
LEYLA KAYACIK
Leyla Kayacik est née à Ankara, donc hors de l’Union Européenne. Pourtant, elle a joué un rôle important au Conseil européen.
Ses parents étaient passionnés par les voyages et la langue française. Elle a étudié la littérature et la civilisation anglaises à l’université de Nice, puis le droit à Strasbourg.
Leyla Kayacik a travaillé pour la charte sociale européenne qui était installée à Ankara. Ceci afin d’ouvrir le bureau des programmes du Conseil européen.
Car jusqu’en 2009, la Turquie espérait entrer dans l’Union Européenne. Seulement voilà, le Président français de l’époque, Nicolas Sarkozy s’y est catégoriquement opposé.
Et puis, ce fut l’arrivée de Recep Tayyip Erdogan à la tête de la Turquie en 2009. Le pays qui connaissait une certaine évolution démocratique, malgré la corruption, a progressivement évolué vers la dictature, surtout après le coup d’Etat du 15 juillet 2016. Cela visait à renverser Erdogan et a été suivi par une répression sévère.
Leyla Kayacik est turque, donc elle est originaire d’un Etat qui n’appartient à l’UE. Pourtant, elle a agi pour défendre ses valeurs. C’est d’autant plus méritoire, qu’à l’intérieur de cette UE, il existe des sceptiques, voire des oppositions, de la part de certains partis politiques et même d’Etats, comme la Hongrie qui en reçoit des subsides. Mais l’utilisation qu’en fait Orban n’est pas très claire.
Giorgia Meloni, Présidente du Conseil d’Italie était plutôt hostile à l’Europe.
Mais ce que l’UE lui apporte a fait taire son opposition.
Heureusement que des personnalités contribuent aux valeurs européennes dans un monde où Etats-Unis et Russie rêvent d’en finir avec cette UE qui est, malgré tout, une grande puissance avec ses 450 millions d’habitants. Elle reste pour l’instant, le seul grand ensemble démocratique, malgré ses imperfections.
La preuve : c’est là que les immigrés venant d’Afrique et du Moyen-Orient veulent venir.
BLANCHE D'ANTIGNY
Le 27 juin 1874, Blanche d’Antigny est décédée à Paris dans le VIIIème arrondissement.
C’était une actrice et une courtisane, plus courtisane qu’actrice. Elle s’appelait Marie-Ernestine Antigny, née dans un village de l’Indre, Martizay, le 9 mai 1840. Elle a donc vécu sous la Monarchie de Juillet (1830-1848) et le 2d Empire (1851-1870). Dans ce village, son père est menuisier et faisait office de sacristain. Elle est
l’aînée de 3 enfants. Son père, infidèle, part à Paris avec une femme du village et abandonne sa famille. Sa mère s’installe aussi à Paris, comme lingère chez une marquise.
En 1849, Marie-Ernestine est placée au couvent des Oiseaux, puis elle devient demoiselle de magasin (en fait, vendeuse) de la rue du Bac (7ème arrondissement actuellement).
À 13 ans, elle intéresse un Roumain qui l’emmène à Bucarest. Lorsqu’elle revient à Paris en 1856, elle fréquente des milieux tsiganes. Ils lui apprennent à monter à cheval. Elle est alors écuyère au cirque Napoléon (qui est aujourd’hui le cirque d’Hiver).
Au bal Mabille (appelé ainsi car fondé en 1831, par Mabille, professeur de danse, dans la rue du Faubourg St-Honoré), elle rencontre Jeanne de Tourbay, amie de Marc Fournier, directeur du théâtre de la Porte St-Martin. Il trouve que Marie-Ernestine a des formes à la Rubens.
Alors, il l’engage pour jouer un rôle muet, le 27 septembre 1856. Mais l’écrivain et critique d’art Jules Janin (1804-1874), de façon ironique écrivit : « Pour être muette, elle n’en parlait pas moins aux sens ». Aujourd’hui, on dirait qu’elle était sexy !
En 1857, Marie-Ernestine pose pour le peintre Paul Baudry (1828-1886).
En 1862, elle fait la connaissance, au bal Mabille, d’un prince russe Alexandre Gortchakov, diplomate de 65 ans, qui la fait venir à St-Pétersbourg. Là, elle fait la connaissance d’hommes riches et puissants, séduits par sa jeunesse et sa fraîcheur : elle n’a que 22 ans. Parmi eux, on trouve le général Nicolas Mesentsoff, directeur du cabinet noir (services de renseignements sur l’Europe)) de l’Impératrice Catherine II. Elle devient alors la femme la plus entretenue de Russie où elle reste 3 années. On l’appelle désormais Blanche d’Antigny, avec une particule s’il vous plait, à partir de 1865 ! Avec Caroline Letessier (1830-1893), comédienne à succès et demie mondaine, elle se livre à la luxure, mène une vie de plaisirs. Au point qu’elles sont expulsées de Russie pour leur comportement tapageur. Il devait en falloir, car Catherine II était loin d’être une sainte !
Revenue à Paris, Blanche donc, se rend chez le journaliste et romancier Henry de Pène (1830- 1888) pour la lancer au théâtre, avec une bonne préparation : formation, plan presse (ça existait déjà), orchestre, relations publiques. Rien n’avait été négligé….A son spectacle, « le tout Paris » comme on dit, y vient, en voitures à quatre chevaux, conduites par un moujik en blouse de soie. Il faut admettre que ça devait avoir de l’allure. Blanche était logée dans un appartement loué par une vieille connaissance : le général russe Mesentsoff qui est là, très attentif à sa réussite. C’est alors qu’elle rencontre Raphaël Bischoffsheim (1823-1906) qui est à la fois banquier, politicien, mécène…et qui devient son « protecteur ».
Elle fait ses débuts au théâtre du Palais Royal le 3 juillet 1868, après avoir posé en 1867 pour « La dame aux bijoux » du célèbre peintre Gustave Courbet (1819-1877). Dans l’ensemble, les critiques sont plutôt bonnes, sauf celle assassine de l’écrivain Barbey d’Aurevilly (1808-1889) : « Elle n’est pas une artiste »
Le 29 juillet 1868, elle remplace une cantatrice, Hortense Schneider (1833-1920) dans son spectacle « Mimi Bamboche » inspiré d’un roman. Tout un programme ! Blanche continue de chanter jusqu’à la guerre de 1870. On dit qu’elle aurait été la première femme à monter à vélo en public, car elle aurait obtenu l’autorisation de la préfecture pour être en pantalon.
Mais dans les années 1870, sa carrière s’oriente surtout comme demie mondaine, surtout que ses prix sont modérés ou même qu’elle « travaille » gratuitement ! Néanmoins, au début de la guerre, elle s’engage comme infirmière, mais sans trop de conviction. Car elle préfère faire la fête du côté de St-Germain-en-Laye.
En juillet 1871, Blanche reprend le théâtre et va se produire à Londres.
En 1873, Bischoffsheim la quitte. Abandonnée à elle-même, elle est criblée de dettes. Elle espère se refaire une santé financière en allant jouer en Egypte, à Alexandrie, en octobre 1873. Malheureusement pour elle, elle est huée par le public. Déçue et malade, elle quitte l’Egypte le 2 mai 1874 et arrive à Marseille le 28, puis à Paris le 30 mai. Atteinte par la tuberculose ou peut-être la fièvre typhoïde, elle meurt boulevard Haussmann, le 27 juin 1874, à 34 ans ! Il y aura beaucoup de monde à ses obsèques et sera enterrée au cimetière du Père Lachaise.
Blanche d’Antigny a inspiré des auteurs de livres, dont celui de Claude Blanchard : « Dames de cœur ». Elle aurait inspiré Emile Zola pour son roman « Nana ». Elle a eu une vie brève mais intense qui s’est terminée par une déception. Une jolie femme ne fait pas forcément une grande artiste. Il faudra attendre la seconde moitié du XXème siècle pour voir une femme très belle, être une artiste à succès. Au point qu’elle sera félicitée par De Gaulle, lui-même, qui la fera chevalière de la Légion d’Honneur, grâce aux rentrées de devises dues à ses films. Cette artiste, c’est Brigitte Bardot.
Dans le calendrier républicain, le 27 juin est le jour de l’absinthe (la plante).

GABRIELLA BATTAÏNI-DRAGONI
Gabriella Battaini-Dragoni est une femme politique italienne, originaire de Brescia où elle est née le 13 août 1957.
Elle a été secrétaire générale adjointe du Conseil de l’Europe depuis 2012, réélue en 2015.
En 1975, elle avait été diplômée de hautes études internationales de l’université de Nice. L’année suivante, elle obtient le diplôme de langues étrangères : anglais, anglo-américain, français.
A la conférence de Vienne (du 14 au 25 juin 1993), elle est à l’initiative sur le sujet des violences faites aux femmes et des droits de l’enfant. Parmi les priorités de Gabriella
Battaini-Dragoni, on trouve l’élaboration du budget des Etats membres. Vaste programme quand on sait, par exemple, ce qu’en fait Victor Orban, Premier ministre de Hongrie.
Autre priorité : faire respecter les droits humains et l’Etat de droit dans l’Union Européenne. Là encore, Orban n’en a que faire. C’est à se demander ce que fait la Hongrie dans l’UE ?
En 2001 elle est la première femme à être directrice générale au Conseil européen en charge de la cohérence sociale. Puis de 2003 à 2011, elle est responsable de l’Education, de la Culture, du Patrimoine, de la Jeunesse et des Sports. La palette est large, alors qu’il y a beaucoup à faire dans ce domaine en Europe.
Gabriella Battaini-Dragoni est une Européenne sincère et active.
Mais les institutions européennes comme la plupart des gouvernements laissent peu de place aux femmes, à part sur des sujets sociaux qui n’engagent pas l’UE dans le domaine international, même si Ursula von der Leyen est Présidente de la Commission européenne depuis 2019.
LISELOTTE HERMANN
Le 23 juin 1909, Liselotte Herrmann naît à Berlin.
C’était une militante communiste allemande, une résistante au IIIème Reich, qui a combattu le fascisme. Elle est issue d’une famille aisée et tolérante.
A 6 ans, elle entre dans une école privée de Berlin, puis en grandissant, s’intègre dans les Jeunesses communistes. Elle se lance dans des études de chimie à Stuttgart, puis à Berlin. Elle travaille dans un laboratoire.
Mais en 1933 (Hitler vient d’arriver au pouvoir), elle est renvoyée de l’université Friedrich Wilhelm car elle est membre des Jeunesses communistes allemandes depuis 1928 et du KPD (Kommunistische Partei Deutschlands = Parti Communiste Allemand) depuis 1931.
Après la naissance de son fils en 1934, elle travaille à Stuttgart avec son père dans un bureau d’études. Elle doit le faire sous un faux nom. Parallèlement, elle participe à des actions clandestines. Bien sûr, la jeune mère de famille s’élève contre l’avènement d’Hitler.
Liselotte, appelée Lilo, s’installe dans le Wurtemberg (sud-ouest de l’Allemagne) pour faire de la résistance. Elle fait passer des informations à l’étranger sur le réarmement de l’Allemagne.
La France a été avertie, mais n’a pas pris ces informations au sérieux. Arriva ce qu’il devait arriver : en décembre 1935, elle est arrêtée par la Gestapo. Elle subit un an et demi de garde à vue.
Le 12 juin 1937, Liselotte est condamnée à mort pour : « préparatifs en vue d’actes de haute trahison avec circonstances aggravantes ». On avait trouvé chez elle des plans d’usines d’armement qu’elle s’apprêtait à transmettre.
Elle est exécutée le 20 juin 1938 (3 jours avant son anniversaire). Elle est la première mère de famille exécutée sous le IIIème Reich.
Son fils Walter sera élevé par ses grands-parents.
Liselotte Herrmann a inspiré un poème à Friedrich Wolf (1888-1953), dramaturge allemand. Un film « die erste Reihe » (le premier rang) en 1987.
Avant 1989, plusieurs institutions de RDA, à Berlin, Erfurt, Iena, ont porté son nom. Mais il n’a pas été conservé après la réunification. Cependant, on a donné son nom à de nouvelles rues à Schwäbisch Hall (Bade-Würtemberg). A Stuttgart, une stèle a été érigée en 1981. Toujours à Stuttgart, le centre culturel s’appelle Lilo Herrmann.
En mars 2008, devant la maison où elle a habité et où elle a été arrêtée, a été placé un « Stolperstein » (un pavé) où son nom a été inscrit.
Dans le calendrier républicain, le 23 juin est le jour du mulet.

WINSTON CHURCHILL
Le 19 septembre 1946, Winston Churchill à l’université de Zürich, a prononcé un discours pour reconstruire la « famille européenne ».
Churchill pro-européen, à priori ce n’était pas évident. Il était plus tourné vers les Etats-Unis.
En 1944, quelques jours avant le débarquement, lors d’une énième dispute avec De Gaulle, n’avait-il pas dit : « Entre les Etats-Unis et l’Europe, je choisirai toujours le grand large ».
En réalité, malgré leur « mésentente cordiale », ces deux personnages, à très forte personnalité, s’estimaient et se respectaient.
À ceci près qu’en 1940, lorsque De Gaulle est arrivé à Londres, celui-ci n’était qu’un inconnu (général à 2 étoiles, fraîchement nommé sous-secrétaire d’Etat à la guerre, juste avant la débâcle de mai 1940), tandis que Churchill, député au Parlement britannique, avait déjà une carrière derrière lui. D’abord, il avait beaucoup bourlingué, comme militaire, comme journaliste.
C’est ainsi qu’en 1896, on le retrouve officier aux Indes, la « perle » de l’Empire britannique.
Né en 1874, Churchill participe en 1898 à la campagne au Soudan, comme journaliste .
En 1899 (du 11 octobre 1899 au 31 mai 1902), il est envoyé comme correspondant de guerre en Afrique lors de la guerre des « Boers » : paysans qui se révoltent contre le colonisateur britannique.
C’est en 1906 qu’il entre en politique et se fait élire député conservateur au nord-ouest de Manchester. Il entame une tournée en Angleterre, aux Etats-Unis, au Canada. En 1909, il est même ministre du commerce. S’il a des démêlés avec l’opposition travailliste, il en a aussi avec son propre parti. Une personnalité bien affirmée donc.
En 1911, il est désigné Premier Lord de l’Amirauté, ministre de la Marine en quelque sorte. Ce qui est une importante responsabilité pour une puissance maritime comme le Royaume-Uni.
La guerre qui éclate en août 1914, Churchill l’espérait un peu. Son souci était de combattre l’Empire ottoman qui contrôlait les détroits et l’est de la Méditerranée, donc la route des Indes via Suez. Il participe donc à une expédition aux Dardanelles (sortie de la mer de Marmara) en novembre 1914. Ce sera un cuisant échec et c’est à lui qu’on l’impute. Il en sera profondément traumatisé dira sa fille.
Le 17 juillet 1917, on est encore en pleine guerre, il devient ministre de l’Armement et de la Guerre. C’est aussi l’année de la révolution russe, dont il se méfie, n’ayant guère de sympathie pour les Bolchéviks.
Après la guerre, en 1921, il est secrétaire d’Etat aux colonies du Royaume-Uni qui a le plus grand empire colonial du monde. C’est aussi à ce moment-là que la SDN (Société Des Nations) donne mandat à son pays sur la Palestine (approximativement Israël actuel), la Transjordanie (Jordanie d’aujourd’hui), la Mésopotamie (à peu près Irak actuel). Le Royaume-Uni est donc très présent au Proche-Orient (La France a mandat sur la Syrie et le Liban).
Dans cet après-guerre, des territoires colonisés ont des velléités d’indépendance. C’est le cas de L’Inde. Churchill y est très opposé. Après la crise de Munich (30 septembre 1938) où Chamberlain (1er ministre britannique) et Daladier (Président du Conseil français) ont accepté les conditions d’Hitler et de ce fait, ont abandonné la Tchécoslovaquie, Churchill a fait cette analyse : « Vous aviez le choix entre la guerre et le déshonneur. Vous avez choisi le déshonneur et vous aurez la guerre ». Très prémonitoire !
Pourtant, son attitude vis-à-vis du nazisme a été quelque peu ambiguë. Comme beaucoup, il pensait que le nazisme serait un bon rempart contre le communisme. On est à l’époque de Staline. Il n’empêche que Churchill avait gardé une grande lucidité ; quand l’Angleterre pliait sous les bombes du « Blitzkieg » (Guerre-éclair) pendant l’été 1940, il a fait cette promesse aux Britanniques : « Je vous promets de la sueur, des larmes et du sang ». On ne pouvait pas l’accuser de démagogie !
Pendant ce même été 1940, il s’est rendu aux Etats-Unis pour convaincre Roosevelt, président des Etats-Unis de venir défendre la France. Là, Winston Churchill est victime d’une crise cardiaque. A ceux qui sont venus le soigner, il a immédiatement répondu : «Ne me dîtes pas de me reposer, je dois repartir, on a besoin de moi ». Et il est rentré à Londres par avion. Dans les années 40, les avions étaient encore loin d’offrir le confort actuel et la traversée de l’Atlantique était beaucoup plus longue. Non seulement, il ne s’est pas reposé, mais il a continué à fumer le cigare et à boire son whisky. Ce qui ne l’a pas empêché de vivre jusqu’à 91 ans (il est mort le 24 janvier 1965). Un vrai défi à la médecine, mais c’était le « vieux Lion » comme on le surnommait.
Après lui, le Royaume-Uni est entré dans la CEE (Communauté Economique Européenne) en 1970. Mais il faut reconnaître qu’il n’y a pas toujours joué le jeu. Même « grâce » à son Premier ministre Boris Johnson, il en est sorti le 31 janvier 2020. Il est fort possible que Winston Churchill se retourne dans sa tombe si on s’en réfère à son discours du 19 septembre 1946.
THABO MVUYELWA MBEKI
Le 18 juin 1942 est né Thabo Mvuyelwa Mbeki à Idutywa, dans le Transkei, province du Cap en Afrique du Sud.
C’est un homme d’Etat, membre de l’ANC (African National Congress) de 1997 à 2007, puis Président de la république Sud-Africaine de 1999 à 2008, après avoir
succédé à Nelson Mandela.
Ses parents étaient enseignants, membres de l’ANC et du parti communiste sud-africain. Ce qui était particulièrement osé au temps de l’apartheid. La langue naturelle de la famille est le xhosa (langue parlée dans l’est de la province du Cap). La jeunesse de Mbeki est influencée par des personnages mythiques comme Marx et Gandhi, dont les portraits sont affichés sur les murs de la maison.
Dès 1956, il adhère à la branche jeune de l’ANC, pour combattre l’apartheid. Il commence ses études à l’école locale. Puis il fait ses études secondaires à Loverdale dans la ville d’Alice (est de la province du Cap).
Mais en 1959, il est expulsé de l’école parce qu’il a été gréviste.
A 19 ans, en 1961 donc, il est en Angleterre où il étudie l’économie dans l’université du Sussex (près de Brighton).
Il en sort diplômé, en 1966. Il installe son quartier général de l’ANC à Londres. Là, il participe à sa première manifestation contre la République sud-africaine, aux mains des Afrikaners (Blancs issus de la colonisation par les Néerlandais puis les Anglais), en décembre 1961.
En 1966, il part en URSS, à l’école du parti communiste pour avoir une formation militaire à l’Institut Lénine de Moscou (1966-1969).
En 1971, il est secrétaire adjoint du conseil révolutionnaire de l’ANC, en exil à Lusaka (capitale de la Zambie). Il représente l’ANC auprès des gouvernements étrangers.
D’ailleurs, il a des bureaux au Botswana, au Swaziland, au Nigeria.
En 1974, il est de nouveau en Angleterre et se marie avec Zanele Dlamini, une féministe, avec laquelle, il aura 2 enfants.
En 1975, il se retrouve membre du comité exécutif de l’ANC. Après les émeutes de Soweto de juin 1976, il maintient la pression sur le régime sud-africain pour qu’il abandonne le pouvoir (les Blancs ne représentent que 10% de la population, mais ce sont eux qui font les lois et détiennent l’économie).
A la fin des années 70, Mbeki voyage aux Etats-Unis pour rencontrer les syndicats et devient conseiller d’Oliver Tambo, le président de l’ANC. Lorsqu’il revient à Johannesburg, il travaille avec Walter Sisulu (1812 -2003), un combattant anti apartheid.
Après l’assassinat de son frère au Lesotho en 1982, il devient chef des services d’information et de propagande anti apartheid en 1984. Cinq ans plus tard, il est chef des relations extérieures de l’ANC. Il fait des démarches pour que le gouvernement légalise ce mouvement et libère les prisonniers politiques. Au total, après l’arrestation de Mandela (9 août 1962), il aura passé 18 ans en exil. De retour d’exil, il participe aux négociations avec Frederik De Klerk, qui sera le dernier président blanc de l’Afrique du Sud. Lorsque Mandela est devenu président, Thabo Mbeki est désigné vice-président, avec Frederik De Klerk (un Noir, un Blanc). Après que De Klerk ait démissionné en 1996, Mandela délègue à Mbeki l’essentiel de l’exécutif et celui-ci en profite pour placer ses fidèles aux postes clés.
En juin 1999, Thabo Mbeki est élu président de le République d’Afrique du Sud et il nomme Jacob Zuma vice-président. Il a la lourde tâche de succéder à Mandela. Il doit faire face aux difficultés de satisfaire la population noire.
En avril 2005, il est quand même réélu, mais il congédie Zuma à cause de problèmes de corruption.
En 2007, il commence un processus d’amnistie pour les crimes politiques commis de 1994 à 1999 (beaucoup de Blancs ont été assassinés). La progression des inégalités ne favorise pas le processus de réconciliation nationale. Car la société sud-africaine est traversée par de profondes divisions raciales.
Mbeki a joué un rôle important dans l’Union africaine et a contribué à la paix au Rwanda, au Burundi et en RDC (République Démocratique du Congo, ex Zaïre). Il exerce une influence sur les pays en développement (en clair, ceux qui sont pauvres). Mbeki entame un dialogue avec Robert Mugabe, président et dictateur du Zimbabwe. Mais sa médiation échoue.
En Afrique du Sud, Mbeki apparaît arrogant et paranoïaque. Et malgré les volontés de réformes, la misère continue de progresser et le chômage atteint 40%. La criminalité reste importante et le sida fait des ravages. L’enseignement se dégrade et les inégalités s’accroissent, ce qui privilégie une nouvelle bourgeoisie « coloured ». Et les relations avec les Blancs restent difficiles.
Le 13 novembre 2007, c’est Zuma qui est élu président de l’ANC, marchepied pour la présidentielle.
D’ailleurs en 2008, Mbeki est menacé par des crises sociales. On lui reproche son imprévoyance, la dégradation des routes, du système hospitalier, des écoles.
En 2008, il doit faire face à une vague de violences contre les immigrés venus des pays voisins (surtout Zimbabwe) : meurtres, lynchages, pillages. Ces violences se produisent surtout dans les grandes villes comme Johannesburg (10,4 millions d’habitants), Le Cap (5 millions), Durban (3,7 millions). Par ailleurs, Mbeki a une vision personnelle de la pandémie du sida, dont il nie la transmission et préconise la simple douche pour s’en débarrasser. Pour lui, c’est le résultat de la pauvreté et de la colonisation.
Entre 2000 et 2 005, on estime à 330 000 les victimes du système de santé. Désapprouvé par son parti, Mbeki démissionne le 21 septembre 2008.
Le 9 mai 2009, Jacob Zuma est élu pour lui succéder. C’est une autre histoire qui commence.
Dans le calendrier républicain, le 6 juin est le jour du chariot.

SIMONE VEIL
Simone Veil (1927-2017), magistrate et femme politique française est née à Nice le 13 juillet 1927, d’une famille d’origine juive, fille de Yvonne et André Jacob.
Ce qui lui a valu d’être arrêtée avec sa famille par la Gestapo le 30 mars 1944, juste après avoir passé le baccalauréat. De là, elle et sa famille sont envoyées à Drancy et partent pour Auschwitz, le 13 avril 1944. Simone n’a pas encore 17 ans.
Elle restera à Auschwitz jusqu’au 8 janvier 1945, quand les nazis évacuent le camp, avant l’arrivée des troupes soviétiques (il sera libéré le 27 janvier). C’est alors que commence la « marche de la mort » pour rejoindre un autre camp à Glewitz. La marche se fait dans la simple tenue des déportés, dans le froid de janvier en Pologne, dans la neige (on ne parle pas encore de réchauffement climatique). Marche exténuante, où certain(e)s meurent ou sont exécuté(e)s sur place s’ils ralentissent la cadence.
Après avoir surmonté toutes ces épreuves, Simone Jacob épouse le 26 octobre 1946, un haut fonctionnaire, Antoine Veil (né en 1926).
Mais en 1952, elle est très marquée par le décès de sa sœur et de son neveu, dans un accident de la route. Cette sœur était pratiquement sa seule confidente sur les mois de déportation.
Malgré son époux qui préfèrerait voir son épouse se consacrer uniquement à son rôle de mère au foyer, elle entame une carrière de magistrate et de haut fonctionnaire, après avoir obtenu une licence en droit et le diplôme de l’Institut des Etudes Politiques (IEP). Elle est alors chargée de l’administration pénitentiaire.
En 1970, elle est la première femme secrétaire générale du Conseil supérieur de la magistrature. Sur le plan politique, lors de la mort du Président Pompidou (2 avril 1974), elle soutient Jacques Chaban-Delmas (1915-2000) pour l’élection présidentielle. Mais c’est Giscard d’Estaing (1926-2020) qui est élu et prend Jacques Chirac (1935-2019) comme Premier ministre.
Dans ce gouvernement, Simone Veil est nommée ministre de la santé et le restera dans le gouvernement suivant, celui de Raymond Barre (1924-2007). Elle est alors chargée de la loi sur l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Le but est de dépénaliser l’avortement, strictement réprimé jusque-là. Face à une assemblée législative, largement masculine et qui ne lui a pas épargné les quolibets et les insultes, la loi sur l’IVG est adoptée le 29 novembre 1974 et mise en application le 17 janvier 1975.
Dans la foulée, en 1977, elle fait passer une loi contre le tabagisme (pourtant elle-même est fumeuse).
En 1979, Giscard d’Estaing lui propose d’être tête de liste UDF (Union pour la Démocratie Française), parti présidentiel en vue des élections européennes qui, pour la première fois, se feront au suffrage universel direct. Elue, elle devient présidente du Parlement européen.
Pendant la campagne électorale, elle est attaquée par le Front National. Ce qui ne l’a pas déstabilisée. « Vous ne me faites pas peur, j’ai survécu à pire que vous. Vous n’êtes que des SS au petit pied », leur a-t-elle asséné.
En 1981, Simone Veil reçoit le prix international Charlemagne (créé par la ville d’Aix-la-Chapelle en 1949, pour des personnalités qui se sont engagées pour l’unification de
l’Europe). Malgré son passé, elle a été parmi celles et ceux qui ont contribué à la réconciliation entre la France et l’Allemagne.
Après son mandat de présidente du Parlement européen, elle reste députée et poursuit son action dans la vie politique européenne. Elle conduit le groupe sur la libre circulation en Europe. Elle soutient le fonds européen sur la liberté d’expression.
En 1993, Simone Veil revient dans la politique française. Elle est nommée ministre des Affaires sociales, de la Santé et de la Ville du gouvernement Balladur.
En 1996, elle signe un manifeste pour la parité. À ce moment-là, les femmes ne sont que 6% des élus dans les assemblées.
En 1998, elle est nommée membre du Conseil constitutionnel par René Monory (1923-2007), président du Sénat. Pour le référendum de 2005, sur le traité de Constitution européenne, elle fait campagne, en vain, pour le « oui ».
Malgré cet échec, un sondage IFOP de 2010, la désigne comme la femme préférée des Français. Et de 2001 à 2007, c’est elle qui préside la Fondation pour la mémoire de la Shoah.
Le 31 octobre 2007, elle publie une autobiographie « Une vie » qui est un succès de librairie et traduit en 15 langues. Elle en obtient le prix des Lauriers verts (créé en 2003).
Le 16 mars 2010, Simone Veil est élue à l’Académie française. Sur l’épée qu’elle reçoit et qui fait partie de la panoplie des Académiciens, sont gravés son numéro matricule de déportée (78651, tatoué sur son bras), la devise de la République française (« Liberté, Egalité, Fraternité ») et celle de l’Union Européenne (« Variatate Concordia »). Elle est reçue sous la Coupole de l’Académie française, le 18 mars 2010.
A la mort de son époux et de sa sœur en 2013, Simone Veil se retire de la vie publique.
En août 2016, elle est hospitalisée pour « détresse respiratoire ».
Elle s’éteint le 30 juin 2017 à son domicile de la place Vauban (VIIème arrondissement).
On peut se douter qu’une telle personnalité (ancienne déportée, magistrate, ministre, présidente du Parlement européen, académicienne) a connu de nombreux honneurs. Ainsi, dès 2006, elle a été faite Chevalier de l’ordre national du mérite.
Le 31 décembre 2008, elle devient Grand officier de l’ordre national de la Légion d’honneur.
Le 21 avril 2009, cette fois, elle est Grand Croix de l’ordre national de la Légion d’honneur.
Le 26 mars 2012, elle reçoit la Médaille d’honneur de la Santé et des Affaires sociales.
Simone Veil a aussi reçu de nombreuses décorations étrangères d’Europe, d’Afrique. Elle a été désignée « docteur Honoris Causa » de nombreuses universités : Princeton, Yale (Etats-Unis), Cambridge, Jérusalem, Edinbourg, Bruxelles, université américaine de Paris.
En juillet 2018, une pièce de 2 € a été émise à son effigie, puis de 10 centimes en septembre 2024.
On ne compte plus les établissements scolaires de la maternelle au lycée qui portent son nom, ainsi que des hôpitaux (Troyes, Eaubonne, Blois) et des facultés de médecine (Versailles). De même pour des rues et places à travers le pays. Plus original, un pont de Bordeaux porte son nom. A Poitiers, c’est un jardin. Une station de métro s’appelle désormais Europe – Simone Veil.
Le 26 juillet 2024, elle fait partie des 10 femmes les plus inspirantes lors de la cérémonie des Jeux Olympiques de Paris.
De nombreux ouvrages ont été édités à son sujet. Elle a aussi écrit : «Seul l’espoir apaise la douleur » et aussi : « Pour les générations futures ».
JEAN-FRANÇOIS PILÂTRE DE ROZIER
Le 15 juin 1785, Jean-François Pilâtre de Rozier est mort à Wimereux (Pas-de-Calais).
Il était né à Metz le 20 mars 1754, un vie courte donc.
C’était un scientifique qui fut le premier aéronaute de l’histoire, avec François-Laurent d’Arlandes (1742-1809).
Pilâtre est le fils d’un ancien militaire qui s’est installé aubergiste et de Magdeleine Wilmard.
A l’école, il est plutôt du genre étourdi et dissipé, il pense surtout à s’amuser et est quelque peu rebelle à l’étude. Il préfère nettement la chimie, l’histoire naturelle (qu’on appellerait biologie aujourd’hui) au latin. On veut faire de lui, un chirurgien.
A 18 ans, il va à Paris. Sa personnalité intéresse François XII, duc de la Rochefoucauld (1747-1827), homme politique et philanthrope qui le présente à Lavoisier (1743-1794), le grand chimiste, ainsi qu’à La Fayette et Déodat Gratet de Dolomieu (1750-1801) qui est géologue, minéralogiste, vulcanologue.
En 1780, Pilâtre est à Reims pour des présentations de physique, de chimie et d’histoire naturelle. Il réussit tellement bien qu’il est nommé à Paris aux cabinets de physique, chimie et histoire naturelle de Monsieur (frère du roi) qui est comte de Provence (et qui sera un jour Louis XVIII). Il sera son protecteur. Ce qui garantit qu’il n’aura pas de problèmes d’argent.
Pilâtre expérimente le masque à gaz, la bougie au phosphore, la teinture d’étoffe. Il fait des recherches sur la foudre, l’hydrogène.
L’année suivante, il crée le « musée de Monsieur », où il fait des expériences et donne des cours de sciences. Le musée est inauguré en décembre 1781.
C’est en septembre 1783 qu’a lieu le premier vol en montgolfière avec des êtres vivants : un coq, un canard, un mouton. On craignait les effets de changement d’altitude trop rapide (quelques centaines de mètres) ! Le but était de convaincre le roi pour qu’il accepte un vol avec des humains.
La montgolfière a été inventée dès 1740 par les frères Montgolfier (Joseph et Etienne).
En novembre 1782, ils ont cousu un globe de soie de 1 m3 , au-dessus d’un feu et le globe s’est soulevé.
Le 14 décembre 1782, ils ont conçu un globe de 3 m3 , chauffé depuis la nacelle attachée au sol, avec un mélange de paille humide, de laine et de papier. Le globe s’élève au-dessus de leur usine à Annonay (actuelle Ardèche).
Le 25 avril 1783, cette fois, c’est un globe de 800 m3 qui s’élève à 400 mètres. C’est le premier vol public.
Jusque-là, les frères Montgolfier ne voulaient pas qu’on connaisse leur secret.
Nouveau vol le 4 juin 1783. Il faudra 10 minutes d’ascension pour atteindre 1 000 mètres d’altitude, toujours avec un mélange de paille humide et de laine. ̈
Pilâtre de Rozier présent, est très intéressé. Mais une fois qu’il n’y a plus assez de chauffage, le ballon redescend et s’écrase….en prenant feu.
Les paysans témoins de la scène et qui n’ont jamais vu d’engin volant, croient au diable. Ils se précipitent avec leurs fourches pour lui faire un mauvais sort….Par contre, d’autres témoins authentifient l’exploit.
En août 1783, les frères Montgolfier présentent un projet d’aérostation à l’Académie des sciences.
Et le 27 août, un ballon de 4 mètres de diamètre décolle du Champ de Mars et se pose à Gonesse (actuel Val-d’Oise).
Le 19 septembre, de Versailles, part le premier vol habité, avec des humains, qui atterrit à la Butte aux Cailles (actuel XIIIème arrondissement).
Le 4 juin 1784, à Lyon, Elisabeth Tible est la première femme à voler en ballon.
Le 23 juin de la même année, un vol de 52 km est effectué à 60 km/h, à 3 000 mètres d’altitude. Ca devient sérieux !
Les techniques de chauffage progressent.
Le 1er décembre 1784, c’est le premier ballon à gaz. Ce qui permet à Pierre Blanchard, avec un Anglais John Jeffries de traverser la Manche, en partant d’Angleterre le 7 janvier 1785.
Le 15 juin, Pilâtre tente aussi la traversée, avec Pierre-Ange Romain. Ils décollent de Boulogne. Mais leur ballon prend feu et s’écrase, non loin de là, à Wimereux, tuant ses deux passagers. Pilâtre sera inhumé dans le cimetière de Wimille (actuel Pas-de-Calais).
Ces actes fous des premiers pionniers de l’aéronautique leur ont souvent coûté la vie. Ils peuvent apparaître dérisoires, et pourtant, grâce à eux, l’aviation et la conquête de l’espace ont, après eux, ont connu une croissance exponentielle, jusqu’à aujourd’hui. Et il y a fort à parier que les progrès ne s’arrêteront pas là, notamment en matière de sécurité, de protection de l’environnement.
Jean-François Pilâtre de Rozier n’a pas été oublié par la postérité. Une stèle a été érigée près du cimetière de Wimille, ainsi qu’un monument à Wimereux. A Metz, sa ville natale, son nom a été donné à une rue, ainsi qu’à Goin (Moselle), à Sarre-Union (Bas-Rhin), à Douai (Nord), à Orange (Vaucluse), au Havre (Seine-Maritime), à Tours (Indre-et-Loire). À la Rochelle, c’est un square, tandis que dans le XVIème arrondissement de Paris, c’est une allée. Le « Souvenir français » a fait ériger un monument à Voellerdingen (Bas-Rhin) en 1991.
Dans le calendrier républicain, le 15 juin est le jour de la verveine.
THÉROIGNE DE MÉRICOURT
Le 8 juin 1817, Théroigne de Méricourt est décédée à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière de Paris.
Elle était née Anne-Joseph de Méricourt, le 13 août 1762 à Marcourt (province de Liège). Elle a été une femme politique et une figure du féminisme de la Révolution. C’était donc une militante du droit des femmes.
Fille de laboureur aisé (on dit qu’un laboureur est aisé lorsqu’il dispose d’un cheval et d’une charrue), elle a 2 frères cadets : l’un né le 25 décembre 1764, l’autre né le 28 septembre 1767. Sa mère meurt peu de temps après, le 27 décembre 1767, alors qu’Anne-Joseph n’a que 5 ans. Elle est prise en charge par des tantes, puis envoyée dans un couvent.
A 12 ans, elle passe chez son père à Xhoris (province de Liège). Mal traitée par sa marâtre, elle s’enfuit pour être servante dans une maison bourgeoise à Sougné-Remouchamps (toujours dans la province de Liège).
17 ans, elle est remarquée par Mme Colbert, femme du monde d’origine anglaise. C’est elle qui lui fait vraiment son éducation : apprendre à lire, écrire, chanter. Anne-Joseph envisage alors d’être chanteuse à Londres. Séduite par un officier anglais, elle aura une fille, emportée par la variole en 1788.
De là, elle part en Italie où elle a de nombreuses aventures. Tellement qu’elle est atteinte par la syphilis. On la soigne avec…du mercure ! La médecine avait de ces remèdes ! Elle aura des relations financières – seulement ? – avec un vieux qui va se ruiner pour elle. A Gènes, elle entame une relation – probablement pas sexuelle puisqu’il s’agit d’un castrat, Giusto Fernando Tenducci. Il lui promet une belle carrière de cantatrice. Mais elle se fait avoir car le contrat était en sa défaveur.
Le 8 août 1788, elle apprend que Louis XVI avait convoqué les Etats généraux à Versailles (réunion des représentants des 3 ordres : clergé, noblesse, tiers-état). Ils n’avaient pas été réunis depuis 1614 !
De Rome, elle va à Paris où elle arrive en juin 1789. Anne-Joseph est attirée par la promesse de l’extension des libertés individuelles. Tout de suite, elle adhère aux idéaux de la Révolution.
Lorsqu’elle intervient à la tribune, elle est la seule femme. Pour l’occasion, elle s’est habillée en amazone (tenue féminine de cheval : jupe longue et étroite veste très cintrée).
Cette mode avait été lancée en 1767. Ses ennemis la font passer pour une bacchante (femme dévergondée, sans retenue) sanguinaire car elle est souvent habillée en rouge.
Elle passe l’été 1789 à Paris pour assister aux débats, notamment à la création de l’assemblée constituante le 17 juin (vote par ordre : clergé et noblesse ensemble contre tiers-état qui rassemble 95% de la population).
Le 20 juin, c’est le Serment du Jeu de Paume où il est décidé un vote par tête. Anne-Joseph assiste à tout cela. A Paris, elle rencontre des figures de la Révolution, comme Siéyès, Camille Desmoulins, Fabre d’Eglantine, auteur de « Il pleut bergère ». Ses amis l’appellent « Le belle Liégeoise ». Originaire de Terwagne, près de Liège le nom est francisé : elle devient Théroigne de Méricourt. Avec Olympe de Gouges et le marquis de Condorcet, elle soutient les clubs patriotiques mixtes. Car pour elle, les femmes doivent avoir les mêmes droits naturels que les hommes. Evidemment, elle est la cible des contre-révolutionnaires. Un journaliste royaliste va même jusqu’à la désigner « la catin du peuple ».
Le 5 octobre, elle est parmi ces nombreuses femmes affamées (des harpies, dira Chateaubriand) qui marchent sur Versailles (18 km à pied, ça ne faisait pas peur à cette époque) pour ramener « le boulanger, la boulangère et le petit mitron » (en clair la famille royale) à Paris- qui ne pourront fournir instantanément du pain à tout le monde. D’ailleurs, ça ne se passe pas trop bien, car deux gardes de la reine sont tués. Courageusement, Marie-Antoinette va sur le balcon, affronter maladroitement la foule agressive, pour dire une bêtise. Elle aurait dit : « ils veulent du pain ! Qu’on leur donne de la brioche ! »
Quoi qu’il en soit, le 6 octobre, on ramène la famille royale, sous bonne escorte. On l’enferme dans le palais des Tuileries. Le roi est donc prisonnier de son peuple. C’est une nouvelle étape de la Révolution.
A partir de 1791, Théroigne est l’objet d’une campagne de calomnies. On lui fait une réputation de femme sulfureuse. Après les journées d’octobre 1789, avec d’autres, elle est menacée par une instruction judiciaire. Elle préfère quitter Paris pour se rendre près de Liège. Mais l’histoire ne s’arrête pas là : elle est enlevée par un groupe d’émigrés royalistes.
Ils la livrent aux Autrichiens qui l’enferment dans une forteresse du Tyrol (Kufstein). C’est en juillet 1791 qu’elle est remise en liberté et se retrouve à Paris à la fin de cette année. Calomniée, cette fois, elle est considérée comme une héroïne. Les gens sont versatiles.
Lorsque le 26 janvier 1792, elle arrive au club des Jacobins, en s’affirmant républicaine, contre les royalistes, le parti des aristocrates, et même contre la bourgeoisie qui veut cantonner la femme au foyer, elle fait un triomphe.
Le 6 mars 1792, avec Pauline Léon (révolutionnaire qui avait participé à la prise de la Bastille), elle est à l’origine d’une pétition pour avoir le droit de former une garde nationale féminine.
Dans un discours du 25 mars, elle veut que les citoyennes aient le droit au port d’armes et s’organisent. « Brisons nos fers…. » clame-t-elle.
Théroigne participe à la prise des Tuileries, le 10 août 1792. Mais comme elle ne veut pas contribuer à la guerre civile, elle préconise l’apaisement. Seulement voilà, le 15 mai 1793, elle est accusée de soutenir les Girondins. C’est plus que les Jacobins ne peuvent accepter. Leur vengeance n’est pas que verbale. Ils la dénudent, lui enlèvent sa culotte et….la fessent publiquement. C’est une humiliation dont elle aura du mal à se remettre. Elle sombre dans le délire de persécution, dans la peur d’être guillotinée. En outre, elle souffre de plus en plus de sa syphilis.
Au printemps 1794, son frère la fait interner. Le 20 septembre 1794, elle est déclarée folle et envoyée à l’hôpital de la Salpêtrière. Elle y est très agitée, se livre à des rites de souillure, se verse de l’eau glacée. Elle restera 23 ans à l’asile (une autre déclarée folle aussi, sera à l’asile 30 ans au XXème siècle : Camille Claudel !).
Elle s’éteint le 8 juin 1847.
Qu’a laissé Théroigne de Méricourt à la postérité ? Pour Lamartine, ce fut une aventurière, une femme impure, punie par des gens plus atroces qu’elle.
En1857, les frères Goncourt en font une héroïne qui brandit la mort. Chacun s’accorde pour affirmer que c’est une des premières féministes ; elle a inspiré les peintres, les poètes, les artistes. C’est Théroigne de Méricourt qui aurait servi de modèle pour le tableau d’Eugène Delacroix : « La liberté guidant le peuple »
Aujourd’hui, on aurait plutôt besoin d’une héroïne cherchant le peuple !. Elle a inspiré Baudelaire pour « Les fleurs du mal ».
En 2011, elle était le sujet d’un roman de Philippe Séguy : « Embrasser la liberté sur la bouche ». Elle apparaît dans le « Napoléon » d’Abel Gance de 1935.
En 1988-1989, M6 a diffusé un téléfilm «Théroigne de Méricourt, l’Amazone rouge » de Miguel Courtois. Dans l’émission « Secrets d’histoire » de Stéphane Bern du 12 juillet 2016, sur F2, elle fait partie de « Les femmes dans la Révolution ».
Le terme de féminisme n’apparaît qu’en 1837. Manifestement pour les historiens, Théroigne de Méricourt en fait partie. Une stèle, en son souvenir, a été érigée dans son village de Marcourt et à Liège, une passerelle sur la Meuse porte son nom.
Depuis 2005, une rue porte son nom à Paris, puis une avenue à Montpellier. Au musée Jacquemard-André trône un buste de Théroigne, fait par Joseph Chinard (1756-1813). De nombreux portraits la représentent.
Dans le calendrier républicain, le 8 juin est le jour de la fourche.
NICOLE GIRARD MANGIN
Le 6 juin 1919, Nicole Girard-Mangin est décédée à Paris.
Elle était née le 11 octobre 1878, à Paris également. Elle a été la seule femme à avoir exercé dans l’armée, pendant la guerre de 1914-1918.
Elle est originaire de la petite bourgeoisie, de Véry-en-Argonne (Meuse). Son père avait été instituteur à Suippes (Marne), puis il s’installe à Charenton-le-Pont (Seine-et-Oise,
actuellement Val-de-Marne), pour être négociant en champagne.
Nicole va à l’école de Charenton, puis au lycée Fénelon à Paris où elle obtient le certificat d’études supérieures de physique, de chimie et biologie (PCN).
À partir de 1896, elle fait des études de médecine à la faculté de Paris.
En 1899, elle est externe aux hôpitaux de Paris.
La même année, elle se marie avec André Girard, arrête ses études et donne naissance à un fils, Etienne. Elle s’installe à Saumur (Maine-et-Loire) pour exploiter le vignoble et vendre le vin mousseux.
Mais en 1903, c’est le divorce et Nicole reprend ses études de médecine.
En 1909, elle présente une thèse sur les poisons cancérigènes et donne des cours à la Sorbonne.
En 1910, avec un confrère, elle représente la France au congrès international de médecine de Vienne.
Puis en 1914, elle est à la tête du dispensaire antituberculeux de l’hôpital Beaujon, situé à Clichy (Seine-et-Oise actuellement Hauts-de-Seine). Elle y fait des recherches sur le cancer et la tuberculose.
En 1914, elle est mobilisée. Avec son patronyme Girard-Mangin, l’administration a fait l’erreur de la prendre pour un homme. Elle est affectée dans un hôpital de l’arrière à Bourbonne -les- Bains (Haute-Marne). Là, on s’aperçoit que c’est une femme !! Ce qui sème un certain trouble.
Mais on a besoin de tout le monde et il est reconnu que Nicole Girard-Mangin est un bon médecin. On peut donc l’envoyer au front… et rémunérée comme un infirmier ! Il faut attendre 1916 pour qu’elle soit reconnue médecin d’état-major. Elle est affectée dans le secteur de Verdun. Comme on n’a pas d’uniforme à lui donner, elle hérite d’un uniforme britannique, avec la casquette. Ce qui finalement l’a beaucoup amusée.
Elle racontera plus tard qu’elle a passé des heures à dormir sur un brancard. Mais l’uniforme britannique avait l’avantage d’avoir de nombreuses poches pour y mettre une lampe, du sucre, du chocolat, un briquet, un couteau…et des caducées.
Lors de la bataille de Verdun qui a débuté le 21 février 1916, elle soigne et opère à tour de bras, de jour, comme de nuit. Elle a même été blessée au visage en évacuant des blessés. Elle parcourt le front en camionnette, accompagnée d’un brancardier et d’un infirmier.
Le 25 février 1916, le journal de gauche « L’œuvre » la reconnaît et elle est encensée par la presse pour son action. Envoyée dans le secteur de la Somme, où on l’imagine, elle est bien accueillie. A l’hôpital de Moulle (Pas-de-Calais), elle dirige le service de traitement des tuberculeux. Puis elle sera à Ypres (Belgique) et à l’hôpital Edith Cavell à Uccle (Belgique également) pour former des infirmières, visiter et opérer des malades.
Après la guerre, elle s’occupe de la grippe espagnole qui fait de nombreuses victimes.
Lorsqu’elle redevient civile, elle ne recevra aucun honneur, ni aucune décoration ! On est encore à l’époque – il y a un siècle – où on a du mal à reconnaître une femme active, compétente et courageuse !
Dans le calendrier républicain, le 6 juin est le jour du pavot.
VAILLANT LE PIGEON VOYAGEUR
Le 4 juin 1916, en pleine bataille de Verdun, le commandant Sylvain Eugène Raynal, commandant du Fort de Vaux, cerné par les Allemands, tente une dernière chance en envoyant un message par le pigeon voyageur Vaillant.
Cette bataille a commencé le 26 février 1916. Cela fait presque 2 ans que la guerre dure, sans qu’un camp n’ait pris le dessus sur l’autre, tout en faisant des millions de
victimes.
Aussi le général allemand Falkenhayn décide-t-il une attaque décisive dans l’espoir de mettre une fin victorieuse à cette boucherie. Il porte son effort sur Verdun qui est une position stratégique : prendre Verdun permettrait de marcher sur Paris.
Son but est de « saigner à blanc l’armée française ». Donc, à partir de ce 26 février, il pilonne les forts de Douaumont et de Vaux sous un déluge d’obus. Au total, cette bataille qui va durer jusqu’au 23 décembre, fera 700 000 victimes (morts, blessés, disparus), avec un bilan à peu près équivalent dans chaque camp : 362 000 victimes pour la France, 337 000 pour l’Empire allemand.
Cette guerre est une effroyable boucherie, puisqu’on se bat aussi du côté de la Somme de juillet ànovembre.
L’attaque du village de Vaux commence le 6 mars et il tombe le 2 avril et disparaît de la carte. Quant au fort, il subit des bombardements et des assauts du 2 au 7 juin. Dans ce fort, il y a 500 hommes, sous la responsabilité du commandant Sylvain Raynal. Celui-ci ayant été blessé sérieusement, ayant des difficultés pour marcher a repris du service dans ce fort le 24 mai 1916. On a besoin de tout le monde…
Le 4 juin, Raynal dispose en plus de 500 hommes, de 4 pigeons…et cocker ! Il faut imaginer ce que cela représente dans des galeries de 1,70 m. de hauteur et de
1,20 m. de largeur. Galeries où l’ennemi a réussi à pénétrer. On s’y bat au lance-flammes, à la baïonnette (appelée Rosalie), voire à la pelle à faire les tranchées. Sans compter qu’il y fait très chaud et qu’à cause des bombardements, il n’y a plus d’électricité, le téléphone est coupé. Le moindre bruit résonne (si un jour, vous visitez, demandez au guide de simplement laisser retomber une plaque d’acier !). Toujours à cause des bombardements, les citernes n’ont plus d’eau. Les soldats meurent de soif et en sont réduits à boire leur propre urine.
Le 2 juin, le commandant Raynal envoie un premier pigeon, où il demande un tir d’artillerie sur les Allemands qui tiennent le fort. Le pigeon arrive blessé et il a perdu sa bague. Donc le message est perdu. Deux autres pigeons sont envoyés pour informer de la situation. Ils n’arriveront pas à destination.
Le 4 juin, dans la fumée et les gaz asphyxiants, le dernier pigeon, appelé Vaillant, prend son envol au milieu des tirs ennemis. Lorsqu’il arrive avec le message pour demander un dégagement du fort, il meurt asphyxié. Malgré cette information, le dégagement échoue.
Le commandant Raynal se rend le 7 juin à 6h30. Face à leur courage et à leur résistance, les Allemands rendent les honneurs aux 250 survivants, devenus de véritables fantômes.
Le fort ne sera libéré qu’en septembre 1916 par le général Mangin.
Quant à Vaillant, il reçoit une bague d’honneur avec citation à l’ordre de la nation. Cela peut paraître dérisoire, mais en ces temps de violence, les humains s’accrochent à tous les symboles.
En ce qui concerne Raynal, il recevra la Légion d’honneur (10 juillet 1916), la Croix de guerre 1914-1918 et d’autres distinctions pour ses activités antérieures.
Aujourd’hui, le fort de Vaux est un monument historique qui se visite, ainsi que celui de Douaumont. L’ensemble Vaux-Douaumont fait partie de la communauté de communes de Verdun.
Dans le calendrier républicain, le 4 juin est le jour de l’œillet.
THIBAUD IV DE CHAMPAGNE
Le 30 mai 1201 est né à Troyes Thibaud Ier de Navarre, plus connu sous le nom de Thibaud IV de Champagne ou encore Thibaud le Chansonnier.
Il a été aussi un des plus célèbres trouvères (poètes et compositeurs). Le trouvère est la version langue d’oïl, du troubadour, version langue d’oc.
Thibaud IV est le fils de Thibaud III et de Blanche de Navarre, régente jusqu’à la majorité de son fils, le père étant mort quelques jours avant la naissance de son fils, le 24 mai 1201.
Celui-ci est alors confié à Blanche de Castille, épouse du roi Louis VIII et mère du futur Louis IX, qu’on appellera Saint-Louis. Vous me suivez ?
De 1216 à 1221, le comté de Champagne du jeune Thibaud est revendiqué par Erard de Brienne, seigneur de Ramerupt (actuellement dans l’Aube) et Venizy (actuellement dans l’Yonne). Il a été sauvé par l’intervention du roi Philippe IV Auguste (1165 – 1223). Ce qui permet de conserver son comté, en versant quand même une indemnité à Erard….
En 1224, Thibaud participe à la campagne de Louis VIII (1187 – 1226) contre les Anglais. L’année suivante, il est chargé de recevoir Raymond VII, comte de Toulouse au concile de Bourges, pour décider une expédition contre les Albigeois (hérésie cathare dans le sud du royaume).
Celle-ci aura lieu en août 1226. L’Eglise ne rigolait pas avec ceux qui s’écartaient du dogme.
Mais Thibaud lâche le roi, on se doute qu’il est mécontent de cette trahison. C’est quand même lui qui sera le négociateur lors du traité de Paris de 1229 qui met fin à la croisade des Albigeois et permet de rattacher le sud du pays au royaume (en gros l’Occitanie actuelle).
A la mort de Louis VIII (novembre 1226), Thibaud et ses amis barons sont opposés au futur roi Louis IX qui n’a que 12 ans et à sa mère, la régente Blanche de Castille. Comme la vie n’est pas un long fleuve tranquille, il se réconcilie avec Blanche. Ce qui lui vaut l’hostilité de ses anciens amis qui vont jusqu’à dire que Blanche est la maîtresse de Thibaud. Les gens sont méchants….Et en plus, ils dévastent le comté de Champagne.
Et finalement, c’est la paix en 1230.
Trois ans plus tard, Thibaud doit faire face à une nouvelle opposition, quand il fait venir Alix de Champagne-Jérusalem.
Elle est la fille d’Henri II de Champagne (1196 – 1247), roi de Jérusalem. Il souhaite qu’elle lui succède au comté de Champagne.
Mais devant une telle opposition, en 1234, elle renonce…contre argent bien sûr.
Le 7 avril 1234, c’est la mort de Sanche VII, roi de Navarre qui n’a pas d’héritier. Les Navarrais font alors appel à Thibaud de Champagne qui est couronné le 5 mai 1234 à Pampelune. Il signe des traités avec la Castille, l’Aragon et l’Angleterre. Ce qui lui permet de renforcer sa couronne. En même temps, il gouverne avec les nobles de Champagne, en échange d’argent et de terres, tout en jurant fidélité aux « fueros » (respect des coutumes et privilèges d’un lieu).
Thibaud négocie le mariage de sa fille Blanche de Champagne avec Alphonse IX le Sage (prince et chroniqueur) en 1236. Alphonse la croyait stérile, alors qu’elle n’avait que 10 ans lors du mariage (ça hurlerait aujourd’hui du côté des féministes et peut-être pas seulement d’elles!).
Puis en 1238, il dirige la croisade dite des barons, lancée par le pape Grégoire IX, pour protéger Jérusalem. Il embarque à Aigues-Mortes (actuellement à la pointe sud du département du Gard) et arrive à Saint-Jean d’Acre le 1er septembre 1239. A part prendre Ascalon et Gaza, cette croisade n’a pas donné grand-chose, sans doute à cause d’une mésentente entre les barons. Néanmoins, on dit qu’il en aurait rapporté la rose de Provins et le cépage chardonnay…On dit tellement de choses.
C’est à Pampelune qu’il meurt le 7 juillet 1253, au retour d’un voyage en Champagne. Il est enterré dans la cathédrale de Pampelune. Thibaud IV de Champagne avait un talent de poète et à sa cour, la musique a été florissante. Il a protégé des écrivains Chrétien de Troyes (poète, romancier, trouvère). Il a composé des chansons, des poésies. Des peintres ont décoré les palais de Troyes et de Provins (Seine-et-Marne). En avance sur son temps, il a écrit les droits et libertés du royaume.
Dans le calendrier républicain, le 30 mai est le jour de la fraise.
MATHIAS RUST
Le 28 mai 1987, un petit avion de tourisme monomoteur Cessna 172 atterrit à Moscou, en bas de la place Rouge, au pied du Kremlin, à 19heures 24.
Il était piloté par un jeune aviateur allemand, Mathias Rust, né le 1er juin 1968 à Wedel (près de Hambourg). Il avait bricolé son appareil, en remplaçant les sièges passagers par des réservoirs de carburant, car il a prévu un long périple.
Le 14 mai 1987, il décolle de l’aéroport d’Ütersen, à proximité de Hambourg et qui est très fréquenté. Il part pour les îles Féroé. De là, il se dirige vers Keflavik, au sud-ouest de l’Islande. Puis il revient vers l’est pour aller à Bergen (Norvège) puis Helsinki.
Le 18 mai à 12 heures 30, Mathias Rust décolle d’Helsinki en direction de l’URSS, en volant à basse altitude pour éviter les radars. Il a bien été repéré par des Mig soviétiques, mais curieusement ils l’ont laissé tranquille.
A 19 heures 24, exactement, il arrive à la verticale de la place Rouge à Moscou. Il fait deux boucles au-dessus et se pose sur la place Vassili Spusk, juste en bas de la place Rouge, derrière la cathédrale Basile le Bienheureux, sous le regard médusé des badauds moscovites. A son arrivée, on se précipite vers lui, il doit signer des autographes.
Or, en ce 18 mai, c’était le jour de fête des garde-frontières. Son objectif ? Faire un geste spectaculaire pour la paix dans le monde, à une époque où on est encore dans le contexte de guerre froide. Désormais, fini de plaisanter : Mikhaïl Gorbatchev, encore Secrétaire général du PCUS prend des mesures. Il limoge Sergueï Sokolov, le ministre de la Défense et le responsable de la défense aérienne, Alexander Koldunov. C’était aussi l’occasion de se débarrasser d’opposants à sa politique de « perestroïka » (reconstruction) et de « glasnost » (transparence). Près de 2 000 officiers sont également visés par cette mesure.
Evidemment, Mathias Rust est arrêté, rapidement jugé et condamné à 4 ans de travaux forcés, pour non-respect des règles de l’aviation internationale et franchissement illégal de la frontière soviétique.
Il s’en tire bien, puisque le 3 août 1988, il est libéré. Il est vrai que les conditions de détention ont été particulièrement difficiles : il a perdu 10 kg et souffre de problèmes intestinaux.
Revenu en Allemagne, il doit faire un service d’utilité civique. Mais voilà que cette fois, ce ne sont pas les intestins qui sont dérangés mais c’est le cerveau : il poignarde une puéricultrice ! Il écope de 4 ans de prison. Mais là encore, il n’accomplit pas toute sa peine : il est libéré au bout de 15 mois.
En 1994, il a l’intention de revenir en URSS pour visiter un orphelinat dont il était devenu le parrain. Mais, pendant 2 ans, on perd sa trace, il a disparu. Certains affirment qu’il se serait mué en vendeur de chaussures à Moscou. Rien n’est sûr.
En 1996, il revient en Allemagne se met à la philosophie hindoue. La raison ? Il est fiancé avec la fille d’un commerçant indien.
Mais sa vie désordonnée se poursuit, car en 2001, il est condamné à une amende de 10 000 Deutsch Mark pour vol à l’étalage, amende ramenée à 600 DM En 2002, il lance un laboratoire d’idées, ce qu’on appelle un « think tank ». Il veut trouver des solutions non violentes pour résoudre les conflits. Noble idéal.
Mais en 2005, il retombe dans ses travers et il est condamné à 1 500 € d’amende pour fraude au poker dont il était devenu joueur professionnel. Dès lors, il s’exile en Suisse et y travaille dans une compagnie financière.
C’est le parcours extravagant d’un aviateur amateur qui a accompli un exploit, mais qui a fini dans la délinquance.
Dans le calendrier républicain, le 28 mai est le jour du serpolet.
ISADORA DUNCAN
Le 26 mai 1877 est née Isadora Duncan à San Francisco.
Elle est la dernière d’une fratrie de 4 enfants. Son père est ruiné à cause de la faillite de sa banque où il travaille et a une maîtresse, la poétesse Ima Coolbrith.
Sa mère, Mary s’installe alors, avec ses enfants, à Oakland (dans la baie de San Francisco) en 1879 et travaille comme professeure de musique, elle donne des cours
de piano à des enfants. Isadora va à cette école, mais abandonne vite.
Isadora Duncan va révolutionné la danse en s’inspirant des figures de l’Antiquité grecque. Elle s’appuie sur deux grands principes : liberté d’expression, spontanéité. On peut dire qu’elle est à l’origine de la danse contemporaine.
Elle a fondé plusieurs écoles de danse aux Etats-Unis, en Europe, en Russie. De caractère indépendant, le système scolaire ne lui convient pas.
Comme la famille est pauvre, Isadora, qui n’a que 12 ans et sa sœur donnent des cours de danse aux enfants de leur quartier à partir de 1889 : elles enseignent la valse et la polka.
En 1895, Isadora est membre de la compagnie de théâtre « Agustin Dely » (dramaturge, directeur de théâtre à New-York). Mais elle est déçue par l’ambiance et en 1899 part pour l’Europe : Londres, Paris où elle connaît un grand succès et se fait remarquer dans les salons artistiques.
À Paris, l’ambiance bohème du quartier Montparnasse ne lui plait pas trop.
Malgré tout, en 1905, elle s’installe rue de Varenne où elle a pour voisin Rodin qu’elle avait rencontré quelques années auparavant. Là, elle crée une école de danse et y restera jusqu’en 1908.
En 1909, Isadora emménage dans 2 grands appartements de la rue Danton (VIème arrondissement) et y installe une académie de danse : danses pieds nus, longues écharpes voyantes, techniques grecques. C’est sa façon de s’opposer aux styles rigides de l’époque.
En 1913, est créé le théâtre des Champs Elysées. A l’entrée, le sculpteur Bourdelle y grave son portrait. Elle s’installe à Meudon (Seine-et-Oise, actuellement Hauts-de-Seine) pour ouvrir une école de danse.
Mais le 9 avril 1913, c’est le drame : ses deux fils, Deirdre (né le 14 septembre 1906) et Patrick (né le 1er mai 1910) et leur nourrice se noient dans la Seine, à la suite d’un accident (la voiture tombée en panne, n’avait pas été calée et a dévalé vers le fleuve). Dévastée, elle part en voyage en Italie et tente de se consoler dans les bras d’un riche aristocrate italien avec qui elle a un enfant le 1er août 1914. Celui-ci ne vivra que quelques heures.
Isadora est très marquée par ces décès. Alors, elle se retire à Deauville en automne 1914, puis part à Corfou (Grèce) et ensuite à Viareggio en Italie (côte Tyrrhénienne) où elle a une relation avec l’actrice Eleonora Duse (1858 – 1924).
En septembre 1918, elle rencontre l’aviateur Roland Garros qui tombe au combat le 5 octobre 1918.
En 1922, intéressée par l’expérience sociale et politique de la nouvelle URSS, elle se rend à Moscou. Elle y rencontre le jeune poète (il a 18 ans de moins qu’elle) Serguei Essenine.
Très vite, ils se marient en mai 1922. En fait, c’est une relation tumultueuse à cause de la dureté de la vie en URSS. En outre, il ne parle pas anglais et elle ne parle pas russe. En 1924, elle revient en Occident, accompagnée de Essenine. Mais lui, alcoolique, sujet à des accès de rage où il casse tout, revient à Moscou, où il est mis dans une institution spécialisée.
Le 28 décembre 1825, il se suicide à l’hôtel d’Angleterre de Leningrad. Tout le monde n’est pas d’accord sur la version du suicide…
Revenons à Isadora qui a une vie privée peu conventionnelle. Bisexuelle, elle a une longue relation avec la poétesse hispano américaine Mercedes de Acosta (1892-1968). Puis une autre avec une écrivaine américaine, Natalie Barney (1876-1972). Elle ne se limite pas aux femmes, elle aura aussi une liaison avec le dessinateur et peintre français, Jules Grandjouan (1875 – 1968). Puis encore avec Paris Singer (1867-1932), le grand industriel de la machine à coudre qui lui fait aménager l’hôtel de Coulanges, situé place des Vosges (IIIème), où Isadora peut préparer une chorégraphie.
C’est à Nice qu’Isadora Duncan meurt le 14 septembre 1927. Son long foulard, comme elle aimait en porter, se prend dans une roue de la voiture qui la transporte. Elle est éjectée, tombe sur la route et meurt sur le coup.
Cette grande artiste, très indépendante, qui a bouleversé la danse, a eu une vie personnelle tourmentée et parfois dramatique. Elle a écrit un ouvrage sur la danse, paru en 1927.
Elle a aussi écrit « Ma vie », paru en 1928. Isadora Duncan a été l’objet de nombreux films, entre 1925 et 2019, ainsi que de téléfilms.
L’écrivain américain Dos Passos (1896-1970) a fait sa biographie.
En 1987, le chanteur français Kent l’a chantée, ainsi qu’Hubert-Félix Thiéfaine en 1993.
Paris a donné son nom à une allée du XVème arrondissement. La ville d’Evry (Essonne) en a fait de même pour son centre culturel. Les astronomes ont donné son nom à un des cratères de Vénus.
Dans le calendrier républicain, le 26 mai est le jour du fromental (plante fourragère).
MAIA SANDU
Le 24 mai 1972 est née Maia Sandu à Risipeni, en Moldavie, à une époque où ce pays était une des 15 républiques de l’URSS, maintenant indépendante depuis le 27 novembre 1991.
La Moldavie est divisée en deux par le fleuve Dniestr. A l’ouest (rive droite), c’est la partie roumanophone, ancienne province de la Roumanie. A l’est, c’est la Transnistrie
(au-delà du Dniestr donc rive gauche et qui est de culture slave (langue russe). Ce pays (33 800 km2 et 2,7 millions d’habitants) dans son ensemble est coincé entre la Roumanie (membre de l’UE depuis 2007 et de l’OTAN depuis 2004) et l’Ukraine en guerre depuis 2022 et n’a aucune ouverture maritime directe. Il n’y a accès que par le delta du Danube, dont il est riverain sur à peine 1 km!
La Moldavie est peuplée de 82% de Moldaves, 6,6% d’Ukrainiens, 4,5% de Gagaouzes (peuple autonome du sud, probablement descendants de Turcs seldjoukides), 4% de Russes.
Avant d’aller à Harvard, Maia Sandu a mené de 1995 à 1998, des études d’économie dans son pays, puis jusqu’en 2005, elle a travaillé au bureau de la Banque mondiale en Moldavie.
En 2006, elle passe à la direction générale des politiques de développement économique et en 2007, elle est coordinatrice du PNUD (programme des Nations Unies de Développement en Moldavie).
Elle continue sa progression, puisque de 2010 à 2012, elle est conseillère à la Banque mondiale à Washington, pour les relations avec l’ancien bloc de l’est et l’ex URSS. Son expérience sera très utile pour la Moldavie dans les relations compliquées avec la Russie de Poutine.
Elle a été élue Présidente de la République de Moldavie le 15 novembre 2020 avec 55,33% des suffrages, elle est la première femme Présidente en Moldavie puis réélue le 3 novembre 2024.
Auparavant, elle avait été ministre de l’Education du 24 juillet 2012 au 30 juillet 2015 et Première ministre du 8 juin 2014 au 14 novembre 2019.
Jusqu’en 2015, elle fait partie du PLDM (Parti Libéral Démocrate de Moldavie), puis du PAS (Parti Action et Solidarité), est diplômée de l’université John Kennedy de Harvard, dans le domaine de l’économie.
Sur un plan personnel, c’est une chrétienne orthodoxe. Sa mère était professeure de musique et son père vétérinaire. Elle a une sœur parfaitement polyglotte (roumain, anglais, russe, espagnol).
En 1992, ce pays a rejoint le Conseil européen nord-atlantique. Mais étant un pays neutre, il ne peut adhérer à l’OTAN. Par contre, il envisage d’intégrer l’UE, puisque le 1er décembre 2016, la présidente signe un accord d’association.
Jusqu’en 2023, la Moldavie a fait partie de la CEI (Communauté des Etats Indépendants, créée le 8 décembre 1991). La CEI qui ne comprend plus que 9 membres, a pour but de préserver des liens entre les anciennes républiques de l’URSS.
Du 24 juillet 2012 au 30 juillet 2017, Maia Sandu est ministre de l’Education (une durée qui doit faire rêver nos ministres de l’Education nationale). Pour combattre la corruption (certains « achètent » les résultats), elle fait installer des caméras dans les centres d’examen du bac.
En mai 2016, elle est présidente du PAS qui a signé un accord avec le PLDM en septembre 2014, pour former une coalition pro-européenne.
Aux élections présidentielles d’octobre 2016, elle est donc battue par le prorusse Igor Dodon.
Mais aux élections législatives du 24 février 2019, le PAS et son allié le PLDM forment une plateforme « Vérité et Dignité », arrivent 3èmes, avec 26,14% des voix. Ce qui ne leur donne que 26 députés. Mais un évènement va changer la donne. L’oligarque ukrainien de Roumanie, Vladimir Plakhtotnouk qui est accusé d’avoir détourné 1 milliard de dollars, est en fuite.
Et le 8 juin 2019, désignée Première ministre, elle forme un nouveau gouvernement. Le lendemain, Igor Dodon est suspendu (il avait refusé de valider des ministres pro européens). C’est une dissolution – on connaît ça – suivie d’élections le 6 septembre 2019….et d’une crise politique !
Le 13 novembre, Ion Chicu doit former un autre gouvernement. Tandis que Maia Sandu est candidate à la présidentielle du 1er novembre 2020, face à….Dodon. Cette fois, elle arrive en tête et au second tour, elle l’emporte avec 57,7% des suffrages, surtout grâce à la diaspora moldave. Pro européenne, elle a la réputation d’être incorruptible. Le problème est que la majorité au Parlement est prorusse.
Elle demande la démission du gouvernement d’Ion Chicu, le 23 décembre 2020.
Le lendemain, elle est investie Présidente et sa fonction débutera le 1er janvier 2021. Elle prend Aureliu Clocoi comme 1er ministre par intérim. En attendant de charger Natalia Gavrilita de former un nouveau gouvernement…qui sera invalidé le 23 février par la Cour constitutionnelle.
Le 16 mars, elle nomme Igor Grosu du PAS qui n’a pas la confiance du parti. Celui-ci promet de boycotter les séances. C’est donc l’échec des différents gouvernements.
Le 22 mars 2021, le Parlement décrète l’état d’urgence pour 2 mois à cause de la pandémie du Covid. Il ne peut donc y avoir d’élections.
D’ailleurs, le 28 avril, Maia Sandu dissout le Parlement. Il y a des élections anticipées qui ont lieu le 21 juillet 2021, les 2 mois étant largement écoulés. Cette fois, son parti a la majorité (52,8% des suffrages). Elle peut à nouveau désigner Natalia Gavrilita pour former un nouveau gouvernement et peut ainsi appliquer son programme à partir d’août 2021.
Le 11 août, elle rencontre le chef d’Etat-major du Kremlin, Dmitri Kozak pour discuter des dépôts de munitions de Transnistrie. Elle estime que ce territoire n’est pas vraiment indépendant et elle souhaite le retrait des forces russes.
En février 2022, chacun sait que c’est l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Maia Sandu ouvre ses frontières aux réfugiés ukrainiens qui veulent passer dans l’UE. Et le 3 mars, sans plus tarder, elle fait une demande formelle d’adhésion à l’UE. Il en résulte que Gazprom réduit ses livraisons de gaz. Ce qui provoque de tels mécontentements que Natalia Gavrilita démissionne. Alors, Sandu désigne Dorin Recean pour faire un gouvernement tandis que la Russie cherche à empêcher d’adhérer à l’UE.
Le 16 décembre 2022, Maia Sandu décrète un nouvel état d’urgence, pour 60 jours cette fois face aux menaces russes de couper totalement l’approvisionnement en gaz.
Le 1er juin 2023, la Moldavie accueille le sommet de la communauté politique européenne dans le domaine agricole de Mimi, histoire de montrer vers quel côté, elle se tourne. Mais, il reste des problèmes avec la Transnistrie prorusse. Là entre 2001 et 2009, le gouvernement local avait rendu obligatoire l’usage de la langue russe. Si bien que la minorité roumanophone n’avait pas le droit de pratiquer sa langue maternelle. Ce qui, on s’en doute, a provoqué des manifestations.
Heureusement, le 5 mai 2013, les deux communautés sont admises sur le plan linguistique.
Le 6 mars 2013, un décret déclare que tous les citoyens de Moldavie, sont moldaves, quelle que soit leur langue. Cette fois, ce sont les prorusses qui sont mécontents. Une semaine plus tard, la rive droite du Dniestr est administrée par le gouvernement moldave (capitale Chisinau), tandis que la rive gauche se proclame Transnistrie, avec pour capitale Tiraspol. A noter que pour les compétitions sportives internationales, il y a deux équipes différentes : Moldavie, Transnistrie.
Aux élections municipales de novembre 2013, le parti pro européen l’emporte sur les pro russes. Le parti de Maia Sandu a 40% des voix, mais pas dans la capitale Chisinau. Ce qui ne l’empêche pas, le 24 décembre 2013 de briguer un second mandat. Les élections ont lieu (1er tour) le 20 octobre 2024. Pour que l’élection soit validée, il faut un minimum de 33% de participants ; il y en aura 36% ! Maia Sandu arrive en tête avec 42,4% des voix. Au second tour, elle obtient 55,3% des suffrages. Mais elle a reçu le secours de la diaspora car sur le territoire moldave, elle n’a eu que 50,4% des voix. Quoi qu’il en soit, elle est investie le 24 décembre 2024.
Le 7 mars 2024, Maia Sandu a reçu la Grand Croix de la Légion d’Honneur de la part d’Emmanuel Macron. Elle est la Présidente d’un petit pays tiraillé entre deux influences : l’Union européenne et la Russie. C’est un des pays les plus pauvres de l’Europe, et pourtant, les Moldaves considèrent qu’il fait bon y vivre, même si beaucoup de jeunes émigrent, faute de trouver un travail. Pauvres, mais pas misérables : les marchés sont colorés et abondants, pleins de produits locaux obtenus avec des méthodes ancestrales, sur des sols riches, le fameux tchernoziom (terres noires qui s’étendent jusqu’en Ukraine et même dans le sud-ouest de la Russie). La Moldavie produit du vin, des fruits, des légumes, que parfois elle exporte. Mais elle est encore gangrénée par la corruption.
C’est ainsi que le 25 mars 2025, la gouverneure de Gagaouzie, Evguenia Gutsul (38 ans) prorusse a été arrêtée à l’aéroport de Chisinau, à cause de ses relations avec des associations criminelles.
Dans le calendrier républicain, le 24 mai est le jour du canard.
ANNE PELLETIER
Le 18 mai 1874 est née à Paris, Anne Pelletier.
Elle sera la première femme médecin, diplômée en psychiatrie en France.
Elle a aussi été une des grandes figures du féminisme de la fin du XIXème au début du XXème siècle.
Adolescente, elle fréquente déjà les milieux socialistes et anarchistes. Donc des idées bien affirmées pour une adolescente. Née d’une famille pauvre, ayant abandonné tôt ses études, elle les reprend à 20 ans. Malgré sa pauvreté, elle envisage de devenir médecin.
En 1906, elle s’initie à la loge maçonnique. Elle est alors présidente d’une association féministe et membre de la SFIO (Section Française de l’Internationale Ouvrière), la grand-mère de notre actuel parti socialiste.
Anne, qui se fera appeler Madeleine, commence à revendiquer afin de faire avancer la cause des femmes, à une époque où on n’y est pas encore prêts.
Aussi, tant à la SFIO que chez les francs-maçons, on essaie de la mettre à l’écart. Les organisations politiques n’aiment pas beaucoup les esprits libres. Alors, quand en plus, ça vient d’une femme…
En 1917, elle est enthousiasmée par la Révolution russe d’octobre, au point qu’elle fait un voyage en Russie. Elle en revient déçue, malgré son idéal communiste.
Revenue en France, elle se donne pour objectifs de combattre le fascisme, continuer la lutte pour le féminisme.
Pour cela, elle écrit beaucoup : des articles, des essais, des romans, des pièces de théâtre.
Malheureusement, en 1937, elle est à son tour victime d’un AVC. Sa santé se détériore et elle meurt le 29 décembre 1939 à Epinay/Orge (Essonne).
Madeleine Pelletier a écrit de nombreux livres sur les droits des femmes, leur émancipation sexuelle, sur l’éducation des filles.
Elle a fait plusieurs publications féministes et politiques. Elle a raconté son voyage en Russie et fait un récit autobiographique (« Mémoire d’une féministe »).
La postérité a retenu peu de choses d’elle. Il y a quand même, depuis 2011, une plaque à son nom, rue de Gergovie dans le XIVème arrondissement de Paris. Poitiers a donné son nom à une rue près du centre universitaire. On a une rue Madeleine Pelletier à Epinay/Orge, là où elle est morte.
En 2019, dans le XIIIème arrondissement de Paris, le passage Madeleine Pelletier a été aménagé en esplanade.
Dans le calendrier républicain, le 18 mai est le jour du sénevé (qui sert de base pour fabriquer la moutarde blanche.
ADA DELETUK
Le 10 mai 1898 est née Ada Deletuk à Solomon en Alaska.
C’est une Inupiat (peuple autonome de l’Alaska). Elle a participé à l’expédition sur l’île russe de Wrangel dans l’Océan Arctique en 1921.
Cette expédition était menée par l’explorateur Canadien Vihjalmur Stefansson (1879 – 1962).
Le bilan de cette expédition a été dramatique et Ada en sera la seule survivante.
Elle n’a que 8 ans lorsque meurt son père. Sa mère l’envoie à Nome (ville de l’ouest de l’Alaska) chez des missionnaires qui lui apprennent l’anglais, la cuisine, la couture. Elle est mariée à 16 ans avec Jack Blackjack, un chasseur et un meneur de chiens. Avec lui, elle aura 3 enfants, dont 2 meurent en bas âge. Puis elle divorce à 22 ans et retourne chez sa mère avec son fils Benett. Celui-ci est atteint de la tuberculose et elle doit le placer dans un orphelinat.
Le 9 septembre 1921, afin d’avoir les moyens d’élever son fils, Ada Blackjack rejoint l’expédition Stefansson sur l’île de Wrangel. Le but est de coloniser l’île pour en faire une
possession de la Couronne britannique….Après tout, pourquoi pas, Trump veut bien prendre le Groenland. A ceci près que c’est une île minuscule (environ 7 000 km2 , soit l’équivalent d’un département français) situé à plus de 100 km de l’extrémité de la Sibérie orientale (presqu’île des Tchouktches). Le climat y est bien plus rigoureux qu’au Groenland (les températures peuvent descendre à – 60°). Seuls y vivent des ours, des phoques, aucun humain. En outre, à cette époque, où il n’est pas encore question de réchauffement climatique, l’Océan Arctique est pris par les glaces plusieurs mois de l’année et il n’y a pas encore de brise-glace.
Dans cette expédition, Ada est engagée comme couturière et cuisinière, donc un rôle important. Participent également 4 autres explorateurs, dont Alan Crawford qui est géologue et paléontologue. C’est lui, le chef de l’expédition. Pour se chauffer et cuisiner, les explorateurs utilisent le bois flotté. Mais avec le temps, ce bois vient à manquer. Il en est de même pour les vivres. Or Stefansson n’a pas assez d’argent pour affréter un bateau afin d’assurer la relève. Cependant, un bateau est envoyé en septembre 1922. A cette époque, il est déjà gêné par les glaces et on n’a pas de gibier pour se nourrir car les animaux (phoques, ours) migrent en fonction des saisons. Alors, Crawford et un compagnon partent sur la banquise à la recherche de secours.
A partir du 20 août 1923, Ada reste seule car Wright, un des membres, meurt du scorbut. Elle doit apprendre la chasse puisque les autres ont disparu. A son retour, les médias la surnommeront « Robinson Crusoé de l’Arctique ».
Comme elle a eu un salaire, elle peut faire soigner son fils dans un hôpital de Seattle (Etats-Unis). Espérons que Trump ne voudra pas lui faire payer la facture !
Plus sérieusement, Ada Blackjack termine sa vie dans une maison de retraite de Palmer, près d’Anchorage, où elle meurt le 29 mai 1983.
C’est le destin d’une femme modeste qui a fait preuve d’un grand courage face aux épreuves de la vie, sans pour autant s’épancher dans les médias.
Heureusement, des livres lui ont été consacrés, ainsi que des courts métrages en 2019 et en 2020 (« Ada Blackjack rising »). Elle a eu aussi droit à une bande dessinée et en 2024, à une émission de France Inter : « Naufrages, une histoire vraie ».
Dans le calendrier républicain, le 10 mai est le jour de la statice (plante littorale
encore appelée œillet de mer).
NELLIE BLY
Le 5 mai 1864 est née Elizabeth Jane Cochran, dite Nellie Bly, à Cochran’s Mills (Pennsylvanie).
C’était une pionnière du reportage clandestin, du journalisme d’investigation, de l’émancipation féminine.
De fin 1889 au début 1890, elle a réalisé un tour du monde en 72 jours, mieux que Phileas Fogg, héros du roman de Jules Verne : « Le tour du monde en 80 jours ».
Le père d’Elizabeth meurt lorsqu’elle a 6 ans, sans laisser de testament. Ce qui fait que la famille n’a pas accès à sa fortune. Le destin d’Elizabeth est scellé : elle sera demoiselle de compagnie ou gouvernante dans le secteur hôtelier. Mais la fille a du caractère, refuse ce destin et préfère écrire des poèmes.
A 16 ans, en 1880 donc, elle commence des études dans le but d’être enseignante. Mais les études coûtent cher et elle n’a pas assez d’argent. Elle part alors à Pittsburgh.
Là, elle tombe sur un article d’un journal local qui a pour titre : « Ce à quoi sont bonnes les jeunes filles ». Révoltée par le sexisme de l’article, elle écrit une lettre virulente au directeur du journal, en signant : « L’orpheline solitaire ». Cette lettre bien écrite est lue par le rédacteur en chef, George Madden. Celui-ci lui promet de l’engager si elle est capable d’écrire un bon article. Elle en écrit un sur la famille, le divorce, les enfants.
Séduit, il l’engage et lui donne un pseudonyme afin de la protéger des éventuelles critiques. Ce sera Nellie Bly, faisant référence à une chanson à la mode à cette époque.
Nellie Bly donc, fait son premier reportage en 1880 – elle n’a que 16 ans – dans une usine de conserves. Elle y raconte la vie des ouvrières, les contrats de travail, le froid, la crasse, le danger. Le reportage, accompagné de photos, paraît dans le « Pittsburgh Dispatch ». Il fait un tabac et les ventes explosent. Désormais, elle peut choisir ses articles et se consacre essentiellement sur la situation du monde ouvrier. C’est sans compter avec la réaction des industriels. On ne lui confie alors que les rubriques sur le théâtre, les arts.
Mais Nellie Bly revient au monde ouvrier. Elle se fait embaucher dans une tréfilerie. C’est la première fois qu’un reportage est fait de l’intérieur. C’est le début du journalisme d’investigation. Encore un reportage qui fait sensation. Retour aux rubriques de théâtre !
En 1886, elle part en voyage au Mexique, avec sa mère. Elle écrit des articles sur les mœurs, la vie culturelle, les pratiques politiques qui ne plaisent guère au pouvoir mexicain. Résultat : elle est expulsée. Néanmoins, elle en tirera un livre en 1888 : « 6 mois au Mexique » qu’elle dédie à Madden.
En mai 1887, elle est à New-York. Elle est candidate pour faire des reportages au « New York Times » et au « New York World » journal à sensation, créé par Joseph Pulitzer (1847 – 1911), personnalité politique, mais aussi journaliste et éditeur.
Elle consacre un article à un asile de fous de l’hôpital à Roosevelt Island (île sur l’East River à New York). Elle se fait passer pour malade mentale en s’inventant des problèmes psychiatriques. Elle le fait si bien que les médecins la déclarent folle et l’internent 10 jours dans l’hôpital. Son reportage fait la une des journaux, car elle dévoile les conditions dans lesquelles sont traitées les patientes, les méthodes utilisées, la nourriture avariée ou souillée.
Ce reportage publié en 1887, avec le pseudonyme « L. Munro », a eu des effets, puisque des changements ont été adoptés dans cet hôpital.
Cette même année, le journaliste Albert Cockerill du « New York World » lui demande un reportage sur un trafiquant, Edward Phelps. Nellie se déguise pour être intégrée au groupe. Son reportage aboutit à l’arrestation de Phelps et de ses copains qui seront traduits en justice ….et pas condamnés !!
En novembre 1891, Julius Chambers (1850 – 1920), écrivain de voyage, lui demande de faire un tour du monde sur les traces du héros de Jules Verne, Phileas Fogg. L’intrépide Nellie se fixe comme objectif de le réaliser en moins de 80 jours.
Le 14 novembre 1889, à 9 heures 40, elle part du port de Hoboken dans le New Jersey.
Le 20 novembre, elle arrive à Southampton. De là, elle prend le train pour Paris. Elle y rencontre un journaliste du « New York World », puis Jules Verne lui-même à Amiens, où elle arrive le 22 novembre à 16 heures. Elle prend le train pour Brindisi dans l’extrême sud de l’Italie. Puis, c’est le bateau : la Méditerranée, Suez, la Mer Rouge.
Le 14 décembre, elle est à Colombo et le 18 à Singapour. Elle note la pauvreté et ….s’achète un singe. Puis, c’est le départ pour Yokohama au Japon où elle arrive le 3 janvier 1890.
Le 7, c’est le début de la traversée du Pacifique pour atteindre San Francisco le 21 janvier.
Pulitzer lui affrète des trains pour traverser les Etats-Unis et arriver à New York. Finalement, elle est à la gare de Jersey City le 25 janvier 1880 à 15 heures 41.
Elle a donc accompli son tour du monde en 72 jours 6 heures 11 minutes. Le jour même, Jules verne lui écrit une lettre pour la féliciter.
Le 5 avril 1895, elle épouse Robert Seaman, un millionnaire, qui a la bonne idée de mourir en 1904. Nellie prend la direction de sa fabrique de bidons de lait qu’elle transforme en bidons pour transporter du pétrole et elle fait breveter son invention. Bon choix à une époque où le pétrole prend son essor. Mais elle a d’autres idées : elle
invente les petits pots de lait (pour le lait cette fois), les poubelles qu’on peut empiler. Dans son entreprise, elle applique de nombreuses réformes pour les ouvriers : salaires journaliers, centres de loisirs, bibliothèques. Mais la gestion laisse à désirer, d’autant que son directeur d’usine fait des malversations. Et c’est la banqueroute.
Alors, elle part au Royaume-Uni et demande à être correspondante de guerre pour le « New York Evening Journal ».
Après 1918, elle retourne à New York. Elle y écrit des articles sur le monde ouvrier, l’enfance, le droit de vote pour les femmes.
Le 27 janvier 1922, atteinte d’une pneumonie, elle meurt dans un hôpital de New York. Elle est inhumée au cimetière de Woodlawn, situé dans le quartier du Bronx.
Le lendemain, paraît un article, ayant pour titre : « La meilleure journaliste d’Amérique ».
Dans le calendrier républicain, le 5 mai est le jour de la consoude (herbacée des lieux humides).
VIOLETTE MORRIS
Le 26 avril 1944, Violette Morris a été exécutée par des maquisards sur une route du département de l’Eure. Elle était née à Paris le
18 avril 1893. C’était une championne sportive, une artiste de cabaret, une espionne collaborationniste. Elle était issue d’une famille
de militaires, petite-fille du général de cavalerie Louis-Michel Morris. Pour ses études, elle est envoyée au couvent de Huy en Belgique
(province de Liège). Les sœurs l’initient à la pratique sportive : basket, hockey, cricket….Mais elle pratique aussi la boxe anglaise et
l’athlétisme, entraînée par des boxeurs et des coureurs.
Elle se marie le 22 août 1914, à 21 ans et divorce en 1923. Il s’agissait peut-être d’un mariage arrangé car Violette est une lesbienne notoire.
En 1914, son mari est envoyé au front. De son côté, elle s’engage comme ambulancière sur le front de la Somme, puis sur celui de Verdun. Malade, elle contracte une pneumonie qui la tient 6 mois à l’hôpital.
En 1918, son père meurt et elle hérite d’une somme qui lui permet une vie confortable.
A partir de 1919, elle s’habille carrément comme un homme, prétextant que pendant la guerre, elle a porté un uniforme masculin. Elle le fait sans demander de permission de travestissement, conformément à ce qu’exige la loi du 16 brumaire de l’an IX (7 novembre 1800).
Après la guerre, elle lance le poids au club Fémina Sports de Paris, club fondé en 1912. Elle fait partie de la Fédération féminine de sports en 1920 et s’entraîne avec un athlète Raoul Paoli. Violette Morris a réalisé de nombreuses performances dans les années 20. Elle a battu les records du monde des lancers du poids et du disque. Les lancers se font à deux mains.
En 1921, elle a été championne olympique aux premiers J.O. féminins de Monte-Carlo. Elle a été capitaine de l’équipe de football féminin de l’Olympique (club parisien), qui a
remporté le titre de championne de France et la Coupe de France en 1925. Mais c’est aussi une pilote de course qui a remporté le « Bol d’or » automobile de 1927.
C’est une épreuve de 24 heures sur le circuit de Montlhéry (actuellement dans le département de l’Essonne), créée en 1922. Elle avait parcouru 1620 km à la moyenne de 67,5 km/h. Belle performance quand on sait que l’automobile n’en est qu’à ses débuts. A ce moment-là, elle est la sportive la plus titrée, hommes et femmes confondus.
En prévision des J.O. de 1928, à Amsterdam, la Fédération lui préfère Lucie Petit, une athlète franco-belge. On lui retire sa licence à cause de ….son costume masculin
Mais c’est aussi et surtout par son comportement que Violette Morris détonne. Habillée en homme, cigarette au bec, cheveux courts et gominés, en cravate, elle
contrevient à toutes les habitudes et aux lois des années 20 – 30. Pour elle, « ce qu’un homme peut faire, Violette peut le faire ». Elle intente un procès à la Fédération sportive féminine. C’est ce qu’on appellera le « procès du pantalon » car le port du pantalon est interdit aux femmes. Ce qui lui vaudra des sanctions et elle ne pourra pas participer aux Jeux Olympiques d’Amsterdam en 1928.
En 1929, elle subit volontairement, une mammectomie, ablation des deux seins, pour selon elle, mieux tenir le volant….
En février 1930, Violette Morris doit faire face à un procès où on lui reproche beaucoup de choses : homosexualité, « comportement inapproprié dans les vestiaires avec les autres sportives », consommation d’alcool et de tabac, pratique du sport en short court et sans soutien-gorge. Et toujours ce problème du port du pantalon. Le jugement confirme la radiation du « déplorable exemple ». Elle a des mots violents à l’égard des dirigeants du pays, les traitant de tous les noms et les estimant « pas dignes de survivre ».
Exclue du monde sportif, elle tient un magasin d’accessoires automobiles jusqu’en 1931, où elle fait faillite. Alors, elle achète une péniche « La Mouette » amarrée à Neuilly/Seine, dans laquelle elle vit avec l’actrice Yvonne de Bray. Elle devient chanteuse en cabaret.
En 1936, elle assiste aux J.O. de Berlin. Y aurait-elle été invitée ? Le conditionnel est de mise. Par contre, ce qui semble sûr, c’est qu’à Noël 1937, elle est arrêtée pour avoir tué un ancien légionnaire sur sa péniche. Elle avance la légitime défense. C’est finalement ce que le procès retiendra. Dans sa péniche, elle aura pour amis des célébrités comme Jean Cocteau, Joséphine Baker. Et bien sûr, elle y recevra aussi plusieurs amantes….
Puis pendant la 2de Guerre mondiale, elle est chauffeure de Christian Sarton du Jonchay, militaire qui a viré à la collaboration. En même temps, Violette Morris est directrice d’un garage réquisitionné par la Luftwaffe.
En 1940, elle aurait été contactée par la Gestapo pour infiltrer des réseaux de résistance, arrêter des femmes qu’elle aurait elle-même torturées.
C’est là que le 26 avril 1944, sa voiture est arrêtée dans l’Eure par le maquis local, Surcouf qui exécute tous les occupants. On dit que cette embuscade aurait été décidée de Londres par l’Intelligence Service ? On dit aussi que ce serait dû à une erreur ?
Fin tragique d’une femme hors norme, grande championne polyvalente qui n’acceptait pas les règles de son temps et qui a fini dans la collaboration et la violence. Malgré tout, elle avait une âme sensible puisqu’elle a composé une œuvre lyrique : « Gisèle, fleur d’amour » dédiée à une de ses amantes.
A son sujet, Jean Cocteau a écrit : « Ces monstres sacrés » où il est question de sa relation avec Yvonne de Bray.
Dans le calendrier républicain, le 26 avril est le jour du muguet.
LAURE HAYMAN
Le 22 avril 1940, Laure Hayman est décédée à Paris.
Elle était née à Valparaiso (Chili) le 12 juin 1851.
Elle a été sculptrice, salonnière et aussi demi-mondaine, c’est-à-dire une prostituée de luxe ou une femme entretenue par des messieurs friqués.
Ses parents n’étant pas mariés, elle est ce qu’on appelle une fille naturelle (combien d’enfants naturels de nos jours ?).
Son père s’appelle Bernard-Marie Hayman. Sa mère est Julie-Augustine Clairet. Si on refait l’arbre généalogique, Laure aurait des origines belge, française, anglaise et même créole. Sacré mélange !
D’ailleurs, son père descend du peintre Francis Hayman (1708 – 1776) qui a eu pour élève Thomas Gainsborough (1727 – 788), célèbre peintre anglais du XVIIIème siècle.
L’enfance de Laure, née dans une hacienda (vaste exploitation agricole dans l’Amérique hispanophone) se passe plutôt bien. On est au pied des Andes et son père est ingénieur dans cette hacienda.
En 1869, Laure Hayman donne naissance à Paris, à Joseph-Edmond, lui aussi naturel et reconnu par le père qui est lieutenant du 2ème régiment de Voltigeurs de la Garde
impériale.
En 1871, la mère de Laure décède. L’année suivante naît un second fils, Jean-Baptiste-Albert qui meurt au bout de 13 mois.
Tandis que Joseph-Edmond meurt aussi mais en 1900, à 31 ans. Son père meurt aussi. Cette fois, Laure doit gagner sa vie. Elle devient alors une courtisane et commence à collectionner les amants. Parmi eux, on trouve un descendant du duc d’Orléans, Constantin Ier roi de Grèce, un prince allemand : Egon IV de Furstenberg, le père de Marcel Proust. Rien que du beau linge. Au milieu de ces célébrités, elle a été quand même amoureuse. L’heureux élu n’était rien moins que le prétendant au trône de Serbie : le prince Alexis Karageorgevitch. Ce qui ne l’empêche pas de vivre aux crochets d’un banquier, Raphaël Bischoffsheim (1823 – 1906).
Laure est surnommée la « déniaiseuse de ducs ». Elle ne s’est pas intéressée seulement aux hommes. Elle a eu des relations avec une Haïtienne, Mimi Pégère, appelée la « comtesse noire », avec qui elle a vécu quelques temps.
Toutes ces relations ont attiré la curiosité de la police de Paris, qui recense les « dames galantes ».
Laure Hayman, qui en fait partie, est décrite ainsi :
– vit au 55 de la rue du Faubourg Saint-Honoré, au 5ème étage;
– Jolie femme, grande, mince, élégante ;
– Un petit garçon de 5 ans ;
– Entretenue par un député (De Pansey) ;
– Pas d’infidélité à M. De Pansey.
Cela ne l’empêche pas de tenir un salon dans un petit hôtel particulier rue de la Pérouse (XIIIème arrondissement). Elle y reçoit des écrivains comme Marcel Proust lui-même (1871 – 1922), l’écrivain essayiste Paul Bourget (1852 – 1935) qui la prend comme modèle dans ses écrits. Elle reçoit aussi Jacques-Emile Blanche (1861 – 1942) qui est peintre, graveur et aussi écrivain.
En octobre 1888, elle rencontre Proust qui n’a que 17 ans. Elle lui offre un exemplaire d’une nouvelle de Paul Bourget, relié avec la soie d’un de ses jupons. Et elle l’a dédicacé ainsi : « Ne rencontrez jamais Gladys Harvey ». C’était le nom de l’héroïne de Paul Bourget. Dans son roman « A la recherche du temps perdu » de Proust, Odette Crécy serait inspirée par Laure.
Elle essaie d’imposer des œuvres au musée du Louvre : celles du peintre et illustrateur Gustave Jacquet (1846 – 1903), du peintre américain Julius LeBlanc Stewart (1855 – 1919). De son côté, Laure pratique la sculpture, surtout des bustes et des thèmes orientalistes. Elle expose au salon d’automne de 1905 au Grand Palais. Puis ce sera en novembre 1913, à la galerie Georges Petit (1856 – 1920), galeriste et marchand d’art. Elle collectionne aussi des porcelaines de Saxe.
En 1936, Laure Hayman vend une partie de son patrimoine, sculptures, meubles, objets d’art, vêtements des années 1890, aux enchères à l’Hôtel Drouot.
Et le 22 avril 1940, elle s’éteint à l’âge respectable de 88 ans.
Dans le calendrier républicain, le 22 avril est le jour de la fougère.
LA LIBÉRATION DE ROYAN
Le 17 avril 1945, la ville de Royan est libérée, à la suite de combats commencés le 13 avril.
A la veille de la guerre, c’est une ville de 12 400 habitants. Située à la sortie de l’estuaire de la Gironde, Royan a toujours eu une position stratégique qui contrôle les entrées et les sorties concernant le port de Bordeaux. Royan a connu les invasions des Wisigoths, puis des Vikings. A la fin du Moyen-Âge, c’est une place forte protestante, contrôlée par les Anglais à l’époque de la Guerre de 100 ans.
Du milieu de XIXème siècle aux « années folles » (années 20), c’est une station balnéaire, située sur ce qu’on appelle la « Côte de Beauté », au climat privilégié (presque autant d’heures de soleil que la Côte d’Azur). Ce qui lui permet de voir passer de nombreux artistes. Mais la fin de la 2de Guerre mondiale a été tragique pour Royan.
Des combats ont débuté le 12 septembre 1944 (Paris était déjà libérée depuis le 25 août) et la ville a été assiégée jusqu’au 15 avril 1945. Déjà, elle avait été bombardée par l’aviation alliée le 5 janvier 1945.
Mais c’est du 13 au 17 avril qu’ont eu lieu les combats décisifs contre l’occupant allemand qui maintient une poche de résistance, alors qu’ailleurs les troupes nazies reculent et reviennent même à l’intérieur de leurs frontières à la fin de 1944 (Strasbourg libérée le 23 novembre 1944).
Les 14 et 15 avril 1945, l’aviation alliée bombarde Royan….avec du napalm ! Non seulement, la ville est détruite à 85%, mais on relève 647 morts et plus de 200 blessés. Ce n’est plus qu’un tas de ruines fumantes. Et donc, le 17, les Allemands capitulent enfin. Alors, il a fallu reconstruire. Cela s’est fait dans les années 50. De ville martyre, on y a installé le siège du laboratoire de recherche sur l’urbanisme. Cette architecture s’est faite dans un style moderniste, inspiré des plus célèbres architectes de l’époque : Le Corbusier (architecte de la Cité radieuse de Marseille) et Oscar Niemeyer (architecte de Brasilia, devenue capitale du Brésil en 1960). Un peu plus d’un demi-siècle plus tard, Royan est classée « Ville d’art et d’histoire » en 2010. Maintenant, c’est une ville moderne de 19 500 habitants permanents, disposant de tous les services et même
d’un pôle universitaire spécialisé dans l’étude des langues. Sur le plan touristique, Royan reçoit chaque année, environ 700 000 touristes, attirés par la diversité des activités : plages de sable fin, zoo de la Palmyre à quelques kilomètres, visites du phare de Cordouan, en plein milieu de l’entrée de l’estuaire de la Gironde, nombreuses activités
culturelles (concerts, expositions). C’est aussi le passage, par le bac pour aller au Verdon, de l’autre côté de la Gironde (près d’un million de passages). De nombreux peintres sont venus y installer leurs toiles, comme Gustave Courbet (1862), Maurice Utrillo en 1936, Pablo Picasso en 1940, parmi les plus célèbres. Robert Desnos a écrit des poèmes sur Royan qui a aussi été le sujet d’émissions de télévision.
Quelques célébrités sont passées à Royan :
Emile Zola (1840 – 1902) : romancier ;
Odilon Redon (1840 – 1916) : peintre ;
Duchesse de Rohan (1853 – 1926) : poétesse ;
Sacha Guitry (1885 – 1957) : écrivain et dramaturge ;
Jacques-Henri Lartigue (1894 – 1986) : photographe ;
Edmond Jouhaud (1905 – 1995) : un des 4 généraux auteurs du putsch manqué à Alger en avril 1961 (décédé à Royan);
Danielle Darrieux (1917 – 2017) : comédienne ;
Cécile Rol-Tanguy (1919 – 2020): résistante qui a participé à la libération de Paris en août 1945 (née à Royan) ;
Jean de Lipkowski (1920 – 1977): maire et secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères de 1968 à 1974.
Aujourd’hui, on pourrait penser que la ville qui a ressuscité est une sorte de paradis où il y a du soleil, où des touristes viennent de partout, où on peut déguster les soles, les raies, les bars qui arrivent dans le port de pêche. Comme dans beaucoup de cités balnéaires, il existe bon nombre de résidences secondaires ouvertes uniquement pendant les vacances (7 000 résidences secondaires pour 8 000 résidences principales). Mais le gros problème est l’emploi. Le taux de chômage atteint 20% (13% pour la moyenne française) et atteint 37% pour les moins de 25 ans. L’emploi se trouve essentiellement dans la construction (46% des emplois). En outre, la moyenne d’âge des Royannais(es) est élevée : les plus de 60 ans sont majoritaires. Bien sûr, en période estivale, c’est la foule dans les magasins, les restaurants, les campings, sur les plages. Mais chacun sait que ce n’est qu’une activité temporaire, plus ou moins liée à la météorologie. Car Royan a été exposée à plusieurs tempêtes dévastatrices :
11 novembre 1916 : tempête qui a détruit le sommet de l’église ;
8 novembre 1924 : raz-de-marée qui a inondé le centre-ville ;
27 décembre 1999 : tempête avec des vents atteignant 194 km/h ;
24 septembre 2006 : pluies diluviennes qui ont provoqué des inondations ;
Nuit du 23 au 24 février 2009 : tempête qui a fait des dégâts ;
28 février 2010 : tempête Xynthia qui a provoqué des dégâts.
Dans le calendrier républicain, le 17 avril est le jour de la pensée (fleur).
ROXELANE
Le 15 avril 1558, Roxelane meurt.
Elle était née vers 1500 à Rohatyn, localité de Galicie, région située entre Cracovie en Pologne et Lviv en Ukraine.
Elle était fille d’un prêtre orthodoxe de Galicie. Elle a été capturée par les Tatars de Crimée (descendants des Mongols, installés en Crimée depuis le XIIIème siècle) et vendue comme esclave pour le harem du sultan ottoman, Soliman le Magnifique (1494 – 1566), sans doute en septembre 1520.
En 1521, elle a un premier fils, et passe à l’officieux statut de favorite.
Vers juin 1534, elle devient carrément 1ère épouse. Belle promotion ! Ce qui lui permet d’être affranchie. Le mariage a été possible par sa conversion à l’islam. « Paris vaut
bien une messe » avait dit le roi de France, Henri IV, on pourrait plagier en disant : « Topkapi de Constantinople (palais dans lequel elle s’installe) dans les années 1530, vaut bien une mosquée. Non seulement, elle est passée d’esclave à sultane, elle exerce une influence sur sa politique puisqu’elle devient sa conseillère pour la politique étrangère. Ainsi, par exemple, elle incite le sultan à conserver des relations pacifiques avec la Pologne. Les ambassadeurs européens s’adressent désormais à elle.
Rôle politique, mais elle ajoute une corde à son arc, en se faisant mécène. Elle finance des travaux dans des lieux saints, tels que La Mecque et Jérusalem. Roxelane crée des fondations pour construire une mosquée, des écoles coraniques, une fontaine, un hôpital pour femmes esclaves (près du marché aux esclaves). Avec Soliman, elle aura 6 enfants, dont 5 fils.
En 1683, l’écrivain et dramaturge français, Bernard de Fontenelle, a imaginé un dialogue entre Roxelane et Agnès Sorel (maîtresse du roi de France Charles VII), où elles
comparent leurs stratégies maritales et sentimentales respectives !
Plus près de nous, la philosophe Catherine Clément (née en 1939) s’est inspirée de la vie de Roxelane pour écrire « La sultane », publié en 1981. Isaure de Saint-Pierre (née en 1944) , romancière et biographe a fait une biographie de Roxelane dans son roman « La magnifique », paru en 2002.
En 2022 est sorti un film où l’actrice australienne Megan Gale joue le rôle de la sultane : « Trois mille ans à t’attendre ».
Roxelane a inspiré une bande dessinée, une multitude de livres, des émissions de radio et de télévision.
Son nom a été donné aux thermes Zeuxiphe créés par les Romains à Constantinople au IIème siècle.
Dans le calendrier républicain, le 15 avril est le jour du lilas.
FLORA CELESTINE HENRIETTE TRISTAN Y MOSCOSO
Le 7 avril 1803, Flora-Célestine-Henriette Tristan y Moscoso est née à Paris.
C’est une femme de lettres, une intellectuelle, militante socialiste et féministe. Elle est la fille de Mariano Tristan y Moscoso, aristocrate péruvien. Sa mère est Anne-Pierre Laisnay, issue de la petite bourgeoisie parisienne, qui avait émigré en Espagne après la Révolution de 1789. Mariano meurt à Paris en 1807, sans avoir légalisé son mariage. Ce qui laisse la mère sans aucun droit. Démunie, elle est expulsée de son domicile parisien de la rue de Vaugirard.
Orpheline, Flora s’imagine dans sa tête, un père virtuel. Pour elle, ce pourrait être Moctezuma II (empereur aztèque), ou Simon Bolivar (général vénézuélien à l’origine de l’indépendance des Etats d’Amérique latine). Elle va même jusqu’à publier de fausses lettres faisant croire que Bolivar est réellement son père.
Flora connaît des difficultés financières, ce qui la pousse à se marier à 17 ans avec un graveur, André Chazal, dont elle est très amoureuse. Elle se retrouve ouvrière
coloriste chez Antoine, un frère d’André. Mais ce dernier s’avère violent, jaloux.
Alors, elle s’évade dans les lectures de Rousseau, Lamartine, Mme de Staël.
En 1822, elle a un enfant, Alexandre qui meurt à 8 ans. Deux ans plus tard, arrive Ernest (1824 – 1879). Elle est de plus en plus victime de violences conjugales, elle est même séquestrée.
En 1825, elle parvient à s’enfuir, alors qu’elle est enceinte d’une fille, Aline qui vivra de 1825 à 1867.
En 1828, c’est la séparation de biens et la fin de la vie commune. Pour échapper à son époux, elle prend un pseudonyme. Après avoir brûlé les traces de son passé, dont elle a honte, commencent alors 10 années de voyages. En 1833, elle part au Pérou sans sa fille, où elle est accueillie à Arequipa par son oncle, Pio de Tristan y Moscoso. Elle
espère récupérer la fortune de son père. Mais il ne lui en accorde qu’un cinquième, considérant que c’est une fille naturelle (non reconnue par le père), plus une pension.
Elle rentre en France en 1835 après un passage à Lima. Elle en écrit : « Pérégrinations d’une paria ». Elle y fait des remarques sur la société péruvienne, la politique, le rôle de l’Eglise catholique, l’esclavage dans les plantations de canne à sucre. Le livre est mal perçu, en premier lieu par son oncle qui lui supprime la pension. Heureusement qu’elle avait quelques économies pour vivre.
A paris, elle fréquente les milieux littéraires et socialistes. Sous la signature F.T., elle écrit un projet utopiste basé sur une association destinée à venir au secours
des femmes. Elle se met alors au service de Charles Fourrier (1772 – 1837), qui est un philosophe fondateur de ‘L’Ecole sociétaire », communauté appelée
phalanstère, pour créer une vie harmonieuse. Mais André Chazal a de la suite dans les idées, il la retrouve et enlève sa fille Aline, dont il voulait la garde. Il obtient la garde de son fils Ernest, qui veut rester avec sa mère. La vie est compliquée.
En 1836, il enlève encore Aline qui réussit à s’enfuir. Flora porte plainte pour ces violences et aussi pour des actes d’inceste. Chazal est jugé et emprisonné, mais il bénéficie d’un non-lieu.
Le 14 mars 1936, le tribunal correctionnel de Paris lui accorde la séparation de corps. Le divorce étant interdit depuis 1816. Alors, Flora se bat pour les droits des femmes, notamment pour le droit de divorcer. Ce qui fait dire à Chazal qu’elle est une prostituée. Dans son esprit et dans une bonne partie de la société du XIXème siècle, une femme qui veut se séparer de son mari, ne peut être qu’une prostituée….L’insulte ne suffit pas, il la menace de mort.
Et le 10 septembre 1838, il met sa menace à exécution : il lui tire un coup de pistolet qui lui perfore un poumon. Chazal est condamné à 20 ans de travaux forcés, commués ensuite en 20 de prison. Cet épisode a affaibli Flora qui se retrouve avec une balle logée près du cœur.
En 1839, elle repart quand même en Angleterre et l’année suivante publie « Promenades dans Londres ». Elle y rencontre Mary Wollstonecraft, une institutrice lettrée qui lui parle de l’Angleterre industrielle. Car ce pays a accompli sa révolution industrielle avant tout le monde. Mais Floran Tristan – qui a repris son nom – est célèbre pour avoir écrit : « Prolétaires de tous pays, unissez-vous ! ». Ce slogan sera repris par Marx et Engels dans leur « Manifeste du communisme » de 1848.
En 1843, elle entame un circuit en France, celui des Compagnons du devoir : jeunes qui font la formation d’un métier par une série de pratiques itinérantes. Malheureusement, elle ne termine pas son périple. Elle est prise par le fièvre typhoïde et s’éteint le 16 novembre 1844. Est-ce une conséquence de sa blessure ?
Flora Tristan s’était définie ainsi : « Aristocrate déchue, femme socialiste et ouvrière féministe ». Ce qui prouve qu’elle avait une certaine lucidité sur elle- même.
En 1846, est paru un ouvrage posthume, ayant pour titre : « L’émancipation de la femme ou le testament de la paria ». Une souscription a été lancée pour un monument à sa mémoire, dans le cimetière des Chartreux de Bordeaux.
De 1973 à 1993, il existait à Lyon, un cercle « Flora Tristan ».
En avril 2018, deux bâtiments de l’université de Bordeaux ont été baptisés à son nom. Au Pérou, la principale organisation féministe s’appelle : « Centro de la mujer peruana Flora Tristan ». Il existe tout un réseau de centres d’hébergement et d’insertion sociale pour les victimes de la violence conjugale. On a aussi donné son nom à une école maternelle de Saint-Pierre de la Réunion, à un lotissement du Haillan (banlieue de Bordeaux). Il y a aussi une place à Paris (XIVème arrondissement), une allée à Lyon. C’est encore le cas pour de nombreux collèges et lycées, l’EHPAD de Saint-Brieuc (Côtes-d’Armor), une médiathèque à Pierrefitte/Seine (Seine-Saint-Denis), à Nanterre (Hauts-de-Seine).
Le 8 mars 1986, elle fait partie de la série de timbres pour l’hommage aux femmes. Il faut ajouter les nombreux ouvrages, fictions émissions de radio concernant Flora Tristan. Elle a défendu les droits des femmes bien avant « Me too ».
Dans le calendrier républicain , le 7 avril est le jour de la cigüe (herbacée particulièrement toxique).
ALEXANDRA MIKHAÏLOVNA DOMONTOVITCH
Le 31 mars 1872 selon le calendrier grégorien, Alexandra Mikhaïlovna Domontovitch est née à Saint-Pétersbourg, fille d’un général tsariste.
Après avoir refusé à 17 ans, un mariage arrangé, elle s’éprend d’un jeune officier, Vladimir Kollontaï, qu’elle épouse en 1893. Elle est donc Alexandra Kollontaï, militante féministe marxiste.
A l’époque elle est la première à la tête d’un ministère après la Révolution russe de 1917, membre à part entière du Conseil du gouvernement (Conseil des Commissaires du peuple de la Russie révolutionnaire).
Vite lassée de la vie conjugale, elle se sépare de son époux en 1896, avec lequel elle a eu un enfant. Elle préfère partir en Suisse, à Zürich, étudier l’économie politique. C’est là qu’elle devient marxiste et prend plaisir à parcourir l’Europe : France, Allemagne, Italie. Forcément, elle fait des rencontres comme celles de Lénine, Plekhanov (philosophe théoricien du marxisme), Rosa Luxembourg (militante allemande du communisme).
En 1898, elle adhère au POSDR (Parti Ouvrier Social Démocrate de Russie) qui se divise en deux en1903, entre bolchéviks (majoritaires) et mencheviks (minoritaires). Trouvant les bolchéviks trop rigides, elle se dirige vers les mencheviks.
En 1905, Alexandra revient en Russie au moment du « Dimanche rouge » (9 janvier 1905).
En 1908, elle doit s’exiler et part vers l’Allemagne et fait connaissance avec les révolutionnaires allemands : Clara Zetkin, Rosa Luxembourg, Karl Liebknecht.
En 1911, elle est en couple avec Alexandre Chliapnikov. Elle a 13 ans de plus que lui, c’est une intellectuelle, cultivée, polyglotte, d’origine noble, d’origine de Carélie. Lui, c’est un métallurgiste provincial, autodidacte. Tout en restant amis (même s’il n’y avait pas Facebook), la liaison se termine rapidement en 1916. Elle est opposée à la guerre qui se déclare en été 1914. Elle se réfugie en Europe du nord et aux Etats-Unis, puis revient en Russie où elle participera à la Révolution de 1917.
C’est là qu’elle devient Commissaire du peuple dans le gouvernement des Soviets de novembre 1917 à mars 1918. Elle est la première femme à remplir ce rôle.
Mais lors du XIème congrès du parti qui se réunit en mars-avril 1922, Alexandra est accusée de fractionnisme (elle n’est pas toujours d’accord avec Lénine) et menacée d’expulsion. Pourtant, 2 ans plus tard, elle est nommée diplomate, chargée d’affaires en Norvège en 1924. Ce qui fait d’elle, la première femme ambassadrice de l’ère moderne. En fait, c’est une façon pour le régime de se débarrasser d’elle et de la mettre en exil. Elle est même attaquée par le gouvernement qui la surnomme « La scandaleuse », en raison de sa vie sentimentale.
De 1926 à 1927, elle est représentante commerciale au Mexique, puis en Norvège encore (1927-1930). Elle part ensuite aux Etats-Unis, avec le rôle de « représentante du parti ». Bon plan, car cela lui permet d’échapper aux purges staliniennes des années 30.
Déjà en 1936, étant à Stockholm, elle est informée des tractations entre Hitler et Staline. Elle transmet l’information à Léon Blum qui n’y croit pas. Par contre, pour elle, c’était une grande prise de risque. C’est si vrai qu’à son retour à Moscou, elle est interrogée par le sinistre Iejov, chef du NKVD. Elle parvient à écarter les soupçons. D’ailleurs, c’est elle qui conduira les négociations pour l’armistice entre l’URSS et la Finlande, après leur guerre froide. Mais là, c’était bel et bien en hiver 1940.
En 1943, elle est officiellement ambassadrice à Stockholm. Mais voilà qu’enaoût 1942, elle est victime d’un AVC qui lui paralyse le côté gauche et l’oblige à se déplacer en chaise roulante. Néanmoins, c’est encore elle qui, en 1944, négocie l’armistice avec la Roumanie. Doyenne du corps diplomatique, elle donne, en 1945, une réception à Stockholm, pour son départ, où se rendent de nombreuses personnalités politiques, même si elle dit respecter la politique de Staline qui a fait tant de victimes. Elle est proposée-en vain-pour être prix Nobel de la paix en 1946 et 1947. Mais après avoir donné des conférences, en mars 1945, elle annonce la fin de ses fonctions.
Elle survit encore quelques années et décède le 9 mars 1952. Elle est enterrée au cimetière de Novodevitchi (en quelque sorte, le Père Lachaise soviétique).
Alexandra Kollontaï a théorisé la notion d’amour libre. Car elle considère le mariage comme un concept capitaliste, où la femme est exploitée par le conjoint. Pour elle, la fidélité est un concept bourgeois. Ce que critiqueront Lénine et Trotski qui la qualifient de décadente. Elle a milité pour l’abolition des règles interdisant la prostitution dont sont principalement victimes les femmes pauvres, contrairement aux prostituées riches qui sont respectées.
Elle théorise aussi la notion d’amour – camarade. Elle considère que c’est le polyamour basé sur 3 principes : égalité des rapports mutuels, absence de possessivité, empathie et souci de l’autre.
En ce qui concerne Alexandra Kollontaï, elle a eu des relations amoureuses libres et multiples.
Elle fut néanmoins une personnalité controversée qui a joué un rôle important dans l’URSS à ses débuts. Ainsi, elle a été citée à l’Ordre de Lénine (qui est la plus haute distinction en URSS). Décorée aussi à l’Ordre du Drapeau rouge du travail (haute distinction civile de l’URSS). En Norvège aussi, son action a été récompensée : Ordre de Saint-Olaf (le plus élevé des ordres de chevalerie norvégienne). Au Mexique, elle a reçu l’Ordre de l’Aigle aztèque, pour les services rendus à la nation mexicaine.
Le 28 mars 2017, une plaque a été inaugurée devant son domicile moscovite par le Ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov.
En 2019, à Genève, l’avenue de la Paix a été renommée au nom d’Alexandra Kollontaï.
JULIE-VICTOIRE DAUBIÉ
Le 26 mars 1824 est née Julie-Victoire Daubié à Bains-les-Bains (Vosges).
Elle fut la première femme à s’inscrire pour le baccalauréat malgré les interdictions et à l’obtenir (17 août 1861) à l’âge de 37 ans.
Son inscription a été possible grâce à l’appui de l’Impératrice Eugénie.
Déjà, avant le bac, le 31 août 1844, elle avait passé le certificat de capacité, donnant le droit d’enseigner. La loi Falloux, (du nom du Ministre de l’Instruction publique) du 5 mars 1850, oblige – entre autres – les communes de plus de 800 habitants à avoir une école de filles.
Après le bac, elle a été licenciée ès lettres le 28 octobre 1871, après avoir suivi les cours à la Sorbonne, qui en principe, n’était pas ouverte aux femmes. Devenue journaliste, elle a milité pour les droits des femmes. Julie note le manque de qualification de certaines religieuses pour
enseigner le latin et le grec qui sont obligatoires pour se présenter au bac. Dès lors, elle étudie ces deux disciplines, et en plus, suit une formation en zoologie en s’inscrivant au Muséum d’histoire naturelle de Paris.
Soutenue par des intellectuels, elle s’inscrit en 1859 à la faculté des Lettres de Lyon, pour préparer le bac. Les épreuves écrites ont lieu le 16 août 1861 (on ne parlait pas de vacances d’été !). Pas question de mixité – ça pourrait perturber ? – un local spécial lui est réservé puisqu’elle est la seule femme.
Les résultats sont publiés le lendemain et elle est admise ! La voici donc, 1ère femme bachelière.
Elle avait grandi près de la Manufacture royale de Bains-les-Bains que dirigeait son père. Julie était la 8ème enfant de la fratrie, ce qui n’était pas exceptionnel à cette époque. Son père meurt lorsqu’elle a 20 mois et il est enterré dans le cimetière de Fontenoy-le-Château (Vosges), village dans lequel il avait été maire. Mais dans cette usine, même si elle n’y a pas travaillé, elle qui était issue de la petite bourgeoisie catholique, a pu observer la misère des ouvriers en milieu rural et les conditions dramatiques dans lesquelles vivent les mères célibataires.
Cela se retrouve dans un essai qu’elle a écrit : « Femme pauvre au XIXème siècle » et qui a obtenu le 1er prix de l’Académie des Sciences, des belles Lettres et des Arts de Lyon. C’était une Académie savante créée en 1713. Son essai a été publié en 1867 à l’Exposition universelle de Paris.
En 2024, l’Institut de France (créé en 1795, pour rassembler les élites littéraires, scientifiques et artistiques) a fêté le bicentenaire de sa naissance. Julie Daubié décède le 26 août 1874 à Fontenoy-le-Château, commune où avait été enterré son père. Dans cette commune, on trouve une place à son nom et une fresque géante sur un mur. Même si elle est peu connue, un certain nombre de villes ont donné son nom à des rues, comme à Paris, à Nancy, entre autres. Il y a aussi une place Daubié à Lyon. Des plaques en son honneur ont été érigées à Bondy (Seine-Saint- Denis) et bien sûr à Fontenoy-le-Château. Si vous passez par cette commune, vous pourrez vous amuser à lire des citations d’auteurs célèbres apposées sur les portails ou entrées des habitations. Ce qui lui a valu le titre (très officieux) de « village de l’écrit » et chaque année est organisé le prix François Massenet qui est un concours de nouvelles.
Dans le calendrier républicain, le 26 mars est le jour de la blette (herbacée de la même famille que la betterave).
PAROSTOO AHMADI
Le 21 mars 1997 est née Parostoo Ahmadi.
Elle est originaire de Nowshah, situé dans le nord de l’Iran, près de la mer Caspienne. C’est une chanteuse qui s’est illustrée en décembre 2024, dans le « concert du Caravansérail ».
Parostoo est diplômée de réalisation cinématographique de l’université de Sore (université semi-privée à Téhéran). A 14 ans, elle a pris des cours de solfège, de musique folklorique, de musique classique.
Son « concert du Caravansérail » a connu un grand succès et a été diffusé sur Youtube. Elle a interprété « Du sang de la jeunesse de la patrie » qu’elle avait chanté lors des manifestations après la mort de Mahsa Amini (16 septembre 2022). Elle était accompagnée par un pianiste, un guitariste, un bassiste, un batteur.
En octobre 2023, ils ont été l’objet de poursuites judiciaires pour avoir chanté et joué de la musique sans autorisation. Parce qu’en Iran, pour chanter ou jouer de la musique, il faut gentiment demander l’autorisation au pouvoir. Qui la donne ou non. Rien à voir avec notre SACEM…. Ce groupe a aussi fait un concert en l’honneur du mouvement « Femme, Vie, Liberté ».
Parostoo a aggravé son cas en chantant sans nijab (foulard traditionnel porté par les Musulmanes, qui cache les cheveux mais pas le visage).
Le 14 décembre 2022, elle a été arrêtée, mais heureusement vite relâchée.
Être femme et artiste en Iran est particulièrement compliqué. Si le cœur vous en dit, vous pouvez écouter et voir le « concert du Caravansérail » sur Youtube. Je ne sais si vous comprendrez les paroles, probablement en langue farsi (langue de 83% des Iraniens), mais il y a un sous-titrage en anglais. Par contre, n’importe qui peut être charmé par la musique et la voix.
Dans le calendrier républicain, le 21 mars est le jour de la primevère.
L'AMOCO CADIZ
Le 16 mars 1978, une date dont les Bretons, surtout ceux de la côte nord, se souviendront longtemps.
Ce jour-là, un énorme super tanker vient d’échouer sur les côtes de Bretagne, au nord-ouest du Finistère à deux encâblures du village de Portsall (commune de Ploudalmézeau).
A 9h45, le navire a une avarie de gouvernail et devient incontrôlable, comme un vélo sans guidon ou une auto sans volant. Mais la « bête » en question transporte près de 230 000 tonnes de brut, mesure 330 mètres de long et à un tirant d’eau (partie qui est sous la ligne de flottaison) de plus de 20 mètres. Soit l’équivalent d’un immeuble de 6 étages. Pour s’arrêter, il lui faut une cinquantaine de kilomètres. Ajoutons à cela que la mer est « formée », comme disent les marins, avec des creux de 8 à 10 mètres.
L’Amoco Cadiz est sorti des chantiers navals de Cadix en Espagne en 1974. C’est donc un bateau relativement récent qui appartient à un armateur de Chicago aux Etats-Unis. Il bat pavillon du Libéria. C’est-à-dire que c’est un pavillon de complaisance : les taxes y sont peu élevées et les lois sociales presque inexistantes. Le résultat est que le plus souvent, on a affaire à des équipages cosmopolites, mal payés, peu compétents.
Dans le cas de l’Amoco Cadiz, le capitaine est italien, l’équipage est fait de 44 personnes de diverses nationalités.
Le bateau est parti d’un port d’Arabie Saoudite le 4 février 1978, à destination de Rotterdam, avec une cargaison de 227 000 tonnes de pétrole brut.
Le 28 février, il passe le Cap de Bonne Espérance. Le 11 mars, il fait escale à Las Palmas aux Canaries.
Le 16 mars il entre dans la Manche avec une météo difficile. Et patatras, c’est à 9h45 que se produit la panne de gouvernail, au moment où le navire contourne le nord-ouest du Finistère qui est une zone délicate à cause des récifs et des courants. Donc, la panne se produit au plus mauvais endroit. Le navire « talonne » (touche le fond) et s’échoue sur les récifs en face du village de Portsall. La mer est agitée et on a des creux de 8 mètres. Le capitaine n’envoie pas de message. Quand il contacte enfin la station radio du Conquet (Finistère), c’est déjà trop tard. A 11h05, il essaie de contacter l’armateur qui est à Chicago. Avec le décalage horaire, il dort du sommeil du juste…
Alors, à 11h20, on se décide à demander un remorqueur. En fait, 2 remorqueurs sont envoyés. Mais face à une telle masse, une chaîne de remorquage se casse à 16h18. Le navire prend de la gîte (commence à pencher) et les machines sont noyées. A minuit, on doit hélitreuiller l’équipage. On imagine dans quelles conditions avec un vent de force 8 à 9 (plus de 100km/h).
Le matin du 17 mars, les populations sentent une forte odeur de mazout et pensent qu’ils ont un problème avec leur cuve. En fait, le navire s’est cassé en 2 et à partir du 24 mars, 85% de la cargaison se répand dans la mer, soit près de 200 000 tonnes ! Toute la côte nord de la Bretagne est couverte de pétrole, jusqu’à Saint-Brieuc, et même dans les pays voisins. Même la Suède est alertée. C’est en tout cas, une gigantesque catastrophe comme on n’en a jamais connu.
Du 17 au 24 mars, 420 personnes travaillent au nettoyage sur 6 chantiers. Du 25 mars au 10 avril, on passe à 4 600 personnes sur 66 chantiers. Puis du 11 avril au 7 mai, ce sont 7 400 personnes sur 90 chantiers. La tâche est gigantesque. Au total, il aura fallu 14 000 personnes dont 7 000 militaires, auxquels se sont ajoutés des agriculteurs, des associations écologiques. Le pétrole pompé est envoyé dans des stations de dégazage à Brest, Nantes, Saint-Nazaire, Le Havre. Mais le nettoyage du sable et des rochers se fait à la main ou à la pelle. Heureusement la nature donne un coup de main par les vagues et aussi des bactéries naturelles qui « mangent » le pétrole.
Evidemment, la nature ne sort pas indemne. On estime que les dégâts se sont étalés sur 1300 km, avec toutes les échancrures du littoral, les estuaires des rivières. 30% de la faune aquatique a été détruite, près de 10% de la flore marine a été touchée. 10 000 oiseaux ont péri, 35 espèces de poissons sont touchées. Il faudra plus de 5 ans pour que l’écosystème se reconstitue.
Il y a eu un procès qui a condamné la société pétrolière. Le procès a lieu à Chicago, siège de la compagnie de transport et de la société Shell qui avait affrété le navire.
Le 4 mai 1982, le procès a été remporté par l’avocate Corinne Lepage, en présence de 55 maires qui avaient défilé dans les rues pour manifester. 587 millions de francs ont été réclamés. Seulement 90 millions ont été perçus par la Bretagne.
Après un appel, 226 millions supplémentaires ont été accordés en 1992.
On a pris des mesures pour la prévention. Mais toute la Bretagne du nord, dont l’économie est principalement tournée vers la mer, a subi une grave crise.
Mais la Bretagne n’en a pas fini avec la pollution. Depuis les années 80, elle vient de l’intérieur cette fois. Elle provient des méthodes de l’agroalimentaire breton qui laisse partir des eaux saturées en nitrates issues de l’élevage intensif (porcs, volailles). Ce qui provoque de véritables marées vertes d’algues. On en a trouvé des dizaines de milliers de tonnes sur le sable. Il faut dire que la Bretagne ne produit pas que des artichauts et des choux-fleurs. Elle produit 50% du porc français, 50% des volailles, 30% des bovins. Ces élevages le plus souvent intensifs (des milliers de volailles, des milliers de porcs rassemblés dans des locaux exigus (il faut économiser la place) produisent des quantités importantes de lisier qui s’coulent dans les rivières et finissent sur les plages. Il se dégage des odeurs de sulfure d’hydrogène (H2S), fort désagréables et surtout dangereuses.
Au point qu’en juillet 1989, un homme a été retrouvé mort à Saint-Michel-en- Grève (Côtes-d’Armor). Un peu plus tard, un ramasseur d’algues (pour faire des engrais) a été retrouvé dans le coma et a dû être hospitalisé pendant 4 mois.
Le 22 juillet 2003, un homme de 48 ans meurt au pied de son camion de ramassage d’algues.
Le 22 juillet 2009, c’est un cheval qui est mort.
En 2011, on a retrouvé morts 36 sangliers.
En 2016, c’est un joggeur.
On commence à se poser des questions. Une association écologique « Halte aux algues vertes » est créée. La presse aussi s’en mêle. Des journalistes, Inès Léraud et Pierre Van Hove font des enquêtes. Mais les élus et l’Administration font la sourde oreille. Le lobby de l’agroalimentaire est si puissant qu’il fait taire les instances officielles. Deux procès en diffamation sont même intentés contre ces journalistes. Les roues de la voiture d’Inès Léraud avaient été dévissées, alors qu’elle enquêtait. Véritable acte criminel….resté impuni !
Heureusement, on n’en reste pas là. Tout le monde n’a pas envie de se taire. L’hebdomadaire satirique « Le Canard Enchaîné » sort deux articles (13 et 27 novembre 2024) titrés « Algues de mort » et « Les fausses barbes de l’agroalimentaire breton ». Dans le second article, les éleveurs ont créé une association « Les Z’Homnivores » revendique une démarche de communication positive et collective. Elle est soutenue par la Chambre d’agriculture. Mais pour compléter ses revenus, elle demande une obole de 10 centimes d’euro/habitant à 170 communes, histoire de discréditer les opposants, les journalistes.
En 2023, l’humoriste Pierre Jolivet s’est mué en cinéaste et créé un film « Les algues vertes », passé dans les grandes salles de cinéma. Avec un certain succès. Mais depuis, on n’a pas entendu dire que les choses avaient vraiment changé.
En 2025, Inès Léraud et Pierre Van Hove ont publié une bande dessinée : « L’histoire du remembrement ». Sujet qui n’est pas complètement étranger aux problèmes de l’agro-industrie en Bretagne…et ailleurs.
Dans le calendrier républicain, le 16 mars est le jour du pissenlit.
CHARLES DELESTRAINT
Le 12 mars 1879 est né Charles Delestraint à Biache-St-Vaast (Pas-de-Calais).
C’était un général, héros de la Résistance. Il fut le 1er chef de l’Armée secrète et il a été « Compagnon de la Libération ». Il a fait ses études secondaires chez les pères Maristes de Lille. Une fois terminées, il entre à l’Ecole militaire spéciale de Saint-Cyr en 1897.
Il en sort le 1er octobre 1900 avec le grade de sous-lieutenant et est intégré au 16ème bataillon de chasseurs à pied.
En décembre 1913, il est promu capitaine et en mars 1914, il entre à l’Ecole de guerre. Ça tombe bien puisque le 3 août, la France mobilise. Et durant, ce mois, Charles Delestraint s’illustre déjà à Haybes dans les Ardennes en permettant la jonction entre 2 armées.
Mais le 30 août, il est fait prisonnier et ne sera libéré qu’après l’armistice du 11 novembre 1918.
Néanmoins, il est promu colonel et conservera ce grade jusqu’en 1938, comme commandant de la 3ème brigade de chars stationnée à Metz. Parmi ses subordonnés, on compte le lieutenant-colonel Charles De Gaulle avec qui il a une même vision de l’utilisation des blindés.
En mars 1939, il passe tout de suite général de division (3 étoiles) et fait valoir son droit à la retraite.
Mais le 1er septembre 1939, c’est la « drôle de guerre » (les soldats restent terrés dans leurs casemates de la ligne Maginot). On a besoin de tout le monde. Charles Delestraint est rappelé comme général de corps d’armée (4 étoiles).
En mai 1940, la France est envahie. Le 2 juin 1940, Delestraint est à la tête du 1 er groupement de cuirassé. Devant l’avance allemande, il combat mais doit battre en retraite jusqu’à Valençay (Indre).
Comme De Gaulle, il refuse la défaite et entre en résistance dès juillet 1940. Après avoir quitté le camp de Caylus (Tarn-et-Garonne), il part pour Bourg-en-Bresse comme cadre de réserve en août 1942. Mais après avis d’Henry Fresnay (grand Résistant), de Jean Moulin et de De Gaulle, on confie à Charles Delestraint le commandement de l’Armée secrète (groupe de Résistants créé en septembre 1942). Il est chargé de regrouper tous les mouvements de la zone sud, comme « Combat », Libération Sud », « Franc-Tireur ». Cette fois, c’est lui qui devient subordonné de De Gaulle et prend le pseudonyme de « Vidal ». Avec Jean Moulin, il élargit le mouvement à la zone nord.
A la suite de mésententes entre Résistants, Delestraint est arrêté à la station de métro « La Muette » (XVIème arrondissement) par l’Abwehr (organisation de défense allemande), peu de temps avant l’arrestation de Jean Moulin (arrêté le 9 juin 1943). Après 50 heures d’interrogatoire, sans avoir parlé, il est envoyé à la maison d’arrêt de Fresnes (Seine-et-Oise, actuellement Val-de-Marne). De là, il est déporté au camp du Struthof en Alsace et en septembre 1944, il est envoyé au camp de Dachau, près de Munich.
Le 19 avril 1945, il est exécuté d’une balle dans la nuque, quelques jours avant l’arrivée des Alliés. Il est incinéré au crématoire du camp. A titre posthume, il est élevé au titre de Commandeur de la Légion d’honneur et de Compagnon de la Libération. Il lui est décerné la Croix de guerre. Son nom est gravé au Panthéon.
De nombreuses villes de France ont mis le nom de Charles Delestraint à une de leurs rues. A l’Ecole militaire de St-Cyr – Coëtquidan, la promotion 1988-1991 a été baptisée à son nom.
En 1977, il a été le sujet de l’émission de télévision « Les dossiers de l’écran ». Il a aussi été l’objet de nombreux ouvrages et le sujet de la thèse de doctorat François-Yves Guillin (historien de la Résistance), présentée à l’université de Lyon III en 1992.
Dans le calendrier républicain, le 12 mars est le jour du persil.
ELENA BATOURINA
Le 8 mars est la journée internationale de la femme que l’URSS fête depuis les années 20; or Elena (prononcer Yelena) Batourina est née le 8 mars 1963 à Moscou.
On est encore à la fin de l’ère de Khrouchtchev, comme Secrétaire général du PCUS (Parti Communiste de l’Union Soviétique).
Elle est issue d’une famille qui a vécu dans un de ces petits appartements exigus de l’époque. Mais cet exemple ne plaira peut-être pas aux féministes qui liront ce texte. En effet, on n’a pas affaire à une féministe qui a passé sa vie à se battre pour l’égalité des droits entre les femmes et les hommes, le droit de vote pour les femmes,
contre les discriminations et les violences dont elles sont victimes. Il faut de tout pour faire un monde….
Non, rien de tout cela. Elena Batourina est une oligarque devenue la femme la plus riche de Russie. D’après le magazine américain Forbes, elle est la 279ème fortune mondiale. Ce n’est pas Musk, mais ce n’est déjà pas mal. Cette fortune est estimée à 4,2 milliards de dollars !
C’est donc une femme d’affaires. Elle débute comme dessinatrice industrielle dans l’usine de son père, tout en continuant ses études. Celles-ci l’amènent à obtenir le diplôme d’ingénieure économiste dans le management. Elle occupe alors un poste au comité des coopératives de Moscou et en 1987, elle devient l’assistante de Iouri Loujkov (1936 – 2019), maire de Moscou de 1992 à 2010. Elle est membre du comité exécutif de la capitale.
Avec Loujkov, Elena s’entend très bien. Ils s’entendent tellement bien qu’en 1992, ils se marient. Cette même année, Boris Eltsine est le Président de la Fédération de Russie, la plus vaste des 15 républiques d’une URSS pas encore démantelée. Il désigne Loujkov maire de Moscou (on désigne, on n’élit pas encore). Puis, c’est la fin de l’URSS en décembre 1999.
Celui-ci, avec des idées novatrices est apprécié des Moscovites. Ca lui donne des idées, et surtout des ambitions : il envisage de se présenter à l’élection présidentielle de l’année de 2000. Dans ce but, il fonde un parti qu’il appelle « Patrie » qui fusionne avec « Toute la Russie », parti de Evgueni Primakov (1949 – 2015).
Seulement, en août 1999, Eltsine, un peu débordé, nomme Premier Ministre, un inconnu : Vladimir Poutine. Ce dernier ne tarde pas à se faire connaître par son action efficace et quelque peu brutale pour régler le problème des attentats tchétchènes de 1998. C’est la fin des ambitions de Loujkov qui accepte que son parti se rallie à Poutine pour l’élection présidentielle de 2000. Il vaut mieux être du bon côté.
Mais voilà que le 28 septembre 2010, il est accusé de corruption et limogé par Dmitri Medvedev devenu Président.
En novembre 2010, le couple Loujkov ose critiquer la politique de Poutine. Par précaution, le couple envoie ses deux filles faire leurs études à Londres ! Elles n’y auront pas de problème de logement, car Elena possède depuis 2008, une petite gentilhommière…de 65 pièces à Witanhurst au nord de Londres. On peut imaginer que ce ne seront pas les deux adolescentes qui feront le ménage !
En 1989, Elena avec son frère Viktor avait fondé Inteko, une entreprise fabriquant et commercialisant des seaux et plats en plastique. Pour faire fructifier leur entreprise, la Sberbank (grande banque russe) leur accorde un prêt de 6 millions de roubles. Et Loujkov, pendant qu’il était maire, n’avait pas manqué de développer ses affaires qui ont progressé rapidement en se diversifiant avec le BTP.
De 1999 à 2005, Viktor est vice-président d’Inteko. Il achète une cimenterie qui devient le principal fournisseur de la Russie, jusqu’à en avoir l’exclusivité. Donc, pas de problème de concurrence ! Il contrôle 20% de la construction à Moscou. Les affaires des Batourine prospèrent. Surtout pendant le mandat de maire de Loujkov. Comme par hasard….
En 1995, Inteko remporte le marché d’offres pour l’amélioration du stade Loujniki où se déroulera la finale de la coupe du monde de football pour 2018. La société remporte aussi le marché des assiettes pour la chaîne de restauration « Bistro Russkoe ». Des journalistes enquêtent et Elena est soupçonnée de corruption, car elle est devenue la femme la plus riche de Russie. On estime qu’entre 2005 et 2008, sa fortune a été multipliée par 3, passant de 1 à 3 milliards d’euros.
Le 9 octobre 2005, le directeur d’Inteko est sauvagement agressé. Il s’en sort, mais on comprend que c’est un message pour Elena. Ceci se confirme le 13 octobre, lorsque son avocat est assassiné. Elle a néanmoins confiance dans sa puissance pour continuer à se diversifier par la construction d’une cimenterie, de bureaux au Royaume-Uni et en Autriche. Elle achète des actions de Gazprom (hydrocarbures) et de Sverbank, investit dans la région de la Mer Noire (des hôtels à Sotchi, 72 000 hectares de terres agricoles, lait condensé). Elena ne s’arrête pas et fonde « Be open » pour la prospection en Russie. Lorsque son mari tombe en disgrâce en 2010, elle vend ses sociétés pour 1 milliard de dollars, pour investir dans hôtellerie partout dans le monde, mais plus particulièrement à Londres. Depuis 2009, elle possède un chalet à Kitzbühel (Autriche), un club de golf, des hôtels à Vienne et à Dublin.
En 2011, Loujkov subit des perquisitions dans son entreprise. Il est accusé de fraude et condamné à 7 ans de prison. Il en sort en 2016 et porte plainte contre…. Inteko ! Pour Elena, si la Russie va mal, c’est à cause de sa politique économique. Et comme tous les oligarques, en 2022, elle est visée par les sanctions occidentales, suite à la guerre en Ukraine. Mais jusqu’à présent, elles ne lui ont pas fait trop de mal. Dans le monde fermé des oligarques, il peut aussi y avoir une femme….
Dans le calendrier républicain, le 8 mars est le jour du mouron, plante appartenant à la famille des primulacées.
CLAIRE LACOMBE
Le 4 mars 1765 est née Claire Lacombe à Pamiers dans l’Ariège.
Avant 1789, elle était actrice à Marseille. Mais avec la Révolution, elle change complètement d’orientation.
En 1792, elle « monte » à Paris et rejoint le club des Cordeliers, appelé ainsi parce qu’il est installé dans un ancien couvent de Franciscains pauvres dont on disait qu’ils n’avaient qu’une corde pour nouer leurs vêtements. Ce club des Cordeliers était « Amis des droits de l’homme et du citoyen » conformément à la fameuse déclaration du 26 août 1789. On situe donc la jeune Claire Lacombe. D’ailleurs, ses idées se confirment le 25 juillet 1792, dans un discours à l’Assemblée nationale où elle affirme, entre autres : « ….Périsse jusqu’au dernier despote….. ». Elle a donc horreur du despotisme.
Après le 10 août 1792, dont on dit que c’est la « seconde Révolution », elle obtient la « Couronne civique » pour avoir participé à l’assaut du palais des Tuileries. Elle milite contre le chômage et contre l’accaparement des richesses.
Le 5 janvier 1793, avec Pauline Léon, elle crée la Société des Républicaines révolutionnaires. Pauline Léon était une révolutionnaire qui avait participé à la prise de la
Bastille le 14 juillet 1789. Comme elle, elle milite pour l’armement des femmes. C’est déjà une révolution à une époque où les femmes n’étaient guère prises au sérieux. Ainsi, un député montagnard s’est permis d’affirmer, parce qu’elle était belle : «Elle n’a d’autre mérite qu’un assez beau physique ». Sous-entendu : belle et con à la fois ! Il n’empêche que Claire Lacombe est éloquente, brillante, influente sur le peuple, à faire rougir de honte ce fameux député. Aujourd’hui, on dirait que c’est une influenceuse.
Le 12 mai 1793, avec les révolutionnaires, elle demande de porter les armes contre les Vendéens, restés royalistes et qui se soulèvent contre la Révolution. Elle participe aux journées insurrectionnelles du 31 mai au 2 juin 1793, destinées à se débarrasser des Girondins (qu’on situerait aujourd’hui au centre droit), opposés aux Montagnards (qu’on situerait à gauche, voire extrême gauche). Dans la foulée, elle demande que les nobles de l’armée soient destitués. Elle va encore plus loin puisque le 5 septembre 1793, elle demande l’épuration du gouvernement. Mais on ne pardonne rien à une jolie femme, surtout si elle a du talent et de l’influence. C’est pourquoi, les Jacobins – club pourtant révolutionnaire – l’accusent de supposés délits. On lui reproche, par exemple, d’avoir donné asile à des aristocrates. Faute considérée gravissime qui l’envoie en prison le 16 septembre 1793. Mais elle est vite relâchée. Peut-être n’avait-on pas assez de preuves ? Lorsqu’elle se présente au tribunal, elle y dénonce l’oppression dont sont victimes les femmes, puisqu’on a interdit les clubs féministes.
Claire Lacombe est de nouveau arrêtée le 2 avril 1794 avec Pauline Léon par le Comité de Sûreté Générale, instance créée par les députés de la Convention (assemblée des députés). Elles seront libérées le 20 août 1795. Là, Claire part à Nantes, redevient comédienne et ne s’engage plus politiquement.
Le 19 juin 1821, elle est internée comme aliénée à l’hôpital de la Salpêtrière de Paris. Victime d’une rupture d’anévrisme de l’aorte, elle meurt le 2 mai 1826. C’est la disparition d’une jolie femme qui s’est passionnément engagée puis qui a été déçue par la politique.
Malgré tout, elle n’a pas été complètement oubliée de la postérité. Claire Lacombe a été l’objet de plusieurs études historiques. La ville de La Rochelle et celle de Saint-Maximin (Oise) ont donné son nom à une de leurs rues. A Paris, dans le XIème arrondissement, on trouve une promenade à son nom et une place à La Courneuve (Hauts – de – Seine).
Dans le calendrier républicain, le 4 mars est le jour du velar (sorte de giroflée).
CRÉATION DES DÉPARTEMENTS
Le 26 février 1790, l’Assemblée constituante crée les départements.
Jusque-là, la France était partagée en provinces de tailles très variées avec à leurs têtes un comte, un duc, un baron. Enfin quelqu’un devant qui le peuple composé à 90% de paysans, devait lever son chapeau ou son béret. Mais ça c’était avant la Révolution de 1789. Dès 1790, il est donc décidé un découpage en 83 départements, selon le cartographe Cassini. Chacun ayant un chef-lieu situé de telle façon que de tout le département, on pouvait le rejoindre en une journée de cheval. En principe, car ça ne sera pas partout respecté comme c’est le cas pour la Charente-Inférieure (Charente-Maritime actuellement) qui est un département allongé et La Rochelle se trouve excentrée au nord.
Il est prévu que le rôle des départements soit d’administrer de façon à peu près uniforme, l’ensemble du territoire. La loi du 10 août 1871 fait du département une collectivité territoriale avec pour le diriger un conseil général élu au suffrage universel (seulement masculin jusqu’en 1945) pour 6 ans, à raison d’un conseiller par canton.
1982, elle devient une collectivité territoriale de plein exercice. En clair, elle est autonome. En principe, car dès le 17 février 1800 (28 pluviose de l’an VIII, en langage républicain), Bonaparte, 1er Consul, crée les préfectures qui imposent la présence de l’Etat dans chaque département. Le conseil général est donc libre de faire ce que lui dit le préfet….Bon d’accord, je caricature, mais il y a de ça. En fait, il est chargé de l’administration et doit faire appliquer les directives « d’en haut ». Il y a une hiérarchie puisqu’il y a des sous-préfets dont le nombre est variable selon l’importance du département. Le cas du département du Var est original : il porte le nom d’une rivière qui ne le traverse pas.
On doit l’explication à l’histoire : en 1859, Napoléon III avait aidé victorieusement le Piémont-Sardaigne à se débarrasser de la domination autrichienne. En récompense, la France a reçu le comté de Nice, transformé en département des Alpes-Maritimes. Mais étant très petit, on lui a ajouté une partie du Var, là où justement passe le fleuve.
Malgré une volonté d’uniformisation, il y a de grandes disparités entre les départements. Ainsi, le plus étendu est la Guyane avec 83 574 km2. Si on reste en métropole, c’est la Gironde avec 10 000 km2 . A l’inverse, la Seine-Saint-Denis n’a que 236 km2 . Pour la population, c’est le département du Nord (qui a gardé son nom) qui est le plus peuplé : 2,6 millions d’habitants (plus que Paris avec 2,1 millions). Tandis que la Lozère n’a que 76 500 habitants.
En 2011, le conseil général devient conseil départemental. A part le vocabulaire, ça ne change pas grand-chose. Un crâne d’œuf d’un ministère a dû trouver que ça présentait mieux. Des conseils départementaux, il y en a 95 : un par département, sauf à Paris, à la Martinique et en Guyane. A Paris, le conseil municipal est aussi conseil départemental (les élus touchent donc les 2 indemnités !). En Martinique et en Guyane, le conseil départemental est aussi conseil régional (et là aussi, les élus perçoivent les 2 indemnités). La Corse, pourtant peu peuplée a été divisée en 2 départements le 11 janvier 2018. Cela fait plus de conseillers à indemniser !! Quant aux deux départements alsaciens, Bas-Rhin et Haut-Rhin, ils sont remplacés par la collectivité européenne d’Alsace le 11 janvier 2021. Histoire de faire semblant de respecter leur particularité historique et peut-être de faire plaisir aux tenants de l’autonomie. Pourtant, ils sont intégrés dans la région Grand Est dont le chef-lieu ..Strasbourg, la grande métropole alsacienne!
Combien gagne un(e) conseiller(e) départemental(e) ? ça dépend de l’importance du département. Ce n’est pas un salaire, c’est une indemnité qui vient s’ajouter au salaire du conseiller s’il en a un ou à sa retraite. C’est progressif et cela va jusqu’à 5 924€ pour le président, si le département a plus de 1,250 million d’habitants. Quant aux conseillers, cela va de 1 556 € pour moins de 250 000 habitants à 2 723 € pour plus de 1,250 million d’habitants. On comprend que la place n’est pas mauvaise et qu’on ne manque pas de candidats.
En 1970, pour la première fois, une femme est élue présidente d’un conseil départemental : Evelyne Baylet dans le Tarn-et-Garonne. Pendant longtemps, les conseils généraux puis départementaux ont été largement – voire exclusivement – masculins. Ce n’est que depuis 2008 que tout candidat à l’élection doit avoir un suppléant de sexe opposé.
Depuis 2015, les femmes représentent 50% des conseillers. Le renouvellement des conseillers, élus pour 6 ans, se fait par tiers.
En 1790, sur 83 départements, 63 portent un nom de rivière. A ce moment-là, on ne s’offusquait pas de l’appellation bas, inférieur ou encore nord. Or depuis la seconde moitié du XXème siècle, on est devenus chatouilleux sur ce plan. Ainsi, la Seine-Inférieure s’est appelée Seine-Maritime, même chose pour la Charente-Inférieure. Quant à la Loire-Inférieure, elle est devenue Atlantique, comme les Basses-Pyrénées, devenues Atlantiques. Seuls le Bas-Rhin a conservé son appellation ainsi que le département du Nord. Mais où on a cogité, c’est pour les Basses-Alpes qu’on a transformées en Alpes de Haute-Provence. On a réussi à y intégrer l’adjectif haute. Pour la Corse récemment divisée en 2, on a la Corse du Sud. Mais l’autre, celle du nord, s’appelle Haute-Corse (puisque c’est là qu’il y a le point culminant de l’île : le Monte Cinto à 2710 mètres).
Et puis, on a estimé que le département est une unité administrative trop petite. Le 5 juillet 1972, la France a été divisée en 22 régions, tout en conservant les départements. Ce qui fait une administration supplémentaire, donc plus de monde à indemniser. Ainsi, tout le monde est content. Sauf le contribuable à qui on ne demande pas son avis. Pour leurs noms, la Révolution étant loin, on n’a pas eu de scrupules à reprendre ceux d’anciennes provinces comme : Champagne, Bourgogne, Poitou, Auvergne, Provence, Bretagne, etc…
Mais, le 3 juin 2014, on est passé de 22 à 14 régions, en alliant 2 anciennes régions ou plus. Ainsi, la Nouvelle Aquitaine rassemble l’Aquitaine, le Poitou-Charentes et le Limousin. Combinaison un peu artificielle car ces régions n’ont pas la même histoire, ni la même géologie (le Limousin fait partie du Massif Central), ni la même culture (le Poitou est un pays de langue d’oïl, contrairement aux autres qui sont de langue d’oc). Il a fallu leur donner un nom. Là non plus, on ne veut pas du nord. Si bien que la nouvelle région du nord qui rassemble Nord-Pas-de-Calais et Picardie s’appelle « Hauts-de-France ». On aurait pu penser que ce nom aurait été donné à une région des Alpes. Que nenni, Hauts-de-France parce que c’est en haut de la carte. C’est un non-sens géographique, d’autant qu’il s’agit de la partie la plus basse de la France. Si on suit le raisonnement, les Hauts de France sont en bas de la Belgique ! Par analogie, qu’auraient dit les habitants de l’Occitanie, la plus méridionale, si on l’avait appelée « Bas-de-France » ? Tout cela apparaît d’une grande puérilité. La région Grand Est rassemble l’Alsace, la Lorraine et la Champagne-Ardenne. Or des Alsaciens militent pour l’autonomie de leur région et répugnent de se voir associés à la Champagne-Ardenne. On s’amuse bien dans les ministères et dans les administrations régionales….
Dans le calendrier républicain, le 26 février est le jour de la violette.
GEORGES CLOAREC
Le 21 février 1944, Georges Cloarec a été fusillé au Mont Valérien.
Il était né dans un village de l’Eure le 22 décembre 1923. Il était un Résistant français volontaire dans les FTP-MOÏ(Francs-Tireurs et Partisans – Main d’Oeuvre Immigrée) du groupe Manouchian. De parents bretons, comme l’indique son patronyme, il est devenu ouvrier agricole à 15 ans, après son certificat d’études.
Quand en mai 1940, les Allemands ont occupé la zone nord et Paris, il passe clandestinement dans la zone sud pour tenter de rejoindre les FFL (Forces Françaises Libres) à Londres. Mais il est jugé trop jeune.
À 18 ans, il s’engage dans la Marine à Toulon. Là, il estime que les ordres des supérieurs sont un peu trop pétainistes. Il se met à crier : « A bas la collaboration ! ». Il est mis aux fers (incarcéré). Libéré, il retourne en zone nord, chez ses parents. De là, il se rend à Paris pour être intégré au 3ème détachement des FTP-MOÏ de la région parisienne. Ceux-ci sont proches du Parti communiste et des étrangers.
Le 22 novembre 1943, Georges Cloarec participe à l’attaque d’un convoi de fonds allemand. Il est arrêté avec les autres membres du groupe par les Brigades spéciales de la préfecture de police de Paris créées en 1941. Celles-ci recherchent les « ennemis de l’intérieur », c’est-à-dire : les communistes et les étrangers. Il est jugé le 15 février avec les 13 membres du groupe Manouchian. Tous sont condamnés à mort et fusillés le 21 février 1944.
Cloarec n’avait que 20 ans et donc mineur – on était majeur à 21 ans à cette époque.
Dans sa lettre à sa famille, il a écrit : « J’ai fait mon devoir de soldat. Rien n’est plus beau que de mourir pour la France ».
Georges Cloarec a été reconnu « Mort pour la France ».
Des plaques commémoratives ont été placées en son honneur à Paris, à Marseille, à la gare d’Evry (Essonne), au Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis). Il est cité sur le monument aux morts de La Madeleine-Nonancourt (Eure).
Le 21 février 2024, il a été cité lors de la panthéonisation de Missak Manouchian, en présence du Président de la République, Emmanuel Macron.
Dans le calendrier républicain, le 21 février est le jour du violier (giroflée des
LA BATAILLE D'IWO JIMA
Le 19 février 1945 a commencé la bataille d’Iwo Jima qui a duré jusqu’au 26 mars 1945.
L’île d’Iwo Jima est à environ 1 000 km au sud de Tokyo, dans l’archipel japonais d’Ogasawara dans la mer des Philippines.
Elle a une petite superficie : 21 km2 et se compose d’une surface plane, surmonté d’un volcan éteint, le Suribachi qui culmine à 170 mètres.
Cette île a été un théâtre de l’affrontement entre Etats-Unis et Japon au cours de la 2de Guerre mondiale (1941 – 1945, concernant ces deux Etats).
Le 19 février 1945, les Etats-Unis y lancent un assaut pour prendre possession des aéroports d’où partent les avions japonais pour bombarder la flotte américaine. Ils décident de s’y installer dès décembre 1944. L’entreprise est difficile car les Japonais y ont une garnison de 22 000 hommes, bien protégée par des galeries souterraines creusées dans le basalte, roche solide.
Au début de 1945, le Japon est copieusement bombardé depuis les îles Mariannes (archipel situé à l’est des Philippines).
Pour l’île d’Iwo Jima, ce sera d’août à octobre. Les Américains disposaient d’un effectif total de 70 000 hommes. La bataille a été féroce. Les Américains y ont laissé 6 800 morts, 20 000 blessés et 490 disparus. Quant au Japon, la presque totalité de sa garnison a été éliminée (20 700 tués, 1 150 disparus). Le but des Américains était de contrôler les 3 aérodromes.
A partir du 16 février, Iwo Jima a été pilonnée par les airs et par la mer. Pilonnage sans grands effets car les défenses sont bien enterrées. Des contre-attaques suicides détruisent de nombreux chars. Néanmoins, une tête de pont est assurée. Il a fallu attaquer au lance-flammes et à la grenade pour déloger les soldats japonais cachés dans leur protection de basalte.
Le 23 février, les Américains plantent leur drapeau sur le mont Suribachi. La scène a été immortalisée par le photographe Joe Rosenthal. La photo a fait le tour du monde et se retrouve dans tous les manuels scolaires d’histoire. Elle a pour titre : «Raising the flag on Iwo Jima ».
Le 25 février après que les Américains aient pris le contrôle des 3 aéroports, les derniers combattants japonais se suicident plutôt que de se rendre, conformément à leur tradition. 216 sont quand même faits prisonniers.
Le 15 mars, toute l’île est prise et le 25 mars, c’est la destruction du dernier blockhaus dans lequel il n’y aura aucun survivant. A partir de là, l’archipel japonais est cerné. Et malgré la férocité des combats aéronavals et les kamikazes, le Japon devra capituler le 2 septembre 1945 après avoir été anéanti par le largage de bombes atomiques sur Hiroshima (6 août 1945) et Nagasaki (9 août 1945).
Dans le calendrier républicain, le 19 février est le jour du tussilage (plante herbacée utilisée en phytothérapie).
BERTY ALBRECHT
Le 15 février 1893 est née Berthe Pauline Mariette Wild à Marseille.
C’est une militante de gauche, féministe, antifasciste, résistante.
C’est une des six femmes « Compagnons de la Libération », ainsi qu’une des deux femmes inhumées dans le Mémorial de la France combattante au Mont Valérien.
Berty Wild est issue d’une famille protestante de la bourgeoisie marseillaise. Elle fait des études au lycée Mongrand de Marseille et en 1912, elle a un diplôme
d’infirmière. Puis, elle part à Londres pour travailler comme surveillante dans un pensionnat de jeunes filles.
Lorsqu’éclate la guerre en 1914, elle revient à Marseille pour travailler dans la Croix Rouge, pour le compte d’un hôpital militaire.
Elle se marie en 1918 à Rotterdam, avec un banquier Frédéric Albrecht, avec qui elle aura deux enfants.
En été 1924, le couple s’installe à Londres. Là, Berthe appelée Berty, rencontre des féministes, entre autres Sylvia Pankhurst, militante communiste, anti colonialiste, antiraciste.
En 1927, elle adhère à la Ligue mondiale pour la réforme sexuelle.
Le couple se sépare en 1931 , elle s’installe à Paris où elle se lie avec Victor Basch, professeur à la Sorbonne, président de la LDH (Ligue des Droits de l’Homme,
fondée en 1898).
En 1932, elle est secrétaire de l’association d’études sexologiques. Une année plus tard, elle crée une revue féministe : « Le problème sexuel » où elle défend le droit
à la contraception, très incertaine à l’époque et le droit à l’avortement, sévèrement réprimé.
En 1933 elle reçoit dans sa maison de Sainte-Maxime (Bouches-du-Rhône) des réfugiés allemands juifs et dissidents. En automne 1934, en bonne communiste, elle se rend en URSS et en revient très déçue. Le système n’est pas ce qu’elle croyait. Elle y a constaté de grandes inégalités entre les apparatchiks et le peuple, ainsi que de beaux gaspillages.
Revenue, Berty Albrecht participe à la création du « Comité mondial des femmes contre la guerre et le fascisme ».
En 1935, elle contribue à la Fondation du Comité d’aide à l’Ethiopie, alors attaquée par l’Italie fasciste. Avec le résistant le capitaine Fresnay, ils organisent le mouvement « Combat » qui aide les Républicains espagnols contre les Franquistes. Malgré des différences de points de vue, ils deviennent amants. L’un n’empêche pas l’autre !
Puis en 1937, c’est la formation à l’école des surintendantes d’usines (sortes d’assistantes sociales). Elle travaille à la fabrication d’instruments d’optique dans les usines Fulmen d’Ivry (Seine-et-Oise, aujourd’hui Hauts de Seine) et de Vierzon (Cher).
A partir de 1940, ensemble ils sont de toutes les initiatives au sein d’un mouvement, qui en 1941, s’appellera « Combat ». Ensemble aussi, ils reconnaissent l’autorité de De Gaulle, qui pour eux, représente réellement la Résistance.
En 1941, Berty s’engage comme inspectrice du chômage féminin à Lyon. Elle est donc fonctionnaire de l’Etat français. Mais comme elle est une militante connue, déjà avant la guerre, elle est donc surveillée par la police. D’autant qu’elle organise le service social en zone libre pour aider les militants emprisonnés. Si bien qu’elle est arrêtée en janvier 1942, mais vite libérée à condition de démissionner.
En avril 1942, elle est à nouveau arrêtée et internée à Vals-les-Bains (Ardèche). Cette fois, c’est sérieux. Elle entame une grève de la faim pour éviter la déportation. Elle est transférée dans un hôpital de Lyon.
Quand, le 11 novembre 1942, les Allemands envahissent la zone libre, elle se fait passer pour folle. Elle est internée dans un hôpital psychiatrique à Bron (banlieue de Lyon), dont elle s’évade le 23 décembre grâce à un groupe de « Combat ». Pas si folle que ça…..Berty Albrecht se réfugie dans la clandestinité dans les montagnes boisées des Cévennes.
Elle s’appelle désormais Victoria et retrouve Fresnay en février 1943. Malgré ses nombreux changements de lieux et de pseudonymes, elle est piégée par Klaus Barbie qui la torture à l’hôtel Terminus de Mâcon (Saône-et-Loire).
Le 31 mars 1943, elle est transférée à la prison de Fresnes où on pense qu’elle s’est suicidée, plutôt que de parler. Elle est enterrée dans le potager de la prison où sa dépouille y est retrouvée en mai 1945.
C’est après la guerre que le gouvernement fait ériger un mémorial à la France Combattante au Mont-Valérien. Berty Albrecht sera l’une des six femmes à y figurer. La
cérémonie a lieu le 11 novembre 1945.
Dans le musée d’histoire de Marseille est exposé le courrier écrit lors de son emprisonnement.
Outre la médaille des Compagnons de la Libération, il lui est attribué la médaille militaire, la Croix de guerre (1939-1945), la médaille de la Résistance française.
Un parc de Grenoble porte son nom, ainsi qu’un centre social d’Aubervilliers. Plusieurs villes ont donné le nom de Berty Albrecht à une de leurs rues ou places. Des plaques commémoratives ont été apposées à Paris et à Mâcon. Elle a été le sujet de nombreux livres et émissions de radio. Elle figure dans le dictionnaire universel des créatrices.
Cette femme audacieuse et courageuse n’a pas été oubliée par l’histoire.
Dans le calendrier révolutionnaire, le 15 février est le jour du noisetier.
HARRY WU
Harry Wu (ou encore Wu Hongda) est né le 8 février 1937 à Shanghaï.
Il est issu d’une famille bourgeoise aisée, catholique, de 8 enfants.
Cette vie est bouleversée en 1949, avec la révolution maoïste. En 1955, il fait des études de géologie à Pékin. Il sera donc un dissident chinois de religion catholique, étiqueté contre-révolutionnaire par le gouvernement chinois. On sait ce que cela veut dire.
C’est si vrai qu’il a été en prison de 1960 à 1979, dans le laogaï (système de camps de rééducation par le travail, créé par Mao). Il y survit en devenant une « bête », comme il a dit : manger des rats….. Il avait néanmoins conservé avec lui « Les Misérables » de Victor Hugo.
Il a été enseignant à l’université de géoscience de Wuhan, agglomération de plus de 10 000 000 d’habitants, située au centre de la Chine, traversée par le Yang Tsé Kiang (encore appelé Fleuve Rouge).
Pourtant en 1957, il avait participé à la campagne des « Cent Fleurs » de février à juin. Campagne qui avait pour but de redonner une certaine liberté d’expression pour
critiquer le Parti. Mais il s’en est suivi une répression féroce qui a abouti à des centaines de milliers de victimes (arrestations, déportations, exécutions).
A sa libération, il a été invité aux Etats-Unis comme enseignant chercheur à l’université de Berkeley (Californie) de 1985 à 1987, puis à l’Institut Hoover de Stanford, toujours en Californie. Mal rémunéré au début, il est obligé de trouver un travail à côté.
Voilà qu’en 1992, la Chine publie « the Human Rights Situation in China », histoire d’évoquer les critiques sur les travaux forcés. Harry Wu y répond en créant, avec un Français, à Washington, la « Laogaï Research Foundation » (Organisation Non Gouvernementale pour la défense des droits et des libertés).
En 1994, après avoir été naturalisé américain, Harry Wu écrit « Vents amers » où il raconte ses années passées dans les camps où, entre autres, on pratiquait le
prélèvement d’organes.
L’année suivante, il publie un document secret avec le nom de 49 personnes interdites d’entrer en Chine. Néanmoins, il ose entrer en Chine, il est immédiatement arrêté et accusé d’espionnage. Il est enfermé pendant 70 jours, puis expulsé à la suite de pressions d’Hillary Clinton, épouse du Président américain qui préconise de boycotter la Chine.
En 2002, on lui refuse l’entrée à Hong Kong pour, officiellement, « raisons de sécurité », notions bien floues. Il parvient néanmoins à faire entrer le terme de laogaï dans l’Oxford English Dictionary, puis dans ceux des langues française, allemande, italienne.
En avril 2008, il dirige la Yahoo Human Rights pour soutenir les familles des dissidents. Au mois de novembre suivant, il inaugure à Washington le musée du laogaï pour dénoncer les atrocités du régime chinois. Si bien qu’en 2013, la Chine mettra fin au laogaï et aux travaux forcés. Ce qui ne signifie pas que le régime s’est assoupli, mais qu’il a trouvé d’autres types de sanctions.
Harry Wu est pressenti pour l’attribution du prix Nobel de la paix. En vain.
Au printemps 2010, en vacances au Honduras, il meurt le 26 avril, laissant une veuve et un fils.
Dans le calendrier révolutionnaire, le 8 février est le jour de la serpette.
DANIÈLLE DÉCURÉ
Le 4 février 1942 est née Danielle Décuré à Bourg-en-Bresse (Ain).
C’est une aviatrice qui a été la première femme pilote de ligne et commandante de bord.
En 1960, à 18 ans, elle passe un brevet de pilote de planeur. Dès 1961, elle envisage d’être pilote de ligne. Problème : l’ENAC (Ecole Nationale d’Aviation Civile) n’accepte que des hommes.
Ce qui ne l’empêche pas en 1967 d’établir un record de distance sur avion privé. Ayant fait ses preuves, elle devient pilote professionnelle en 1969. C’est « Europe Falcon » qui l’emploie sur des « Mystère 20 ». Dans cette société, elle passe au statut de commandante de bord en 1971. Trois en plus tard, elle entre à Air France comme pilote de ligne. Elle est donc la première femme à être pilote de ligne mais n’allons pas trop vite : ce sera dans l’Aéropostale sur des « Fokkers » (avions néerlandais). Jusque-là, ni Air France, ni ses passagers ne sont prêts à confier un poste de haute responsabilité à une femme.
Malgré les difficultés – disons les bâtons dans les roues et grâce à sa volonté – le 7 avril 1975, on lui confie un Airbus A300 où elle commandante de bord. Il y a eu un tel émoi qu’en 1982 elle écrira un livre : « Vous avez vu le pilote ? C’est une femme ! ». L’ouvrage obtiendra le prix Marcel Pullitzer (1888 – 1981, journaliste et homme de lettres), prix littéraire créé en 1953. Elle y note, entre autres : « Le sexe des garçons leur sert à tout : faire la guerre, être président, directeur, aviateur, commander,
légiférer et accessoirement à faire des enfants et même à faire pipi ».
Pour être pilote de ligne, il faut une licence ATPL (Airline Transport Pilot Licence), qui en France est délivrée par la DGAC (Direction Générale de l’Action Civile). C’est une licence européenne. Pour l’obtenir, les épreuves sont spécialement rigoureuses. L’examen comprend deux parties: une théorique et une pratique.
* Partie théorique qui comprend 14 certificats. Pour les réussir, il faut :
. Obtenir au moins 75% à chacun de ces certificats ;
. Les présenter en 6 sessions au maximum ;
. Ne pas échouer plus de 4 fois pour un même module ;
. Respecter un délai de 18 mois pour valider l’ensemble des certificats.
* Partie pratique :
. Avoir un minimum de 1 500 heures de vol dont 500 en multi-pilotes (100 au minimum en simulateur de vol), 250 heures comme commandant de bord, 200 heures de vol en campagne comme commandant de bord, 75 heures de vol aux instruments, 100 heures de vol de nuit ;
. Maîtrise de la langue anglaise.
Donc, Danielle Décuré a passé avec succès toutes ces épreuves et malgré cela, Air France a mis du temps à lui faire confiance. Néanmoins, elle a ouvert la voie à d’autres femmes pilotes et même mécaniciennes de bord.
Ainsi, actuellement, Air France compte 9% de femmes commandantes de bord. C’est bien peu, mais il faut tenir compte que c’est une évolution récente. Il arrivera même que le 8 février 1985, l’équipage (pilote et copilote) sera entièrement féminin.
Le 19 novembre 2001, Béatrice Vialle sera la première femme en France à piloter le Concorde (il y en a une autre en Angleterre). Longtemps, les femmes ont été cantonnées au rôle d’hôtesses de l’air. Désormais, elles ont pu accéder à la responsabilité suprême dans un avion de ligne.
Dans le calendrier révolutionnaire, le 4 février est le jour du buis.
LE STROMBOLI
Le 2 février 1934, le volcan italien Stromboli a eu une éruption violente.
Ce volcan occupe une île de 12,6 km2, et culmine à 924 mètres. Il fait partie des îles Lipari, appartenant à l’archipel des Eoliennes, situé à une soixantaine de kilomètres au nord de la Sicile et à une soixantaine de kilomètres à l’ouest de la Calabre.
Administrativement, il appartient à la commune de Lipari. Il s’agit d’un stratovolcan c’est-à-dire qu’il est composé de couches régulières de lave. Cela est dû à la fréquence et à la régularité de ses éruptions qui peuvent se produire toutes les 10 minutes à peu près, mais avec des intensités variables.
Le Stromboli s’est formé il y a environ 5 000 ans, donc relativement récemment, à la suite d’une éruption sous-marine. Il a pris naissance à 2 000 mètres sous la mer. Cette éruption de 1934 a provoqué la chute de produits incandescents sur le côté nord-ouest, formant une « sciara des fuoco » (allée de feu). L’explosion a été entendue jusqu’à une soixantaine de kilomètres. C’est une des plus graves éruptions des temps modernes.
Mais il y en eut bien d’autres avant et après. Par exemple en 1916 et 1919, des blocs de plusieurs tonnes ont causé des destructions dans les villages de San Bertolo et Ginostra où il y a eu 6 morts. Un raz-de-marée a suivi.
Le 30 décembre 2002, un éboulement si important s’est produit dans l’allée du feu qu’il a entraîné un tsunami.
Le 5 avril 2003, une violente explosion a été entendue à Ginostra. Depuis, l’accès au sommet a été interdit.
Le 27 février 2007 : coulées dans la mer, explosions le 5 mars, et encore en 2010, 2013, 2014….
Or, l’île est habitée depuis l’Antiquité. On y a pratiqué l’agriculture traditionnelle de pays méditerranéen : blé, vigne, olivier et bien sûr la pêche. L’île exportait des pouzzolanes (scories volcaniques). Mais dans les années 30, la vigne a été victime du mildiou. Ce qui a entraîné des départs. L’émigration s’est faite vers l’Australie, l’Amérique ou tout simplement vers la Sicile.
C’est à partir des années 50 que s’est développé le tourisme. On commence à connaître l’île grâce au roman de Jules Verne : « Voyage au centre de la Terre » (1864) et surtout avec le film de Roberto Rossellini (1906 – 1977) : « Stromboli, terra di dio ».
Environ 350 habitants vivent sur l’île et elle atteint 3 500 à 5 000 habitants en période touristique. Le tourisme est même devenu la principale ressource économique pour Ginestra, le plus petit port de toute l’Italie.
Néanmoins, il y a une école primaire, un collège où on ne doit pas être débordés par les effectifs. Les excursions ne sont possibles sur les pentes du volcan qu’avec des guides. Et depuis avril 2023, il n’est plus possible de monter au-delà de 400 mètres d’altitude, mesures de sécurité nécessaires face à l’afflux de visiteurs et à l’inconscience de quelques touristes.
Le Stromboli est un volcan typique par sa forme, son type d’éruption et d’activité. On parle de volcans stromboliens pour ceux qui lui ressemblent dans le monde.
Dans le calendrier républicain, le 2 février est le jour de l’avelinier (variété de noisetier).
LEYMAH GBOWEE
Le 1er février 1972, est née Leymah Gbowee à Monrovia, capitale du Libéria.
Elle est la quatrième fille de la famille. «Encore une fille ! » s’est-on écrié.
Son pays a été créé par d’anciens esclaves d’Amérique, revenus après avoir été libérés.
Très bonne élève, elle rêvait de devenir médecin. Elle sera finalement travailleuse sociale et une militante pour la paix en Afrique.
En 1989, commence la guerre civile au Liberia et qui va durer jusqu’en 1996. Elle quitte son pays avec ses 2 enfants victimes des violences de leur père pour se retrouver au Ghana, séparé du Liberia par la Côte d’Ivoire. Comme elle y connaît une grande pauvreté, elle revient dans son pays d’origine.
Leymah intègre alors le « Mother Patern College of Health Sciences. Cet organisme est fondé en 1989 par l’archidiocèse de Monrovia. Il sert à préparer les mères et futures mères et à protéger la santé de leurs enfants. Puis elle est volontaire pour participer au programme social de l’Eglise luthérienne du Liberia. Ce programme consiste à préparer la guérison des conséquences liées aux traumatismes de la guerre et à la réconciliation.
Pendant la guerre civile, elle a œuvré pour la paix.
En 1991 sont réunis pasteurs, chefs laïcs, enseignants, personnels de santé dans la Christian Health Association of Liberia. Elle a pour but de réparer les dommages psychiques de la guerre. Elle veut aussi guérir et réhabiliter les nombreux anciens enfants soldats, souvent utilisés dans les différents conflits en Afrique.
Selon Leymah Gbowee, les changements doivent être apportés par les mères et donc impliquer les femmes du Liberia.
Au printemps 1999, elle est présentée à Samuel Gbaydee Doe, diplômé d’une université chrétienne des Etats-Unis.
Celui-ci a créé en 1998, le WANEP (West Africa Network for Peacebuilding), dont le siège est à Accra (capitale du Ghana). Le but de cet organisme est de prévenir les conflits.
Formée par le WANEP, Leymah devient la cheffe de file du mouvement des femmes. Elle s’allie avec une femme mandingue (ethnie de l’Afrique occidentale) qui est musulmane. Ensemble, elles vont dans les mosquées le vendredi, sur les marchés le samedi, à l’église et au temple le dimanche. Elles distribuent des tracts sur lesquels elles ont écrit : « Femmes, réveillez-vous, vos enfants sont tués, nous sommes maltraitées ».
Au cours de l’été 2002, Leymah Gbowee est reconnue porte-parole et dirigeante de l’action de masse des femmes du Liberia pour la parité. Ce mouvement tire ses origines dans le chant et la prière. Elles organisent des manifestations non violentes contre le Président en place : Charles Taylor (Président du 4 août 1997 au 11 août 2003).
Justement, le 23 avril 2003, il la reçoit. Il promet des négociations pour la paix et la réconciliation. Mais on sait ce que valent des promesses. Pourtant Leymah parvient à faire passer un message par le biais du général Abubakar qui l’annonce ainsi : « La salle de réunion pour la paix a été investie par le général Leymah et ses troupes ». Après avoir enlevé leurs vêtements (gestes graves devant des hommes), elles sont restées assises à l’extérieur de la salle des négociations. Gestes symboliques qui leur permettent d’avoir gain de cause car la guerre du Libéria prend fin le 18 août 2003.
Et en 2005, une femme est élue Présidente du Libéria : Ellen Johnson Sirleaf.
En 2011, toutes deux seront prix Nobel de la paix. Ensuite, l’ONU envoie une délégation pour maintenir la paix. Mais Leymah est déçue car cette délégation ne comprend rien à la culture locale que, d’ailleurs elle paraît mépriser.
Néanmoins, elle est récompensée par l’université de Harvard. On lui attribue le titre de Docteure Honoris Causa de plusieurs universités :
-Rhodes en Afrique du Sud
– Alberta au Canada ;
– Dartmouth College dans le New Hampshire.
Avec Carol Milthers, elle publie « Votre force est infinie ».
Pénélope Bagieu lui a consacré une bande dessinée dans son ouvrage : « Culottées » (tome 1).
La journaliste Annick Cojean a écrit : « Leymah Gbowee, la guerrière de la paix » (2019)
Dans le calendrier révolutionnaire, le 1er février est le jour du laurier.
LE BLOCUS DE LENINGRAD
Le 27 janvier 1944 se termine le blocus de Leningrad.
Les Russes utilisent plutôt le terme de blocus plutôt que de siège qui avait commencé le 8 septembre 1941, c’est-à-dire à peu près un mois et demi après l’attaque de l’URSS par les nazis.
On dit que ce sont les 900 jours de Leningrad. En fait, il a duré exactement 872 jours.
Pendant ces presque trois années, ce fut une terrible épreuve, quasiment inhumaine pour les habitants de la deuxième ville d’URSS (plus de 3 millions).
Les armées ennemies sont composées de la Wehrmacht, complétée par des éléments finlandais et des Espagnols.
Quant à l’Armée rouge, elle est commandée par les généraux Vorochilov, puis Joukov.
Ce blocus a fait 1 million de morts parmi les civils auxquels il faut ajouter 450 000 militaires.
Au 27 janvier 1944, il ne restait plus que 600 000 survivants.
Plus d’un million de personnes ont pu être évacuées. La ville a été presque totalement encerclée.
Ce fut le plus long siège de l’histoire (il sera dépassé dans les années 90 par le siège de Sarajevo qui a duré 1425 jours).
Déjà, le 19 août 1941, des affrontements se produisent avec la 1ère division blindée soviétique. La route et la voie ferrée vers Moscou sont coupées.
Le 30 août la petite ville de Mga, près du lac Ladoga, au nord-est de Leningrad est prise par les Allemands. L’isolement est pratiquement complet.
Le 4 septembre commencent les bombardements et le surlendemain, le Kampfgruppen attaque vers le lac Ladoga. Mais le 7 septembre, l’Armée rouge parvient à
ouvrir une brèche qui permettra des évacuations et un peu de ravitaillement. Mis à part ça, on peut quand même dire que Leningrad est coupée du reste de l’URSS.
Cette brèche sera appelée « la route de la vie ».
Les Allemands avancent toujours malgré la défense assurée par Joukov. Ils sont à l’usine Kirov qui fabrique des locomotives et des chars, dans la banlieue sud-ouest. Elle avait joué un rôle décisif dans la révolution de 1917. Ce n’est qu’en fin septembre que le front s’est stabilisé.
Mais Tsarskoe Celo n’est qu’à une dizaine de kilomètres de Leningrad et se trouve sur une des rares hauteurs du secteur. De là, les bombardements sont faciles. Et la Wehrmacht ne va pas se gêner pour détruire les silos de ravitaillement car Hitler décide le blocus alimentaire.
Dans la ville, on tente de s’organiser en créant des milices civiles armées pour veiller aux pillages.
Début octobre 1941, il ne reste que 30 jours de viande, 45 jours de matières grasses. On instaure des cartes d’alimentation. L’électricité est coupée, il n’y a plus de tramways dès novembre 1941. Mais le peuple s’efforce de résister.
A la radio, la poétesse Olga Bergholtz, par ses mots, la douceur de sa voix prodigue des encouragements.
A partir de décembre, du ravitaillement arrive par camions via le lac Ladoga gelé. Il y a même assez de glace pour supporter une ligne de chemin de fer. Ce qui permet, outre le ravitaillement, d’évacuer des milliers de personnes, mais aussi les œuvres d’art du palais d’hiver (aujourd’hui musée de l’Ermitage). Il y avait une incroyable foi en l’avenir en s’efforçant de préserver l’art et les monuments alors qu’on meurt de faim et de froid.
Bien sûr, dans ces conditions, il y eut des actes effroyables, comme des actes de cannibalisme, à partir de l’hiver 1942. On mangeait les seins et les fesses des femmes parce que plus tendres. D’ailleurs, plus de 2 000 personnes ont été arrêtées. Mais on ne se « contentait » pas de ça. On en était réduit à manger des rats, des chats, du cuir bouilli, une espèce de pain fabriqué avec de la sciure de bois. Parfois, on gardait les cadavres chez soi sans les déclarer pour conserver leurs cartes d’alimentation. Celles-ci donnaient droit à 225 grammes de pain par jour, par adulte. Pour les enfants, c’étaient 150 grammes par jour. Ceux qu’on voulait enterrer, il fallait faire des trous à la dynamite pour les ensevelir. Il arrivait même qu’on n’avait plus assez de force pour tirer les traineaux transportant les cadavres. Les gens mouraient de froid, de faim. L’hiver, la température descendait régulièrement à – 20°. Mais au cours de l’hiver 41- 42, elle est descendue à – 40° et même – 45° le 8 janvier 1942.
Pour les Allemands, les conditions étaient dures aussi. Mais les Léningradois n’allaient pas les plaindre. Malgré le blocus, il y eut des actes d’un courage inouï, prouvant une fois de plus, une foi inébranlable en l’avenir. Outre les œuvres d’art et les monuments, Leningrad a aussi voulu protéger les animaux du zoo. Presque tous ont été évacués vers Kazan. Malheureusement, beaucoup sont morts. Mais à Leningrad, entre autres, il restait un hippopotame. La jeune gardienne du zoo s’est efforcée de lui apporter chaque jour, le minimum vital en foin et en eau qu’elle allait chercher dans la Neva.
De même, dans les conditions que l’on sait, des activités culturelles se sont poursuivies, notamment au théâtre Kirov (aujourd’hui Marinski) qui est à Leningrad, l’équivalent du Bolchoï de Moscou, des représentations ont eu lieu. Le 19 septembre 1941, il a été touché par une bombe de 250 kg. Une bonne partie de la troupe et
du personnel a été évacué à Molotov (devenu Perm), dans l’Oural. Ceux qui sont restés ont continué à donner des représentations, malgré l’exiguïté de la scène (pour les danseurs, il a fallu privilégier les sauts en hauteur, plutôt qu’en longueur) et moins de place pour l’orchestre.
C’est plus que le théâtre qui est touché, c’est tout un symbole, celui du patrimoine de Leningrad.
Le 9 août 1942, la radio joue « Leningrad », une symphonie que DImitri Chostakovitch, resté dans la ville, s’est dépêché d’achever. Mais si on parvient tant bien que mal à se distraire, la situation démographique est catastrophique. Outre, les centaines de milliers de morts, les nombreuses évacuations, en 1944, il ne reste plus que 600 000 habitants. Ce qui est aggravé par le déficit de naissances. Il y en avait eu 175 000 en 1939. On tombe à 700 en 1943. Et parmi ces nouveaux nés, beaucoup sont morts. Comme si cela ne suffisait pas, en mars – avril 1943, des épidémies de typhus et de paratyphoïdes ont sévi.
Déjà au début 1943, les Soviétiques lancent une attaque d’envergure. On s’aperçoit que les Allemands commencent à craquer et en janvier 1944, ils sont repoussés à 150 km de Leningrad.
Enfin, le 27 janvier le blocus est levé. Mais en reculant, ils pillent et détruisent. Il en va ainsi pour les célèbres palais : palais Catherine de Tsarskoe Celo (village natal de Pouchkine) où le tsar venait en été, Peterhof, cher à Pierre le Grand et à Catherine II, Gatchina.
En se repliant, les Allemands ne laissent plus que des ruines. Dans le palais Catherine, il existait la fameuse chambre d’ambre, pièce dont les murs étaient composés de toutes les variétés allant du jaune au rouge. Tous ces ambres ont disparu, sans qu’on sache ce qu’ils sont devenus.
Curieusement, tous ces palais de l’époque tsariste ont été reconstruits sous Staline, le révolutionnaire. Mais lui qui a été le grand artisan de la victoire dans ce que les Soviétiques, puis les Russes appellent la Grande Guerre patriotique, considérait que les tsars étaient de grands patriotes. Quant à la chambre d’ambre jamais retrouvée, elle a été reconstituée en 2 003 pour le tricentenaire de ce qui est redevenu Saint-Pétersbourg.
Saint-Pétersbourg renaît donc de ses cendres malgré le traumatisme et l’ombre que lui fait la capitale, Moscou. Justement tout ce patrimoine accumulé par le passé et protégé donne une nouvelle dynamique depuis les années 2 000. C’est devenu une destination touristique très prisée des Européens, des Asiatiques, des Américains. Ce sont de longues files d’attente devant les musées et les palais. Cet élan a été plus ou moins stoppé par l’épidémie de Covid en 2 020, puis par « l’opération militaire spéciale » en Ukraine en 2 022. Les visas sont plus difficiles à obtenir. Il faut donc attendre des jours meilleurs pour que le monde puisse revoir Saint-Pétersbourg, la magique.
Dans le calendrier républicain, le 27 janvier est le jour du bois joli, encore appelé jolibois.
HERTA OBERHEUSER
Le 24 janvier 1978, Hertha Oberheuser est décédée à Linz am Rhein.
C’était une médecin allemande. Elle était née à Cologne le 15 mai 1911.
En 1931, elle obtient son Abitur (équivalent du bac), puis son diplôme de médecin en 1937.
Déjà en 1935, elle est membre du BDM (Bund Deutscher Mädel) qui est la ligue des jeunes filles allemandes de 10 à 18 ans.
Après avoir étudié à l’université de Bonn, elle s’oriente vers des expérimentations médicales, notamment sur l’utilisation de la sulfanilamide.
En principe, ce médicament est un antibactérien sensé agir sur les nerfs, les os et les muscles.
Mais parmi les effets secondaires, il peut causer des insuffisances rénales aigües.
Ce médicament a été expérimenté sur 106 femmes au camp de Ravensbrück. Les injections duraient de 3 à 5 minutes et aboutissaient à une mort lente.
Durant le régime nazi (1933 – 1945), la science n’intéresse que si elle correspond aux idéaux du régime.
Au début du XXème siècle et pendant la République de Weimar (1919 – 1933), la science allemande a été particulièrement brillante.
Elle a reçu 71 prix Nobel. De 1933 à 1966, il n’y en a eu plus que 15 ! Si le nombre de Nobel recule, ce n’est pourtant pas faute d’avoir tenté des expériences médicales.
Celles-ci ont été effectuées sur les déporté(e)s.
C’est ainsi qu’Hertha Oberheuser participe, assez activement à ces expériences sur les femmes du camp de Ravensbrück.
Elle applique les traitements au sulfanilamide qui a causé la mort de 86 femmes.
Le traitement à l’hexobarbital (un barbiturique qui a des effets hypnotiques et sédatifs, qui servait d’anesthésiant) a provoqué la mort d’enfants pourtant en bonne santé.
Avec ce médicament, le patient est conscient jusqu’au dernier moment.
Après ces traitements et la mort qui s’ensuit, on prélève des organes. On ne va quand même pas les laisser perdre.
Mais les nazis ne seront pas les derniers à pratiquer ce genre d’opération.
Bien sûr, Hertha Oberheuser sera convoquée au procès de Nuremberg (20 novembre 1945 au 1 er octobre 1946). Elle sera même la seule femme au procès des médecins nazis.
Mais elle est libérée en avril 1952 pour « bonne conduite » et elle peut redevenir médecin à Stocksee, ville du Schleswig-Holstein, au nord de l’Allemagne, près du
Danemark.
Mais manque de chance, une survivante de Ravensbrück la reconnaît en 1956.
Elle perd donc son poste et en 1958, Hertha Oberheuser n’a plus le droit d’exercer la médecine.
On la retrouve en 1961, comme employée dans un laboratoire.
Finalement, elle meurt le 24 janvier 1978 à Linz am Rhein, bourgade de 6 000 habitants à 25 km au sud-est de Bonn.
Dans le calendrier républicain, le 24 janvier est le jour de la mousse.
MONTREUIL-BELLAY
Le 16 janvier 1945 a été fermé le camp de concentration de Montreuil-Bellay dans le Maine-et-Loire, entre Angers et Poitiers.
Il avait été installé à l’emplacement d’une poudrerie.
Les Allemands l’ont transformé en stalag dès le 21 juin 1940. Ils n’ont pas traîné, cela ne faisait qu’un mois et demi qu’ils avaient envahi la France. Mais sur ce camp de 5
hectares, par une loi du 6 avril 1940 (les Allemands ne sont pas encore là et Pétain n’est pas encore au pouvoir), c’est donc la IIIème République finissante qui interdit la circulation des nomades sur tout le territoire. On entend par nomades, les forains et tout ce qui peut ressembler à des Roumains. Du délit de « sale gueule » quoi. On y met : Manouches, Gitans, Roms, Sinté, Tziganes. Des fois qu’ils seraient des espions…
Le 8 novembre 1941, c’est l’arrivée des premiers Roms raflés, venant du camp de la Mirellerie, dans l’Indre-et-Loire. Des nouveaux arrivent le 2 décembre 1941, en provenance du camp de Gorny dans le Finistère. Puis on y ajoutera des clochards de la ville de Nantes.
Jusqu’en 1943, ils sont gardés par les gendarmes, puis par des jeunes de la région. Cela leur permettait d’échapper au STO (Service du Travail Obligatoire) en Allemagne. En juin et juillet 1944, le camp est bombardé….par les Alliés, malgré les filets de camouflage que devaient fabriquer les internés. Au cours de la première quinzaine de septembre 1944, les internés sont parqués derrière des barbelés. On y trouve des Italiens, des soldats du Reich faits prisonniers (il y en avait), des Géorgiens, des Russes « blancs » qui espéraient encore le retour du tsar, des « collabos » (qui seront ensuite envoyés à Chateaubriant (Loire-Atlantique).
Les derniers prisonniers arrivent juste avant la fermeture du camp. Ce sont des civils allemands arrêtés dans l’Alsace reconquise.
Le 16 janvier 1945, le camp est donc fermé et les prisonniers sont envoyés à Jargeau (Loiret) et à Angoulême où ils resteront jusqu’en juin 1946.
On estime que 3 000 personnes sont passées dans ce camp. En août 1942, il y en avait plus de 1 000.
Le 22 octobre 1946, les installations sont vendues aux enchères et il ne reste plus que des ruines, hormis une stèle.
Et dans les années 50, le camp sert d’entrepôt de matériel américain (l’armée américaine occupe des bases françaises jusqu’en 1966). Cet entrepôt emploie 1 500 locaux.
C’est un historien local, Jacques Sigot qui a écrit un ouvrage sur le camp en 1983. Ce qui a éveillé la curiosité des institutions et une nouvelle stèle a été érigée en 1988. En juillet 2010, les ruines ont été classées comme « monument historique » et sont donc un lieu de mémoire.
Le 27 septembre 2012, c’est l’ensemble du site qui a été classé.
En avril 2013, la préfecture du Maine-et-Loire a établi un projet de valorisation des lieux. Ce qui a abouti, le 19 octobre 2016 à une cérémonie officielle en hommage aux prisonniers. Cérémonie en présence du Président de la République, François Hollande qui a reconnu la responsabilité de la France.
Ce site, longtemps abandonné, est enfin l’objet d’une reconnaissance officielle. Ceux qui font la route entre Angers et Poitiers, savent désormais que c’est un lieu de mémoire.
Dans le calendrier révolutionnaire, le 16 janvier est le jour du plomb.
KATHERINE SWITZER
Le 5 janvier 1947 est née Katherine Switzer à Amberg, localité de Bavière.
C’était une coureuse de marathon et une présentatrice à la télévision américaine, après avoir émigré tôt aux Etats-Unis.
En 1967, elle est la première à courir le marathon de Boston.
Elle avait étudié le journalisme à l’université de Syracuse, université privée de l’Etat de New-York. Elle s’entraîne au cross-country, sous la férule de son entraîneur Arnie Briggs. Elle lui demande de la laisser courir un marathon. Dans un premier temps, il refuse. Pour lui, comme pour beaucoup d’hommes, les femmes ne sont pas assez endurantes. En plus, on prétend que cela fait tomber l’utérus et masculinise….Qu’en pense la médecine ? Pourtant, elle fait preuve d’une telle volonté qu’il l’aide à se préparer, à condition quand même que :
– Elle soit capable de courir sur une telle distance (42,195 km)
– Ce ne soit pas interdit par le règlement.
A l’entraînement, Katherine court nettement plus que le marathon et, après vérification, le règlement n’a pas prévu le cas d’une femme, donc il n’est pas question d’interdit. Pour son inscription, elle choisit l’initiale de son prénom : K. C’est d’ailleurs de cette façon qu’elle signe ses articles. Pour le jour de la course le 19 avril 1967, elle a 20 ans. Au départ, elle ne se cache pas : rouge à lèvres, serre-tête, survêtement. Elle prend le départ aux côtés d’Arnie Briggs et de son compagnon Tom Miller, qui lui aussi est un athlète, mais un lanceur de marteau. Donc un costaud.
Au 6ème kilomètre, elle est repérée par les organisateurs. On essaie de l’arrêter de courir. Un dénommé Jock Stample veut carrément la bloquer, mais il est violemment bousculé par Tom Miller. Elle peut terminer en…4h20 minutes. Les photos de l’incident sont publiées dans le monde entier. Mais on sort un point du règlement qui dit que les femmes n’ont pas le droit de courir…sur route ! Alors, elle est disqualifiée.
A partir de ce moment-là, Katherine Switzer milite pour que les femmes puissent participer à un marathon. Cette épreuve est officiellement ouverte aux femmes en 1972. Elle remporte le marathon féminin de New-York en 1974 en 3h 7 minutes. On mesure le progrès depuis 1957.
Au marathon de Boston en 1975, elle descend même à 2h 52 minutes ! A partir de 1984, aux Jeux de Los Angeles, le marathon féminin sera une épreuve olympique.
Le 17 avril 2017, elle a 70 ans. Elle court le marathon de Boston pour la 9ème fois, avec un temps honorable de 4h45 minutes, très honorable, compte tenu de son âge. L’année suivante, le 22 avril, elle est à Londres où elle court encore en 4h45 minutes.
En 1963, Katherine a épousé Tom Miller, dont elle divorce en 1975 et se remarie en 1987 avec un coureur britannique Roger Robinson.
Pour la période 1967 – 1977, elle est désignée « la coureuse de la décennie ». Elle est inscrite au « National Women’s Hall of Fame » fondé en 1969. Ce sera au musée américain qui perpétue les femmes américaines qui se sont illustrées dans les domaines des arts, de la politique, des sciences, des affaires, du sport.
En 2019, La ville de Dunkerque (département français du Nord) a donné son nom à son nouveau stade d’athlétisme. A noter que le record actuel du marathon féminin est détenu par la Kényane Ruth Chepngetich en….2h10 minutes. Il n’est plus si éloigné que cela du record masculin en 2h 0 minute et 35 secondes (par le Kényan Kelvin Kiptum).
C’est l’incroyable histoire d’une femme qui a largement contribué à ouvrir en grand les portes du sport féminin.
Dans le calendrier révolutionnaire, le 5 janvier est le jour du silex.
HENRI PISTRE
Le 26 décembre 1900 est né à Mazamet (Tarn) Henri Pistre.
C’est un prêtre français dit « le pape du rugby ». Il est issu d’une famille modeste.
Son père était menuisier. Sa vocation religieuse lui est venue en 1912. Il était à peine adolescent quand le prêche de missionnaires venus de l’Océanie à Mazamet, l’a fasciné. Il entre au petit séminaire d’Albi, chef-lieu du département, puis au grand séminaire. Sa foi chrétienne ne l’empêche pas d’être très sportif. Il commence par pratiquer l’athlétisme : sprint, saut en hauteur. Pas facile avec la soutane, car à cette époque, elle est obligatoire en toutes circonstances….
Après 1918, il fait son service militaire. Sa génération a échappé à la guerre. Il est affecté au 15ème régiment d’infanterie. Un officier repère ses aptitudes physiques et l’oriente vers le Sporting Club d’Albi où il pratique l’athlétisme et le rugby. Ces sports se complètent bien à cette époque : athlétisme, l’été et rugby, l’hiver. Dans ce dernier sport, il joue trois-quarts aile (n°11 ou 14). Puis il passe demi d’ouverture (n°10) et enfin 3ème ligne aile (n°6 ou 7).
Le rugby de cette époque est parfois violent et sous la mêlée, il y a des échanges peu…catholiques. Et Henri Pistre n’est pas spécialement manchot. Ce qui lui fait dire qu’il est en accord avec les textes des Evangiles : « on a plus de plaisir à donner qu’à recevoir ! ». En juin 1922, il participe à un challenge d’athlétisme du SC Albi, avec tous les clubs des environs. Il est le seul à représenter son club. Qu’à cela ne tienne, il participe à presque toutes les épreuves : 100 mètres, 110 mètres haies, lancer du poids, saut en hauteur, saut en longueur, lancer du disque, relais 4×100 mètres. Sans soutane bien entendu, la règle de l’Eglise s’est assouplie. Il termine 2ème !!
En été 1922, après le service militaire, il revient au grand séminaire, mais il joue quand même au rugby. Pour l’ouverture du championnat, il participe à la rencontre Albi – Perpignan.
Le 4 avril 1923, il est à Colombes où se jouent les matchs du Tournoi des 5 Nations. Ce jour-là, c’est France – Irlande. Le match a été très engagé, comme on dit. Pistre a été enthousiasmé par le « fighting spirit » des Irlandais. Ce qui signifie qu’il y a eu des échanges un peu durs….
Le 23 décembre 1923, Henri Pistre est ordonné prêtre. Ses coéquipiers lui font des cadeaux.
Pour les remercier, il leur montre le maillot de son club sous la soutane. D’ailleurs, il lui est arrivé de faire des messes avec le maillot sous la soutane quand il y avait un match l’après-midi !
Devenu Vicaire, il est nommé à Cordes/Ciel, village du Tarn le bien nommé, puisque plus près du ciel, étant situé sur une hauteur. Le ciel en question n’est pas un cours d’eau, mais il évoque plutôt, la mer de nuages qui entoure le village aux intersaisons. Dans sa paroisse, il emmène les jeunes voir des matchs de rugby, crée une troupe de théâtre, s’occupe du patronage.
Affecté à Castres (Tarn), il devient dirigeant du C.O. (Castres Olympique, club de la ville) et en 1934, il passe entraîneur.
En 1946, après la guerre, il est curé de Noailhac, entre Castres et Mazamet. Là, esprit ouvert, il bénit des mariages entre catholiques et protestants, baptise des enfants de ces unions.
Entre 1964 et 1966, il crée des compétitions sportives entre militaires réservistes, étant lui-même sorti du service militaire avec le grade de sergent.
Le 6 janvier 1975, l’ORTF se divise en 3 chaînes : TF1, Antenne 2, France 3 Régions. Sur Antenne 2, les commentaires des matchs du Tournoi des 5 Nations sont assurés par le tandem Roger Couderc – Pierre Albaladejo. Couderc est plus enthousiaste et chauvin que connaisseur. Albaladejo, surnommé « Bala » est un ancien international qui apporte sa science du jeu. Sur TF1, Georges De Caunes veut concurrencer Antenne 2. Pour les commentaires, il fait appel à l’abbé Pistre. Mais cela n’a duré qu’une saison.
Vieilli et fatigué par une vie bien active, le bouillant curé tarnais s’éteint le 27 janvier 1981 à 81 ans. Si, en dehors du monde du rugby, peu de gens le connaissent, il a laissé quelques traces.
Ainsi, il y a une rue à son nom à Albi. En 1970, Antoine Blondin lui a dédié son roman : « Monsieur Jadis ou l’école du soir ». Le journaliste du quotidien sportif « L’Equipe », Henri Garcia le décrit dans « les contes du rugby ».
Dans le calendrier révolutionnaire, le 26 décembre est le jour de la lave (roche volcanique qu’on trouve dans le Massif Central).
ROUHOLLAH ZAM
Le 12 décembre 2020, Rouhollah Zam a été exécuté à Téhéran. Il était né dans cette même ville le 27 juillet 1971. C’était un ancien journaliste en exil aux
Etats-Unis. Il vient d’une famille cléricale (en clair, son père était un mollah, réformiste qui, dans les années 80 – 90, avait des positions élevées dans la société iranienne.
Il s’engage politiquement en 2009, lors du soulèvement qui suit les élections présidentielles où des fraudes auraient permis à Mahmoud Ahmadinejad de rester au pouvoir.
Il gère le groupe Télégram qui est un service instantané de messagerie et dont le siège social est à Dubaï (Emirats Arabes Unis).
Rouhollah Zam a couvert les manifestations qui se sont déroulées du 28 décembre 2017 au 1er janvier 2018.
Ce furent des manifestations violentes contre les restrictions imposées aux Iraniens. Il a été arrêté par les Gardiens de la révolution – organisation paramilitaire de la République islamique d’Iran. Il a aussitôt été emprisonné à Evin (prison de Téhéran).
Il a souvent été invité dans les télévisions et radios américaines (Voice of American’s Persian Service). Mais le 14 octobre 2019, il est piégé par les Gardiens de la révolution pour qu’il revienne en Iran. C’est là qu’il est une nouvelle fois arrêté. En fait, il a été arrêté en Irak qui l’a livré à l’Iran.
C’est en 2023 qu’on a appris qu’il avait été trahi par des agents infiltrés. On lui a trouvé pas moins de 37 chefs d’inculpation dont « corruption sur Terre » (comprendre appel à la sédition), ce qui, en Iran, est passible de la peine de mort. On est facilement condamné à mort en Iran.
Le procès avait eu lieu le 10 février 2020 devant le tribunal révolutionnaire de Téhéran et le 30 juin, il est condamné à mort. La peine sera confirmée le 28 décembre. Cette décision a bien entendu été critiquée par l’Union Européenne, Reporters Sans Frontières et différentes ONG. Il faut dire qu’il ne pouvait guère s’en sortir, compte tenu de tous les chefs d’accusation contre lui. On peut en citer quelques-uns :
– Corruption sur Terre ;
– Perturber la sécurité nationale ;
– Espionnage au profit d’Israël ;
– Espionnage au profit de la France ;
– Coopération avec le gouvernement américain ;
– Association de malfaiteurs ;
– Activités de propagande ;
– Insulte au fondateur de la République.
Le pouvoir iranien pouvait inventer tous les prétextes qu’il voulait. Il n’y a pas d’opposition pour le limiter. Quant aux réactions internationales, il s’en moque complètement, d’autant qu’elles sont teintées d’hypocrisie.
Avec 853 exécutions en 2023, en augmentation de 48% par rapport à l’année précédente, l’Iran règle à sa façon la fin de vie….
Dans le calendrier révolutionnaire, le 12 décembre est le jour de la bruyère.
HENRIETTE CAILLAUX
Le 5 décembre 1874 est née Henriette Rainouard à Rueil-Malmaison en Seine-et-Oise (actuellement Hauts-de-Seine). C’est une femme de la haute bourgeoisie parisienne.
En 1894, elle se marie avec le romancier Léo Clarétie avec qui elle aura deux enfants.
Mais à partir de 1907, elle a une liaison avec le ministre des Finances de l’époque, Joseph Caillaux.
Si bien qu’en 1908, elle divorce puis se remarie le 21 octobre 1911 avec son amant.
C’est donc Madame Henriette Caillaux. On a là, un couple de la très haute bourgeoisie, plutôt fortunée.
Mais voilà que le 16 mars 1914, elle tue d’un coup de révolver, le journaliste Gaston Calmette, directeur du journal « Le Figaro ». Motif de ce crime par une dame « bien » ? Elle reproche à ce journal sa campagne de presse contre son époux. Elle avait noté que son mari, leader du parti radical, avait fait l’objet de 138 articles, pas vraiment élogieux, en 95 jours! Ce sont tout d’abord des articles concernant sa politique. Le journal lui reproche son attitude dans l’affaire d’Agadir de 1911 (canonnières allemandes installées dans le port d’Agadir au Maroc qui est un protectorat français). Il s’agit aussi d’une sombre histoire de message qui aurait dû rester secret et que Caillaux a failli dévoiler. Enfin, c’est la guéguerre entre un journal de droite et un homme politique plutôt à gauche. On connaît ça !
Mais c’est l’honnêteté de Joseph Caillaux qui est remise en cause par le journal. Pour financer sa campagne électorale, il a usé de son influence auprès de la justice pour faire libérer un escroc. Mais les méthodes du journal sont-elles plus « propres » ?
Par le biais de la femme de ménage, on a fait subtiliser les lettres de Joseph Caillaux à sa femme. Et ces lettres seront publiées dans le journal ! Henriette veut défendre la réputation de son époux et la sienne.
Le 16 mars 1914, elle va chez un armurier et achète un pistolet automatique. Avec la voiture de son mari, elle se fait conduire au « Figaro » pour rencontrer Calmette qui accepte de la recevoir. Une fois dans son bureau, de son manchon, elle sort le pistolet et tire 6 balles à bout portant. Calmette s’effondre gravement blessé, mais encore conscient. En attendant les secours, il murmure : « J’ai fait mon devoir sans haine ».
Henriette Caillaux se rend sans difficulté et reconnaît les faits, pensant ne l’avoir que blessé. Calmette est transféré à l’hôpital de Neuilly/Seine (Seine-et-Oise), il meurt sur la table d’opération.
Mme Caillaux est incarcérée à la prison St-Lazare (devenue hôpital St-Lazare dans le Xème arrondissement) et inculpée « d’homicide volontaire avec préméditation ». Le procès a lieu à partir du 20 juillet 1916. Son avocat Me Labori plaide pour un crime passionnel. Devant un jury composé exclusivement d’hommes, il convainc que « c’est un réflexe féminin incontrôlé ». Sous entendu, ces pauvres femmes ne sont pas capables e se maîtriser !
Finalement, Henriette Caillaux est acquittée le 28 juin 1914 (jour de l’attentat de Sarajevo qui a déclenché la guerre).
Par conséquent, officiellement, elle n’est pas une criminelle et son casier judiciaire restera vierge. On peut imaginer que ce verdict a été critiqué.
Joseph Caillaux a largement usé de sa fonction de ministre pour influencer les décisions. Comme par hasard, le Procureur général a reçu la Légion d’honneur, juste avant le procès. Un de ses amis a été nommé ministre de la Justice en juin 1914. Le président de la Cour d’assise est un ami personnel du couple Caillaux. Un député corse a payé des truands pour acclamer ou huer les témoins selon leurs déclarations.
Evidemment, tout cela provoque un scandale qui amène Joseph Caillaux à démissionner. La presse de droite s’en donne à plume joie en dénonçant ce qu’elle considère comme une faillite morale. Ces histoires d’adultère et de divorces sont encore très mal acceptées en ce début de XXème siècle.
Ce qui ne l’empêche pas d’être réélu député le 17 mars 1915. Mais à ce moment-là, la France a d’autres préoccupations et l’affaire est quelque peu oubliée.
La guerre terminée, on repense aux Caillaux. Dans les années 20, le couple est surveillé par les services spéciaux dont un correspondant devient l’amant d’Henriette, c’était une rapide l’Henriette, aurait dit ma grand-mère. Ce qui n’empêche pas la jolie dame (elle était effectivement belle) de reprendre des études dans les années 30 pour être diplômée de l’Ecole du Louvre, dont la sélection est rigoureuse.
En 1935 sa thèse sur le sculpteur Jules Dalou est publiée et servira même de référence sur cet artiste.
En 1940, le couple s’installe à Mamers (Sarthe). L’été de cette année, il faut faire un choix : Joseph Caillaux sera de ceux qui ont voté les pleins pouvoirs à Pétain. Henriette meurt le 29 janvier 1943, à l’âge de 69 ans. Joseph ne lui survivra pas longtemps, il meurt l’année suivante.
La vie romanesque de Madame Caillaux a inspiré auteurs et historiens. Ainsi le réalisateur Yannick Andrei a créé une série en 4 épisodes sur sa vie.
De nombreux ouvrages et documentaires lui ont été consacrés.
Dans le calendrier révolutionnaire, le 5 décembre est le jour du chevreuil.
HÉLÈNE BOUCHER
Le 30 novembre 1934, Hélène Boucher, aviatrice, est morte accidentellement à Guyancourt (Yvelines). Elle était née à Paris le 23 mai 1908.
Quand la guerre éclate en août 1914, la famille quitte Paris pour aller à Boigneville, près d’Ermenonville en Seine-et-Oise (actuellement dans les Yvelines).
De retour à Paris, Hélène fait des études au lycée Montaigne. Elle a une passion: l’aviation : elle décore sa chambre avec des photos et des articles sur les aviateurs.
A 22 ans, elle décide d’être aviatrice : elle veut venger la mort d’un ami de son frère qui était pilote d’essai.
Elle commence par être une élève d’Henri Farbos, pilote fondateur de l’aéro-club de Mont-de-Marsan (Landes).
C’est le 4 juillet 1930 qu’elle prend son baptême de l’air. En mars 1931, ce sont les premiers cours de pilotage. Trois mois plus tard, le 21 juin, elle obtient le brevet de pilote de tourisme. L’année suivante, elle accède à la qualification de pilote professionnelle de transport public.
Elle est la 4ème femme en France à avoir ce statut après des femmes aussi prestigieuses qu’Adrienne Volland, Maryse Bastié et Maryse Hilsz.
Elle parvient à s’acheter un avion d’occasion avec lequel elle participe au rallye aérien Caen – Deauville en 1932. Mais une panne le fait atterrir dans les branches d’un arbre. Par chance, elle en sort indemne.
Loin de se décourager, en 1933, elle envisage le raid Paris – Saïgon. Là, c’est une autre épreuve. Le 7 février 1933 à 7 heures 30 elle décolle. Le départ avait été différé
de quelques jours à cause de la météo. Elle compte rallier Saïgon, distant de 12 000 km par étapes : Rome, Athènes, Alep, Bassorah, Djask (dans le golfe d’Oman), Karachi, Allahabad (au sud de l’inde), Calcutta, Rangoun, Bangkok et enfin Saïgon. L’entreprise est particulièrement audacieuse quand on sait qu’il n’y a que quelques années que Charles Lindbergh a traversé l’Atlantique (21 mai 1927). Mais le moteur de son appareil ne tiendra pas le coup et elle n’ira pas au-delà de Bagdad. Ce qui n’est déjà pas si mal.
Infatigable, en juillet 1933, elle participe en duo aux 12 heures d’Angers (Maine-et-Loire). A l’arrivée, elle sera la première femme. Puis le 8 juillet 1934, ce sont à nouveau les 12 heures d’Angers où, en solo cette fois, elle termine 2ème. Entre temps, en septembre 1933, elle se lance dans l’acrobatie aérienne avec un biplan. Ca lui réussit tellement bien que son moniteur affirme : « Dans quelques mois, elle sera la meilleure acrobate du monde ». Si bien qu’elle décroche un contrat de pilote d’essai avec Caudron-Renault ce qui lui assure un bon salaire et par conséquent, l’indépendance financière.
Le 12 août 1933, elle avait battu le record du monde d’altitude pour atteindre 5 900 m. Mais elle ne s’arrête pas là et le 13 août 1934, elle bat le record de vitesse à 445 km/heure.
Sacrées performances quand on sait que l’aviation n’en est encore qu’à ses débuts. C’est avec la guerre qui suivra qu’elle franchira un grand pas.
La guerre, Hélène Boucher ne la verra pas. Le 30 novembre 1934, elle fait un simple vol d’entraînement à Guyancourt. Là, c’est l’accident. Défaillance technique ? Faute de pilotage qui peut arriver même aux meilleurs ? Quoi qu’il en soit, elle atterrit dans les arbres et cette fois, elle est grièvement blessée. Ceux qui assistaient à son entraînement sont vite sur les lieux. Elle est transférée d’urgence à Versailles mais elle décède durant le transport.
Celle qui fut une aviatrice audacieuse, a trouvé la mort à 26 ans. L’avion qui était sa raison de vivre, a été la raison de sa mort.
Hélène Boucher, à l’instar d’autres grandes aviatrices, fut aussi une grande féministe qui a milité pour le droit de vote des femmes.
Peu avant sa mort, elle avait été lauréate du prix Monique Berlioux (fondé en 1905) de l’Académie des sports. De nombreuses villes ont donné son nom à des rues, comme Nancy, Chaumont pour ne citer que les principales . A Reims, on a une place Hélène Boucher. A Paris, c’est un square (dans le XIIIème arrondissement) qui porte son nom.
Dans le calendrier républicain, le 30 novembre est le jour de la pioche.µ
MARIE CHAVANNES
Marie Chavannes est née à Lyon, le 23 novembre 1876. C’est une historienne, biographe féministe.
Son père est ingénieur dans les chantiers ferroviaires de la région lyonnaise, sa mère est la fille d’un industriel de la soie.
C’est une famille protestante. Marie reçoit donc une éducation en conséquence.
Elle fait de brillantes études qui lui permettent d’obtenir l’agrégation d’histoire.
Elle se marie le 25 avril 1902 avec Octave Monod et devient Marie Octave Monod. Le couple aura deux enfants, dont Marie-Laure qui épousera Jean-Marcel Jeanneney,
économiste et homme politique.
En 1920, Marie Monod fonde avec Marie Bonnet (directrice de la Maison des étudiantes à Paris) la Société féminine de rapprochement universitaire (qui est devenue
l’Association française des femmes diplômées d’université : AFFDU). Puis elle passe à la FIFDU (Fédération Internationale des Femmes Diplômées des Universités), dont elle devient la présidente en 1923. Elle y reste jusqu’en 1933 pour être ensuite présidente d’honneur.
Ces fondatrices estiment que l’éducation des filles est un facteur de paix et de promotion des femmes.
C’est justement en 1923 qu’elle organise le congrès de la FIFDU qui va rassembler 300 participantes venues de 17 pays.
Marie Monod fait de nombreuses publications, notamment dans le bulletin des femmes diplômées d’université et fait des traductions en anglais et en allemand.
Elle participe à l’attribution de bourses pour étudiantes françaises à l’étranger, une sorte d’Erasmus avant l’heure.
Pendant la 2de Guerre mondiale, elle aide à l’accueil d’intellectuelles étrangères en France, notamment des Tchèques, des Polonaises, des Scandinaves : elle leur permet de passer en zone libre, tant qu’il y en a une.
Au cours de sa vie, elle a eu de nombreuses activités éditoriales. Déjà en 1902, elle publie un mémoire sur le gouvernement de Lyon. En 1937, sous le pseudonyme Daniel Stern, elle écrit une biographie sur une femme de lettres, Marie d’Agoult.
En 1939, ce sera un lexique international des femmes universitaires.
Marie Monod ne s’est pas seulement intéressée aux intellectuelles. Elle a été très active au sein des foyers pour employées et ouvrières. Elle a accueilli des mères isolées et leurs bébés et lutté contre la prostitution.
Après la guerre, elle s’efforce de faire repartir l’association. Mais les temps auront changé : les femmes accèdent au droit de vote et plus facilement aux études.
Toutes ces activités lui vaudront d’être chevalière de la Légion d’honneur en 1958.
Elle s’éteint le 31 décembre 1966.
Des ouvrages lui ont été consacrés, notamment par sa fille Marie-Laure.
Dans le calendrier révolutionnaire, le 23 novembre est la journée de la chicorée.
ANNA DE NOAILLES
Anna Elisabeth Bessaraba de Brancovan est née le 15 novembre 1876 à Paris. En fait, il s’agit de celle, qui après son mariage s’appellera Anna de Noailles, grande poétesse et romancière française, avec des origines grecque et roumaine.
Elle était issue d’une riche famille de la noblesse roumaine et élevée à Londres. Son père était ambassadeur de l’Empire Ottoman dans la capitale britannique, auprès de la reine Victoria.
On ne peut pas dire qu’elle ait vécu dans la misère. Dans son enfance, il y a eu des précepteurs pour s’occuper d’elle. Elle a appris plusieurs langues : outre le français, ce furent le roumain, le grec, l’anglais, l’allemand. Un beau bagage ! Sans compter que son éducation a été tournée vers les arts, comme la musique et la poésie. Elle passe ses hivers à Paris, puis vit le reste de l’année à Amphion, tout près d’Evian (Haute-Savoie), dans sa villa Bessaraba, sur les rives du Léman. Il y a vraiment plus triste comme environnement.
Cette habitation est décorée par Emilio Théry, un architecte et décorateur, d’origine cubaine. Ceci pour le cas où elle se lasserait de la vue sur le Léman.
Le 17 août 1897, elle épouse Mathieu de Noailles (1873-1942), capitaine de cavalerie et s’appelle donc Anna de Noailles. On parle cependant d’une liaison avec le poète Henri Franck (1888-1912). Ne vous attendez pas à des détails croustillants. Ce ne fut qu’une liaison platonique entre deux poètes. Par contre, l’écrivain Charles Demange était fou amoureux d’elle. Mais comme ce n’était pas réciproque…il se suicide.
La poésie d’Anna de Noailles est inspirée par la beauté de la nature. Au début du XXème siècle, elle participe à un salon qui a lieu avenue Hoche à Paris. Elle se retrouve avec du beau monde : Jean Rostand, Francis Jammes, Paul Claudel, Colette, André Gide, Maurice Barrès, Frédéric Mistral, Alphonse Daudet, Pierre Loti.
En 1904, elle crée un prix littéraire « Vie heureuse » qui deviendra « Prix Fémina » en 1922. Dans ce jury, ce ne sont que des femmes. Mais les prix peuvent être décernés indistinctement à des femmes ou à des hommes.
A partir de 1902, elle écrit aussi des romans.
C’est en 1919 qu’on lui attribue la Légion d’Honneur (elle sera Commandeur en 1931).
L’année suivante, elle obtient le prix de l’Académie française avec le poème « Le cœur innombrable » et en 1921, celle-ci crée le prix « Anna de Noailles ».
Au printemps 1922, elle a le plaisir de rencontrer Einstein, avec qui elle a une discussion passionnée, elle si bien mise, lui ébouriffé.
En 1925, elle fréquente le salon littéraire d’Henri le Savoureux qui est psychiatre, mais aussi écrivain et salonnier. Elle y retrouve Edouard Herriot, Antoine de Saint-Exupéry, Vladimir Jankélévitch, Paul Morand, René Pleven, Paul Valéry, Marc Chagall.
Elle est aussi membre de l’Académie roumaine. A cette époque, elle a des échanges épistolaires avec Marcel Proust.
Après une vie bien remplie à écrire, à fréquenter de nombreux artistes et même des personnalités politiques, Anna de Noailles meurt le 30 avril 1933.
De nombreux contemporains ont écrit des témoignages élogieux à son sujet.
En 1906, elle avait servi de modèle pour le sculpteur Rodin. Il existe un portrait d’elle au musée Carnavalet de Paris et un square Anna de Noailles dans le XVIème arrondissement. A Vevey, sur la rive suisse du Léman, on trouve un buste en bronze. En 1976, la Poste française a édité un timbre à son effigie.
Des villes, parfois modestes ont donné son nom à des rues ou places, comme à Châteauroux (Indre) ou encore à St-Germain-du-Puy, dans la banlieue de Bourges (Cher), à Cormontreuil (banlieue de Reims dans la Marne), à Chevigny-St-Sauveur (banlieue de Dijon en Côte-d’Or). Et surtout de nombreux établissements scolaires ont choisi de porter son nom. C’est d’abord le lycée d’Evian (Haute-Savoie), situé tout près d’Amphion. C’est aussi le cas de plusieurs collèges dans le Val d’Oise (Luzarches et Sarcelles), à Noailles le bien nommé, dans l’Oise, à Larche (Corrèze) et même des écoles primaires. Il en est ainsi du lycée français de Bucarest qui s’appelle Anna de Noailles.
Dans le calendrier révolutionnaire, le 15 novembre est le jour du faisan.
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MANON ROLAND
Le 8 novembre 1793, Manon Roland, née Jeanne-Marie Philipon le 17 mars 1754, a été guillotinée à Paris sur la Place de la Concorde à 39 ans. Elle était ce qu’on appelait une salonnière: elle recevait chez elle, dans son salon, des personnalités politiques du parti des Girondins. On les appelait ainsi parce qu’ils étaient d’origine plutôt de bourgeoisie provinciale (et peut-être aussi que Bordeaux a une réputation bourgeoise). Ce groupe était plutôt modéré et actuellement se situerait au centre droit. Face à eux les Montagnards – qui seraient à gauche – et appelés ainsi parce qu’à l’assemblée, ils siégeaient sur les gradins les plus élevés.
Manon Roland a été l’égérie des Girondins et une des figures de la Révolution. Manon est la fille d’un graveur aisé et d’une mère érudite. Elle se révèle être une enfant
pieuse et intelligente. Très tôt, elle se passionne pour la lecture et pas n’importe quels auteurs. Visez un peu : la Bible, des auteurs grecs comme Plutarque, des auteurs plus récents : Bossuet, Fénelon, les philosophes de son siècle : Montesquieu, Voltaire, Rousseau.
En 1765, elle entre au couvent des Augustins. Mais quelques années plus tard, en 1774, à Versailles, elle est témoin de l’arrogance et du mépris de la noblesse envers la bourgeoisie.
Manon Philipon est belle. On dit d’elle qu’elle a « un sourire tendre et séducteur » : les demandes en mariage ne manquent pas. Pour les éconduire, elle dicte elle-même à son père, les lettres de refus.
Mais en 1776, elle rencontre Jean-Marie Roland de la Platière, député et économiste.
Finalement, le 4 février 1780, elle l’épouse même s’il a 20 ans de plus qu’elle. Ce qui ne l’empêche pas de coopérer avec lui et l’aide à rédiger ses discours.
En 1781, le couple s’installe à Amiens et donne naissance à une fille Eudora Roland (1781 – 1858).
Pourtant, la vie de couple ne l’enchante guère. En 1784, ils s’installent à Villefranche/Saône.
C’est en 1791 qu’ils reviennent à Paris et la Révolution enthousiasme Manon qui trouve une nouvelle raison de vivre.
Elle adhère au club des Jacobins, club révolutionnaire installé dans l’ancien couvent des Jacobins.
Chez elle, elle crée un salon où elle reçoit des hommes politiques dont Robespierre.
Un peu grâce à ses rencontres, son mari est nommé ministre de l’Intérieur.
Malgré tout, elle lui reste fidèle tout en disant de lui : « Ce vénérable vieillard ». Ironique ou affectueux ? Allez savoir….
Par contre, elle est scandalisée par les massacres des 6 et 7 septembre 1792, perpétrés par les révolutionnaires les plus excités quand la famille royale a été incarcérée. De là sont nées des rumeurs – les fake news, ce n’est pas nouveau ! – que les royalistes allaient se venger et faire appel aux étrangers qui avaient déjà commencé à envahir le pays.
Alors, c’est par centaines qu’on sort les prisonniers pour les exécuter.
La princesse de Lamballe, amie de la reine, est martyrisée puis décapitée. On montre sa tête au bout d’une pique à la reine. Dans la violence, il n’y a plus de tabous et l’humain perd toute humanité
Cette violence révolte donc Manon Roland. Elle en veut surtout à Danton qui, selon elle, ne fait rien contre cette situation. Les Montagnards la détestent. Tandis que son mari démissionne de son poste de ministre, le 1er juin 1793 Manon est arrêtée et incarcérée à la Conciergerie.
C’est en prison qu’elle rédige ses mémoires.
Elle est jugée le 8 novembre 1793 et exécutée le jour même. En montant sur l’échafaud, on lui attribue cette phrase restée dans l’histoire :
« Ô, liberté, que de crimes on commet en ton nom ! ».
Il semble que ce sont des historiens qui la lui ont attribuée. Car elle serait plutôt de Lamartine au siècle suivant.
Deux jours après, son époux se suicide. Sa fille Eudora est récupérée par un ami et se mariera le 13 décembre 1796.
Après sa mort, Manon Roland devient une légende pour les grands auteurs du XIXème siècle comme Lamartine, Stendhal. Gita May, professeur de français à l’université de Columbia aux Etats-Unis a dit d’elle : « Une héroïne sans tache et sans reproche ».
Par contre, des historiens français ont dit qu’elle n’était qu’une petite bourgeoise intrigante et rancunière.
En 1989, le cinéaste Edouard Molinaro lui a consacré un film pour la télévision. Dans « Secrets d’histoire », Stéphane Bern l’a évoquée dans « Les femmes dans la Révolution ». Il nous reste de nombreux tableaux d’elle et ses lettres ont été publiées. Peu de rues sont à son nom. Curieusement, elles sont en Bretagne : à Nantes et Saint-Nazaire.
Dans le calendrier républicain, le 8 novembre est le jour de la dentelaire, plante autrefois utilisée contre le saturnisme. Elle est censée combattre les maladies de peau et les rhumatismes.
LE CONGRÈS DE VIENNE
Le 1er novembre 1814, c’est l’ouverture officielle du congrès de Vienne.
Il rassemble les vainqueurs de Napoléon : Royaume-Uni, Autriche, Prusse, Russie. La France est aussi invitée, ainsi que 3 autres Etats européens : Espagne, Portugal, Suède. Il durera jusqu’au 9 juin 1815.
La bataille de Waterloo (18 juin 1815) n’a même pas encore eu lieu.
Les objectifs de ce congrès sont principalement de 5 ordres :
– Signer la paix ;
– Déterminer les frontières ;
– Etablir un nouvel ordre pacifique ;
– Abolir la traite négrière (mais pas l’esclavage) ;
– Reconnaître la neutralité de la Suisse.
A la fin de l’hiver 1814, la France est envahie et le 31 mars, Paris est occupé.
Le 15 mai suivant, la France se voit imposer le traité de Paris qui la ramène aux frontières de 1790 (avant les guerres révolutionnaires et les conquêtes de Napoléon) ; elle sera en bonne partie occupée jusqu’en 1818. Mais les frontières de l’Europe sont transformées. La partie flamande de la Belgique est attribuée aux Pays-Bas qui reçoit aussi le Luxembourg pour former le royaume du Bénélux. Les Pays-Bas perdent Le Cap en Afrique du Sud et la Guyane qui passe au Royaume-Uni (actuel Surinam). Le grand changement se situe dans les territoires allemands qui étaient très morcelés en une multitude de mini Etats. Il y en avait 350 en 1792. On passe à
39 en 1815. En fait, ils sont plus ou moins inféodés à la Prusse au nord et à l’Autriche au sud.
Le Congrès reconnaît l’indépendance et la neutralité de la Suisse. De grands changements s’opèrent aussi dans la péninsule italienne. L’Autriche obtient la Lombardie et la Vénétie. Au nord-ouest, la Maison de Savoie se voit attribuer le Piémont (région au pied est des Alpes), Nice et Gènes ce qui formera plus tard le royaume de Piémont-Sardaigne.
Le pape est aussi le chef des Etats Pontificaux qui occupent pratiquement tout le centre de la péninsule. Coincés entre les Etats pontificaux et la Lombardie, il reste de petits duchés (Parme, Modène) dominés par l’Autriche.
Au nord de l’Europe, le Danemark cède la Norvège à la Suède. Tandis que le Pologne est partagée entre Russie (qui contrôle Varsovie et le royaume de Pologne), la Prusse à l’ouest et l’Autriche au sud.
Quant au Royaume-Uni, il ne demande rien du moment qu’on le laisse maître des mers et océans. Il contrôle les îles des Caraïbes, Malte en Méditerranée (route des Indes). Un chant patriotique de 1740 ne disait-il pas : « Britannia rules the waves » (L’empire britannique règne sur les vagues).
La France, grâce à la diplomatie de Talleyrand n’a pas été trop mal traitée. Comme pays vaincu, elle aurait pu être partagée ou occupée. Elle ne le sera que partiellement
et seulement jusqu’en 1818. Pourtant lorsque le congrès se termine le 9 juin 1815, alors que la bataille de Waterloo n’a lieu que le 18 juin !
Le Congrès a été animé par le chancelier d’Autriche, Klemens Metternich. Celui-ci s’efforce de maintenir un équilibre entre les trois grandes puissances continentales, tout en veillant bien à ce que l’Autriche conserve son influence en Italie. Il sera le maître d’œuvre de la formation de la Sainte Alliance créée le 20 septembre 1815. Il s’agit d’une alliance entre les trois grandes puissances chrétiennes : Autriche catholique, Prusse protestante, Russie orthodoxe.
Par contre, au milieu de tout cela, les petits peuples ne sont pas invités à dire leur mot. Tchèques, Slovaques, Polonais, Hongrois, Moldaves, Serbes, Bosniaques, Slovènes, Croates, Macédoniens sont intégrés et parfois divisés de gré ou de force selon les intérêts stratégiques des trois « grands ».
Sont-ils heureux de cette soumission ? L’avenir le dira.
En attendant, le « Congrès s’amuse. Il ne marche pas, il danse» comme il a été écrit dans « Le Moniteur » (gazette française fondée au XVIIIème siècle) du 3 décembre 1814.
Toute l’Europe des chefs d’Etats, des rois, des princes sont réunis à Vienne pendant 7 mois.
Au fait, pourquoi Vienne ? C’est la capitale d’une grande puissance qui a l’avantage d’être dans une position centrale. En outre Vienne possède un patrimoine culturel inégalé à cette époque en Europe. C’est la ville de la gaité, de la joie de vivre. Ses fêtes sont célèbres. En tout cas, pendant ce congrès, l’ambiance est particulièrement festive. Il faut bien se détendre après les journées de discussions ! Une chanson avait même été écrite où il était dit : «L’empereur de Russie aime, le roi du Danemark boit, le roi de Wurtemberg mange, le roi de Bavière parle, l’empereur d’Autriche paie ».
On danse, on s’étourdit dans les fameuses valses (qui vient de Waltzer = tourner en rond) de Vienne que vient de créer la dynastie des Strauss : Johan et Josef.
Bien entendu, pour pimenter ces soirées, de grandes dames sont là, à la vertu moins grande. Et on ne se posait pas la question du consentement. C’était le congrès de Vienne où on a refait la carte de l’Europe en s’amusant. Quelques jours avant qu’on apprenne la défaite de Napoléon à Waterloo et qu’on envoie « l’ogre », là-bas loin, à Sainte-Hélène, île perdue au milieu de l’Atlantique sud.
Mais on vous dit : le congrès s’amuse !!!
Dans le calendrier républicain, le 1er novembre est le jour de la scorsonère (ou encore salsifis).
ROBERT CAPA
Le 22 octobre 1913, est né à Budapest Endre Ernö Friedman. Ce patronyme ne dit sans doute rien à beaucoup de monde. Pourtant c’est un personnage bien connu qui a pris comme pseudonyme Robert Capa.
C’était un célèbre photographe, reporter de guerre et co-fondateur de la coopérative photographique Magnum le 27 mai 1947 à New-York.
Ses photos ont été reprises dans bien des livres d’histoire.
Robert capa est originaire d’une famille juive (non pratiquante). Il est atteint de polydactylie, c’est-à-dire qu’il a un petit doigt supplémentaire. On dit que sa mère y a vu le signe d’une carrière hors du commun.
Adolescent, il fréquente les milieux communistes révolutionnaires de Budapest. Ce qui lui vaut d’être arrêté pour activités antifascistes.
Il est libéré mais à la condition de quitter la Hongrie.
Si bien qu’en juillet 1931, il a à peine 18 ans, il se retrouve à Berlin où il poursuit des études de sciences politiques pendant 2 ans.
Grâce à l’agence Dephot (Deutscher Photodienst), il a son premier appareil photo. Il l’utilise pour photographier Léon Trotski lors d’un meeting sur la révolution russe en novembre 1932. Son cliché paraîtra dans un film muet : « Der Welt Spiegel » (Le miroir du monde).
A l’arrivée d’Hitler au pouvoir en janvier 1933, il sent qu’il faut partir et va à Vienne, puis en 1934 à Paris où il rencontre un photo journaliste, Henri Cartier-Bresson. C’est là qu’il fait connaissance avec Gerda Taro, photo journaliste allemande, d’origine espagnole.
Ils deviennent amants.
Le magazine « Vu » (hebdomadaire d’informations illustrées qui existe depuis 1928) lui permet d’obtenir sa première carte de presse.
Au printemps 1935, il fait ses premiers reportages mais ses photos se vendent mal. Il lui est conseillé de prendre un pseudonyme non étranger : ce sera Robert Capa.
A partir de ce moment-là, ça va mieux. « Vu » et « Regards » (périodiques proches du parti communiste) publient ses photos en particulier celle du 14 juillet 1936 sur Léon Blum devenu Président du Conseil.
En août 1936, avec Gerda Taro, il couvre la guerre civile espagnole. Là, Robert Capa devient carrément antifasciste.
La photo en plein mouvement d’un républicain touché à mort, intitulée « Mort d’un soldat républicain », est publiée le 12 juillet 1937 et lui vaut un grand succès… et une grande polémique. On lui reproche d’avoir fait un montage photographique. La polémique rebondira bien des décennies après quand des historiens ont confronté l’image avec des récits de témoins.
Néanmoins, lors de l’exposition universelle de 1937 à Paris, ses photos sont exposées parmi des œuvres d’artistes célèbres tels que Miro ou Picasso. Mais voilà que son égérie et amante, Gerda Taro meurt le 26 juillet 1937, écrasée par un char. Pour atténuer son chagrin, en 1938, il devient salarié dans « Le Soir ». C’est à ce moment qu’il est envoyé par « Life » (hebdomadaire américain) dans la guerre sino-japonaise (1937 – 1945).
Le 3 décembre 1938, l’hebdomadaire photos britannique « Pictures » le proclame « plus grand photographe de guerre du monde ». Pas moins !
Fort de cette gloire, il émigre aux Etats-Unis en 1939 où il se marie avec un mannequin d’origine argentine Tini Schoessel.
Mais ses idées proches du communisme font qu’il est expulsé l’année suivante.
En 1942, Robert Capa couvre le front en Afrique du Nord, puis le débarquement des Alliés en Sicile.
Et ce sera le 6 juin 1944 où il fait des photos pour « Life ». Là encore, il y aura polémique sur l’authenticité des photos (il affirme être resté 2 heures sur la plage d’Omaha alors que des témoins parlent d’une ½ heure. Allez donc savoir). Mais il suit les troupes débarquées à travers la Normandie, puis celles de la 2ème DB du maréchal Leclerc qui libérera Paris le 25 août.
Mais avant que Paris soit libéré, il est passé par Chartres (Eure-et-Loir). Là les règlements de compte avaient déjà commencé. Des femmes soupçonnées – à tort ou à raison – de collaboration -principalement « horizontale »- ont été tondues.
Robert Capa est là pour cette photo qui fera le tour des documents d’histoire et intitulée « La tondue de Chartres ».
Ce cliché n’a donné lieu à aucune polémique et illustre très bien la situation de la France à la libération.
En 1946, Robert Capa est à Hollywood où il fait des photos de mode. Il y a moins de risques et c’est même plutôt agréable puisqu’il rencontre la célèbre actrice suédoise Ingrid Bergman.
Rencontre tellement proche qu’ils deviennent amants ! C’est donc en 1947 qu’il cofonde l’agence « Magnum ». Les sujets sont plus sociaux, politiques et sur les célébrités (on dirait « people » aujourd’hui)
Mais l’action, ça le démange et en 1948, il est en Israël lors de la création de l’Etat hébreux et de la déclaration de guerre qui a suivi par les voisins arabes. Il y est même blessé.
En 1954, « Life » l’envoie sur un autre champ de bataille : l’Indochine, colonie française que se bat pour s’affranchir de la tutelle coloniale.
Le 25 avril, il est au Tonkin, pendant que l’armée française est aux prises dans la cuvette de Dien Bien Phu.
Robert
Capa s’écarte du chemin balisé pour on ne sait quelle raison. Il marche sur une mine anti personnelle. Ca ne pardonne pas : il est tué. Même les baroudeurs les plus expérimentés peuvent toujours commettre une erreur. Celle-ci lui est fatale.
Il sera enterré dans un cimetière près de New-York : cimetière d’Amawalk.
Dans le calendrier républicain, le 22 octobre est le jour de la pomme.
MAC MAHON
Le 17 octobre 1893, l’ancien Président de la République Patrice Mac Mahon est mort.
Il s’appelait exactement Edme Patrice Maurice de Mac Mahon et né le 13 juin 1808 au château de Sully, en Saône-et-Loire, près d’Autun. Sa famille, d’origine irlandaise, s’était établie en Bourgogne en 1689, au moment où l’Angleterre vivait sa révolution. Il était le 16ème enfant de la famille.
En 1820, Il est inscrit au petit séminaire d’Autun puis passe au collège Saint-Louis (actuellement lycée Saint-Louis) à Paris. Le 23 octobre 1825, il entre à l’école militaire de Saint-Cyr (installée depuis 1808 à Saint-Cyr-l’Ecole dans le département des Yvelines, anciennement Seine-et-Oise). Il en sort 3ème pour être officier du 4ème régiment de hussards (cavalerie) en 1830 et participe à la conquête d’Alger.
Célèbre pour sa bravoure et son audace, il est récompensé en devenant Chevalier de la Légion d’honneur et promu capitaine en 1833.
Revenu en Algérie en 1836, il participe au siège de Constantine. De nouveau en France en 1840, il est encore promu, cette fois chef d’escadron, c’est-à-dire commandant dans l’artillerie.
En mai 1841, il est chef du 4ème bataillon d’infanterie dans les chasseurs à pied.
Le 25 mai, il combat Abd-el-Kader, chef religieux et militaire d’Algérie.
Le 31 décembre 1842, il passe lieutenant-colonel du 2ème régiment de la légion étrangère et s’illustre dans les combats en octobre 1844, dans le sud-ouest de l’Algérie (région de Tlemcen).
Il poursuit sa progression en devenant colonel d’infanterie puis général de division (2 étoiles).
Là, il épouse Elisabeth de La Croix de Castries. De cette union naîtront 4 enfants.
En 1865, c’est la guerre de Crimée où il est général de division (3 étoiles) et se montre audacieux devant Sébastopol et Malakoff. Lorsqu’un officier anglais (allié dans cette guerre) lui demande ce qu’il compte faire, on attribue à Mac Mahon, cette réponse restée célèbre : « J’y suis, j’y reste ! ».
A son retour en France, il est élu sénateur, puis repart en Algérie combattre une tribu berbère, les Kabyles, dans les montagnes du nord-est du pays.
En 1859, Napoléon III s’est engagé dans la guerre en Italie pour soutenir le Piémont-Sardaigne contre l’Autriche.
Là, Mac Mahon contribue à la victoire de Magenta. Si bien que l’Empereur le nomme maréchal et gouverneur de l’Algérie.
Il a franchi tous les échelons de la hiérarchie militaire.
En 1870, Napoléon III s’engage dans une nouvelle guerre, contre la Prusse, à laquelle participe Mac Mahon. Mais il est défait en Alsace et blessé et le 2 septembre, comme Napoléon III, il est fait prisonnier. Il sera libéré le 25 mars suivant.
A son retour, il est nommé chef de l’armée régulière. On entend par là, les « Versaillais », ceux à qui le Président de la République Adolphe Thiers a confié la tâche de réprimer les « Communards » (opposants à l’occupation allemande et au pouvoir).
Mac Mahon a tellement bien rempli sa mission qu’au cours de cette semaine du 21 au 28 mai 1871 qu’on a appelée
« sanglante », on dénombre environ 20 000 morts. Rien que ça !
Alors le 14 mai 1873, il est élu Président de la République.
Ce qui lui permet de bien afficher ses idées : comme Président du Conseil, il nomme un monarchiste, Albert De Broglie. Mais la 3ème restauration d’un roi échoue à cause du comte de Chambord qui aurait dû régner sous le nom d’Henri V (dernier
descendant de Louis XV) et qui exigeait le retour du drapeau blanc à la place du drapeau tricolore.
C’en était trop, si bien qu’aux élections législatives de 1876, on se retrouve avec une majorité républicaine, donc un gouvernement républicain. Au passage, c’est à ce moment-là que le mandat du Président passe à 7 ans.
Mais les vents de la politique font tourner la girouette. De mars 1875 à décembre 1879, on passe d’un gouvernement royaliste à un gouvernement de centre gauche, puis de gauche. François Ier avait fait écrire sur les murs de Chambord : « Toute femme varie, bien fol qui s’y fie ». S’il était encore là, il aurait pu faire écrire sur les murs de l’Assemblée législative :
« Toute assemblée varie, bien fol qui s’y fie ! ».
En janvier 1879, même au Sénat, la majorité passe à gauche. Mac Mahon n’a donc plus aucun soutien. « Le Président n’a que ce choix : se soumettre ou se démettre ». Non, ce n’est pas Mélenchon qui a dit ça (en tout cas pas en 1879), c’est Léon Gambetta, celui qui, le 4 septembre a proclamé la République, la IIIème qui durera jusqu’en 1940.
Et le 30 janvier 1879, Mac Mahon démissionne.
Malade, il meurt le 12 octobre 1893 à Montcresson (Loiret, près de Montargis).
Il est inhumé le 22 à Saint-Louis des Invalides (XIVème arrondissement). On lui fera des obsèques nationales.
C’est l’histoire d’une carrière militaire qui a franchi tous les échelons, jusqu’à la fonction suprême.
Mais la République n’a pas laissé une grande place à ce monarchiste. Tout au plus, trouve-t-on une avenue Mac Mahon dans le XVIIème arrondissement de Paris et une rue Mac Mahon à Nancy.
Mais la postérité retiendra cette formule particulièrement originale, lors d’une visite à Toulouse en 1875. Devant la Garonne en crue, il se serait exclamé : « Que d’eau ! Que d’eau ! ». Il n’y avait pas de micros pour enregistrer, mais elle a été notée par un journaliste de « La Gazette du Midi ».
En fait, cette phrase a été reprise par plusieurs journaux et appliquée – par dérision – à diverses inondations, telle celle de la Seine à Paris en 1910.
Dans le calendrier républicain, le 17 octobre est le jour de l’aubergine.
BOUGHERA EL OUAFI
Le 15 octobre 1898 est né Boughera El Ouafi, en Algérie, à Ouled Djellal, près de Biskra. On est à une époque où l’Algérie est organisée en départements français depuis la conquête en 1830. Boughera El Ouafi est donc français. Et pour la France, il remporte la médaille d’or du marathon aux Jeux olympiques de 1928 à Amsterdam et c’est le premier athlète africain à remporter une médaille aux J.O.
Son service militaire se fait pendant la guerre. Il est intégré dans le 25ème régiment de tirailleurs….sénégalais.
Algériens, Sénégalais, c’est pareil, c’est de la bonne chair à canons!
Il a la chance d’en sortir indemne et en 1923, il participe à l’occupation de la Ruhr, région très industrielle de l’Allemagne, pour lui faire payer les désastres de la guerre.
Ses chefs ont repéré ses aptitudes à la course à pied malgré son aspect chétif. Il participe à des compétitions militaires. Cette fois, c’est un club civil qui le remarque. El Ouafi est donc engagé par le CASG : Club Athlétique de la Société Générale (il s’agit bien de la célèbre banque), club qui a été créé en 1903, dont le siège est au stade Jean Bouin, près du Parc des princes qui deviendra plus tard Roland Garros. A noter que déjà, pour ce stade, on a exproprié des jardins ouvriers !
En juin 1924, El Ouafi remporte le marathon de Paris en 2h51 (record actuel est de 2h). Avec un autre coureur de fond, Jean-Baptiste Manhès, il est qualifié pour participer au marathon des J.O. de Paris en 1924. Il termine 7ème de l’épreuve.
Mais voilà, Boughera est pauvre et la course à pied, à cette époque, ça ne fait pas vivre son homme. Il lui faut travailler pour vivre. Il trouve un emploi comme décolleteur chez Renault dans l’usine de Boulogne-Billancourt. Ce n’est pas l’idéal pour une préparation aux grandes compétitions. Néanmoins, le 8 juillet 1928, il remporte le marathon qui se déroule entre Maisons-Alfort et Melun. Il est donc retenu pour le marathon des J.O. d’Amsterdam qui auront lieu du 28 juillet au 12 août 1928. L’épreuve se déroule le 5 août. El Ouafi est loin d’être favori face aux stars de l’époque : l’Américain Joie Ray et le Japonais Komantsu. Il en est conscient et fait un départ prudent. Si bien qu’au km 21, il n’est que 7ème. Puis progressivement, il remonte et au km 32, il est 3ème. Et puis encore, il dépasse les favoris, partis plus vite, pour finalement remporter le titre olympique. Il est le seul Français et le premier Africain à recevoir une médaille d’or.
C’est aussi le constat pour la France que l’Empire est un réservoir d’athlètes!
Malheureusement pour lui, son exploit est peu médiatisé. Les Français des années 20 sont plus passionnés par le cyclisme et le foot. En plus, le modeste El Ouafi est peu préparé à la gloire et après son succès, il est vite abandonné à lui-même. Alors, lorsqu’il est invité aux Etats-Unis
pour participer à des meetings payés, il ne refuse pas. Il participe même à des courses contre des animaux (l’image du bon sauvage…). Seulement, rentré en France, il est exclu du Comité National Olympique et de la FFA (Fédération Française d’Athlétisme). Motif ? L’athlétisme doit rester amateur. Donc pas question de toucher de l’argent.
Avec ce qu’il a gagné aux Etats-Unis, il achète un café à Paris, avec un associé, près de la gare d’Austerlitz. Mais cet associé n’était pas fiable et El Ouafi doit trouver un boulot. Ce sera chez Alstom. Voilà qu’il est renversé par un bus et ne peut plus travailler. Il vit dans la misère et l’oubli, lui le champion olympique. Il lui faut attendre 1956, quand Alain Mimoun, d’origine algérienne lui aussi, vient de remporter le marathon olympique de Melbourne et est reçu par le Président de la République, René Coty. Grâce à son entremise, il lui trouve un emploi comme gardien de stade. Le quotidien sportif « L’Equipe » se réveille et lance une souscription pour l’aider à vivre.
Le 18 octobre 1961, Boughera El Ouafi est assassiné. Pourquoi ? Plusieurs versions.
Rappelons le contexte, c’est la guerre d’Algérie qui dure depuis 1954. La situation se radicalise et la violence augmente. La mort d’El Ouafi serait due à un mitraillage du FLN (Front de Libération Nationale) et il aurait été une victime collatérale.
Ou alors, est-ce à la suite d’une querelle familiale ?
Ou encore, a-t-il voulu s’interposer dans une rixe face à des tueurs qui en voulaient à sa sœur ? On ne le saura jamais. Son cas n’est pas apparu important à la justice qui avait d’autres chats à fouetter à une époque où De Gaulle était physiquement menacé.
Boughera El Ouafi a été enterré au cimetière musulman de Bobigny à côté de Paris.
Qu’a-t-il aissé à la postérité ?
Depuis 1998, la rue qui mène au stade de France à Saint-Denis, porte son nom. On a également donné son nom à un gymnase de La Courneuve et depuis 2022, à une piste sportive à Echirolles (Isère), ainsi qu’à une allée à Boulogne-Billancourt. Par contre, rien en Algérie sauf dans son village natal à Ouled Djellal.
Curieusement, la Corée du Nord a émis un timbre-poste à son effigie en 1978.
Quand même, l’historien Pascal Blanchard et le cinéaste algérien Rachid Bouchared ont fait un film « Champions de France » où il est question de lui.
Le commentaire est de Lilian Thuram qui a fait partie de l’équipe de France, championne du monde de football en 1998.
En 2018, Il est l’objet d’un documentaire sur Arte.
Enfin en 2021, Nicolas Debon lui a consacré une bande dessinée.
Il méritait bien au moins ça, Boughera El Ouafi.
Dans le calendrier républicain, le 15 octobre est le jour de l’amaryllis, plante bulbeuse à fleurs.
LE CORRIDOR DE SUWALKI
Le 7 octobre 1920 est signé le traité de Suwalki.
Ce traité, sous l’égide de la SDN (ONU d’après la 1ère guerre mondiale) concerne la Pologne et la Lituanie.
Puis ces deux Etats devenus indépendants, se disputent une frontière de 85 km au point d’entamer une guerre à laquelle la SDN met fin.
A la suite d’un différent, le 28 août 1920, la Pologne envahit la Lituanie qui fait appel à la médiation de la SDN.
Le conflit se termine le 10 septembre 1920 et détermine la frontière dans une région de forêts et de marécages.
Puis, on n’en parle plus … jusqu’au 16 juin 1940 quand l’URSS occupe les Pays baltes et la Pologne, tandis que l’Allemagne nazie envahit l’ouest de la Pologne, conformément au pacte germano-soviétique d’août 1939.
Donc les communistes sont amis-amis avec les nazis ! C’est un de ces contre-pieds dont l’histoire a le secret.
Mais le 22 juin 1941, Hitler rompt ce fameux Pacte et envahit l’URSS dont fait partie la Lituanie et la libère du joug soviétique.
Trois ans plus tard, après que bien du sang et des larmes aient coulé, l’URSS « libère » les pays baltes du joug nazi et en fait 3 RSS (République Socialiste Soviétique) qui
viennent s’ajouter aux 12 autres.
La Pologne elle se voit imposer un régime communiste sur le principe de Moscou et est intégrée en 1949 dans le pacte de Varsovie (en réponse à la création de l’Otan à l’ouest de ce que Churchill a appelé le « Rideau de Fer »).
En août 1991, c’est la fin de l’URSS et les différentes Républiques qui la composaient, se déclarent indépendantes avec quelquefois des accrochages.
La nouvelle Russie accepte mal cette volonté de ses anciennes républiques, volonté de voler de leurs propres ailes.
On a dit aux pays baltes : « On vous a libérés en 1940 ». « Vous nous avez occupés en 1944 » ont-ils répondu. Et chacun disait vrai. Donc dialogue difficile…
De son côté, la Pologne s’émancipe et se tourne vers l’ouest en adhérant à l’OTAN le 12 mars 1999, puis à l’union Européenne le 1er mai 2004.
Quant à la Lituanie, elle adhère à l’OTAN le 19 mars 2004 et dans la foulée à l’UE, le 1er mai 2004 également.
Oui mais voilà, cette situation isole l’oblast (équivalent russe de nos départements) de Kaliningrad qui du temps de la Prusse s’appelait Königsberg, coincé entre Pologne et Lituanie.
Il est simplement ouvert sur la Baltique où les Russes viennent en villégiature l’été (les Russes supportent une eau inférieure à 20° pour se baigner). Cet oblast de Kaliningrad a une
superficie de 15 000 km2 (à peu près 1 fois et demie le département de la Gironde), autant dire peu de choses pour l’immense Russie et ses 17 millions de km2. Là vivent 1 million d’habitants.
La Lituanie voisine en a 2,9 millions. Etant donné sa situation géostratégique, Kaliningrad surarmé constitue un coin dans l’OTAN et l’UE ; isolé, mais pas totalement, puisque ce fameux
corridor de Suwalki le relie à la Biélorussie, amie et alliée de la Russie.
Une restriction quand
même : les véhicules militaires ne peuvent transiter par ce corridor. En principe….
Seulement voilà, le 24 février 2022, cette situation prend un tout autre relief : la Russie vient d’envahir l’Ukraine. Du côté des pays baltes, dont la Lituanie, on s’inquiète car les similitudes sont grandes.
Comme l’Ukraine, ils ont fait partie de l’URSS. Comme l’Ukraine, il y a de fortes minorités russes qui se disent menacées, au moins dans leur culture. Comme l’Ukraine, ils ont été envahis par les nazis en 1941, croyant être libérés du stalinisme. Comme l’Ukraine, ils ont été libérés du nazisme par l’Armée rouge en 1944 et ont été intégrés dans l’URSS.
Alors, la guerre en Ukraine inquiète la Lituanie, séparée du reste des Occidentaux par ce fameux corridor de Suwalki. C’est elle qui est coincée entre Kaliningrad et la Biélorussie.
D’ailleurs, du haut des dunes de l’arrière-pays lituanien, on aperçoit Kaliningrad. Avec un frisson dans le dos. Comme pour exorciser un passé de soumission, dans les forêts qui longent
ce corridor, les Lituaniens y ont rejeté tout ce qui rappelait le communisme : statues de Lénine, emblèmes, etc …
Aujourd’hui, la Lituanie et la Pologne qui ont oublié leur différent de 1920 sont amies et alliées, résolument tournées vers l’Occident.
Elles accueillent même des troupes de l’OTAN.
Mais elles sont séparées par cet étroit corridor. Que peut-il se passer face à un Poutine imprévisible et qui parle toujours de son arsenal nucléaire à des Occidentaux frileux?
L’histoire ne se conjugue pas au futur, encore moins au conditionnel.
Dans le calendrier révolutionnaire, le 7 octobre est le jour de la belle de nuit, fleur qui vient d’Amérique latine.
L'INCIDENT DE FACHODA
Le 19 septembre 1898, c’est l’incident de Fachoda.
Cette localité se trouve à 650 km au sud de Khartoum (actuel Soudan)
C’est un poste militaire égyptien pour lutter contre des trafiquants arabes.
Fachoda est une localité sur la rive ouest du Nil Blanc (branche du Nil).
Elle est constituée de quelques constructions en terre sèche et elle est la capitale du peuple Silluk (peuple traditionnel). Cette région est aussi très convoitée par les puissances colonisatrices européennes : France, Royaume-Uni, Italie, Belgique. Elle est donc d’un grand intérêt stratégique.
La France possède le Sénégal sur la côte ouest de l’Afrique et à l’est, Djibouti à la sortie de la Mer Rouge. De leur côté, les Britanniques contrôlent l’Egypte au nord et possèdent l’Afrique du sud qui est la pointe méridionale du continent. On est à l’ère de la pleine expansion du chemin de fer. Les Français envisagent de relier Dakar à Djibouti par voie ferrée. Tandis que les Britanniques veulent en faire autant dans le sens nord-sud pour relier Le Caire au Cap.
Forcément, les deux lignes devraient se croiser. La Mer rouge est aussi d’un grand intérêt stratégique depuis l’ouverture du canal de Suez (1869). Le khédive (vice-roi d’Egypte à cette époque) avait accordé 45% des parts du canal aux Français. Parts qui ont été rachetées par….les Britanniques. Pour eux, c’est la route des Indes, « perle de leur empire ».
Pour les Français, c’est la route vers l’Indochine récemment conquise et qui permet l’exploitation du caoutchouc (on est au début du développement de
l’automobile). Les deux plus grands empires coloniaux ont tout pour se retrouver face à face.
En juin 1882, les Anglais interviennent militairement en Egypte. La France voudrait bien réagir, mais elle n’en a pas les moyens (surtout financiers). Elle qui y était très présente depuis 1798, quand Bonaparte était venu la conquérir, un siècle plus tard, elle en est exclue. Dans un premier temps, les Britanniques avaient été vaincus par les Mahdistes (religieux du Soudan) qui ont finalement été matés par le général Horacio Kitchener (le jeune Winston Churchill y a participé). Voyant qu’ils sont en position de force, le ministre français des colonies, Théophile Delcassé veut en 1894, amener les Britanniques à faire quelques concessions sur l’Egypte.
Mais les Britanniques n’ont pas pris cette demande à la légère. Cela a été considéré comme un « acte inamical », voire un acte de guerre. Il faut dire que
cette susceptibilité s’explique par le fait que de nombreux accrochages se produisent entre colonisateurs. Alors, Delcassé devenu ministre des Affaires
étrangères, demande au capitaine Jean-Baptiste Marchand de préparer une expédition vers Fachoda. Il en reçoit l’accord officiel le 24 février 1896 et part de Marseille le 29 juin pour arriver à Loango au Congo en septembre. De là avec 5 000 fantassins indigènes (parfois recrutés de force) et des tirailleurs sénégalais comme porteurs, Marchand se dirige vers Fachoda où il hisse le drapeau tricolore et appelle la localité Fort Saint-Louis.
En août 1798, Salisbury, Premier Ministre britannique demande à Kitchener de repousser toute implantation étrangère. Le 25 août, Marchand a fort à faire avec des populations indigènes mécontentes de cette intrusion.
C’est le 19 septembre à 10 heures que Kitchener rencontre Marchand à Fachoda. Tout en reconnaissant que ce dernier, en bon militaire, obéit aux ordres de son gouvernement, l’échange est houleux, car Kitchener exige l’évacuation des lieux le 30 septembre. Les deux chancelleries, française et britannique, échangent pendant quelques semaines. La France prévoit alors d’évacuer. L’information est envoyée à Marchand. Mais pendant les négociations, la Royal Navy envoie sa flotte devant Bizerte (port de Tunisie qui est un protectorat français) et devant Brest, grand port militaire français.
Seulement voilà, la France a perdu l’Alsace-Lorraine en 1871 et rêve de la récupérer. Pour cela, elle a besoin d’alliés et il n’est donc pas question de faire de la Grande-Bretagne un ennemi. Le 3 novembre, l’évacuation est confirmée. Près d’un mois plus tard, le 1er décembre, Marchand quitte Fachoda et part pour Djibouti. Pour la France, c’est une défaite diplomatique qui attise le sentiment anti- anglais dans le pays. On a le patriotisme sensible dans ce contexte.
Le 21 mars 1899, un accord définit plus clairement les limites des influences territoriales. Elle s’établit sur la ligne de partage des eaux du Nil et du lac Tchad. Comme on sent qu’on aura besoin de la puissance britannique (la 3 ème du monde au début du XXème siècle, dépassée par les Etats-Unis et.. l’Allemagne), le 8 avril 1904 est signée « l’entente cordiale ». C’est sûr, en cas de conflit, le Royaume-Uni sera aux côtés de la France. Et de part et d’autre, chacun a ses problèmes internes. Le Royaume-Uni est en guerre en Afrique du Sud contre les Boers. En France, on est en pleine affaire Dreyfus et aussi en plein débat sur la laïcité. Pour éviter l’isolement et prendre éventuellement l’Allemagne à revers, la France avait signé une entente avec la Russie le 27 décembre 1892. De son côté le Royaume-Uni en a signé une avec cette même Russie en juillet 1905. Finalement, on s’est beaucoup chamaillé avec les Britanniques, mais finalement, dans les moments difficiles, ils seront à nos côtés.
Dans le calendrier républicain, le 19 septembre est le jour du …. Travail
ALEXANDRA SKOTCHILENKO
Le 13 septembre 1990 est née Alexandra Skotchilenko à Léningrad , devenue Saint-Pétersbourg en 1991.
Alexandra qu’on appelle aussi Sacha est une artiste musicienne, passée par le collège Smolny (ancien couvent réservé aux filles de la haute société au temps des tsars, puis siège de Lénine lors de la révolution de 1917).
Elle est aussi passée par l’université d’Etat de Saint-Pétersbourg dans le département des arts et des sciences.
Elle s’engage pour lutter contre les maladies mentales.
En 2014, elle a écrit « Livre sur la dépression ».
Musicienne, écrivaine, c’est aussi une opposante convaincue à Vladimir Poutine.
Ce qui lui a valu d’être arrêtée le 31 mars 2022 et condamnée à 7 ans de prison.
Qu’avait-elle fait pour cette sanction sévère ?
Dans une grande surface, au dos des étiquettes de prix, elle avait écrit des informations sur le bombardement du théâtre de Marioupol en Ukraine le 16 mars 2022,sur l’armée russe qui a bombardé une école d’art où 400 personnes se sont trouvées piégées.
Dénoncée par une cliente, elle a été arrêtée le 31 mars. Elle est accusée de « haine politique envers la Russie ».
Le 16 novembre suivant, elle est condamnée à 7 ans de prison.
A titre de comparaison, imaginons chez nous, une personne qui écrit des critiques sur Macron sur les étiquettes d’un supermarché et qui est dénoncée à la police. Il y a fort à parier que celle-ci ne se déplacera pas pour ce genre de situation. Mais la Russie n’est pas la France.
Pour en revenir à Alexandra Skotchilenko de santé fragile, pendant sa détention elle a été malmenée par le personnel pénitentiaire (qui ne lui a pas donné son traitement médical), mais aussi par des codétenues. Au point que sa santé se dégradait assez vite.
Heureusement pour elle, le 1er août 2024, elle a été libérée dans le cadre des échanges de prisonniers entre la Russie et l’Occident. Ce qu’on ne sait pas pour le moment : est-elle partie dans un pays occidental ou pourra-t-elle un jour revenir dans son pays natal ?
Dans le calendrier républicain, le 13 septembre est le jour de la verge d’or ou encore gerbe
d’or. C’est une variété d’aster aux fleurs toujours jaunes.
LES 1ers JEUX OLYMPIQUES FÉMININS
Le 20 août 1922 ont lieu les premiers Jeux olympiques féminins.
Ils se sont déroulés au stade Pershing, nouvellement construit à l’est de Vincennes d’une capacité de 30 000 spectateurs
Il porte le nom du général américain qui, avec ses troupes, a débarqué à Saint-Nazaire en 1917 pour aider la France dans la guerre contre l’Empire allemand (c’est le fameux « La Fayette, nous voilà ! »).
Ces J.O. ont été organisés par le quotidien « Le Journal », à l’initiative de Alice Milliat (1884 – 1957). Militante féministe, et accessoirement championne d’aviron. Elle fut la fondatrice des sociétés féminines sportives de France.
Face au refus de Pierre de Coubertin d’accepter la participation des femmes aux Jeux Olympiques de 1896 d’abord, puis son interdiction pour qu’elles participent à certaines épreuves jugées non féminines, notamment l’athlétisme, les femmes se sont organisées et ont créé « leurs » Jeux Olympiques.
Ces Jeux de 1922 ont rassemblé 5 pays : France, Tchécoslovaquie, Suisse, Royaume-Uni, Etats-Unis. Les épreuves étaient les suivantes : 60 mètres, 100 yards haies, relais 4×110 yards, saut en longueur avec élan, saut en longueur sans élan, lancer du poids, lancer du javelot. Les lancers se font à deux mains.
Déjà, Américaines et Britanniques se taillent la part du lion pour les médailles.
L’attitude de De Coubertin serait aujourd’hui durement condamnée. Mais dans les mentalités du début du XXème siècle, elle n’étonnait pas grand monde.
Ainsi, la presse dénonçait ces femmes qu’on trouvait affreuses à se démener de cette façon plutôt que de se consacrer à leurs familles.
« Le Figaro » de l’époque notait : « Les femmes doivent faire du sport mais pas trop ». Et si elles étaient présentes dans les compétitions sportives, on considérait que leur rôle devait plutôt être de couronner les vainqueurs.
Le CIO (Comité International Olympique) n’a pas accepté l’appellation « Jeux Olympiques » pour les femmes qui se sont donc appelés : « Jeux Mondiaux Féminins ».
En 1922, ceux-ci ont rassemblé 77 athlètes (« athlétesses » a écrit un journal).
Parallèlement, les femmes ont organisé des Jeux athlétiques féminins.
Les premiers ont eu lieu en 1921 à Monaco et ont rassemblé 100 participantes venant de 5 pays.
En 1922, toujours à Monaco, il y eut 300 participantes venant de 7 pays.
Pour les J.O. de 1920 à Anvers, il y avait 27 femmes sur un total de 997 participants. Et encore, elles ne pouvaient participer qu’à des épreuves dites féminines : tennis, voile, croquet, équitation, patinage.
Les J.O. devaient, selon De Coubertin rester un hymne à la virilité, alliance du muscle et du cerveau. Ce que selon lui, n’ont pas les femmes….Les courses à partir de 800 mètres et au-delà leur seront interdites jusqu’aux J.O. de Rome en….1960 !
On constate que c’est après la guerre que les femmes ont revendiqué l’égalité sportive.
Considérées comme le sexe faible, l’argument ne tient plus après ce qu’elles ont vécu à la terre, dans les usines pour remplacer les hommes partis au front, et souvent tués ou mutilés. Un détail illustrait ce changement. Lorsqu’un « Poilu » revenait en permission, sa femme ou sa mère allait le chercher à la gare et c’était elle qui conduisait la voiture à chevaux. L’homme restait sagement à côté de sa conductrice.
Aujourd’hui, heureusement, on n’en est plus là, même si le machisme n’a pas complètement disparu. Les femmes peuvent pratiquer tous les sports.
On peut même constater que leurs performances tendent à se rapprocher de celles des hommes. Il en est même dont les résultats sont si impressionnants qu’elles sont soupçonnées de masculinité.
Ce fut le cas pour une boxeuse algérienne à Paris en 2024 ! Certaines deviennent mères de famille et continuent d’avoir des activités sportives de haut niveau.
La contrepartie est que, comme chez les hommes, il arrive que certaines aient recours au dopage.
Autre contrepartie, dans certaines disciplines, elles sont exposées au harcèlement sexuel de la part de leur coach, en plus du harcèlement moral. C’est principalement le cas en gymnastique, patinage, voire tennis.
Comme pour les hommes, le sport pour les femmes peut contribuer à un certain épanouissement. Mais il faut reconnaître que parfois, elles subissent plus de contraintes.
Aujourd’hui encore, il y a des réactions d’un autre temps. Par exemple, le Tour de France féminin de 2022 a été marqué par de nombreuses chutes. Sur les réseaux sociaux, un triste individu n’a pu s’empêcher d’écrire que si ces femmes étaient victimes de chutes, c’est parce qu’elles étaient préoccupées par leur sac à main ! Peut-on être plus con ? Il vaudrait mieux admettre aussi que les femmes ont évolué plus vite que les hommes.
Dans le calendrier républicain, le 20 août est le jour de la vesse de loup, ou pet de loup, champignon très répandu dans les prés et qui évacue une poussière brune lorsqu’on l’écrase
RINO DELLA NEGRA
Le 18 août 1923 est né Rino Della Negra à Vimy dans le Pas-de-Calais.
Sa famille est d’origine italienne.
Arrivée dans le nord de la France, comme beaucoup d’Italiens, elle s’installe en région parisienne à Argenteuil en 1926. Ses parents ont été naturalisés en 1938.
A partir de 1937, Rino Della Negra est employé comme ajusteur dans l’entreprise Chausson qui fabrique des véhicules utilitaires à Asnières dans le département de la Seine.
Actuellement, Asnières est dans le département des Hauts-de-Seine (banlieue ouest de Paris).
Le jeune Rino est un bon footballeur et il est même un espoir dans son club d’Argenteuil. Avec l’équipe de son entreprise, il
remporte la coupe de France des entreprises en 1938 et 1941. En 1942, lors des compétitions interrégionales, son équipe, celle de Paris, gagne et il est un artisan de la victoire en marquant deux buts. Il est alors recruté par une équipe de professionnels : le Red Star. C’est l’équipe fanion de Saint-Ouen, ville de la banlieue parisienne. Ce club, déjà ancien, avait été fondé en 1897.
Mais voilà qu’en 1942, il est réquisitionné pour le STO (Service du Travail Obligatoire) qui envoie d’office des travailleurs français en Allemagne pour remplacer les hommes partis au front en Russie. Seulement, Rino ne part pas et se trouve donc dans l’illégalité.
En 1943, il rejoint les FTP MOI de la région parisienne, du groupe Missak Manouchian. Tout en jouant toujours au football, il participe à des coups de main contre l’occupant.
Ainsi, le 7 juin 1943, il est de ceux qui exécutent le général allemand Von Apt. Trois jours plus tard, il participe à l’attaque du siège français du parti fasciste italien.
Puis le 13 juin, c’est lui qui mène l’attaque d’une caserne. Une grenade y a été lancée, faisant 9 morts.
Et ce n’est pas fini. Le 13 novembre 1944, avec Robert Witchiz un autre membre des FTP MOI, il attaque un convoyeur de fonds allemand. Mais cette fois, ils sont blessés tous les deux…et arrêtés.
Dans son club, personne ne savait qu’il avait des activités clandestines.
Seulement, à partir de ce mois de novembre 1944, les membres du groupe Manouchian sont un à un arrêtés par le BS 52 de Rueil-Malmaison dans la banlieue ouest de Paris (caserne construite sous Louis XIV et actuellement caserne Guynemer).
Au total, 17 seront arrêtés. Comme les autres, Rino est condamné à mort et fusillé au fort du Mont Valérien le 21 février 1944 avec les membres de l’Affiche rouge. Il avait 21 ans. Il sera inhumé au cimetière d’Argenteuil.
En sa mémoire est créé un tournoi de football FSGT (Fédération Sportive et Gymnique du Travail) en septembre 1944.
En novembre de la même année, le quotidien communiste « Le Soir » a fait un article sur Rino Della Negra.
C’était l’itinéraire d’un fils d’immigré qui a sacrifié sa vie pour son pays d’adoption.
Dans le calendrier révolutionnaire, le 18 août, est la journée de la prune.
CRISTINA BOICO
Le 8 août 1916 est née Cristina Boico à Botosani en Moldavie roumaine.
Elle est issue d’une famille bourgeoise juive comme il y en a beaucoup dans cette partie de l’Europe. Elle s’est tôt exilée en France où elle a fait des études à la Sorbonne.
Expulsée à cause de ses activités politiques, elle retourne en Roumanie et s’inscrit à la faculté de médecine de Bucarest en 1937.
Lycéenne, elle avait déjà rejoint le Front Démocratique des Etudiants, antenne du parti communiste roumain.
Là, elle écrivait des articles contre le fascisme qui s’est étendu en Allemagne, en Italie, en Espagne.
Selon Cristina Boico, le communisme est un idéal qui inclut toutes les ethnies, les religions, les nationalités. Pour elle encore, c’est l’espoir d’un monde meilleur qui, entre autres, permettra la libération du peuple juif.
Avec la guerre, elle revient en France pour entrer dans la résistance dès 1941. Cristina rejoint l’OSMOI (Organisation Spéciale-Main d’Oeuvre Immigrée) sous le pseudonyme de Monique : elle devient responsable du renseignement pour informer les combattants. Ce qui permet aux FTP (Francs-Tireurs et Partisans) MOI d’être à l’origine de 14 déraillements de trains, de 34 incendies et à Paris de 43 assassinats.
L’organisation étant bien cloisonnée, elle échappe aux arrestations de 1943 qui ont permis aux nazis de condamner les membres désignés sur l’Affiche rouge, le 21 février 1944. Le leader de ce groupe était Missak Manouchian. Cette affiche, tirée à 15 000 exemplaires, avait été diffusée dans toutes les villes de France. C’est là qu’il est question de l’affaire Joseph
Davidovitch.
Dans ses informations, Cristina Boiko a découvert que Davidovitch, résistant polonais avait fourni des documents aux Services de renseignements allemands et qui ont permis l’arrestation de Manouchian et de son groupe.
Davidovitch a été piégé et exécuté le 8 décembre 1943.
A la fin de la guerre, Cristina Boiko retourne en Roumanie où elle obtient le poste de directrice au ministère de l’Information. Puis de 1945 à 1947, elle fait partie des membres de l’ambassade de Roumanie en Yougoslavie, pays qui, sous la conduite de Tito, refuse l’alignement sur Moscou.
Rappelée en Roumanie, elle est nommée ministre des Affaires étrangères (1948 – 1952)
Elle est ensuite mise à l’écart et n’est plus « que » enseignante à la faculté de biologie et de sciences politiques (association bizarre).
Elle entre vite en conflit avec celui qui deviendra le « Conducatore », Nicolae Ceaucescu.
En total désaccord avec lui, elle revient en France où sont installés ses enfants et petits-enfants, en 1987.
Elle meurt à Paris le 16 avril 2002.
Itinéraire d’une femme méconnue qui a joué un rôle important dans la résistance, puis dans la politique de son pays.
Dans le calendrier révolutionnaire, le 8 août est le jour de la carline, plante herbacée très épineuse, proche du chardon.
MARIE CURIE
Le 4 juillet 1934, Marie Curie décède à Passy en Haute-Savoie où elle se faisait soigner. Elle était née le 7 décembre 1867 à Varsovie, dans cette partie de la Pologne qui était russe.
Son patronyme était Maria Sklodowska, issue d’une famille aisée dont le père était professeur de mathématique et physique. Sa mère était institutrice.
Très tôt, elle fait des études brillantes et participe à « l’université volante », c’est-à-dire clandestine, car les études supérieures étaient interdites aux femmes.
Alors, elle part en France et se fait un peu d’argent comme gouvernante (nounou), puis revient à Varsovie en 1886.
De retour à Paris en 1891 elle s’inscrit à la faculté des sciences le 3 novembre 1891.
Au mois de mars suivant, elle trouve un logement dans le Quartier Latin, proche de la faculté. En juillet 1894, elle termine 1ère de sa promotion de licence de physique
et 2ème pour la licence de mathématique, l’année suivante.
C’est à ce moment-là qu’elle rencontre Pierre Curie avec qui elle travaille en laboratoire.
La collaboration est telle qu’ils ont des sentiments l’un pour l’autre.
Si bien qu’après un nouveau séjour à Varsovie, elle se marie le 20 juillet 1894 à Sceaux, dans la région parisienne.
En 1896, elle obtient l’agrégation de mathématique. Parallèlement, elle fait des travaux de recherche sur les aciers et prépare un doctorat. Entre temps, le 12 septembre 1897, elle met au monde une fille que le couple prénomme Irène qui sera secrétaire d’Etat sous le Front populaire de 1936.
Le sujet de son doctorat concerne une étude des rayonnements d’uranium.
En même temps, elle découvre la radioactivité du thorium. Puis le 28 décembre 1898, avec le chimiste Gustave Bémont, c’est la découverte du radium.
Grâce à tout ce travail, le 26 octobre 1900, elle devient chargée de conférences de physique à l’Ecole Normale Supérieure de jeunes filles (on ne mélange pas les filles
et les garçons!) à Sèvres, toujours dans la région parisienne.
Le 25 juin 1903, Marie Curie présente une thèse sur les substances radioactives. Elle obtient la mention « très honorable ».
Six mois plus tard, le 20 décembre 1903, elle obtient le prix Nobel de Physique avec son époux Pierre et un autre physicien, Henri Becquerel….mais son nom n’est pas cité. Il a fallu l’intervention de Pierre Curie pour que son nom soit associé aux deux autres lauréats.
Elle devient donc la première femme à obtenir un prix Nobel. Ce prix existe depuis 1901.
La vie continue et le 6 décembre 1904 naît sa seconde fille, Eve (qui sera pianiste et fera carrière aux Etats-Unis).
Mais un drame vient toucher la famille car le 19 décembre 1906, Pierre meurt dans un accident de voiture à cheval.
Marie en a été très affectée. Néanmoins, elle devient la première femme directrice de laboratoire et elle enseigne à la Sorbonne. Ce qui amène le commentaire suivant du quotidien « Le journal » : « Le temps est proche où les femmes deviendront des êtres humains ».
Cela est écrit 10 ans après que pour les premiers Jeux Olympiques de 1896, Pierre de Coubertin avait interdit la participation des femmes.
Le 4 novembre 1911 éclate l’affaire Langevin. Paul Langevin est un physicien qui a été élève de Pierre Curie.
Depuis 1910, avec Marie Curie commence une liaison amoureuse passionnée.
Elle est veuve, lui est marié, père de 4 enfants, plus jeune qu’elle de 5 ans. Leur liaison est donc découverte en 1911. On a fouillé les affaires personnelles de l’un et de
l’autre, pour les livrer à la presse. Pas joli, mais c’était ainsi et c’est encore ainsi.
La presse se déchaîne, surtout celle d’extrême droite (en particulier « L’œuvre ») antisémite et nationaliste (Langevin est pacifiste et anti fasciste).
Ce journal titre : « Une histoire d’amour : Mme Curie et le professeur Langevin, les feux du radium viennent d’allumer un incendie ».
Les relents nationalistes s’en donnent à cœur joie. Ainsi, peut-on lire dans la presse : « Une Polonaise venant briser un bon ménage français ».
L’affaire tombe très mal car Marie Curie vient d’être à nouveau désignée Prix Nobel, mais de chimie cette fois. Néanmoins, même dévastée, elle se rend à Stockholm recevoir son prix.
Déjà atteinte de problèmes rénaux, le voyage l’a épuisée.
La même année, est créé l’Institut Curie. Puis arrive la guerre en été 1914, dans laquelle elle s’engage.
Elle crée une antenne chirurgicale mobile pour être au plus près des blessés et des malades.
Les véhicules sont équipés d’appareils Röntgen pour prendre des radiographies dont les images sont transmises par rayons X.
Le 28 juillet 1916, elle obtient son permis de conduire. Elle fait des radiographies, assistée de sa fille Irène.
A partir des années 20, elle voyage beaucoup pour le compte de la Commission internationale de coopération intellectuelle qui est un organe de la jeune SDN (Société Des Nations).
Elle a toujours tenu à conserver son identité polonaise.
Ainsi elle a appelé polonium, un élément chimique (bien connu des empoisonneurs).
Au cours de sa carrière scientifique, elle a été très exposée à la radioactivité.
On ne prenait pas encore les précautions nécessaires, faute de savoir les conséquences pour la santé.
Aujourd’hui, tous les radiologues prennent des mesures de protection.
Marie Curie est de plus en plus malade, elle est atteinte d’une leucémie qu’elle essaie de soigner au sanatorium de Passy dans la Haute-Savoie.
Rien n’y fait, elle s’éteint le 4 juillet 1934.
Mais Marie Curie n’est pas oubliée. On a donné son nom à de nombreux hôpitaux et établissements
d’enseignement.
Même en Pologne, à Lublin, l’université s’appelle « Marie Curie – Sklodowska ».
Ici et là, des rues portent son nom, à Paris, c’est une station de métro. Avant l’euro, un billet de 500 francs était fait à son effigie, puis ce sera une pièce de 50 centimes d’euro, en 2024, un timbre-poste.
Son histoire est relatée dans des livres, au théâtre, au cinéma, à la télévision.
L’année 2011 a été décrétée année Marie Curie, en l’honneur du 100ème anniversaire de son prix Nobel de chimie.
Le 17 juin 1994 est ouvert le musée Curie (Pierre et Marie) à Paris, à l’université des sciences et lettres.
Enfin, honneur suprême, 20 avril 1995, elle fait son entrée au Panthéon, mais dans un cercueil entouré de plomb pour éviter les contaminations radioactives au personnel et aux visiteurs.
Dans le calendrier républicain, le 4 juillet est le jour du tabac. Le tabac, qui comme le radium, tue.
ALAIN MIMOUN
Le 27 juin 2013, Alain Mimoun est mort. C’était un athlète français qui a fait carrière de 1947 à 1966. Il était né en Algérie, dans la région d’Oran le 1er janvier 1921.
Sa spécialité était la course de fond: 5 000 mètres, 10 000 mètres et marathon (42,195 km).
Il venait d’une famille modeste : père ouvrier agricole, mère femme de ménage. Néanmoins, il passe brillamment le certificat d’études primaires.
Malheureusement, il ne peut pour poursuivre ses études, les bourses étant réservées aux enfants de colons.
Face à cette injustice, il décide de partir en métropole pour y continuer des études. Mais voilà, 1939 c’est la guerre et il a 18 ans. Le 4 janvier, il s’engage dans le 6ème régiment de tirailleurs algériens qui est envoyé à la frontière belge. À partir de 1940, après la démobilisation, il commence à faire du sport. Il choisit la course à pied.
Il devient même champion du département de l’Ain sur 5 000 mètres, son régiment étant stationné à Bourg-en-Bresse. Il fait partie de l’équipe de cross-country de son nouveau régiment, le 19ème régiment du génie en Algérie.
De novembre 1942 à mai 1943, il participe à la campagne de Tunisie contre l’Afrika Korps, sous la direction du général Giraud. Puis à partir de juillet 1943, c’est la campagne d’Italie, avec le général Juin, cette fois. A la bataille du Monte Cassino, il est sérieusement blessé au pied. Il risque l’amputation, mais l’hôpital de Naples le lui sauve. Ainsi, le 15 août 1944, il peut participer au débarquement en Provence et remonte la vallée du Rhône, puis de la Saône, pour faire la jonction avec ceux débarqués en Normandie, le 6 septembre 1944, au village de Nods/Seine, en Côte d’Or (une stèle marque l’évènement).
Comme beaucoup, il est démobilisé en 1946. Il peut s’inscrire dans un club d’athlétisme parisien. Ce sera le Racing Club de France qui lui offre un poste de garçon de café. Il peut donc s’entraîner et commence à dominer la course de fond française dès 1947 : 5 000 mètres et 10 000 mètres. Mais dans les compétitions internationales, il trouve presque systématiquement sur son chemin, le Tchécoslovaque Emil Zatopek, au rythme infernal. Au point qu’on le surnomme « la locomotive humaine ». Aux Jeux Olympiques de Londres en 1948, puis d’Helsinki en 1952, Alain Mimoun doit, à chaque fois, se contenter de la médaille d’argent. Néanmoins, le quotidien sportif « L’Equipe » le désigne « champion des champions » en 1949. Quelques temps après, il bat le record de France des 20 km.
Après avoir visité Sainte-Thérèse de Lisieux, il se convertit au catholicisme.
1956 : les Jeux Olympiques ont lieu à Melbourne. Le 1er décembre, c’est le marathon auquel participe Alain Mimoun. La veille, il a appris la naissance de sa fille. C’est le premier marathon de sa vie, où il y a aussi celui qui est devenu son ami : Emil Zatopek. Pour Mimoun, la fin de parcours est interminable sous le chaud soleil. Il a mis un mouchoir sur sa tête, pour une protection dérisoire. Selon ses dires, les derniers kilomètres sont un calvaire. Mais finalement, il remporte l’épreuve en 2h25mn (aujourd’hui, le record est autour de 2 h). Cette fois, Zatopek vaincu (il termine 6ème) vient le féliciter. A son retour à Orly, il est acclamé et porté en triomphe. Il est au sommet de sa gloire, lui le fils de paysan modeste d’Algérie. Cette année-là, « L’Equipe » le désigne encore « champion des champions ».
En 1960, il crée un centre sportif national à Bugeat (Corrèze) d’où est originaire son épouse. Il termine sa carrière en 1966. Entre-temps, il y a eu les accords d’Evian qui donnent l’indépendance à l’Algérie. Alain Mimoun n’a pas voulu choisir un camp ou l’autre. Quoi qu’il en soit, il devient Français.
Des gymnases portent son nom, en particulier à Argenteuil, ainsi que des écoles et des stades. Il a la médaille d’honneur de la ville de Vincennes. Il a été chevalier de la Légion d’Honneur en 1956 (par le Président Coty), Commandeur de la Légion d’Honneur en 1999 (par le Président Chirac), Grand Officier de la légion d’Honneur (par le président Sarkozy). Mais ce n’est pas tout. Il est Chevalier de l’Ordre national du mérite et il a la Croix de guerre 1939 – 1945. Enfin, il a été le sujet de documentaires, de films, de livres.
Il s’est éteint à l’hôpital de Saint-Mandé le 27 juin 2013. C’était le parcours d’un grand champion resté modeste et qui était charismatique.
Dans le calendrier républicain, le 27 juin est le jour de l’absinthe.
BENAZIR BHUTTO
Le 21 juin 1953, est née à Karachi, Benazir Bhutto qui fut première ministre du Pakistan de 1988 à 1990, puis de 1993 à 1996.
Elle est issue d’une famille riche qui possède de vastes terres. Elle est la fille d’Ali Bhutto, fondateur du PPP (Parti du Peuple Pakistanais), plutôt socialiste et qui a été président de la République de 1971 à 1977.
Même si elle a été la première femme élue démocratiquement à la tête d’un pays à majorité musulmane, sa vie a été loin d’être un long fleuve tranquille qui se terminera de façon dramatique par un assassinat (attentat suicide) le 27 décembre 2007.
Dans sa jeunesse, elle a reçu une éducation dans des missions catholiques anglophones. A partir de 1969, elle suit des études à Harvard puis à Oxford. D’ailleurs, en décembre 1976, elle devient la première femme originaire d’Asie à être présidente de l’Oxford Union (sorte d’association des anciens d’Oxford).
Elle revient au Pakistan en 1977, avec l’ambition de faire une carrière diplomatique sous le gouvernement de son père, Ali Bhutto, 1er ministre à cette époque.
Mais le 5 juillet 1977, son père est en prison. Accusé d’un meurtre en 1974, puis de fraudes électorales, il est condamné à mort et pendu le 4 avril 1979.
Benazir, avec sa mère, devient la cheffe du PPP. Mais toutes deux sont emprisonnées, puis libérées en 1980.
En 1981, elles fondent le « mouvement pour la Reconstruction de la Démocratie ». Benazir se retrouve en prison à Sukkur (ville de la province du Sind, dans le sud du pays). Les conditions de détention y sont si dures qu’elle tombe malade.
En 1982, sa peine est soulagée, mais elle doit rester en résidence surveillée à Karachi (plus grande ville du pays, mais pas la capitale).
En janvier 1984, elle part à Londres se faire opérer du mastoïde (os temporal). De là, elle essaie de mobiliser l’opinion internationale contre le général Zia qui a fait un coup d’Etat.
Elle rentre au Pakistan en juillet 1985, pour les funérailles de son frère Shahnawaz, probablement empoisonné sur ordre de Zia. Mais elle est aussitôt arrêtée et emprisonnée.
Libérée, elle repart à l’étranger. Puis revient à Lahore le 11 avril 1986, bien accueillie par la foule qui la sollicite pour prendre la tête de l’opposition. A partir de là, Benazir Bhutto entame une tournée qui tourne court car elle à nouveau incarcérée et échappe de justesse à un assassinat.
Le 18 décembre 1987, elle épouse Asif Ali Zardani. Mais comme elle ne fournit pas de dot, elle conserve son nom de naissance. Le couple aura 3 enfants. A partir de là, Benazir entre en conflit avec ses frères encore vivants qui veulent pratiquer une opposition armée, alors qu’elle préconise un combat non violent.
Le 29 mai 1988, Zia dissout l’assemblée nationale. Les militaires forment une alliance démocratique et islamique anti Zia. Et le 21 septembre 1988, des attaques ont lieu à Karachi et à Hyderabad (dans le Sind) qui font 240 morts.
Néanmoins, aux élections du 16 novembre 1988, c’est la victoire du PPP.
Benazir et sa mère Nusrat sont parmi les élu(e)s. Benazir sera désignée 1ère ministre si elle soutient Ishaq Khan (haut fonctionnaire qui a été 1er ministre de Zia, disparu dans un mystérieux accident d’avion) pour la présidentielle.
Ishaq Khan est finalement élu président le 13 décembre 1988.
Ainsi, à 35 ans, Benazir Bhutto est la plus jeune personne désignée à ce poste dans un pays musulman.
Aussitôt, elle veut appliquer une politique de privatisation (contraire à celle de son père).
En juin 1989, elle milite pour la liberté de l’Internationale libérale (fédération mondiale de partis politiques libéraux). Mais après les troubles de Karachi du 6 août 1990, elle est démise, car accusée de corruption et d’abus de pouvoir. Arrêtée et emprisonnée avec son mari, elle est vite libérée et innocentée (son mari reste détenu).
Les élections législatives du 6 octobre 1993 donnent la victoire au PPP et à ses alliés, mais c’est une majorité fragile.
Néanmoins, Benazir Bhutto est désignée 1ère ministre le 19 octobre 1993.
A ce moment-là, elle soutient plus ou moins les mouvements islamistes du Cachemire, en lutte contre l’Inde, le grand rival. Dans le même temps, elle s’efforce de créer de bonnes relations avec l’Occident.
Ainsi, en novembre 1994, elle rend visite à Mitterrand, et quelques mois plus tard, elle reçoit Hillary Clinton.
Sur le plan économique, elle reprend sa politique de privatisations qu’elle avait déjà initiée.
Seulement voilà, son frère Murtaza est abattu par la police le 26 septembre 1996. Curieusement, des soupçons pèsent sur elle. Aux élections législatives de 1997, le PPP est battu et Benazir est contestée. Elle doit alors encore s’enfuir pour se retrouver à Londres et à Dubaï, car elle est accusée de corruption et de clanisme. De l’étranger, elle dirige le PPP. Finalement, elle sera amnistiée par Pervez Mousharaf, chef de l’exécutif de l’époque. Car une modification de la constitution intervenue en 1998, lui interdisait de revenir au Pakistan. Elle y revient en 2001. Son retour en grâce est dû à une ordonnance de réconciliation nationale du 27 juillet 2007. Elle peut donc préparer les élections de 2008, comme opposante à….Mousharaf.
Le 18 octobre 2007, elle revient à Karachi et se déclare comme la principale opposante au pouvoir. Le soir même, il y a un attentat, dont elle réchappe. Mais il fait près de 200 morts. Le miracle n’aura pas lieu le 27 décembre, lors d’un rassemblement du PPP à Rawalpindi. Là, un jeune homme de 15 ans tire trois coups de feu et déclenche sa ceinture d’explosifs. Bilan : 20 morts et Benazir Bhutto est grièvement blessée. Elle meurt à l’hôpital. L’annonce de sa mort provoque des émeutes dans tout le pays et on dénombre 44 morts. Trois jours de deuil sont décrétés. Une enquête de l’ONU du 25 avril 2010, estime que la sécurité était mal assurée. Le Pakistan accuse Al Qaïda.
C’était l’itinéraire compliqué d’une femme dans un pays gangréné par la violence. Une femme pourra-t-elle revenir un jour au pouvoir au Pakistan ?
Dans le calendrier républicain, le 21 juin est le jour de l’oignon.
MARINA OVSIANNIKOVA
Le 19 juin 1978 est née Marina Ovsiannikova à Odessa, d’un père ukrainien et d’une mère russe. L’Ukraine faisait encore partie de l’URSS. Marina était journaliste et productrice sur « Первы Канал » (1ère chaîne russe de télévision).
Le 24 mars 2022, c’est-à-dire 3 semaines après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, elle a accompli un acte de résistance pacifique et audacieux.
Au cours du journal télévisé du soir «Время » (Le Temps) ,derrière la présentatrice, elle a exposé une pancarte écrite en russe et en anglais, contre la guerre en Ukraine. Sur cette pancarte, était écrit: « Non à la guerre. Ne croyez pas la propagande. Ils nous mentent ».
L’émission a été interrompue et remplacée par un reportage enregistré. L’image a fait le tour des télévisions occidentales.
Bien sûr, elle a été arrêtée, mais en octobre, elle a réussi à s’enfuir clandestinement. Sans ses deux enfants car son mari, dont elle était séparée, a refusé qu’ils partent avec elle.
Revenue malgré tout en Russie, elle manifeste pour Navalny qui est en prison, et encourage les Russes à en faire autant.
Arrêtée encore, elle est jugée coupable d’«infraction administrative » (formule vague où l’on peut mettre tout ce qu’on veut).
Le 15 mai, après 14 heures d’interrogatoire, elle est condamnée à une amende équivalent à 250 € (salaire mensuel moyen en Russie : à peine 400 €) et encourt 15 ans de prison.
Sachant les risques qu’elle prenait, Marina Ovsiannikova avait pris soin d’enregistrer une vidéo publiée sur « Télégram ».
Elle y dénonce la guerre en Ukraine et rappelle que la Russie est l’agresseur, que la propagande a transformé le peuple russe en « zombie » (c’est son mot). Après cet épisode, Marina ovsiannikova démissionne de son poste à la télévision russe et se retrouve en Allemagne où elle travaille pour le journal « Die Welt » (Le Monde).
Le 22 mai, elle est récompensée par le prix « Vaclav Havel », créé par la Fondation « Human Rights ».
En fait, Marina n’est pas la première venue. Elle est diplômée d’Etat de l’université de Kouban (dans le sud de la Russie) pour la culture physique, le sport et le tourisme. Elle est également diplômée de l’Académie russe de l’économie nationale. Elle travaille pour une télévision et une radio panrusses (de toutes les régions russophones). Mais les condamnations n’arrêtent pas Marina Ovsiannikova.
Le 15 juillet 2022, elle manifeste au pied du Kremlin, en posant sur le sol, 3 poupées ensanglantées accompagnées d’une affiche sur laquelle est écrit : «Poutine assassin, soldats fascistes ».
Evidemment, le 17 juillet, elle est encore arrêtée, mais curieusement relâchée. Lors du procès qui suit, elle persiste et déclare que l’invasion russe est un «terrible crime ».
Le 9 août, Marina est à nouveau arrêtée, condamnée à une amende de 300 €, cette fois et assignée à résidence. Le lendemain, elle est mise en détention provisoire à Moscou.
Néanmoins, en octobre 2022, avec l’aide de « Reporters Sans Frontières », elle peut s’enfuir avec un de ses enfants.
C’est au printemps 2023 qu’elle écrit son autobiographie qui sera publiée en Allemagne et en France. Comme elle est absente pour son procès en Russie, elle est condamnée par contumace pour « hooliganisme ».
Marina Ovsiannikova est soutenue par la presse étrangère, par l’attachée de presse de Navalny, par l’avocate russe Lioubov Sobol, militante anti-corruption, et aussi par Volodomyr Zélensky.
En mai 2023, Macron lui a proposé l’asile politique. Elle décliné la proposition car elle ne veut pas quitter son pays définitivement.
Certains s’étonnent qu’après ses arrestations, elle ait pu fuir relativement facilement. D’autres remarquent que les sanctions sont relativement modérées, alors que pour de simples manifestations, certains prennent 8 ans de prison.
Ceux-là finissent par se demander si par cette relative clémence, Poutine ne voudrait pas montrer que le droit de contestation existe en Russie. Réalité ou manipulation ?
Quoi qu’il en soit, bon anniversaire Marina.
Dans le calendrier révolutionnaire, le 19 juin est la journée du seigle.
MOLLY MALLONE
On dit – ne regardez pas Mesdames – que caresser cette poitrine, est un gage de bonheur…pour les hommes. D’où l’aspect patiné de cette partie de son anatomie!
Il s’agit d’une sculpture en bronze, grandeur nature, de Jeanne Rynhart (1946 – 2020), sculptrice irlandaise qui a réalisé cette œuvre en 1988.
Elle a été initialement placée en bas de Grafton Street, artère commerciale avec de nombreux magasins de luxe.
Elle a été déplacée en 2014, dans St Andrew’s street, non loin de là.
La légende veut que Molly Malone ait été une marchande ambulante vendant « cookles and mussels » (bucardes et moules) le jour et qu’elle se prostituait la nuit.
D’autres affirment au contraire, que c’était une femme chaste. Que chacun choisisse son camp…
Elle serait morte jeune d’une fièvre. En fait, la tenue de Molly Malone ne fait que représentait la façon dont s’habillaient les femmes modestes du XVIIème siècle. Beaucoup d’entre elles avaient une poitrine généreuse pour allaiter les bébés (cf les femmes du Morvan, pleines de santé, qui allaitaient les enfants des Parisiennes au XIXème siècle). En outre, l’allaitement pouvait se faire en public, sans que cela ne choque personne.
Elle a inspiré l’hymne officieux de Dublin, celui que chante le peuple. C’est aussi…l’hymne de l’équipe de rugby, et du GAA (Association Athlétique Gaélique) après quelques pintes de Guinness que les irlandais boivent sans modération. Je joins la chanson que vous reprendrez si cela vous amuse, mais il n’existe aucune preuve qu’elle concerne Molly Malone elle-même.
Elle a aussi inspiré des chansons :
– The Dubliners : « Molly Malone »
– Renaud : « Molly Malone, ballade irlandaise »
– Hugues Aufray : « La ballade de Molly Malone »
L’Irlande d’hier et d’aujourd’hui aime bien ce genre de légende. Et Molly Malone fait désormais partie du patrimoine touristique de Dublin.
Dans le calendrier républicain, le 23 juin est le jour de la tanche.
MARIUS ROSSILLON
Le 8 juin 1867, est né à Lyon, Marius Rossillon.
C’était un dessinateur pour publicités (on disait réclames).
On l’avait surnommé O’Galop car ses dessins étaient rendus rapidement.
Il a dessiné pour « Le Rire » (hebdomadaire humoristique), pour « l’Assiette au beurre » (magazine satirique), le « Pèle-Mêle » (hebdomadaire humoristique), « Le Cri de Paris » (hebdomadaire satirique et politique), le « Charivari » (quotidien satirique illustré).
Tout le monde connaît la publicité pour les pneus Michelin : le fameux Bibendum, avec son embonpoint débonnaire, ses grosses semelles de caoutchouc. L’auteur de ce personnage universellement connu, c’est lui : Marius Rossillon qui l’a créé en 1910, où il devient l’affichiste attitré de Michelin. On est au tout début de l’essor de l’automobile.
Mais c’est loin d’être sa seule production. Il a dessiné la réclame pour le dentifrice Gibbs, les pâtes Lustucru, le stylo Waterman, la boisson gazeuse Riqlès. II a également illustré des recueils des Images d’Epinal. Et ce n’est pas tout. Il a aussi produit des films : « Bécassotte à la mer », court métrage de 1920, et « La colombe et la fourmi » de 1924 et qui est une illustration de la fable de La Fontaine.
Après son mariage, en 1898, il achète une maison en Périgord, à Beynac qui est encore loin d’être submergé par le tourisme. Cette maison est en haut d’un chemin au-dessus des maisons. La sienne domine le bas du village et la courbe de la Dordogne, et tout là-haut, le fier et puissant château médiéval qui donne l’impression de surveiller les alentours. On peut la reconnaître : une plaque commémorative y a été apposée. De-là, il a peint les merveilleux paysages de la vallée de la Dordogne. Marius Rossillon y restera jusqu’à sa mort (2 janvier 1946). En fait, il mourra à l’hospice de saint-Rome (actuellement EHPAD), sur la commune de Carsac-Aillac, distante d’une trentaine de km.
Son petit-fils Philippe fera une carrière de diplomate. Celui-ci s’est donné pour objectif de défendre la langue française au Québec. Ce qui lui vaudra quelques ennuis avec le 1er Ministre Canadien, notamment après l’apostrophe de De Gaulle : « Vive le Québec libre ! » en juillet 1967. Philippe se marie avec Véronique Seydoux, issue d’une riche famille d’industriels. Ils ont deux enfants : Antonin et Kléber. Antonin se tue accidentellement, à 33 ans, sur la route le 11 août 1991, sur la commune voisine de Vézac. Quant à Kléber, il dirige l’entretien des sites culturels et touristiques. Il en a 12 sous sa responsabilité. Parmi eux, on note, le château de Marqueyssac sur la commune de Vézac, célèbre pour ses jardins bordés de buis parfaitement taillés, dominant la Dordogne. De l’autre côté de la rivière, il a fait reconstruire le château médiéval de Castelnaud, longtemps en ruines et qui, aujourd’hui est le lieu d’animations liées au Moyen-Age. Il est aussi le propriétaire de ces deux châteaux. Entre autres, il gère le château de Langeais (Indre-et-Loire), le musée de Montmartre, la grotte Chauvet (Ardèche), la grotte Cosquer (Bouches-du-Rhône), le Mémorial de Waterloo en Belgique.
Mais c’est finalement dans son secteur que Kléber Rossillon a connu le plus de difficultés : la vallée de la Dordogne qui passe entre le château de Castelnaud (pris par les Anglais pendant la guerre de Cent ans) et celui de Beynac (resté français). En fait le problème n’a rien à voir avec les rivalités de cette époque. Celui qui fut maire de Castelnaud, puis conseiller départemental, est devenu président du Conseil départemental de la Dordogne : Germinal Peiro. Celui-ci s’est mis en tête, à la suite de son père, maire de Vézac, de contourner Beynac par ce que l’un et l’autre ont appelé « la voie de la vallée ». Il est vrai que la route qui joint Bergerac à Sarlat, ne peut recevoir un trafic toujours plus dense, vue son étroitesse. Il existe bien une autre route pour joindre ces deux villes, mais elle passe dans les bois à une quinzaine de km de là et qui serait moins coûteuse. Mais elle le tort de ne pas traverser le fief électoral de Germinal Peiro. Pour réaliser cette « voie de la vallée », il fallait construire deux ponts, une route traversant une réserve naturelle protégée. Mais rien n’y fit. Germinal, l’ancien champion de Canoë kayak, a fait commencer les travaux malgré les oppositions d’une partie de la population, de l’administration régionale de Bordeaux, et l’opposition de Kléber Rossillon, protecteur du patrimoine et propriétaire de deux châteaux. Et de toute façon, sa démarche avait été jugée illégale.
Est-ce que Germinal Peiro, avec un prénom qui rappelle le calendrier de 1793, se croit investi pour s’opposer à ceux qu’il appelle les châtelains ? Quoi qu’il en soit, il en fait un combat personnel et, jusqu’à présent, tarde à répondre aux injonctions administratives pour détruire ce qu’il a commencé à construire. Or, parmi ceux qu’il désigne comme des « châtelains, il y a bon nombre d’illustres inconnus qui ont signé des pétitions contre cette stupide entreprise. On est en plein imbroglio politico-clochemerlesque, qui a pour principal inconvénient de coûter cher à la collectivité, sans rien rapporter à personne, sauf à l’ego de germinal Peiro. Pour l’instant, il règne en potentat local sur le département de la Dordogne. Stéphane Bern, lui aussi sensible au patrimoine, a même parlé d’un « Ceausescu » du Périgord.
On est loin de Marius Rossillon et de son Bibendom Michelin. Ainsi va le monde dans ce beau Périgord.
Dans le calendrier républicain, le 8 juin est le jour de la fourche (peut-être celle que Germinal Peiro voudrait brandir contre les « châtelains »).
JOSÉPHINE BAKER
Le 3 juin 1906, est née Freda Joséphine Mac Donald à Saint-Louis dans l’Etat de Missouri. On la connaît bien mieux sous le pseudonyme de Joséphine Baker. Fille d’artistes, elle est abandonnée par son père dès 1907. Elle passe son enfance entre école et petits boulots chez des gens aisés, car elle est l’aînée d’une famille pauvre. Dans un premier temps, elle est mariée à 14 ans avec Willie Wells, un joueur de base-ball, dont elle se séparera très tôt. Cependant, elle a des aptitudes pour la danse et elle fait vite partie d’un trio d’artistes de rue. Lors d’une tournée à Philadelphie, elle trouve à se remarier avec William Howard Baker qui travaille pour Pullmann. Elle conservera ce patronyme.
A 16 ans, elle quitte son second mari pour tenter sa chance à Broadway, rien que ça. Mais sa proposition est refusée. N’oublions pas qu’elle est noire et que dans les années 20, les Etats-Unis sont toujours ségrégationnistes. Après plusieurs tentatives infructueuses avec divers groupes, elle rencontre Caroline Reagan, épouse d’un haut fonctionnaire de l’ambassade américaine à Paris. On lui propose un salaire de 250 dollars si elle vient en France. Caroline et son époux montent un spectacle : « La revue nègre » où elle sera la vedette. Joséphine débarque à Cherbourg le 22 septembre 1925. Le 2 octobre, elle passe en 1ère partie de « La revue nègre » au théâtre des Champs Elysées. Elle y danse le charleston, encore inconnu des Parisiens, où son déhanché fait un tabac, comme on dirait aujourd’hui.
Là, Joséphine réalise que la France est moins raciste que les Etats-Unis. En 1927, elle obtient un contrat pour se produire aux Folies Bergères. C’est là qu’elle danse nue, avec une ceinture de bananes (artificielles) et accompagnée d’un guépard (un vrai), ce qui inquiète un peu l’entourage. Son impresario est devenu son amant. Alors, elle se lance dans la chanson : « la Tonkinoise » (pas sûr que ça passerait aujourd’hui ?) et « J’ai deux amours » (en fait, elle en aura bien plus de deux !). Si bien qu’en 1928, elle fait une tournée mondiale (il n’y a pas encore d’avions pour les voyages).
Dans les années 30, elle engage Jean Lion, un play-boy issu d’une riche famille d’industriels, comme secrétaire et…comme amant, puis mari. Le mariage dure peu, mais lui permet d’acquérir la nationalité française. C’est à ce moment-là que le couple loue un château du XVème siècle aux Milandes (commune de Castelnaud – Fayrac) en Dordogne, à une vingtaine de km de Sarlat.
Avec la guerre, elle rencontre Jacques Abtey, officier du renseignement et du contre-espionnage. Pour le camoufler, elle en fait son secrétaire artistique….et son amant. Elle se produit devant les troupes au front. Mais surtout, elle profite de sa notoriété pour être invitée dans des soirées mondaines où elle recueille des informations importantes, rapidement transmises à Londres. Elle embarque pour le Maroc où elle poursuit ses spectacles devant les troupes. Mais une méchante péritonite manque lui coûter la vie. Il lui faudra de longues semaines de convalescence. Lorsque les Américains débarquent en Algérie en novembre 1942, le commandement l’invite à se produire devant les soldats.
Elle avait obtenu un brevet de pilote d’avion en 1938. Forte de ce bagage, elle participe à des évacuations sanitaires. Toutes ces actions lui vaudront de devenir lieutenante de l’armée de l’air et de recevoir la médaille de la Résistance de De Gaulle lui-même. Médaille qu’elle revendra au profit des mouvements de Résistance.
Après la guerre, elle devient ambassadrice de la haute couture française. Sur scène, elle se présente avec de magnifiques robes de Dior ou Balmain. En 1947, elle épouse Jo Bouillon, chef d’orchestre et compositeur qui l’accompagne dans ses spectacles. Mais à la suite d’une fausse couche qui s’est mal passée, elle ne pourra pas avoir d’enfants. C’est avec Jo Bouillon qu’en 1947, elle achète les Milandes, dont elle était déjà locataire depuis 1937 (sur les cartes du XIXème siècle, ce château s’appelait les Mirandes. Mais Joséphine ayant un problème avec la prononciation des R, c’est devenu les Milandes). Là, elle adopte 12 enfants de toutes origines (Jo Bouillon n’en voulait que 4). Elle l’appellera « la tribu arc-r-ciel ».
Les Milandes deviennent un lieu d’attractions diverses avec piscine (encore rare à cette époque), golf miniature, restaurant, bar, et bien sûr, salle de spectacle. Tout le monde vient aux Milandes, c’est le lieu, avec St-Trop’, où il faut être vu. Des touristes arrivent de toute la France, et même de l’étranger. Mais c’est surtout la « jet set » parisienne qui vient aux Milandes. De grandes stars s’y produisent: Gilbert Bécaud, Dalida, Jacques Brel, Luis Mariano, etc… Et dans leur sillage, de nombreux journalistes qui, par la même occasion ont découvert le Périgord.
Pour transformer ce « palais de la démesure », il faut aménager. Joséphine fait alors appel à des artisans locaux, souvent peu scrupuleux qui ont contribué à sa ruine, d’autant que Joséphine, si elle était une grande artiste, était une très mauvaise gestionnaire. Certains n’hésitaient pas à faire payer la même facture deux ou trois fois. On volait de la vaisselle, des couverts, des objets précieux. On a vu un électricien qui allait chez ses clients en vélo, avec la boîte à outils sur le dos, devenir propriétaire d’une magnifique maison surplombant la vallée de la Dordogne. On a vu une famille de plombiers devenir rapidement riche. Dans les exploitations agricoles qu’elle possédait, des animaux étaient déclarés morts, alors qu’ils étaient vendus au bénéfice des exploitants. Et ainsi de suite…Face à une telle gabegie, les relations entre Joséphine et Jo se sont dégradées. Les disputes se sont multipliées, de la vaisselle volait. Ils se séparent en 1957. Joséphine reste aux Milandes .
Et que pensaient les gens du coin de toute cette activité nouvelle, dans une région restée encore aux activités ancestrales, disons encore en retard ? Peu familiers avec la langue de Shakespeare, ils l’appelaient Joséphine Bakère, ou plus familièrement Joséphine. Ils étaient partagés entre agacement et fierté. Agacement, parce que dans cette région, jusque-là si tranquille, arrivaient tout ce monde complètement étranger aux habitudes locales. Fierté quand même de voir que de jour en jour, le Périgord pouvait être à la une des journaux et radios. Et comme toujours des bruits courraient, parfois vrais, parfois faux. Parmi les vrais: Jo Bouillon était homosexuel. Comme il avait des connaissances bien placées, les jeunes de la région qui voulaient éviter la guerre d’Algérie et allaient le voir. Ce qu’il se passait ensuite n’est pas forcément vrai. De toute façon, ma mère m’interdirait de le répéter. Ce qui semble vrai aussi : on finit par savoir que Joséphine était bisexuelle. Elle a eu pour amantes -entre autres – l’écrivaine Colette et la peintre Frida Kahlo. Evidemment, dans ce Périgord traditionnel, on en faisait des gorges chaudes avec des moues de réprobation.
Tout au cours de sa vie, elle a milité contre le racisme. Joséphine a même fait partie de la LICRA (Ligue Internationale Contre le Racisme et l’Antisémitisme). Elle sera aux côtés de Martin Luther King lors de son fameux discours du 22 août 1963 : « I have a dream ».
Ruinée, criblée de dettes, le château est mis aux enchères. Joséphine lance un appel pour le sauver. Emue par sa situation, Brigitte Bardot lui envoie un chèque important. La princesse Grace de Monaco en fait autant et l’invite même à se produire dans la Principauté. Jean-Claude Brialy la produit dans son cabaret. En 1964, elle remonte sur scène : l’Olympia, Belgrade, Carnegie hall à New-York, puis encore à Paris en 1974. Le 24 mars 1975, elle veut fêter ses 50 ans de carrière. Mais le 10 avril, elle est victime d’une hémorragie cérébrale et se retrouve dans le coma. Le 12 avril, elle décède à l’hôpital de la Pitié-Salpétrière. Triste fin d’une grande artiste. De nombreux hommages lui ont été rendus ici et là en France et même à l’étranger. Puis finalement, le 29 novembre 2021, ce sera l’hommage suprême : l’entrée au Panthéon. Tout un symbole : femme, noire, d’origine étrangère….
Pourtant, les Périgordins (habitants du Périgord, tandis que les Périgourdins sont les habitants de Périgueux) doivent beaucoup à Joséphine. Outre ceux qui se sont enrichis sur son dos, artistes et journalistes ont découvert et fait découvrir cette merveilleuse région, avec la vallée de la Dordogne (la « Grande Aygue » chère à Christian Signol dans ses romans). On redécouvre son histoire, ainsi que celles de tous ces châteaux médiévaux, Renaissance. Il y a tous ces villages, dont certains sont classés parmi les plus beaux villages de France, comme Beynac (prononcer Beïnac et non pas Bénac comme le fait Stéphane Bern), La Roque-Gageac, et un peu plus loin : Domme, Belvès, Monpazier, Montignac et Lascaux, Les Eyzies avec ses grottes et son musée de la préhistoire . Au milieu de tout cela, un trésor médiéval – comme il était annoncé au bord des routes – Sarlat, ses vieilles rues, ses maisons, dont celle de La Boétie, le grand ami de Montaigne, son église Saint-Sardos, sa place de l’Hôtel de Ville, envahie par les cafés et les touristes, et par le grand marché du samedi. Même l’architecte Jean Nouvel natif du département voisin du Lot-et-Garonne y a mis sa patte en transformant l’église Sainte-Marie du XIVème siècle en marché couvert, avec sa gigantesque porte.
Finalement, le Périgord est envahi par les touristes, on peut utiliser le mot. Il y a trop de monde dans les rues de Sarlat (e qui pose des problèmes de sécurité pour l’accès des secours), de Beynac, de Laroque-Gageac, de Domme. Trop de monde également sur des routes surchargées. Il en va ainsi pendant toute la saison touristique qui, maintenant s’étale sur presque 6 mois (de mai à début novembre). Evidemment, toutes les activités liées au tourisme y trouvent leur compte : restaurants, hôtels, commerces. Malheureusement, tout ce beau monde cherche plus à faire du profit que de la qualité. Par contre, tous ceux dont l’activité n’est pas liée au tourisme ne s’y retrouvent pas : augmentation des prix, difficultés de circulation, files d’attente dans les magasins devenus souvent moins accueillants, car débordés. Autre inconvénient: hors la saison touristique, beaucoup de magasins ayant fait leur beurre pendant l’été, ferment pour aller en vacances à Arcachon ou dans les Pyrénées, malgré des efforts de novembre à mai.
Le Sarladais (environs de Sarlat) ne semble pas avoir une grande reconnaissance pour Joséphine Baker. C’est elle qui, indirectement, a fait venir les touristes dans le secteur. Le seul souvenir est cette longue avenue Joséphine Baker qui traverse une grande et affreuse zone commerciale qui s’arrête au lycée du Pré de Cordy (qui ne porte même pas son nom), à la lisière des bois, avant que la route continue vers la Dordogne et Bergerac.
MADAME DE MONTESPAN
Le 27 mai 1707, Françoise de Rochechouart de Mortemart est décédée à Bourbon-l’Archambault (actuellement dans l’Allier). Elle avait 67 ans (née le 5 octobre 1642 à Lussac-les Châteaux aujourd’hui dans la Vienne). On la connaît beaucoup plus comme . Elle fut d’abord mademoiselle de Tonnay-Charente (localité en amont de Rochefort/Mer en Charente-Maritime actuelle), jusqu’à ce qu’elle devienne l’épouse de Louis Henri de Pardaillan de Gondrin, marquis de Montespan. Voilà donc Françoise de Rochechouart, marquise de Montespan.
La reine, Marie-Thérèse d’Autriche, épouse de Louis XIV la fait venir à la Cour, au service de Monsieur (on appelle Monsieur, le frère du roi). Françoise est très belle et donc recherchée. Elle se marie en février 1643, à 21 ans, ce qui n’est pas trop précoce à l’époque. Avec son époux, elle a 3 enfants. Une fois à la Cour, elle devient dame d’honneur de la reine Marie-Thérèse. Ce qui lui donne l’occasion de rencontrer le roi Louis XIV en 1666, qui lui, est occupée avec Louise de la Vallière, sa maîtresse. Donc, jusque-là, il ne prête guère attention à Madame de Montespan. Mais celle-ci est futée, elle se lie d’amitié avec Louise dont elle devient la confidente. On progresse…
Enfin, le roi la remarque. Il note sa culture, la vivacité de son esprit, et bien sûr sa beauté. Tout compte fait, il trouve La Vallière trop réservée. Madame de Montespan franchit un échelon : elle devient la maîtresse du roi. La nature du roi a horreur du vide! Le 18 juillet 1668, lors du « grand divertissement royal », Louis XIV rend hommage à sa nouvelle favorite. En 1670, elle fait même partie du voyage aux Provinces-Unies (actuels Pays-Bas) dans la voiture du roi….et de la reine. Cette beauté, le roi tient à « la faire admirer à tous les ambassadeurs » dit madame de Sévigné. Et le Montespan, dans tout ça ? L’époux légitime ? Habituellement, le mari trompé fait contre mauvaise fortune bon cœur. Les belles récompenses : des titres, des terres, voire des pensions, incitent à ne pas faire de scandales. Lui, il revient sur ses terres de Gascogne, où il pourrait facilement retrouver à se marier. Mais non, le Montespan, il n’est pas content. Cocu et pas content, même si c’est le roi. Il clame partout son infortune et décore son carrosse de cornes! Il refuse d’annuler son mariage. Si bien que la relation de sa femme avec le roi, est un double adultère. Ca fait un peu sourciller le pape, mais bon…
Elle est capable d’influencer le roi. Les ministres le savent, la craignent et se soumettent à ses caprices. Car la dame aime le grand luxe. D’ailleurs, dans les moments de grande intimité, les colliers de perles tombent sur son cou, raconte l’historien Jean Teulé. Le luxe, mais elle contribue aussi au développement du commerce, des manufactures, des beaux arts. Elle protège La Fontaine, Molière, celle qu’on appelle le Grande Mademoiselle : la duchesse de Montpensier, petite-fille d’Henri IV et cousine de Louis XIV.
Avec Louis XIV, Mme de Montespan aura 7 enfants (dont 4 qui atteindront l’âge adulte). On n’a pas de contraception sûre au XVIIème siècle. Aussi, au fur et à mesure des grossesses, elle devient moins belle. Il est difficile de dire à un souverain aussi absolu que Louis XIV : « Sire, prenez garde, vous allez encore m’engrosser ! ». Conséquence : Madame de Montespan a pris de l’embonpoint. Conséquence de la conséquence : le roi s’entiche d’une jeunette de 17 ans. Oh, Me too, que n’étais-tu pas là ! Le roi en a 41. C’est la duchesse de Fontanges arrivée à la Cour pour devenir la demoiselle d’honneur. En clair la nounou des enfants. Elle est belle et jeune, la Montespan est moins belle et moins jeune. Alors, le roi la remarque. Il la remarque d’autant mieux que la famille lui avait recommandé de devenir la maîtresse du roi. Elle est belle, mais « sotte comme un panier » dira Bossuet. La liaison ne dure pas longtemps : Mademoiselle de Fontanges meurt en couches à 20 ans. Quant à madame de Montespan, soupçonnée d’être impliquée dans « l’affaire des poisons » qui a pourri l’atmosphère de la Cour de 1676 à 1682, elle tombe en disgrâce. En 1691, elle se retire dans l’abbaye de Fontevraud (Maine-et-Loire), où elle reste jusqu’à sa mort, en 1707.
Mais après l’épisode de Mademoiselle de Fontanges, le roi n’allait pas rester sans maîtresse, le pauvre ! Le 10 juillet 1683, la reine meurt, le roi est donc veuf. En 1674, il rencontre Françoise d’Aubigné, veuve du seigneur Scarron. Elle est d’abord la gouvernante des enfants « naturels » (j’aime l’expression) du roi avec Madame de Montespan, qui l’avait invitée à la Cour. Louis XIV apprécie qu’elle s’occupe parfaitement des enfants. Ce qui lui vaudra de devenir marquise de Maintenon.
Elle a la réputation d’être une femme très pieuse. Dans la nuit du 9 au 10 octobre 1683, elle se marie en secret avec le roi. A partir de là, son influence est grande sur Louis XIV. Ainsi, elle le pousse à signer l’édit de Fontainebleau (18 octobre 1685) qui abolit l’édit de Nantes, signé presque un siècle plus tôt par Henri IV. Finie la relative liberté de culte. Les protestants sont invités à se convertir. L’invitation devient obligation. Contre les récalcitrants, on envoie des soldats, les dragons.
Ce seront les « dragonnades » qui consistent à les convertir de force. Il paraît que le roi n’était pas au courant ?
Résultat, beaucoup de protestants se réfugient dans des lieux difficiles d’accès, comme les Cévennes. Où s’expatrient vers des pays luthériens, en Allemagne du nord et surtout aux Provinces-unies (approximativement Pays-Bas actuels) qui se lancent dans la conquête de l’Afrique du Sud, à laquelle certains participeront. Ainsi aujourd’hui, en Afrique du Sud, on retrouve des patronymes français, comme Dutoit, De Clerq….
Même au temps de Louis XIV, on considérait une femme d’abord par son physique avant de savoir si elle était intelligente ou sotte. Est-ce que les choses ont beaucoup changé ?
Dans le calendrier révolutionnaire, le 27 mai est le jour du lis.
LA PAÏVA
Esther Pauline Blanche Lachman est née le 7 mai 1819 en Silésie qui est russe à cette époque. Esther Lachman est bien plus connue comme comtesse de la Païva. Elle est originaire d’une famille juive polonaise. Après une enfance un peu ballottée, on la marie le 11 août 1836 à Hyacinthe Villoing, fils de tailleur français installé en Russie. Elle aura un fils Antoine, né en 1837. Vite lassée par la vie maritale, elle s’enfuit et se retrouve à Paris, dès 1840. Là, elle se prostitue sous le pseudonyme de Thérèse. Il faut bien gagner sa vie. Ce qui lui permet de rencontrer des artistes comme Franz Liszt, Richard Wagner, ou encore Théophile Gautier. En 1847, elle rencontre un pianiste Henri Herz, avec qui elle aura une fille Henriette, qu’elle confie à ses parents et qui meurt à 12 ans. En1848, Herz part seul aux Etats-Unis. Esther en profite pour croquer sa fortune et part à Londres, où elle a de nouveaux amants dont Edward Stanley, membre du parlement britannique à ce moment-là (et qui deviendra ministre des colonies).
Un bon plan donc !
Puis elle revient à Paris, où elle va défrayer la chronique scandaleuse sous le Second Empire. Villoing, désespéré se suicide. Le 5 juin 1851, elle épouse un riche – forcément – Portugais, le marquis de Païva qui lui offre un hôtel particulier construit en 1840. Par ce mariage, elle devient marquise. Puis la maîtresse d’un riche – comme toujours – Prussien, cousin de Bismarck – qui est en fait un de ses agents: Guido von Donnersmarck. Elle lui est relativement fidèle de 1856 à 1865. Ce qui lui permet de jouer un rôle dans certaines tractations politiques. Ainsi par son entregent. Ainsi elle aura facilité le remboursement anticipé de l’indemnité exigée par Bismarck. Guido von Donnersmarck lui offre à son tour, un somptueux hôtel, de style Renaissance italienne, sis au 25 de l’avenue des Champs Elysées. On ne peut rien lui refuser. L’escalier de cet hôtel est en onyx d’Algérie, la salle de bain est de style mauresque. Les sculptures sont d’artistes célèbres : Dalou et Carrier-Belleuse, tandis que les peintures sont de Paul Baudry (Napoléon III lui avait confié le décor du foyer de l’Opéra Garnier ). Le lit est en acajou de Cuba, orné d’une sirène flanquée de cygnes. En 1857, Donnersmarck lui offre aussi le château de Pontchartrain (actuellement dans les Yvelines). A son tour, le marquis de Païva, ruiné, se suicide !
Soupçonnée d’espionnage,les Républicains, au pouvoir après 1870, l ’expulsent. Elle se retire en Silésie où elle meurt le 21 janvier 1884. Son époux inconsolable la fait embaumer dans un cercueil de verre. Mais la Païva ne sera pas oubliée pour autant. Le 7 mai 2005, une vente Sothesby’s à Genève, permet de vendre des diamants d’une valeur de 2 et 3 millions d’euros. Celle qu’on appelait aussi : « la grande horizontale » était une grande dame de petite vertu qui a été à l’origine de formules célèbres :
– « Chez la Païva, qui paye y va. »
– « C’est presque fini, il ne manque plus que le trottoir ». Alexandre Dumas fils.
– « C’est le Louvre du cul ». Frères Goncourt.
– La Païva a été une grande courtisane, terme pudique pour désigner une de ces prostituées de luxe de haut vol, qui avaient pour clients des souverains, des personnalités politiques, des artistes célèbres, et aussi de riches provinciaux qui venaient s’encanailler à Paris.
Dans le calendrier républicain du 19 octobre 1793, le 7 mai est le jour de la corbeille d’or (une plante).
PAUL CHYTELMAN
Le 26 avril 2016, Paul Chytelman est mort, à l’âge de 94 ans. Il était né le 23 novembre 1922 en Pologne, d’une famille juive. Il est arrivé tôt en France, en 1923, avec ses parents. C’est là qu’il a grandi et passé certificat d’études et brevet. En 1939, il s’engage dans l’armée française où il est affecté au courrier militaire. Puis après l’occupation de mai 1940, il devient agent de liaison en octobre. En août 1941, il parvient à passer en zone libre et rejoint des groupes de résistants. Ce qui lui vaut, comme pour beaucoup, d’être arrêté le 15 janvier 1944, emprisonné à Mende, puis à Montpellier. De là, il est envoyé à Drancy, ultime étape avant la déportation. Pour lui, ce sera Auschwitz, où il arrive le 3 février 1944. Là, comme tous ses compagnons d’infortune, il vit l’enfer quotidien : appels interminables tôt le matin, dans le froid polonais, nourriture rationnée, brimades, humiliations, bastonnades pour un détail, travail forcé. Le tout, férocement surveillés par des SS zélés. Cependant, Paul Chytelman estimait être relativement épargné. En effet, connaissant la langue allemande, il comprenait rapidement les ordres.
A l’arrivée des troupes de l’Armée rouge, le camp est évacué et libéré le 27 janvier 1945. Le calvaire n’est pas terminé pour autant. Au contraire, car commence ce qu’on a appelé « la marche de la mort ». Pour évacuer les prisonniers, les SS n’ont rien trouvé de mieux que de les conduire à pied au camp de Gleiwitz, situé à 70 km. Marche forcée dans le froid, dans la simple tenue rayée de déporté, sans boire, ni manger. Beaucoup sont morts d’épuisement en cours de route. D’autres ont été exécutés parce qu’ils ralentissaient la marche. Les survivants arrivés à Gleiwitz, ont ensuite été conduits – en camions – au camp de Dora pour travailler dans les carrières. Ce camp sera libéré en avril 1945, par l’armée britannique du général Montgomery, cette fois.
Lorsque les déportés sont rapatriés, ils sont rassemblés à l’hôtel Lutetia à Paris, où ils sont pris en charge administrativement et sanitairement. Ensuite, une fois à peu près rétablis, ils peuvent partir retrouver leurs familles. Lorsque Paul Chytelman est descendu du train, il a croisé sa mère qui ne l’a pas reconnu, tant il était devenu méconnaissable, pesant à peine 45 kg. Malgré toutes ces épreuves, ce n’est qu’en 1947 qu’il devient français.
Pendant longtemps, ceux qui sont devenus d’anciens déportés sont restés dans le silence, conscients que leur « aventure » ne serait pas entendue. Et puis, à partir des années 50, on est à l’ère de la réconciliation franco-allemande, alors les dirigeants veulent éviter tout ce qui pourrait froisser les Allemands. Néanmoins, à partir des années 70, certains éprouvent le besoin de parler, de témoigner. Il faut que les générations nées après la guerre, sachent. Encore plus, dans les années 80, quand le négationnisme se répand et que Jean-Marie Le Pen considère la déportation comme « un détail de l’histoire ». Alors, Paul Chytelman, comme beaucoup d’autres, vont dans les collèges et les lycées, où ils sont invités, pour témoigner. Paul, avec sa faconde et ses mots savait toucher les adolescents qui écoutaient ses récits plus qu’émouvants, dans un silence religieux. Parfois des yeux brillaient, des larmes coulaient sur les joues. Le temps de surmonter leurs émotions, les élèves posaient de multiples questions : ils voulaient savoir. Paul répondait. Mais sur ses joues, coulaient aussi des larmes. Tout en intervenant volontiers, il admettait que les rappels de ces épreuves, étaient douloureux. Il confessait aussi ne plus avoir bien dormi depuis 1945.
Pour ses dernières années, il avait du mal à marcher. Son épouse Geneviève, plus jeune, le conduisait et l’accompagnait. Elle connaissait tellement bien son histoire qu’après sa mort, elle a pris le relais pour aller témoigner auprès des jeunes. Quand un ancien déporté s’en va, c’est une page d’histoire qui disparaît. C’est d’autant plus regrettable à une époque où prolifèrent les « fake news ». Paul a aussi écrit, notamment « Le courage d’espérer », et nous en avons bien besoin. Il est aussi l’auteur de « Pitchipoï », sorte de lieu imaginaire, une sorte « Peta Ouchenok » où on vivrait des horreurs.
Merci Paul !
Dans le calendrier républicain du 11 octobre 1793, le 26 avril est le jour du muguet.
POL POT
Le 15 avril 1998, Saloth Sâr, plus connu sous le nom de Pol Pot, 1er Ministre du Cambodge, est mort. On a découvert son corps le lendemain, dans le dernier bastion encore occupé par les Khmers rouges, au nord du Cambodge, près de la frontière thaïlandaise. En juillet 1997, il est jugé et condamné à la prison à vie par ses anciens partisans (dictateurs de tous pays, méfiez-vous)) qui veulent lui faire porter le mouk slek (chapeau traditionnel cambodgien) pour le massacre de 2 millions de Cambodgiens entre 1975 et 1979.
Le 17 avril 1975, ses troupes sortent de la jungle pour entrer dans Phnom Penh et renversent le général Lom Nol, chef d’Etat cambodgien. On a l’image d’un sanguinaire et pourtant, ceux qui l’ont côtoyé, le trouvent doux et serein. Il paraît qu’il aimait Verlaine. C’est dire. Après tout pourquoi pas : Hitler aimait bien Wagner. Derrière cette façade, se cache un théoricien monstrueux et sanglant. Il rêve de créer un « peuple nouveau » basé sur une société agraire qui retrouverait les vraies valeurs khmères traditionnelles. Pour y parvenir, il déclenche un véritable génocide à travers tout le pays. Les citadins sont rassemblés dans des camps de travail forcé, surveillés par de jeunes soldats analphabètes. Pol Pot, dans sa paranoïa, se désigne le « Frère n°1 » ou « chef suprême de l’Angkar » (organisation qui fait régner la terreur).
Les attaques contre le Viêt Nam, conduisent celui-ci à occuper le Cambodge au début de 1979 et à chasser les Khmers rouges du pouvoir. Les accords de Paris du 23 octobre 1991 mettent fin au conflit, malgré une résistance des Khmers rouges jusqu’en 1993. En mai 1993, l’ONU organise des élections et Norrodom Sihanouk (ancien chef d’Etat) qui a échappé au massacre, peut rentrer au Cambodge. A partir de ce moment-là, les Khmers rouges ne peuvent plus grand-chose, d’autant qu’ils ont perdu l’aide de la Chine et de la Thaïlande. Certains survivent en se livrant à des trafics (bois, pierres précieuses). Ils finissent par rendre les armes et même par se rallier au pouvoir de Phnom Penh, où ils seront fonctionnaires, policiers ou militaires. Belle reconversion !
Mais il faut juger ce génocide. Les anciens chefs survivants nient toute responsabilité. Il faudra bien que le Cambodge regarde en face son histoire.
Dans le calendrier républicain du 11 octobre 1793, le 16 avril est le jour de l’anémone.
PAUVRE HAÏTA
Le 12 avril 1770, la terre a tremblé en Haïti. Elle tremblera encore le 20 avril, puis le 3 juin, jour de la Pentecôte à 7h1/4 sur la pointe de l’île. En fait, j’aurais pu choisir n’importe quelle date, tant l’histoire d’Haïti est jalonnée de catastrophes naturelles (séismes, ouragans), aggravées par la situation politique, économique, et sociale. Inutile de les énumérer toutes. Peut-être peut-on s’attarder sur quelques-unes. Deux années sont particulièrement marquantes : 1751 et 1770. Ainsi, le 22 novembre 1751, tout ce qui n’était pas en maçonnerie a été détruit. A partir du 8 décembre, on a ressenti 25 secousses qui se sont étalées sur plus d’un mois. On cherche à se placer sous des tentes, rapidement fabriquées à partir de voiles de navires. A Saint-Domingue voisine, il y a de gros dégâts. A Port au Prince, il reste une seule maison debout. Le séisme a été précédé par une sorte de bruit de canon souterrain. Les mouvements de la terre se font de l’est vers l’ouest. Des gens affolés sautent par les fenêtres. Des témoins de l’époque racontent que des soldats ont eu si peur qu’ils sont devenus épileptiques. Le sol est resté calme jusqu’au 27 décembre 1767.
Le plus grand désastre se produit le 3 juin 1770, vers 19h15, à Port au Prince, capitale de la colonie. La ville est entièrement détruite. Le lendemain, au jour, on découvre plus de 200 cadavres. Des incendies se déclarent à partir des cuisinières en fonction pour préparer le dîner. Il faut les combattre avec les moyens du bord. Des crevasses se sont formées, laissant sourdre une eau pleine de sel et de soufre. Seuls, 43 bâtiments ont résisté. Comme par hasard, ce sont ceux des Français, situés près du port. Heureusement, la solidarité a vite joué. Des campagnes, sont venus des légumes, de la viande et de la volaille, distribués gratuitement. On a reconstruit, en hâte des fours car le prix du pain s’envolait.
Mais ce n’est pas fini car il y aura environ 200 secousses jusqu’à le fin octobre. Il y aura encore une violente secousse le 20 juillet 1785. On passera sur la multitude de secousses qui se produiront pendant les deux siècles suivants. J’en viens à ce qu’il s’est passé le 12 janvier 2010 à 16h53. Ce fut sans doute le plus terrible de l’histoire de Haïti. Ce séisme avait une magnitude très forte : 7 à 7,3 (échelle qui va jusqu’à 9). Or à partir de 7, c’est très destructeur. L’épicentre se situait à 25 km au sud-ouest de Port au Prince, et à une profondeur de seulement 10 km. Il a été suivi d’une douzaine de secousses de force entre 5 et 6. Il a été ressenti jusqu’à 60 km au sud-ouest de Port au Prince.
Haïti a le malheur de se situer au contact de deux plaques tectoniques : la plaque des Caraïbes et celle de Panama – Amérique du sud. C’est donc une zone fragile qui l’expose aux séismes. On est dans un cas de subduction : une plaque qui passe sous une autre (au rythme de 2 cm /an). Ailleurs, cela peut donner des volcans.
Le bilan est lourd, très lourd en 2010. On dénombre plus de 280 000 morts, 300 000 blessés et 1,3 millions de sans-abris. Dans les jours qui ont suivi, il y a eu 52 répliques de magnitude entre 4 et 5. A Port au Prince, le Palais national et la cathédrale Notre Dame ont été détruits. Des décombres, on a réussi à sauver 211 personnes. A Carrefour (c’est le nom d’une ville) qui a 300 000 habitants, 40% ont été détruits. A Léogane (200 000 habitants), la ville a été détruite à 90%. Le problème est d’enterrer les morts (la tradition du vaudou interdit l’incinération). Les hôpitaux, en partie détruits, ne peuvent prendre en charge tous les blessés. L’armée de l’air argentine a monté un hôpital de campagne. L’aéroport est inutilisable. Il faut passer par Saint-Domingue, mais les routes sont encombrées de rochers. Il est plus que temps car à partir du 19 janvier, des maladies comme la dysenterie, commencent à se développer. Le port est administré par les Etats-Unis qui ont prévu un porte-hélicoptères. L’ONU a créé la MINUSTAH (Mission des Nations Unies pour la Stabilisation de Haïti). Mais cela ne peut empêcher le trafic d’enfants pour la prostitution et le trafic d’organes.
Néanmoins, la générosité internationale existe. Le roi du Maroc, Mohamed VI envoie 14 millions de dollars, des aliments et des médicaments. Un pays pauvre comme le Tchad envoie 18 millions de dollars. Le Dalaï Lama envoie 100 000 francs suisses. Dès le 17 janvier le CICR (Comité International de la Croix Rouge) et le Croissant Rouge (équivalent musulman de la Croix Rouge) envoient des spécialistes et du matériel médical. L’Union Européenne fait une avance de 100 millions de dollars.
Toutes ces aides sont importantes, mais dans le contexte politique du pays, Haïti aura de mal à s’en remettre. Les séismes ne sont pas tout. Haïti est situé sur la trajectoire des cyclones tropicaux qui peuvent faire des ravages. Là aussi, il serait bien fastidieux de les énumérer tous. Il suffit de s’intéresser à celui qui a dévasté le sud-ouest de l’île dans la nuit du 3 au 4 octobre 2016. Il s’agit de l’ouragan Matthew de force 4 sur une échelle de 5 (échelle Saffir-Simpson). Cet ouragan a fait près de 5 000 morts, 4 000 blessés, 175 000 sans-abris. Les cultures ont été ravagées. Les Nations Unies ont déclenché un plan d’urgence et débloqué 100 millions de dollars, de la nourriture, des forces de maintien de la paix.
Comme si la nature n’était pas assez féroce avec Haïti, les hommes ont bien souvent aggravé les choses. Ca commence dès le 1er janvier 1804, quand à la suite d’une révolte des esclaves contre les colons, Haïti se proclame indépendant. C’est la première colonie à le faire. D’autres suivront en Amérique latine à partir de 1823. Mais cette indépendance a été chèrement payée. Pour compenser (compenser quoi ?), la France exige 150 millions de francs (selon le New York Times, cela équivaudrait actuellement à 525 millions d’euros). Ce qui était largement supérieur aux pauvres ressources du pays. Or, comme Haïti ne peut payer cash, il est obligé à emprunter à des banques….françaises. S’ajoutent donc des intérêts (qui vont enrichir les actionnaires des dites banques). Haïti, ne pouvant jamais investir, ne s’en est jamais remis. D’autant que ses dirigeants ont été souvent incompétents, corrompus. Ou assassinés….Là encore, il y aurait une longue liste de dictateurs à présenter. Contentons-nous de l’actualité. Ce n’est déjà pas si mal.
Les Duvalier, père et fils, ont régné de manière féroce et arbitraire de 1957 à 1986. Depuis cette époque, c’est le règne de l’instabilité, combinée à la violence et à la corruption. Le dernier Président Jouvenel Moïse a été assassinée le 7 juillet 2021. C’est Ariel Henry qui assure l’intérim, mais il est impopulaire et Haïti s’enfonce dans la violence des gangs. Ceux-ci pillent, violent, rançonnent, tuent. Ils sont les maîtres du pays. Ils ont pris le Palais présidentiel, les commissariats, les prisons, d’où ils ont libéré des centaines de prisonniers qui viennent ajouter à l’anarchie. Le caïd des caïds s’appelle « Barbecue », tout un programme !
Pourtant, dans les années 1950 – 1970, Haïti était désignée comme « la perle des Antilles ». Elle attirait les touristes. Le Larousse de 1962 indique que l’agriculture est florissante. Haïti exporte canne à sucre, sisal, coton, banane et même cacao. C’est loin tout ça. C’est véritablement un autre siècle.
Depuis le règne dictatorial des Duvalier (père et fils) de 1957 à 1986, Haïti descend aux enfers : incompétence, violence, corruption. Au point que le pays est devenu ingouvernable. Aucune puissance ne veut mettre son nez dans cet enfer. Les Etats-Unis, où il y a de nombreux immigrés haïtiens, surveillent de loin. L’Union Européenne a rappelé ses ambassadeurs. C’est plus prudent, mais tant pis pour Haïti. Russes et Chinois, en général prompts à investir les pays pauvres, sont pour l’instant discrets. Seul, le pauvre Kenya a proposé une force d’intervention. Un borgne au service d’un aveugle, ont cyniquement raillé certains. Ariel s’y est rendu dernièrement, mais il n’a pu rentrer : l’aéroport lui est interdit. Il a démissionné, comme tout le monde le lui demandait. Les gangs disent remettre de l’ordre. Mais de quel ordre s’agit-il ? Qui peut gouverner – et qui en a envie ? – un Etat où il n’y a plus d’Etat ? Qui saura trouver une solution ? Et laquelle ?
« Haïti chérie », c’est le cri de Frédéric Marcelin (1848 – 1917) que l’on considère comme le père du roman haïtien. Pour lui : « En dépit de tout, Haïti est un adorable petit pays, même pour nous Haïtiens quand nous sommes obligés de le fuir ». Dans ses malheurs, Haïti a donné de grands écrivains. Outre Frédéric Marcelin, on peut citer, entre autres, Anténor Firmin (1850 – 1941) et un contemporain : Dany Laferrière, né en 1953, à Port au Prince, et actuellement sociétaire de l’Académie Française.
Dans le calendrier républicain, le 12 avril est le jour du marronnier.