d’Egypte à cette époque) avait accordé 45% des parts du canal aux Français. Parts qui ont été rachetées par….les Britanniques. Pour eux, c’est la route des Indes, « perle de leur empire ».
Pour les Français, c’est la route vers l’Indochine récemment conquise et qui permet l’exploitation du caoutchouc (on est au début du développement de
l’automobile). Les deux plus grands empires coloniaux ont tout pour se retrouver face à face.
En juin 1882, les Anglais interviennent militairement en Egypte. La France voudrait bien réagir, mais elle n’en a pas les moyens (surtout financiers). Elle qui y était très présente depuis 1798, quand Bonaparte était venu la conquérir, un siècle plus tard, elle en est exclue. Dans un premier temps, les Britanniques avaient été vaincus par les Mahdistes (religieux du Soudan) qui ont finalement été matés par le général Horacio Kitchener (le jeune Winston Churchill y a participé). Voyant qu’ils sont en position de force, le ministre français des colonies, Théophile Delcassé veut en 1894, amener les Britanniques à faire quelques concessions sur l’Egypte.
Mais les Britanniques n’ont pas pris cette demande à la légère. Cela a été considéré comme un « acte inamical », voire un acte de guerre. Il faut dire que
cette susceptibilité s’explique par le fait que de nombreux accrochages se produisent entre colonisateurs. Alors, Delcassé devenu ministre des Affaires
étrangères, demande au capitaine Jean-Baptiste Marchand de préparer une expédition vers Fachoda. Il en reçoit l’accord officiel le 24 février 1896 et part de Marseille le 29 juin pour arriver à Loango au Congo en septembre. De là avec 5 000 fantassins indigènes (parfois recrutés de force) et des tirailleurs sénégalais comme porteurs, Marchand se dirige vers Fachoda où il hisse le drapeau tricolore et appelle la localité Fort Saint-Louis.
En août 1798, Salisbury, Premier Ministre britannique demande à Kitchener de repousser toute implantation étrangère. Le 25 août, Marchand a fort à faire avec des populations indigènes mécontentes de cette intrusion.
C’est le 19 septembre à 10 heures que Kitchener rencontre Marchand à Fachoda. Tout en reconnaissant que ce dernier, en bon militaire, obéit aux ordres de son gouvernement, l’échange est houleux, car Kitchener exige l’évacuation des lieux le 30 septembre. Les deux chancelleries, française et britannique, échangent pendant quelques semaines. La France prévoit alors d’évacuer. L’information est envoyée à Marchand. Mais pendant les négociations, la Royal Navy envoie sa flotte devant Bizerte (port de Tunisie qui est un protectorat français) et devant Brest, grand port militaire français.
Seulement voilà, la France a perdu l’Alsace-Lorraine en 1871 et rêve de la récupérer. Pour cela, elle a besoin d’alliés et il n’est donc pas question de faire de la Grande-Bretagne un ennemi. Le 3 novembre, l’évacuation est confirmée. Près d’un mois plus tard, le 1er décembre, Marchand quitte Fachoda et part pour Djibouti. Pour la France, c’est une défaite diplomatique qui attise le sentiment anti- anglais dans le pays. On a le patriotisme sensible dans ce contexte.
Le 21 mars 1899, un accord définit plus clairement les limites des influences territoriales. Elle s’établit sur la ligne de partage des eaux du Nil et du lac Tchad. Comme on sent qu’on aura besoin de la puissance britannique (la 3 ème du monde au début du XXème siècle, dépassée par les Etats-Unis et.. l’Allemagne), le 8 avril 1904 est signée « l’entente cordiale ». C’est sûr, en cas de conflit, le Royaume-Uni sera aux côtés de la France. Et de part et d’autre, chacun a ses problèmes internes. Le Royaume-Uni est en guerre en Afrique du Sud contre les Boers. En France, on est en pleine affaire Dreyfus et aussi en plein débat sur la laïcité. Pour éviter l’isolement et prendre éventuellement l’Allemagne à revers, la France avait signé une entente avec la Russie le 27 décembre 1892. De son côté le Royaume-Uni en a signé une avec cette même Russie en juillet 1905. Finalement, on s’est beaucoup chamaillé avec les Britanniques, mais finalement, dans les moments difficiles, ils seront à nos côtés.

Dans le calendrier républicain, le 19 septembre est le jour du …. Travail

ALEXANDRA SKOTCHILENKO

Le 13 septembre 1990 est née Alexandra Skotchilenko à Léningrad , devenue Saint-Pétersbourg en 1991.
Alexandra qu’on appelle aussi Sacha est une artiste musicienne, passée par le collège Smolny (ancien couvent réservé aux filles de la haute société au temps des tsars, puis siège de Lénine lors de la révolution de 1917).
Elle est aussi passée par l’université d’Etat de Saint-Pétersbourg dans le département des arts et des sciences.
Elle s’engage pour lutter contre les maladies mentales.
En 2014, elle a écrit « Livre sur la dépression ».
Musicienne, écrivaine, c’est aussi une opposante convaincue à Vladimir Poutine.
Ce qui lui a valu d’être arrêtée le 31 mars 2022 et condamnée à 7 ans de prison.
Qu’avait-elle fait pour cette sanction sévère ?
Dans une grande surface, au dos des étiquettes de prix, elle avait écrit des informations sur le bombardement du théâtre de Marioupol en Ukraine le 16 mars 2022,sur l’armée russe qui a bombardé une école d’art où 400 personnes se sont trouvées piégées.
Dénoncée par une cliente, elle a été arrêtée le 31 mars. Elle est accusée de « haine politique envers la Russie ».
Le 16 novembre suivant, elle est condamnée à 7 ans de prison.
A titre de comparaison, imaginons chez nous, une personne qui écrit des critiques sur Macron sur les étiquettes d’un supermarché et qui est dénoncée à la police. Il y a fort à parier que celle-ci ne se déplacera pas pour ce genre de situation. Mais la Russie n’est pas la France.
Pour en revenir à Alexandra Skotchilenko de santé fragile, pendant sa détention elle a été malmenée par le personnel pénitentiaire (qui ne lui a pas donné son traitement médical), mais aussi par des codétenues. Au point que sa santé se dégradait assez vite.
Heureusement pour elle, le 1er août 2024, elle a été libérée dans le cadre des échanges de prisonniers entre la Russie et l’Occident. Ce qu’on ne sait pas pour le moment : est-elle partie dans un pays occidental ou pourra-t-elle un jour revenir dans son pays natal ?

Dans le calendrier républicain, le 13 septembre est le jour de la verge d’or ou encore gerbe
d’or. C’est une variété d’aster aux fleurs toujours jaunes.

LES 1ers JEUX OLYMPIQUES FÉMININS

Le 20 août 1922 ont lieu les premiers Jeux olympiques féminins.
Ils se sont déroulés au stade Pershing, nouvellement construit à l’est de Vincennes d’une capacité de 30 000 spectateurs
Il porte le nom du général américain qui, avec ses troupes, a débarqué à Saint-Nazaire en 1917 pour aider la France dans la guerre contre l’Empire allemand (c’est le fameux « La Fayette, nous voilà ! »).

Ces J.O. ont été organisés par le quotidien « Le Journal », à l’initiative de Alice Milliat (1884 – 1957). Militante féministe, et accessoirement championne d’aviron. Elle fut la fondatrice des sociétés féminines sportives de France.
Face au refus de Pierre de Coubertin d’accepter la participation des femmes aux Jeux Olympiques de 1896 d’abord, puis son interdiction pour qu’elles participent à certaines épreuves jugées non féminines, notamment l’athlétisme, les femmes se sont organisées et ont créé « leurs » Jeux Olympiques.
Ces Jeux de 1922 ont rassemblé 5 pays : France, Tchécoslovaquie, Suisse, Royaume-Uni, Etats-Unis. Les épreuves étaient les suivantes : 60 mètres, 100 yards haies, relais 4×110 yards, saut en longueur avec élan, saut en longueur sans élan, lancer du poids, lancer du javelot. Les lancers se font à deux mains.
Déjà, Américaines et Britanniques se taillent la part du lion pour les médailles.
L’attitude de De Coubertin serait aujourd’hui durement condamnée. Mais dans les mentalités du début du XXème siècle, elle n’étonnait pas grand monde.
Ainsi, la presse dénonçait ces femmes qu’on trouvait affreuses à se démener de cette façon plutôt que de se consacrer à leurs familles.
« Le Figaro » de l’époque notait : « Les femmes doivent faire du sport mais pas trop ». Et si elles  étaient présentes dans les compétitions sportives, on considérait que leur rôle devait plutôt être de couronner les vainqueurs.
Le CIO (Comité International Olympique) n’a pas accepté l’appellation « Jeux Olympiques » pour les femmes qui se sont donc appelés : « Jeux Mondiaux Féminins ».
En 1922, ceux-ci ont rassemblé 77 athlètes (« athlétesses » a écrit un journal).
Parallèlement, les femmes ont organisé des Jeux athlétiques féminins.
Les premiers ont eu lieu en 1921 à Monaco et ont rassemblé 100 participantes venant de 5 pays.
En 1922, toujours à Monaco, il y eut 300 participantes venant de 7 pays.
Pour les J.O. de 1920 à Anvers, il y avait 27 femmes sur un total de 997 participants. Et encore, elles ne pouvaient participer qu’à des épreuves dites féminines : tennis, voile, croquet, équitation, patinage.
Les J.O. devaient, selon De Coubertin rester un hymne à la virilité, alliance du muscle et du cerveau. Ce que selon lui, n’ont pas les femmes….Les courses à partir de 800 mètres et au-delà leur seront interdites jusqu’aux J.O. de Rome en….1960 !
On constate que c’est après la guerre que les femmes ont revendiqué l’égalité sportive.
Considérées comme le sexe faible, l’argument ne tient plus après ce qu’elles ont vécu à la terre, dans les usines pour remplacer les hommes partis au front, et souvent tués ou mutilés. Un détail illustrait ce changement. Lorsqu’un « Poilu » revenait en permission, sa femme ou sa mère allait le chercher à la gare et c’était elle qui conduisait la voiture à chevaux. L’homme restait sagement à côté de sa conductrice.
Aujourd’hui, heureusement, on n’en est plus là, même si le machisme n’a pas complètement disparu. Les femmes peuvent pratiquer tous les sports. 
On peut même constater que leurs performances tendent à se rapprocher de celles des hommes. Il en est même dont les résultats sont si impressionnants qu’elles sont soupçonnées de masculinité.
Ce fut le cas pour une boxeuse algérienne à Paris en 2024 ! Certaines deviennent mères de famille et continuent d’avoir des activités sportives de haut niveau.
La contrepartie est que, comme chez les hommes, il arrive que certaines aient recours au dopage.
Autre contrepartie, dans certaines disciplines, elles sont exposées au harcèlement sexuel de la part de leur coach, en plus du harcèlement moral. C’est principalement le cas en gymnastique, patinage, voire tennis.
Comme pour les hommes, le sport pour les femmes peut contribuer à un certain épanouissement. Mais il faut reconnaître que parfois, elles subissent plus de contraintes.
Aujourd’hui encore, il y a des réactions d’un autre temps. Par exemple, le Tour de France féminin de 2022 a été marqué par de nombreuses chutes. Sur les réseaux sociaux, un triste individu n’a pu s’empêcher d’écrire que si ces femmes étaient victimes de chutes, c’est parce qu’elles étaient préoccupées par leur sac à main ! Peut-on être plus con ? Il vaudrait mieux admettre aussi que les femmes ont évolué plus vite que les hommes.

Dans le calendrier républicain, le 20 août est le jour de la vesse de loup, ou pet de loup, champignon très répandu dans les prés et qui évacue une poussière brune lorsqu’on l’écrase

RINO DELLA NEGRA

Le 18 août 1923 est né Rino Della Negra à Vimy dans le Pas-de-Calais.
Sa famille est d’origine italienne.
Arrivée dans le nord de la France, comme beaucoup d’Italiens, elle s’installe en région parisienne à Argenteuil en 1926. Ses parents ont été naturalisés en 1938.
A partir de 1937, Rino Della Negra est employé comme ajusteur dans l’entreprise Chausson qui fabrique des véhicules utilitaires à Asnières dans le département de la Seine.
Actuellement, Asnières est dans le département des Hauts-de-Seine (banlieue ouest de Paris).
Le jeune Rino est un bon footballeur et il est même un espoir dans son club d’Argenteuil. Avec l’équipe de son entreprise, il
remporte la coupe de France des entreprises en 1938 et 1941. En 1942, lors des compétitions interrégionales, son équipe, celle de Paris, gagne et il est un artisan de la victoire en marquant deux buts. Il est alors recruté par une équipe de professionnels : le Red Star. C’est l’équipe fanion de Saint-Ouen, ville de la banlieue parisienne. Ce club, déjà ancien, avait été fondé en 1897.
Mais voilà qu’en 1942, il est réquisitionné pour le STO (Service du Travail Obligatoire) qui envoie d’office des travailleurs français en Allemagne pour remplacer les hommes partis au front en Russie. Seulement, Rino ne part pas et se trouve donc dans l’illégalité.
En 1943, il rejoint les FTP MOI de la région parisienne, du groupe Missak Manouchian. Tout en jouant toujours au football, il participe à des coups de main contre l’occupant.
Ainsi, le 7 juin 1943, il est de ceux qui exécutent le général allemand Von Apt. Trois jours plus tard, il participe à l’attaque du siège français du parti fasciste italien.
Puis le 13 juin, c’est lui qui mène l’attaque d’une caserne. Une grenade y a été lancée, faisant 9 morts.
Et ce n’est pas fini. Le 13 novembre 1944, avec Robert Witchiz un autre membre des FTP MOI, il attaque un convoyeur de fonds allemand. Mais cette fois, ils sont blessés tous les deux…et arrêtés.
Dans son club, personne ne savait qu’il avait des activités clandestines.
Seulement, à partir de ce mois de novembre 1944, les membres du groupe Manouchian sont un à un arrêtés par le BS 52 de Rueil-Malmaison dans la banlieue ouest de Paris (caserne construite sous Louis XIV et actuellement caserne Guynemer).
Au total, 17 seront arrêtés. Comme les autres, Rino est condamné à mort et fusillé au fort du Mont Valérien le 21 février 1944 avec les membres de l’Affiche rouge. Il avait 21 ans. Il sera inhumé au cimetière d’Argenteuil.
En sa mémoire est créé un tournoi de football FSGT (Fédération Sportive et Gymnique du Travail) en septembre 1944.
En novembre de la même année, le quotidien communiste « Le Soir » a fait un article sur Rino Della Negra.
C’était l’itinéraire d’un fils d’immigré qui a sacrifié sa vie pour son pays d’adoption.
Dans le calendrier révolutionnaire, le 18 août, est la journée de la prune.

CRISTINA BOICO

Le 8 août 1916 est née Cristina Boico à Botosani en Moldavie roumaine.
Elle est issue d’une famille bourgeoise juive comme il y en a beaucoup dans cette partie de l’Europe. Elle s’est tôt exilée en France où elle a fait des études à la Sorbonne.
Expulsée à cause de ses activités politiques, elle retourne en Roumanie et s’inscrit à la faculté de médecine de Bucarest en 1937.
Lycéenne, elle avait déjà rejoint le Front Démocratique des Etudiants, antenne du parti communiste roumain.
Là, elle écrivait des articles contre le fascisme qui s’est étendu en Allemagne, en Italie, en Espagne.
Selon Cristina Boico, le communisme est un idéal qui inclut toutes les ethnies, les religions, les nationalités. Pour elle encore, c’est l’espoir d’un monde meilleur qui, entre autres, permettra la libération du peuple juif.
Avec la guerre, elle revient en France pour entrer dans la résistance dès 1941. Cristina rejoint l’OSMOI (Organisation Spéciale-Main d’Oeuvre Immigrée) sous le pseudonyme de Monique : elle devient responsable du renseignement pour informer les combattants. Ce qui permet aux FTP (Francs-Tireurs et Partisans) MOI d’être à l’origine de 14 déraillements de trains, de 34 incendies et à Paris de 43 assassinats.
L’organisation étant bien cloisonnée, elle échappe aux arrestations de 1943 qui ont permis aux nazis de condamner les membres désignés sur l’Affiche rouge, le 21 février 1944. Le leader de ce groupe était Missak Manouchian. Cette affiche, tirée à 15 000 exemplaires, avait été diffusée dans toutes les villes de France. C’est là qu’il est question de l’affaire Joseph
Davidovitch.
Dans ses informations, Cristina Boiko a découvert que Davidovitch, résistant polonais avait fourni des documents aux Services de renseignements allemands et qui ont permis l’arrestation de Manouchian et de son groupe.
Davidovitch a été piégé et exécuté le 8 décembre 1943.
A la fin de la guerre, Cristina Boiko retourne en Roumanie où elle obtient le poste de directrice au ministère de l’Information. Puis de 1945 à 1947, elle fait partie des membres de l’ambassade de Roumanie en Yougoslavie, pays qui, sous la conduite de Tito, refuse l’alignement sur Moscou.
Rappelée en Roumanie, elle est nommée ministre des Affaires étrangères (1948 – 1952)
Elle est ensuite mise à l’écart et n’est plus « que » enseignante à la faculté de biologie et de sciences politiques (association bizarre).
Elle entre vite en conflit avec celui qui deviendra le « Conducatore », Nicolae Ceaucescu.
En total désaccord avec lui, elle revient en France où sont installés ses enfants et petits-enfants, en 1987.
Elle meurt à Paris le 16 avril 2002.
Itinéraire d’une femme méconnue qui a joué un rôle important dans la résistance, puis dans la politique de son pays.

Dans le calendrier révolutionnaire, le 8 août est le jour de la carline, plante herbacée très épineuse, proche du chardon.

MARIE CURIE

Le 4 juillet 1934, Marie Curie décède à Passy en Haute-Savoie où elle se faisait soigner. Elle était née le 7 décembre 1867 à Varsovie, dans cette partie de la Pologne qui était russe.
Son patronyme était Maria Sklodowska, issue d’une famille aisée dont le père était professeur de mathématique et physique. Sa mère était institutrice.
Très tôt, elle fait des études brillantes et participe à « l’université volante », c’est-à-dire clandestine, car les études supérieures étaient interdites aux femmes.
Alors, elle part en France et se fait un peu d’argent comme gouvernante (nounou), puis revient à Varsovie en 1886.
De retour à Paris en 1891 elle s’inscrit à la faculté des sciences le 3 novembre 1891.
Au mois de mars suivant, elle trouve un logement dans le Quartier Latin, proche de la faculté. En juillet 1894, elle termine 1ère de sa promotion de licence de physique
et 2ème pour la licence de mathématique, l’année suivante.

C’est à ce moment-là qu’elle rencontre Pierre Curie avec qui elle travaille en laboratoire. 
La collaboration est telle qu’ils ont des sentiments l’un pour l’autre. 
Si bien qu’après un nouveau séjour à Varsovie, elle se marie le 20 juillet 1894 à Sceaux, dans la région parisienne.
En 1896, elle obtient l’agrégation de mathématique. Parallèlement, elle fait des travaux de recherche sur les aciers et prépare un doctorat. Entre temps, le 12 septembre 1897, elle met au monde une fille que le couple prénomme Irène qui sera secrétaire d’Etat sous le Front populaire de 1936.
Le sujet de son doctorat concerne une étude des rayonnements d’uranium.
En même temps, elle découvre la radioactivité du thorium. Puis le 28 décembre 1898, avec le chimiste Gustave Bémont, c’est la découverte du radium.
Grâce à tout ce  travail, le 26 octobre 1900, elle devient chargée de conférences de physique à l’Ecole Normale Supérieure de jeunes filles (on ne mélange pas les filles 
et les garçons!) à Sèvres, toujours dans la région parisienne.
Le 25 juin 1903, Marie Curie présente une thèse sur les substances radioactives.  Elle obtient la mention « très honorable ».
Six mois plus tard, le 20 décembre 1903, elle obtient le prix Nobel de Physique avec son époux Pierre et un autre physicien, Henri Becquerel….mais son nom n’est pas cité. Il a fallu l’intervention de Pierre Curie pour que son nom soit associé aux deux autres lauréats.
Elle devient donc la première femme à obtenir un prix Nobel. Ce prix existe depuis 1901.
La vie continue et le 6 décembre 1904 naît sa seconde fille, Eve (qui sera pianiste et fera carrière aux Etats-Unis).
Mais un drame vient toucher la famille car le 19 décembre 1906, Pierre meurt dans un accident de voiture à cheval.
Marie en a été très affectée. Néanmoins, elle devient la première femme directrice de laboratoire  et elle enseigne à la Sorbonne. Ce qui amène le commentaire suivant du quotidien « Le journal » : « Le temps est proche où les femmes deviendront des êtres humains ».
Cela est écrit 10 ans après que pour les premiers Jeux Olympiques de 1896, Pierre de Coubertin avait interdit la participation des femmes.
Le 4 novembre 1911 éclate l’affaire Langevin. Paul Langevin est un physicien qui a été élève de Pierre Curie.
Depuis 1910, avec Marie Curie commence une liaison amoureuse passionnée.
Elle est veuve, lui est marié, père de 4 enfants, plus jeune qu’elle de 5 ans. Leur liaison est donc découverte en 1911. On a fouillé les affaires personnelles de l’un et de
l’autre, pour les livrer à la presse. Pas joli, mais c’était ainsi et c’est encore ainsi.
La presse se déchaîne, surtout celle d’extrême droite (en particulier « L’œuvre ») antisémite et nationaliste (Langevin est pacifiste et anti fasciste).
Ce journal titre : « Une histoire d’amour : Mme Curie et le professeur Langevin, les feux du radium viennent d’allumer un incendie ».
Les relents nationalistes s’en donnent à cœur joie. Ainsi, peut-on lire dans la presse :  « Une Polonaise venant briser un bon ménage français ».
L’affaire tombe très mal car Marie Curie vient d’être à nouveau désignée Prix Nobel, mais de chimie cette fois. Néanmoins, même dévastée, elle se rend à Stockholm recevoir son prix.
Déjà atteinte de problèmes rénaux, le voyage l’a épuisée.
La même année, est créé l’Institut Curie. Puis arrive la guerre en été 1914, dans laquelle elle s’engage.
Elle crée une antenne chirurgicale mobile pour  être au plus près des blessés et des malades.
Les véhicules sont équipés d’appareils Röntgen pour prendre des radiographies dont les images sont transmises par rayons X. 
Le 28 juillet 1916, elle obtient son permis de conduire. Elle fait des radiographies, assistée de sa fille Irène. 
A partir des années 20, elle voyage beaucoup pour le compte de la Commission internationale de coopération intellectuelle qui est un organe de la jeune SDN (Société Des Nations).
Elle a toujours tenu à conserver son identité polonaise.
Ainsi elle a appelé polonium, un élément chimique (bien connu des empoisonneurs).
Au cours de sa carrière scientifique, elle a été très exposée à la radioactivité.
On ne prenait pas encore les précautions nécessaires, faute de savoir les conséquences pour la santé.
Aujourd’hui, tous les radiologues prennent des mesures de protection.
Marie Curie est de plus en plus malade, elle est atteinte d’une leucémie qu’elle essaie de soigner au sanatorium de Passy dans la Haute-Savoie.
Rien n’y fait, elle s’éteint le 4 juillet 1934.

Mais Marie Curie n’est pas oubliée. On a donné son nom à de nombreux hôpitaux et établissements
d’enseignement.
Même en Pologne, à Lublin, l’université s’appelle « Marie Curie – Sklodowska ».
Ici et là, des rues portent son nom, à Paris, c’est une station de métro. Avant l’euro, un billet de 500 francs était fait à son effigie, puis ce sera une pièce de 50 centimes d’euro, en 2024, un timbre-poste.
Son histoire est relatée dans des livres, au théâtre, au cinéma, à la télévision.
L’année 2011 a été décrétée année Marie Curie, en l’honneur du 100ème anniversaire de son prix Nobel de chimie.
Le 17 juin 1994 est ouvert le musée Curie (Pierre et Marie) à Paris, à l’université des sciences et lettres. 

Enfin, honneur suprême, 20 avril 1995, elle fait son entrée au Panthéon, mais dans un cercueil  entouré de plomb pour éviter les contaminations radioactives au personnel et aux visiteurs.

Dans le calendrier républicain, le 4 juillet est le jour du tabac. Le tabac, qui comme le radium, tue.

ALAIN MIMOUN

Le 27 juin 2013, Alain Mimoun est mort. C’était un athlète français qui a fait carrière de 1947 à 1966. Il était né en Algérie, dans la région d’Oran le 1er janvier 1921.
Sa spécialité était la course de fond: 5 000 mètres, 10 000 mètres et marathon (42,195 km).
Il venait d’une famille modeste : père ouvrier agricole, mère femme de ménage. Néanmoins, il passe brillamment le certificat d’études primaires.
Malheureusement, il ne peut pour poursuivre ses études, les bourses étant réservées aux enfants de colons.
Face à cette injustice, il décide de partir en métropole pour y continuer des études. Mais voilà, 1939 c’est la guerre et il a 18 ans. Le 4 janvier, il s’engage dans le 6ème régiment de tirailleurs algériens qui est envoyé à la frontière belge. À partir de 1940, après la démobilisation, il commence à faire du sport. Il choisit la course à pied.
Il devient même champion du département de l’Ain sur 5 000 mètres, son régiment étant stationné à Bourg-en-Bresse. Il fait partie de l’équipe de cross-country de son nouveau régiment, le 19ème régiment du génie en Algérie.
De novembre 1942 à mai 1943, il participe à la campagne de Tunisie contre l’Afrika Korps, sous la direction du général Giraud. Puis à partir de juillet 1943, c’est la campagne d’Italie, avec le général Juin, cette fois. A la bataille du Monte Cassino, il est sérieusement blessé au pied. Il risque l’amputation, mais l’hôpital de Naples le lui sauve. Ainsi, le 15 août 1944, il peut participer au débarquement en Provence et remonte la vallée du Rhône, puis de la Saône, pour faire la jonction avec ceux débarqués en Normandie, le 6 septembre 1944, au village de Nods/Seine, en Côte d’Or (une stèle marque l’évènement).
Comme beaucoup, il est démobilisé en 1946. Il peut s’inscrire dans un club d’athlétisme parisien. Ce sera le Racing Club de France qui lui offre un poste de garçon de café. Il peut donc s’entraîner et commence à dominer la course de fond française dès 1947 : 5 000 mètres et 10 000 mètres. Mais dans les compétitions internationales, il trouve presque systématiquement sur son chemin, le Tchécoslovaque Emil Zatopek, au rythme infernal. Au point qu’on le surnomme « la locomotive humaine ». Aux Jeux Olympiques de Londres en 1948, puis d’Helsinki en 1952, Alain Mimoun doit, à chaque fois, se contenter de la médaille d’argent. Néanmoins, le quotidien sportif « L’Equipe » le désigne « champion des champions » en 1949. Quelques temps après, il bat le record de France des 20 km.
Après avoir visité Sainte-Thérèse de Lisieux, il se convertit au catholicisme.
1956 : les Jeux Olympiques ont lieu à Melbourne. Le 1er décembre, c’est le marathon auquel participe Alain Mimoun. La veille, il a appris la naissance de sa fille. C’est le premier marathon de sa vie, où il y a aussi celui qui est devenu son ami : Emil Zatopek. Pour Mimoun, la fin de parcours est interminable sous le chaud soleil. Il a mis un mouchoir sur sa tête, pour une protection dérisoire. Selon ses dires, les derniers kilomètres sont un calvaire. Mais finalement, il remporte l’épreuve en 2h25mn (aujourd’hui, le record est autour de 2 h). Cette fois, Zatopek vaincu (il termine 6ème) vient le féliciter. A son retour à Orly, il est acclamé et porté en triomphe. Il est au sommet de sa gloire, lui le fils de paysan modeste d’Algérie. Cette année-là, « L’Equipe » le désigne encore « champion des champions ».
En 1960, il crée un centre sportif national à Bugeat (Corrèze) d’où est originaire son épouse. Il termine sa carrière en 1966. Entre-temps, il y a eu les accords d’Evian qui donnent l’indépendance à l’Algérie. Alain Mimoun n’a pas voulu choisir un camp ou l’autre. Quoi qu’il en soit, il devient Français.
Des gymnases portent son nom, en particulier à Argenteuil, ainsi que des écoles et des stades. Il a la médaille d’honneur de la ville de Vincennes. Il a été chevalier de la Légion d’Honneur en 1956 (par le Président Coty), Commandeur de la Légion d’Honneur en 1999 (par le Président Chirac), Grand Officier de la légion d’Honneur (par le président Sarkozy). Mais ce n’est pas tout. Il est Chevalier de l’Ordre national du mérite et il a la Croix de guerre 1939 – 1945. Enfin, il a été le sujet de documentaires, de films, de livres.
Il s’est éteint à l’hôpital de Saint-Mandé le 27 juin 2013. C’était le parcours d’un grand champion resté modeste et qui était charismatique.

Dans le calendrier républicain, le 27 juin est le jour de l’absinthe.

BENAZIR BHUTTO

Le 21 juin 1953, est née à Karachi, Benazir Bhutto qui fut première ministre du Pakistan de 1988 à 1990, puis de 1993 à 1996.
Elle est issue d’une famille riche qui possède de vastes terres. Elle est la fille d’Ali Bhutto, fondateur du PPP (Parti du Peuple Pakistanais), plutôt socialiste et qui a été président de la République de 1971 à 1977.
Même si elle a été la première femme élue démocratiquement à la tête d’un pays à majorité musulmane, sa vie a été loin d’être un long fleuve tranquille qui se terminera de façon dramatique par un assassinat (attentat suicide) le 27 décembre 2007.
Dans sa jeunesse, elle a reçu une éducation dans des missions catholiques anglophones. A partir de 1969, elle suit des études à Harvard puis à Oxford. D’ailleurs, en décembre 1976, elle devient la première femme originaire d’Asie à être présidente de l’Oxford Union (sorte d’association des anciens d’Oxford).
Elle revient au Pakistan en 1977, avec l’ambition de faire une carrière diplomatique sous le gouvernement de son père, Ali Bhutto, 1er ministre à cette époque.
Mais le 5 juillet 1977, son père est en prison. Accusé d’un meurtre en 1974, puis de fraudes électorales, il est condamné à mort et pendu le 4 avril 1979.
Benazir, avec sa mère, devient la cheffe du PPP. Mais toutes deux sont emprisonnées, puis libérées en 1980.
En 1981, elles fondent le « mouvement pour la Reconstruction de la Démocratie ». Benazir se retrouve en prison à Sukkur (ville de la province du Sind, dans le sud du pays). Les conditions de détention y sont si dures qu’elle tombe malade.
En 1982, sa peine est soulagée, mais elle doit rester en résidence surveillée à Karachi (plus grande ville du pays, mais pas la capitale).
En janvier 1984, elle part à Londres se faire opérer du mastoïde (os temporal). De là, elle essaie de mobiliser l’opinion internationale contre le général Zia qui a fait un coup d’Etat.
Elle rentre au Pakistan en juillet 1985, pour les funérailles de son frère Shahnawaz, probablement empoisonné sur ordre de Zia. Mais elle est aussitôt arrêtée et emprisonnée.
Libérée, elle repart à l’étranger. Puis revient à Lahore le 11 avril 1986, bien accueillie par la foule qui la sollicite pour prendre la tête de l’opposition. A partir de là, Benazir Bhutto entame une tournée qui tourne court car elle à nouveau incarcérée et échappe de justesse à un assassinat.
Le 18 décembre 1987, elle épouse Asif Ali Zardani. Mais comme elle ne fournit pas de dot, elle conserve son nom de naissance. Le couple aura 3 enfants. A partir de là, Benazir entre en conflit avec ses frères encore vivants qui veulent pratiquer une opposition armée, alors qu’elle préconise un combat non violent.
Le 29 mai 1988, Zia dissout l’assemblée nationale. Les militaires forment une alliance démocratique et islamique anti Zia. Et le 21 septembre 1988, des attaques ont lieu à Karachi et à Hyderabad (dans le Sind) qui font 240 morts.
Néanmoins, aux élections du 16 novembre 1988, c’est la victoire du PPP.
Benazir et sa mère Nusrat sont parmi les élu(e)s. Benazir sera désignée 1ère ministre si elle soutient Ishaq Khan (haut fonctionnaire qui a été 1er ministre de Zia, disparu dans un mystérieux accident d’avion) pour la présidentielle.
Ishaq Khan est finalement élu président le 13 décembre 1988.
Ainsi, à 35 ans, Benazir Bhutto est la plus jeune personne désignée à ce poste dans un pays musulman.
Aussitôt, elle veut appliquer une politique de privatisation (contraire à celle de son père).
En juin 1989, elle milite pour la liberté de l’Internationale libérale (fédération mondiale de partis politiques libéraux). Mais après les troubles de Karachi du 6 août 1990, elle est démise, car accusée de corruption et d’abus de pouvoir. Arrêtée et emprisonnée avec son mari, elle est vite libérée et innocentée (son mari reste détenu).
Les élections législatives du 6 octobre 1993 donnent la victoire au PPP et à ses alliés, mais c’est une majorité fragile.
Néanmoins, Benazir Bhutto est désignée 1ère ministre le 19 octobre 1993.
A ce moment-là, elle soutient plus ou moins les mouvements islamistes du Cachemire, en lutte contre l’Inde, le grand rival. Dans le même temps, elle s’efforce de créer de bonnes relations avec l’Occident.
Ainsi, en novembre 1994, elle rend visite à Mitterrand, et quelques mois plus tard, elle reçoit Hillary Clinton.
Sur le plan économique, elle reprend sa politique de privatisations qu’elle avait déjà initiée.
Seulement voilà, son frère Murtaza est abattu par la police le 26 septembre 1996. Curieusement, des soupçons pèsent sur elle. Aux élections législatives de 1997, le PPP est battu et Benazir est contestée. Elle doit alors encore s’enfuir pour se retrouver à Londres et à Dubaï, car elle est accusée de corruption et de clanisme. De l’étranger, elle dirige le PPP. Finalement, elle sera amnistiée par Pervez Mousharaf, chef de l’exécutif de l’époque. Car une modification de la constitution intervenue en 1998, lui interdisait de revenir au Pakistan. Elle y revient en 2001. Son retour en grâce est dû à une ordonnance de réconciliation nationale du 27 juillet 2007. Elle peut donc préparer les élections de 2008, comme opposante à….Mousharaf.
Le 18 octobre 2007, elle revient à Karachi et se déclare comme la principale opposante au pouvoir. Le soir même, il y a un attentat, dont elle réchappe. Mais il fait près de 200 morts. Le miracle n’aura pas lieu le 27 décembre, lors d’un rassemblement du PPP à Rawalpindi. Là, un jeune homme de 15 ans tire trois coups de feu et déclenche sa ceinture d’explosifs. Bilan : 20 morts et Benazir Bhutto est grièvement blessée. Elle meurt à l’hôpital. L’annonce de sa mort provoque des émeutes dans tout le pays et on dénombre 44 morts. Trois jours de deuil sont décrétés. Une enquête de l’ONU du 25 avril 2010, estime que la sécurité était mal assurée. Le Pakistan accuse Al Qaïda.
C’était l’itinéraire compliqué d’une femme dans un pays gangréné par la violence. Une femme pourra-t-elle revenir un jour au pouvoir au Pakistan ?
Dans le calendrier républicain, le 21 juin est le jour de l’oignon.

MARINA OVSIANNIKOVA

Le 19 juin 1978 est née Marina Ovsiannikova à Odessa, d’un père ukrainien et d’une mère russe. L’Ukraine faisait encore partie de l’URSS. Marina était journaliste et productrice sur « Первы Канал » (1ère chaîne russe de télévision).
Le 24 mars 2022, c’est-à-dire 3 semaines après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, elle a accompli un acte de résistance pacifique et audacieux.
Au cours du journal télévisé du soir «Время » (Le Temps) ,derrière la présentatrice, elle a exposé une pancarte écrite en russe et en anglais, contre la guerre en Ukraine. Sur cette pancarte, était écrit: « Non à la guerre. Ne croyez pas la propagande. Ils nous mentent ».
L’émission a été interrompue et remplacée par un reportage enregistré. L’image a fait le tour des télévisions occidentales.
Bien sûr, elle a été arrêtée, mais en octobre, elle a réussi à s’enfuir clandestinement. Sans ses deux enfants car son mari, dont elle était séparée, a refusé qu’ils partent avec elle.
Revenue malgré tout en Russie, elle manifeste pour Navalny qui est en prison, et encourage les Russes à en faire autant.
Arrêtée encore, elle est jugée coupable d’«infraction administrative » (formule vague où l’on peut mettre tout ce qu’on veut).
Le 15 mai, après 14 heures d’interrogatoire, elle est condamnée à une amende équivalent à 250 € (salaire mensuel moyen en Russie : à peine 400 €) et encourt 15 ans de prison.
Sachant les risques qu’elle prenait, Marina Ovsiannikova avait pris soin d’enregistrer une vidéo publiée sur « Télégram ».
Elle y dénonce la guerre en Ukraine et rappelle que la Russie est l’agresseur, que la propagande a transformé le peuple russe en « zombie » (c’est son mot). Après cet épisode, Marina ovsiannikova démissionne de son poste à la télévision russe et se retrouve en Allemagne où elle travaille pour le journal « Die Welt » (Le Monde).
Le 22 mai, elle est récompensée par le prix « Vaclav Havel », créé par la Fondation « Human Rights ».
En fait, Marina n’est pas la première venue. Elle est diplômée d’Etat de l’université de Kouban (dans le sud de la Russie) pour la culture physique, le sport et le tourisme. Elle est également diplômée de l’Académie russe de l’économie nationale. Elle travaille pour une télévision et une radio panrusses (de toutes les régions russophones). Mais les condamnations n’arrêtent pas Marina Ovsiannikova.
Le 15 juillet 2022, elle manifeste au pied du Kremlin, en posant sur le sol, 3 poupées ensanglantées accompagnées d’une affiche sur laquelle est écrit : «Poutine assassin, soldats fascistes ».
Evidemment, le 17 juillet, elle est encore arrêtée, mais curieusement relâchée. Lors du procès qui suit, elle persiste et déclare que l’invasion russe est un «terrible crime ».
Le 9 août, Marina est à nouveau arrêtée, condamnée à une amende de 300 €, cette fois et assignée à résidence. Le lendemain, elle est mise en détention provisoire à Moscou.
Néanmoins, en octobre 2022, avec l’aide de « Reporters Sans Frontières », elle peut s’enfuir avec un de ses enfants.
C’est au printemps 2023 qu’elle écrit son autobiographie qui sera publiée en Allemagne et en France. Comme elle est absente pour son procès en Russie, elle est condamnée par contumace pour « hooliganisme ».
Marina Ovsiannikova est soutenue par la presse étrangère, par l’attachée de presse de Navalny, par l’avocate russe Lioubov Sobol, militante anti-corruption, et aussi par Volodomyr Zélensky.
En mai 2023, Macron lui a proposé l’asile politique. Elle décliné la proposition car elle ne veut pas quitter son pays définitivement.
Certains s’étonnent qu’après ses arrestations, elle ait pu fuir relativement facilement. D’autres remarquent que les sanctions sont relativement modérées, alors que pour de simples manifestations, certains prennent 8 ans de prison.
Ceux-là finissent par se demander si par cette relative clémence, Poutine ne voudrait pas montrer que le droit de contestation existe en Russie. Réalité ou manipulation ?
Quoi qu’il en soit, bon anniversaire Marina.

Dans le calendrier révolutionnaire, le 19 juin est la journée du seigle.

MOLLY MALLONE

On dit – ne regardez pas Mesdames – que caresser cette poitrine, est un gage de bonheur…pour les hommes. D’où l’aspect patiné de cette partie de son anatomie!
Il s’agit d’une sculpture en bronze, grandeur nature, de Jeanne Rynhart (1946 – 2020), sculptrice irlandaise qui a réalisé cette œuvre en 1988.
Elle a été initialement placée en bas de Grafton Street, artère commerciale avec de nombreux magasins de luxe.
Elle a été déplacée en 2014, dans St Andrew’s street, non loin de là.
La légende veut que Molly Malone ait été une marchande ambulante vendant « cookles and mussels » (bucardes et moules) le jour et qu’elle se prostituait la nuit.
D’autres affirment au contraire, que c’était une femme chaste. Que chacun choisisse son camp…
Elle serait morte jeune d’une fièvre. En fait, la tenue de Molly Malone ne fait que représentait la façon dont s’habillaient les femmes modestes du XVIIème siècle. Beaucoup d’entre elles avaient une poitrine généreuse pour allaiter les bébés (cf les femmes du Morvan, pleines de santé, qui allaitaient les enfants des Parisiennes au XIXème siècle). En outre, l’allaitement pouvait se faire en public, sans que cela ne choque personne.
Elle a inspiré l’hymne officieux de Dublin, celui que chante le peuple. C’est aussi…l’hymne de l’équipe de rugby, et du GAA (Association Athlétique Gaélique) après quelques pintes de Guinness que les irlandais boivent sans modération. Je joins la chanson que vous reprendrez si cela vous amuse, mais il n’existe aucune preuve qu’elle concerne Molly Malone elle-même.
Elle a aussi inspiré des chansons :
– The Dubliners : « Molly Malone »
– Renaud : « Molly Malone, ballade irlandaise »
– Hugues Aufray : « La ballade de Molly Malone »
L’Irlande d’hier et d’aujourd’hui aime bien ce genre de légende. Et Molly Malone fait désormais partie du patrimoine touristique de Dublin.
Dans le calendrier républicain, le 23 juin est le jour de la tanche.

MARIUS ROSSILLON

Le 8 juin 1867, est né à Lyon, Marius Rossillon.
C’était un dessinateur pour publicités (on disait réclames).
On l’avait surnommé O’Galop car ses dessins étaient rendus rapidement.
Il a dessiné pour « Le Rire » (hebdomadaire humoristique), pour « l’Assiette au beurre » (magazine satirique),  le « Pèle-Mêle » (hebdomadaire humoristique), « Le Cri de Paris » (hebdomadaire satirique et politique), le « Charivari » (quotidien satirique illustré).

Tout le monde connaît la publicité pour les pneus Michelin : le fameux Bibendum, avec son embonpoint débonnaire, ses grosses semelles de caoutchouc. L’auteur de ce personnage universellement connu, c’est lui : Marius Rossillon qui l’a créé en 1910, où il devient l’affichiste attitré de Michelin. On est au tout début de l’essor de l’automobile.

Mais c’est loin d’être sa seule production. Il a dessiné la réclame pour le dentifrice Gibbs, les pâtes Lustucru, le stylo Waterman, la boisson gazeuse Riqlès. II a également illustré des recueils des Images d’Epinal. Et ce n’est pas tout. Il a aussi produit des films : « Bécassotte à la mer », court métrage de 1920, et « La colombe et la fourmi » de 1924 et qui est une illustration de la fable de La Fontaine.

Après son mariage, en 1898, il achète une maison en Périgord, à Beynac qui est encore loin d’être submergé par le tourisme. Cette maison est en haut d’un chemin au-dessus des maisons. La sienne domine le bas du village et la courbe de la Dordogne, et tout là-haut, le fier et puissant château médiéval qui donne l’impression de surveiller les alentours. On peut la reconnaître : une plaque commémorative y a été apposée. De-là, il a peint les merveilleux paysages de la vallée de la Dordogne. Marius Rossillon y restera jusqu’à sa mort (2 janvier 1946). En fait, il mourra à l’hospice de saint-Rome (actuellement EHPAD), sur la commune de Carsac-Aillac, distante d’une trentaine de km.

Son petit-fils Philippe fera une carrière de diplomate. Celui-ci s’est donné pour objectif de défendre la langue française au Québec. Ce qui lui vaudra quelques ennuis avec le 1er Ministre Canadien, notamment après l’apostrophe de De Gaulle : « Vive le Québec libre ! » en juillet 1967. Philippe se marie avec Véronique Seydoux, issue d’une riche famille d’industriels. Ils ont deux enfants : Antonin et Kléber. Antonin se tue accidentellement, à 33 ans, sur la route le 11 août 1991, sur la commune voisine de Vézac. Quant à Kléber, il dirige l’entretien des sites culturels et touristiques. Il en a 12 sous sa responsabilité. Parmi eux, on note, le château de Marqueyssac sur la commune de Vézac, célèbre pour ses jardins bordés de buis parfaitement taillés, dominant la Dordogne. De l’autre côté de la rivière, il a fait reconstruire le château médiéval de Castelnaud, longtemps en ruines et qui, aujourd’hui est le lieu d’animations liées au Moyen-Age. Il est aussi le propriétaire de ces deux châteaux. Entre autres, il gère le château de Langeais (Indre-et-Loire), le musée de Montmartre, la grotte Chauvet (Ardèche), la grotte Cosquer (Bouches-du-Rhône), le Mémorial de Waterloo en Belgique.  

Mais c’est finalement dans son secteur que Kléber Rossillon a connu le plus de difficultés : la vallée de la Dordogne qui passe entre le château de Castelnaud (pris par les Anglais pendant la guerre de Cent ans) et celui de Beynac (resté français). En fait le problème n’a rien à voir avec les rivalités de cette époque. Celui qui fut maire de Castelnaud, puis conseiller départemental, est devenu président du Conseil départemental de la Dordogne : Germinal Peiro. Celui-ci s’est mis en tête, à la suite de son père, maire de Vézac, de contourner Beynac par ce que l’un et l’autre ont appelé « la voie de la vallée ». Il est vrai que la route qui joint Bergerac à Sarlat, ne peut recevoir un trafic toujours plus dense, vue son étroitesse. Il existe bien une autre route pour joindre ces deux villes, mais elle passe dans les bois à une quinzaine de km de là et qui serait moins coûteuse. Mais elle le tort de ne pas traverser le fief électoral de Germinal Peiro. Pour réaliser cette « voie de la vallée », il fallait construire deux ponts, une route traversant une réserve naturelle protégée. Mais rien n’y fit. Germinal, l’ancien champion de Canoë kayak, a fait commencer les travaux malgré les oppositions d’une partie de la population, de l’administration régionale de Bordeaux, et l’opposition de Kléber Rossillon, protecteur du patrimoine et propriétaire de deux châteaux. Et de toute façon, sa démarche avait été jugée illégale.

Est-ce que Germinal Peiro, avec un prénom qui rappelle le calendrier de 1793, se croit investi pour s’opposer à ceux qu’il appelle les châtelains ? Quoi qu’il en soit, il en fait un combat personnel et, jusqu’à présent, tarde à répondre aux injonctions administratives pour détruire ce qu’il a commencé à construire. Or, parmi ceux qu’il désigne comme des « châtelains, il y a bon nombre d’illustres inconnus qui ont signé des pétitions contre cette stupide entreprise. On est en plein imbroglio politico-clochemerlesque, qui a pour principal inconvénient de coûter cher à la collectivité, sans rien rapporter à personne, sauf à l’ego de germinal Peiro. Pour l’instant, il règne en potentat local sur le département de la Dordogne. Stéphane Bern, lui aussi sensible au patrimoine, a même parlé d’un « Ceausescu » du Périgord.  

On est loin de Marius Rossillon et de son Bibendom Michelin. Ainsi va le monde dans ce beau Périgord. 

Dans le calendrier républicain, le 8 juin est le jour de la fourche (peut-être celle que Germinal Peiro voudrait brandir contre les « châtelains »).

JOSÉPHINE BAKER

Le 3 juin 1906, est née Freda Joséphine Mac Donald à Saint-Louis dans l’Etat de Missouri. On la connaît bien mieux sous le pseudonyme de Joséphine Baker. Fille d’artistes, elle est abandonnée par son père dès 1907. Elle passe son enfance entre école et petits boulots chez des gens aisés, car elle est l’aînée d’une famille pauvre. Dans un premier temps, elle est mariée à 14 ans avec Willie Wells, un joueur de base-ball, dont elle se séparera très tôt. Cependant, elle a des aptitudes pour la danse et elle fait vite partie d’un trio d’artistes de rue. Lors d’une tournée à Philadelphie, elle trouve à se remarier avec William Howard Baker qui travaille pour Pullmann. Elle conservera ce patronyme.
A 16 ans, elle quitte son second mari pour tenter sa chance à Broadway, rien que ça. Mais sa proposition est refusée. N’oublions pas qu’elle est noire et que dans les années 20, les Etats-Unis sont toujours ségrégationnistes. Après plusieurs tentatives infructueuses avec divers groupes, elle rencontre Caroline Reagan, épouse d’un haut fonctionnaire de l’ambassade américaine à Paris. On lui propose un salaire de 250 dollars si elle vient en France. Caroline et son époux montent un spectacle : « La revue nègre » où elle sera la vedette. Joséphine débarque à Cherbourg le 22 septembre 1925. Le 2 octobre, elle passe en 1ère partie de « La revue nègre » au théâtre des Champs Elysées. Elle y danse le charleston, encore inconnu des Parisiens, où son déhanché fait un tabac, comme on dirait aujourd’hui.
Là, Joséphine réalise que la France est moins raciste que les Etats-Unis. En 1927, elle obtient un contrat pour se produire aux Folies Bergères. C’est là qu’elle danse nue, avec une ceinture de bananes (artificielles) et accompagnée d’un guépard (un vrai), ce qui inquiète un peu l’entourage. Son impresario est devenu son amant. Alors, elle se lance dans la chanson : « la Tonkinoise » (pas sûr que ça passerait aujourd’hui ?) et « J’ai deux amours » (en fait, elle en aura bien plus de deux !). Si bien qu’en 1928, elle fait une tournée mondiale (il n’y a pas encore d’avions pour les voyages).
Dans les années 30, elle engage Jean Lion, un play-boy issu d’une riche famille d’industriels, comme secrétaire et…comme amant, puis mari. Le mariage dure peu, mais lui permet d’acquérir la nationalité française. C’est à ce moment-là que le couple loue un château du XVème siècle aux Milandes (commune de Castelnaud – Fayrac) en Dordogne, à une vingtaine de km de Sarlat.
Avec la guerre, elle rencontre Jacques Abtey, officier du renseignement et du contre-espionnage. Pour le camoufler, elle en fait son secrétaire artistique….et son amant. Elle se produit devant les troupes au front. Mais surtout, elle profite de sa notoriété pour être invitée dans des soirées mondaines où elle recueille des informations importantes, rapidement transmises à Londres. Elle embarque pour le Maroc où elle poursuit ses spectacles devant les troupes. Mais une méchante péritonite manque lui coûter la vie. Il lui faudra de longues semaines de convalescence. Lorsque les Américains débarquent en Algérie en novembre 1942, le commandement l’invite à se produire devant les soldats.
Elle avait obtenu un brevet de pilote d’avion en 1938. Forte de ce bagage, elle participe à des évacuations sanitaires. Toutes ces actions lui vaudront de devenir lieutenante de l’armée de l’air et de recevoir la médaille de la Résistance de De Gaulle lui-même. Médaille qu’elle revendra au profit des mouvements de Résistance.
Après la guerre, elle devient ambassadrice de la haute couture française. Sur scène, elle se présente avec de magnifiques robes de Dior ou Balmain. En 1947, elle épouse Jo Bouillon, chef d’orchestre et compositeur qui l’accompagne dans ses spectacles. Mais à la suite d’une fausse couche qui s’est mal passée, elle ne pourra pas avoir d’enfants. C’est avec Jo Bouillon qu’en 1947, elle achète les Milandes, dont elle était déjà locataire depuis 1937 (sur les cartes du XIXème siècle, ce château s’appelait les Mirandes. Mais Joséphine ayant un problème avec la prononciation des R, c’est devenu les Milandes). Là, elle adopte 12 enfants de toutes origines (Jo Bouillon n’en voulait que 4). Elle l’appellera « la tribu arc-r-ciel ».
Les Milandes deviennent un lieu d’attractions diverses avec piscine (encore rare à cette époque), golf miniature, restaurant, bar, et bien sûr, salle de spectacle. Tout le monde vient aux Milandes, c’est le lieu, avec St-Trop’, où il faut être vu. Des touristes arrivent de toute la France, et même de l’étranger. Mais c’est surtout la « jet set » parisienne qui vient aux Milandes. De grandes stars s’y produisent: Gilbert Bécaud, Dalida, Jacques Brel, Luis Mariano, etc… Et dans leur sillage, de nombreux journalistes qui, par la même occasion ont découvert le Périgord.
Pour transformer ce « palais de la démesure », il faut aménager. Joséphine fait alors appel à des artisans locaux, souvent peu scrupuleux qui ont contribué à sa ruine, d’autant que Joséphine, si elle était une grande artiste, était une très mauvaise gestionnaire. Certains n’hésitaient pas à faire payer la même facture deux ou trois fois. On volait de la vaisselle, des couverts, des objets précieux. On a vu un électricien qui allait chez ses clients en vélo, avec la boîte à outils sur le dos, devenir propriétaire d’une magnifique maison surplombant la vallée de la Dordogne. On a vu une famille de plombiers devenir rapidement riche. Dans les exploitations agricoles qu’elle possédait, des animaux étaient déclarés morts, alors qu’ils étaient vendus au bénéfice des exploitants. Et ainsi de suite…Face à une telle gabegie, les relations entre Joséphine et Jo se sont dégradées. Les disputes se sont multipliées, de la vaisselle volait. Ils se séparent en 1957. Joséphine reste aux Milandes .
Et que pensaient les gens du coin de toute cette activité nouvelle, dans une région restée encore aux activités ancestrales, disons encore en retard ? Peu familiers avec la langue de Shakespeare, ils l’appelaient Joséphine Bakère, ou plus familièrement Joséphine. Ils étaient partagés entre agacement et fierté. Agacement, parce que dans cette région, jusque-là si tranquille, arrivaient tout ce monde complètement étranger aux habitudes locales. Fierté quand même de voir que de jour en jour, le Périgord pouvait être à la une des journaux et radios. Et comme toujours des bruits courraient, parfois vrais, parfois faux. Parmi les vrais: Jo Bouillon était homosexuel. Comme il avait des connaissances bien placées, les jeunes de la région qui voulaient éviter la guerre d’Algérie et allaient le voir. Ce qu’il se passait ensuite n’est pas forcément vrai. De toute façon, ma mère m’interdirait de le répéter. Ce qui semble vrai aussi : on finit par savoir que Joséphine était bisexuelle. Elle a eu pour amantes -entre autres – l’écrivaine Colette et la peintre Frida Kahlo. Evidemment, dans ce Périgord traditionnel, on en faisait des gorges chaudes avec des moues de réprobation.
Tout au cours de sa vie, elle a milité contre le racisme. Joséphine a même fait partie de la LICRA (Ligue Internationale Contre le Racisme et l’Antisémitisme). Elle sera aux côtés de Martin Luther King lors de son fameux discours du 22 août 1963 : « I have a dream ».
Ruinée, criblée de dettes, le château est mis aux enchères. Joséphine lance un appel pour le sauver. Emue par sa situation, Brigitte Bardot lui envoie un chèque important. La princesse Grace de Monaco en fait autant et l’invite même à se produire dans la Principauté. Jean-Claude Brialy la produit dans son cabaret. En 1964, elle remonte sur scène : l’Olympia, Belgrade, Carnegie hall à New-York, puis encore à Paris en 1974. Le 24 mars 1975, elle veut fêter ses 50 ans de carrière. Mais le 10 avril, elle est victime d’une hémorragie cérébrale et se retrouve dans le coma. Le 12 avril, elle décède à l’hôpital de la Pitié-Salpétrière. Triste fin d’une grande artiste. De nombreux hommages lui ont été rendus ici et là en France et même à l’étranger. Puis finalement, le 29 novembre 2021, ce sera l’hommage suprême : l’entrée au Panthéon. Tout un symbole : femme, noire, d’origine étrangère….
Pourtant, les Périgordins (habitants du Périgord, tandis que les Périgourdins sont les habitants de Périgueux) doivent beaucoup à Joséphine. Outre ceux qui se sont enrichis sur son dos, artistes et journalistes ont découvert et fait découvrir cette merveilleuse région, avec la vallée de la Dordogne (la « Grande Aygue » chère à Christian Signol dans ses romans). On redécouvre son histoire, ainsi que celles de tous ces châteaux médiévaux, Renaissance. Il y a tous ces villages, dont certains sont classés parmi les plus beaux villages de France, comme Beynac (prononcer Beïnac et non pas Bénac comme le fait Stéphane Bern), La Roque-Gageac, et un peu plus loin : Domme, Belvès, Monpazier, Montignac et Lascaux, Les Eyzies avec ses grottes et son musée de la préhistoire . Au milieu de tout cela, un trésor médiéval – comme il était annoncé au bord des routes – Sarlat, ses vieilles rues, ses maisons, dont celle de La Boétie, le grand ami de Montaigne, son église Saint-Sardos, sa place de l’Hôtel de Ville, envahie par les cafés et les touristes, et par le grand marché du samedi. Même l’architecte Jean Nouvel natif du département voisin du Lot-et-Garonne y a mis sa patte en transformant l’église Sainte-Marie du XIVème siècle en marché couvert, avec sa gigantesque porte.
Finalement, le Périgord est envahi par les touristes, on peut utiliser le mot. Il y a trop de monde dans les rues de Sarlat (e qui pose des problèmes de sécurité pour l’accès des secours), de Beynac, de Laroque-Gageac, de Domme. Trop de monde également sur des routes surchargées. Il en va ainsi pendant toute la saison touristique qui, maintenant s’étale sur presque 6 mois (de mai à début novembre). Evidemment, toutes les activités liées au tourisme y trouvent leur compte : restaurants, hôtels, commerces. Malheureusement, tout ce beau monde cherche plus à faire du profit que de la qualité. Par contre, tous ceux dont l’activité n’est pas liée au tourisme ne s’y retrouvent pas : augmentation des prix, difficultés de circulation, files d’attente dans les magasins devenus souvent moins accueillants, car débordés. Autre inconvénient: hors la saison touristique, beaucoup de magasins ayant fait leur beurre pendant l’été, ferment pour aller en vacances à Arcachon ou dans les Pyrénées, malgré des efforts de novembre à mai.
Le Sarladais (environs de Sarlat) ne semble pas avoir une grande reconnaissance pour Joséphine Baker. C’est elle qui, indirectement, a fait venir les touristes dans le secteur. Le seul souvenir est cette longue avenue Joséphine Baker qui traverse une grande et affreuse zone commerciale qui s’arrête au lycée du Pré de Cordy (qui ne porte même pas son nom), à la lisière des bois, avant que la route continue vers la Dordogne et Bergerac.

MADAME DE MONTESPAN

 

Le 27 mai 1707, Françoise de Rochechouart de Mortemart est décédée à Bourbon-l’Archambault (actuellement dans l’Allier). Elle avait 67 ans (née le 5 octobre 1642 à Lussac-les Châteaux aujourd’hui dans la Vienne). 
On la connaît beaucoup plus comme . Elle fut d’abord mademoiselle de Tonnay-Charente (localité en amont de Rochefort/Mer en Charente-Maritime actuelle), jusqu’à ce qu’elle devienne l’épouse de Louis Henri de Pardaillan de Gondrin, marquis de Montespan. Voilà donc Françoise de Rochechouart, marquise de Montespan.

La reine, Marie-Thérèse d’Autriche, épouse de Louis XIV la fait venir à la Cour, au service de Monsieur (on appelle Monsieur, le frère du roi). Françoise est très belle et donc recherchée. Elle se marie en février 1643, à 21 ans, ce qui n’est pas trop précoce à l’époque. Avec son époux, elle a 3 enfants. Une fois à la Cour, elle devient dame d’honneur de la reine Marie-Thérèse. Ce qui lui donne l’occasion de rencontrer le roi Louis XIV en 1666, qui lui, est occupée avec Louise de la Vallière, sa maîtresse. Donc, jusque-là, il ne prête guère attention à Madame de Montespan. Mais celle-ci est futée, elle se lie d’amitié avec Louise dont elle devient la confidente. On progresse…
Enfin, le roi la remarque. Il note sa culture, la vivacité de son esprit, et bien sûr sa beauté. Tout compte fait, il trouve La Vallière trop réservée. Madame de Montespan franchit un échelon : elle devient la maîtresse du roi. La nature du roi a horreur du vide! Le 18 juillet 1668, lors du « grand divertissement royal », Louis XIV rend hommage à sa nouvelle favorite. En 1670, elle fait même partie du voyage aux Provinces-Unies (actuels Pays-Bas) dans la voiture du roi….et de la reine. Cette beauté, le roi tient à « la faire admirer à tous les ambassadeurs » dit madame de Sévigné. Et le Montespan, dans tout ça ? L’époux légitime ? Habituellement, le mari trompé fait contre mauvaise fortune bon cœur. Les belles récompenses : des titres, des terres, voire des pensions, incitent à ne pas faire de scandales. Lui, il revient sur ses terres de Gascogne, où il pourrait facilement retrouver à se marier. Mais non, le Montespan, il n’est pas content. Cocu et pas content, même si c’est le roi. Il clame partout son infortune et décore son carrosse de cornes! Il refuse d’annuler son mariage. Si bien que la relation de sa femme avec le roi, est un double adultère. Ca fait un peu sourciller le pape, mais bon…
Elle est capable d’influencer le roi. Les ministres le savent, la craignent et se soumettent à ses caprices. Car la dame aime le grand luxe. D’ailleurs, dans les moments de grande intimité, les colliers de perles tombent sur son cou, raconte l’historien Jean Teulé. Le luxe, mais elle contribue aussi au développement du commerce, des manufactures, des beaux arts. Elle protège La Fontaine, Molière, celle qu’on appelle le Grande Mademoiselle : la duchesse de Montpensier, petite-fille d’Henri IV et cousine de Louis XIV.
Avec Louis XIV, Mme de Montespan aura 7 enfants (dont 4 qui atteindront l’âge adulte). On n’a pas de contraception sûre au XVIIème siècle. Aussi, au fur et à mesure des grossesses, elle devient moins belle. Il est difficile de dire à un souverain aussi absolu que Louis XIV : « Sire, prenez garde, vous allez encore m’engrosser ! ». Conséquence : Madame de Montespan a pris de l’embonpoint. Conséquence de la conséquence : le roi s’entiche d’une jeunette de 17 ans. Oh, Me too, que n’étais-tu pas là ! Le roi en a 41. C’est la duchesse de Fontanges arrivée à la Cour pour devenir la demoiselle d’honneur. En clair la nounou des enfants. Elle est belle et jeune, la Montespan est moins belle et moins jeune. Alors, le roi la remarque. Il la remarque d’autant mieux que la famille lui avait recommandé de devenir la maîtresse du roi. Elle est belle, mais « sotte comme un panier » dira Bossuet. La liaison ne dure pas longtemps : Mademoiselle de Fontanges meurt en couches à 20 ans. Quant à madame de Montespan, soupçonnée d’être impliquée dans « l’affaire des poisons » qui a pourri l’atmosphère de la Cour de 1676 à 1682, elle tombe en disgrâce. En 1691, elle se retire dans l’abbaye de Fontevraud (Maine-et-Loire), où elle reste jusqu’à sa mort, en 1707.
Mais après l’épisode de Mademoiselle de Fontanges, le roi n’allait pas rester sans maîtresse, le pauvre ! Le 10 juillet 1683, la reine meurt, le roi est donc veuf. En 1674, il rencontre Françoise d’Aubigné, veuve du seigneur Scarron. Elle est d’abord la gouvernante des enfants « naturels » (j’aime l’expression) du roi avec Madame de Montespan, qui l’avait invitée à la Cour. Louis XIV apprécie qu’elle s’occupe parfaitement des enfants. Ce qui lui vaudra de devenir marquise de Maintenon.
Elle a la réputation d’être une femme très pieuse. Dans la nuit du 9 au 10 octobre 1683, elle se marie en secret avec le roi. A partir de là, son influence est grande sur Louis XIV. Ainsi, elle le pousse à signer l’édit de Fontainebleau (18 octobre 1685) qui abolit l’édit de Nantes, signé presque un siècle plus tôt par Henri IV. Finie la relative liberté de culte. Les protestants sont invités à se convertir. L’invitation devient obligation. Contre les récalcitrants, on envoie des soldats, les dragons.
Ce seront les « dragonnades » qui consistent à les convertir de force. Il paraît que le roi n’était pas au courant ?
Résultat, beaucoup de protestants se réfugient dans des lieux difficiles d’accès, comme les Cévennes. Où s’expatrient vers des pays luthériens, en Allemagne du nord et surtout aux Provinces-unies (approximativement Pays-Bas actuels) qui se lancent dans la conquête de l’Afrique du Sud, à laquelle certains participeront. Ainsi aujourd’hui, en Afrique du Sud, on retrouve des patronymes français, comme Dutoit, De Clerq….
Même au temps de Louis XIV, on considérait une femme d’abord par son physique avant de savoir si elle était intelligente ou sotte. Est-ce que les choses ont beaucoup changé ?

Dans le calendrier révolutionnaire, le 27 mai est le jour du lis.

LA PAÏVA

Esther Pauline Blanche Lachman est née le 7 mai 1819 en Silésie qui est russe à cette époque. Esther Lachman est bien plus connue comme comtesse de la Païva. Elle est originaire d’une famille juive polonaise. Après une enfance un peu ballottée, on la marie le 11 août 1836 à Hyacinthe Villoing, fils de tailleur français installé en Russie. Elle aura un fils Antoine, né en 1837. Vite lassée par la vie maritale, elle s’enfuit et se retrouve à Paris, dès 1840. Là, elle se prostitue sous le pseudonyme de Thérèse. Il faut bien gagner sa vie. Ce qui lui permet de rencontrer des artistes comme Franz Liszt, Richard Wagner, ou encore Théophile Gautier. En 1847, elle rencontre un pianiste Henri Herz, avec qui elle aura une fille Henriette, qu’elle confie à ses parents et qui meurt à 12 ans. En1848, Herz part seul aux Etats-Unis. Esther en profite pour croquer sa fortune et part à Londres, où elle a de nouveaux amants dont Edward Stanley, membre du parlement britannique à ce moment-là (et qui deviendra ministre des colonies).
Un bon plan donc !
Puis elle revient à Paris, où elle va défrayer la chronique scandaleuse sous le Second Empire. Villoing, désespéré se suicide. Le 5 juin 1851, elle épouse un riche – forcément – Portugais, le marquis de Païva qui lui offre un hôtel particulier construit en 1840. Par ce mariage, elle devient marquise. Puis la maîtresse d’un riche – comme toujours – Prussien, cousin de Bismarck – qui est en fait un de ses agents: Guido von Donnersmarck. Elle lui est relativement fidèle de 1856 à 1865. Ce qui lui permet de jouer un rôle dans certaines tractations politiques. Ainsi par son entregent. Ainsi elle aura facilité le remboursement anticipé de l’indemnité exigée par Bismarck. Guido von Donnersmarck lui offre à son tour, un somptueux hôtel, de style Renaissance italienne, sis au 25 de l’avenue des Champs Elysées. On ne peut rien lui refuser. L’escalier de cet hôtel est en onyx d’Algérie, la salle de bain est de style mauresque. Les sculptures sont d’artistes célèbres : Dalou et Carrier-Belleuse, tandis que les peintures sont de Paul Baudry (Napoléon III lui avait confié le décor du foyer de l’Opéra Garnier ). Le lit est en acajou de Cuba, orné d’une sirène flanquée de cygnes. En 1857, Donnersmarck lui offre aussi le château de Pontchartrain (actuellement dans les Yvelines). A son tour, le marquis de Païva, ruiné, se suicide !
Soupçonnée d’espionnage,les Républicains, au pouvoir après 1870, l ’expulsent. Elle se retire en Silésie où elle meurt le 21 janvier 1884. Son époux inconsolable la fait embaumer dans un cercueil de verre. Mais la Païva ne sera pas oubliée pour autant. Le 7 mai 2005, une vente Sothesby’s à Genève, permet de vendre des diamants d’une valeur de 2 et 3 millions d’euros. Celle qu’on appelait aussi : « la grande horizontale » était une grande dame de petite vertu qui a été à l’origine de formules célèbres :
– « Chez la Païva, qui paye y va. »
– « C’est presque fini, il ne manque plus que le trottoir ». Alexandre Dumas fils.
– « C’est le Louvre du cul ». Frères Goncourt.
– La Païva a été une grande courtisane, terme pudique pour désigner une de ces prostituées de luxe de haut vol, qui avaient pour clients des souverains, des personnalités politiques, des artistes célèbres, et aussi de riches provinciaux qui venaient s’encanailler à Paris.

Dans le calendrier républicain du 19 octobre 1793, le 7 mai est le jour de la corbeille d’or (une plante).

PAUL CHYTELMAN

Le 26 avril 2016, Paul Chytelman est mort, à l’âge de 94 ans. Il était né le 23 novembre 1922 en Pologne, d’une famille juive. Il est arrivé tôt en France, en 1923, avec ses parents. C’est là qu’il a grandi et passé certificat d’études et brevet. En 1939, il s’engage dans l’armée française où il est affecté au courrier militaire. Puis après l’occupation de mai 1940, il devient agent de liaison en octobre. En août 1941, il parvient à passer en zone libre et rejoint des groupes de résistants. Ce qui lui vaut, comme pour beaucoup, d’être arrêté le 15 janvier 1944, emprisonné à Mende, puis à Montpellier. De là, il est envoyé à Drancy, ultime étape avant la déportation. Pour lui, ce sera Auschwitz, où il arrive le 3 février 1944. Là, comme tous ses compagnons d’infortune, il vit l’enfer quotidien : appels interminables tôt le matin, dans le froid polonais, nourriture rationnée, brimades, humiliations, bastonnades pour un détail, travail forcé. Le tout, férocement surveillés par des SS zélés. Cependant, Paul Chytelman estimait être relativement épargné. En effet, connaissant la langue allemande, il comprenait rapidement les ordres.
A l’arrivée des troupes de l’Armée rouge, le camp est évacué et libéré le 27 janvier 1945. Le calvaire n’est pas terminé pour autant. Au contraire, car commence ce qu’on a appelé « la marche de la mort ». Pour évacuer les prisonniers, les SS n’ont rien trouvé de mieux que de les conduire à pied au camp de Gleiwitz, situé à 70 km. Marche forcée dans le froid, dans la simple tenue rayée de déporté, sans boire, ni manger. Beaucoup sont morts d’épuisement en cours de route. D’autres ont été exécutés parce qu’ils ralentissaient la marche. Les survivants arrivés à Gleiwitz, ont ensuite été conduits – en camions – au camp de Dora pour travailler dans les carrières. Ce camp sera libéré en avril 1945, par l’armée britannique du général Montgomery, cette fois.
Lorsque les déportés sont rapatriés, ils sont rassemblés à l’hôtel Lutetia à Paris, où ils sont pris en charge administrativement et sanitairement. Ensuite, une fois à peu près rétablis, ils peuvent partir retrouver leurs familles. Lorsque Paul Chytelman est descendu du train, il a croisé sa mère qui ne l’a pas reconnu, tant il était devenu méconnaissable, pesant à peine 45 kg. Malgré toutes ces épreuves, ce n’est qu’en 1947 qu’il devient français.
Pendant longtemps, ceux qui sont devenus d’anciens déportés sont restés dans le silence, conscients que leur « aventure » ne serait pas entendue. Et puis, à partir des années 50, on est à l’ère de la réconciliation franco-allemande, alors les dirigeants veulent éviter tout ce qui pourrait froisser les Allemands. Néanmoins, à partir des années 70, certains éprouvent le besoin de parler, de témoigner. Il faut que les générations nées après la guerre, sachent. Encore plus, dans les années 80, quand le négationnisme se répand et que Jean-Marie Le Pen considère la déportation comme « un détail de l’histoire ». Alors, Paul Chytelman, comme beaucoup d’autres, vont dans les collèges et les lycées, où ils sont invités, pour témoigner. Paul, avec sa faconde et ses mots savait toucher les adolescents qui écoutaient ses récits plus qu’émouvants, dans un silence religieux. Parfois des yeux brillaient, des larmes coulaient sur les joues. Le temps de surmonter leurs émotions, les élèves posaient de multiples questions : ils voulaient savoir. Paul répondait. Mais sur ses joues, coulaient aussi des larmes. Tout en intervenant volontiers, il admettait que les rappels de ces épreuves, étaient douloureux. Il confessait aussi ne plus avoir bien dormi depuis 1945.
Pour ses dernières années, il avait du mal à marcher. Son épouse Geneviève, plus jeune, le conduisait et l’accompagnait. Elle connaissait tellement bien son histoire qu’après sa mort, elle a pris le relais pour aller témoigner auprès des jeunes. Quand un ancien déporté s’en va, c’est une page d’histoire qui disparaît. C’est d’autant plus regrettable à une époque où prolifèrent les « fake news ». Paul a aussi écrit, notamment « Le courage d’espérer », et nous en avons bien besoin. Il est aussi l’auteur de « Pitchipoï », sorte de lieu imaginaire, une sorte « Peta Ouchenok » où on vivrait des horreurs.
Merci Paul !

Dans le calendrier républicain du 11 octobre 1793, le 26 avril est le jour du muguet.

POL POT

Le 15 avril 1998, Saloth Sâr, plus connu sous le nom de Pol Pot, 1er Ministre du Cambodge, est mort. On a découvert son corps le lendemain, dans le dernier bastion encore occupé par les Khmers rouges, au nord du Cambodge, près de la frontière thaïlandaise. En juillet 1997, il est jugé et condamné à la prison à vie par ses anciens partisans (dictateurs de tous pays, méfiez-vous)) qui veulent lui faire porter le mouk slek (chapeau traditionnel cambodgien) pour le massacre de 2 millions de Cambodgiens entre 1975 et 1979.
Le 17 avril 1975, ses troupes sortent de la jungle pour entrer dans Phnom Penh et renversent le général Lom Nol, chef d’Etat cambodgien. On a l’image d’un sanguinaire et pourtant, ceux qui l’ont côtoyé, le trouvent doux et serein. Il paraît qu’il aimait Verlaine. C’est dire. Après tout pourquoi pas : Hitler aimait bien Wagner. Derrière cette façade, se cache un théoricien monstrueux et sanglant. Il rêve de créer un « peuple nouveau » basé sur une société agraire qui retrouverait les vraies valeurs khmères traditionnelles. Pour y parvenir, il déclenche un véritable génocide à travers tout le pays. Les citadins sont rassemblés dans des camps de travail forcé, surveillés par de jeunes soldats analphabètes. Pol Pot, dans sa paranoïa, se désigne le « Frère n°1 » ou « chef suprême de l’Angkar » (organisation qui fait régner la terreur).
Les attaques contre le Viêt Nam, conduisent celui-ci à occuper le Cambodge au début de 1979 et à chasser les Khmers rouges du pouvoir. Les accords de Paris du 23 octobre 1991 mettent fin au conflit, malgré une résistance des Khmers rouges jusqu’en 1993. En mai 1993, l’ONU organise des élections et Norrodom Sihanouk (ancien chef d’Etat) qui a échappé au massacre, peut rentrer au Cambodge. A partir de ce moment-là, les Khmers rouges ne peuvent plus grand-chose, d’autant qu’ils ont perdu l’aide de la Chine et de la Thaïlande. Certains survivent en se livrant à des trafics (bois, pierres précieuses). Ils finissent par rendre les armes et même par se rallier au pouvoir de Phnom Penh, où ils seront fonctionnaires, policiers ou militaires. Belle reconversion !
Mais il faut juger ce génocide. Les anciens chefs survivants nient toute responsabilité. Il faudra bien que le Cambodge regarde en face son histoire.

Dans le calendrier républicain du 11 octobre 1793, le 16 avril est le jour de l’anémone.

PAUVRE HAÏTA

Le 12 avril 1770, la terre a tremblé en Haïti. Elle tremblera encore le 20 avril, puis le 3 juin, jour de la Pentecôte à 7h1/4 sur la pointe de l’île. En fait, j’aurais pu choisir n’importe quelle date, tant l’histoire d’Haïti est jalonnée de catastrophes naturelles (séismes, ouragans), aggravées par la situation politique, économique, et sociale. Inutile de les énumérer toutes. Peut-être peut-on s’attarder sur quelques-unes. Deux années sont particulièrement marquantes : 1751 et 1770. Ainsi, le 22 novembre 1751, tout ce qui n’était pas en maçonnerie a été détruit. A partir du 8 décembre, on a ressenti 25 secousses qui se sont étalées sur plus d’un mois. On cherche à se placer sous des tentes, rapidement fabriquées à partir de voiles de navires. A Saint-Domingue voisine, il y a de gros dégâts. A Port au Prince, il reste une seule maison debout. Le séisme a été précédé par une sorte de bruit de canon souterrain. Les mouvements de la terre se font de l’est vers l’ouest. Des gens affolés sautent par les fenêtres. Des témoins de l’époque racontent que des soldats ont eu si peur qu’ils sont devenus épileptiques. Le sol est resté calme jusqu’au 27 décembre 1767.
Le plus grand désastre se produit le 3 juin 1770, vers 19h15, à Port au Prince, capitale de la colonie. La ville est entièrement détruite. Le lendemain, au jour, on découvre plus de 200 cadavres. Des incendies se déclarent à partir des cuisinières en fonction pour préparer le dîner. Il faut les combattre avec les moyens du bord. Des crevasses se sont formées, laissant sourdre une eau pleine de sel et de soufre. Seuls, 43 bâtiments ont résisté. Comme par hasard, ce sont ceux des Français, situés près du port. Heureusement, la solidarité a vite joué. Des campagnes, sont venus des légumes, de la viande et de la volaille, distribués gratuitement. On a reconstruit, en hâte des fours car le prix du pain s’envolait.
Mais ce n’est pas fini car il y aura environ 200 secousses jusqu’à le fin octobre. Il y aura encore une violente secousse le 20 juillet 1785. On passera sur la multitude de secousses qui se produiront pendant les deux siècles suivants. J’en viens à ce qu’il s’est passé le 12 janvier 2010 à 16h53. Ce fut sans doute le plus terrible de l’histoire de Haïti. Ce séisme avait une magnitude très forte : 7 à 7,3 (échelle qui va jusqu’à 9). Or à partir de 7, c’est très destructeur. L’épicentre se situait à 25 km au sud-ouest de Port au Prince, et à une profondeur de seulement 10 km. Il a été suivi d’une douzaine de secousses de force entre 5 et 6. Il a été ressenti jusqu’à 60 km au sud-ouest de Port au Prince.
Haïti a le malheur de se situer au contact de deux plaques tectoniques : la plaque des Caraïbes et celle de Panama – Amérique du sud. C’est donc une zone fragile qui l’expose aux séismes. On est dans un cas de subduction : une plaque qui passe sous une autre (au rythme de 2 cm /an). Ailleurs, cela peut donner des volcans.
Le bilan est lourd, très lourd en 2010. On dénombre plus de 280 000 morts, 300 000 blessés et 1,3 millions de sans-abris. Dans les jours qui ont suivi, il y a eu 52 répliques de magnitude entre 4 et 5. A Port au Prince, le Palais national et la cathédrale Notre Dame ont été détruits. Des décombres, on a réussi à sauver 211 personnes. A Carrefour (c’est le nom d’une ville) qui a 300 000 habitants, 40% ont été détruits. A Léogane (200 000 habitants), la ville a été détruite à 90%. Le problème est d’enterrer les morts (la tradition du vaudou interdit l’incinération). Les hôpitaux, en partie détruits, ne peuvent prendre en charge tous les blessés. L’armée de l’air argentine a monté un hôpital de campagne. L’aéroport est inutilisable. Il faut passer par Saint-Domingue, mais les routes sont encombrées de rochers. Il est plus que temps car à partir du 19 janvier, des maladies comme la dysenterie, commencent à se développer. Le port est administré par les Etats-Unis qui ont prévu un porte-hélicoptères. L’ONU a créé la MINUSTAH (Mission des Nations Unies pour la Stabilisation de Haïti). Mais cela ne peut empêcher le trafic d’enfants pour la prostitution et le trafic d’organes.
Néanmoins, la générosité internationale existe. Le roi du Maroc, Mohamed VI envoie 14 millions de dollars, des aliments et des médicaments. Un pays pauvre comme le Tchad envoie 18 millions de dollars. Le Dalaï Lama envoie 100 000 francs suisses. Dès le 17 janvier le CICR (Comité International de la Croix Rouge) et le Croissant Rouge (équivalent musulman de la Croix Rouge) envoient des spécialistes et du matériel médical. L’Union Européenne fait une avance de 100 millions de dollars.
Toutes ces aides sont importantes, mais dans le contexte politique du pays, Haïti aura de mal à s’en remettre. Les séismes ne sont pas tout. Haïti est situé sur la trajectoire des cyclones tropicaux qui peuvent faire des ravages. Là aussi, il serait bien fastidieux de les énumérer tous. Il suffit de s’intéresser à celui qui a dévasté le sud-ouest de l’île dans la nuit du 3 au 4 octobre 2016. Il s’agit de l’ouragan Matthew de force 4 sur une échelle de 5 (échelle Saffir-Simpson). Cet ouragan a fait près de 5 000 morts, 4 000 blessés, 175 000 sans-abris. Les cultures ont été ravagées. Les Nations Unies ont déclenché un plan d’urgence et débloqué 100 millions de dollars, de la nourriture, des forces de maintien de la paix.
Comme si la nature n’était pas assez féroce avec Haïti, les hommes ont bien souvent aggravé les choses. Ca commence dès le 1er janvier 1804, quand à la suite d’une révolte des esclaves contre les colons, Haïti se proclame indépendant. C’est la première colonie à le faire. D’autres suivront en Amérique latine à partir de 1823. Mais cette indépendance a été chèrement payée. Pour compenser (compenser quoi ?), la France exige 150 millions de francs (selon le New York Times, cela équivaudrait actuellement à 525 millions d’euros). Ce qui était largement supérieur aux pauvres ressources du pays. Or, comme Haïti ne peut payer cash, il est obligé à emprunter à des banques….françaises. S’ajoutent donc des intérêts (qui vont enrichir les actionnaires des dites banques). Haïti, ne pouvant jamais investir, ne s’en est jamais remis. D’autant que ses dirigeants ont été souvent incompétents, corrompus. Ou assassinés….Là encore, il y aurait une longue liste de dictateurs à présenter. Contentons-nous de l’actualité. Ce n’est déjà pas si mal.
Les Duvalier, père et fils, ont régné de manière féroce et arbitraire de 1957 à 1986. Depuis cette époque, c’est le règne de l’instabilité, combinée à la violence et à la corruption. Le dernier Président Jouvenel Moïse a été assassinée le 7 juillet 2021. C’est Ariel Henry qui assure l’intérim, mais il est impopulaire et Haïti s’enfonce dans la violence des gangs. Ceux-ci pillent, violent, rançonnent, tuent. Ils sont les maîtres du pays. Ils ont pris le Palais présidentiel, les commissariats, les prisons, d’où ils ont libéré des centaines de prisonniers qui viennent ajouter à l’anarchie. Le caïd des caïds s’appelle « Barbecue », tout un programme !
Pourtant, dans les années 1950 – 1970, Haïti était désignée comme « la perle des Antilles ». Elle attirait les touristes. Le Larousse de 1962 indique que l’agriculture est florissante. Haïti exporte canne à sucre, sisal, coton, banane et même cacao. C’est loin tout ça. C’est véritablement un autre siècle.
Depuis le règne dictatorial des Duvalier (père et fils) de 1957 à 1986, Haïti descend aux enfers : incompétence, violence, corruption. Au point que le pays est devenu ingouvernable. Aucune puissance ne veut mettre son nez dans cet enfer. Les Etats-Unis, où il y a de nombreux immigrés haïtiens, surveillent de loin. L’Union Européenne a rappelé ses ambassadeurs. C’est plus prudent, mais tant pis pour Haïti. Russes et Chinois, en général prompts à investir les pays pauvres, sont pour l’instant discrets. Seul, le pauvre Kenya a proposé une force d’intervention. Un borgne au service d’un aveugle, ont cyniquement raillé certains. Ariel s’y est rendu dernièrement, mais il n’a pu rentrer : l’aéroport lui est interdit. Il a démissionné, comme tout le monde le lui demandait. Les gangs disent remettre de l’ordre. Mais de quel ordre s’agit-il ? Qui peut gouverner – et qui en a envie ? – un Etat où il n’y a plus d’Etat ? Qui saura trouver une solution ? Et laquelle ?
« Haïti chérie », c’est le cri de Frédéric Marcelin (1848 – 1917) que l’on considère comme le père du roman haïtien. Pour lui : « En dépit de tout, Haïti est un adorable petit pays, même pour nous Haïtiens quand nous sommes obligés de le fuir ». Dans ses malheurs, Haïti a donné de grands écrivains. Outre Frédéric Marcelin, on peut citer, entre autres, Anténor Firmin (1850 – 1941) et un contemporain : Dany Laferrière, né en 1953, à Port au Prince, et actuellement sociétaire de l’Académie Française.

Dans le calendrier républicain, le 12 avril est le jour du marronnier.