CLAUDIA SHEINBAUM
Claudia Sheinbaum est la Présidente des Etats-Unis du Mexique (appellation officielle) depuis le 1er octobre 2024. Elle est aussi une scientifique, spécialiste de l’efficacité énergétique et une des auteur(e)s du 5ème rapport du GIEC (Groupe d’Experts Intergouvernementaux sur l’Evolution du Climat). Politiquement, elle est membre du Parti de la révolution démocratique MORENA (MOuvement de REgénération NAtionale).
Claudia Sheinbaum devient secrétaire à l’Environnement de Mexico (agglomération de 22 millions d’habitants) de 2000 à 2006, puis maire de Talpan, un quartier de Mexico de 2015 à 2017. De 2018 à 2023, elle passe cheffe du gouvernement de la ville de Mexico. Pour l’élection présidentielle de 2017, elle mène la coalition de centre gauche « Continuons de faire l’histoire ». Pour l’élection de 2024, c’est elle qui devient Présidente, à 62 ans (née en 1962).
Il est peut-être utile de consacrer quelques lignes à ses origines. Dans les années 20, la famille de tradition juive fuit les persécutions en Lituanie, pour s’installer au Mexique. Situation fréquente dans cette partie de l’Europe.
Le père de Claudia est chimiste et sa mère, biologiste. Claudia, qui est sans confession, fait des études de physique à l’université nationale de Mexico. Elle obtient une maîtrise de génie énergétique (aspects techniques et industriels des transports, de l’utilisation de l’énergie). Elle devient enseignante à l’Institut d’ingénierie à l’université de Mexico et participe au PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement). Claudia a développé des méthodes pour mesurer la pollution et créé des systèmes d’alerte pour les émissions de gaz à effet de serre.
Elle a participé à des mouvements de solidarité avec des paysans et des ouvriers, manifesté pour le maintien de l’enseignement universitaire gratuit, pour les droits des femmes. En 1982, elle a 20 ans. Elle milite pour Rosario Ibarra qui a été la première femme à se présenter à une élection présidentielle. Elle est membre du parti de la révolution démocratique depuis 1990.
En 1987, Claudia se marie avec Carlos Imaz Gispert, universitaire, un des fondateurs du parti de la « Révolution démocratique ». Ils divorcent en 2017 et elle se remarie en 2023.
Claudia Sheinbaum entre le 20 novembre 2020 au cabinet du chef du gouvernement de la ville de Mexico, et devient même secrétaire à l’environnement. Sa politique a eu des effets : la qualité de l’air s’est améliorée, les usines polluantes sont sanctionnées ou déplacées, contrôle technique systématique pour les automobiles. A Mexico a été créée la première ligne de métrobus (bus à haut niveau de service).
Claudia participe à la campagne de 2006 d’AMLO (Andres Manuel Lopez Obrador), néanmoins battu par Felipe Calderon du parti « Action Nationale », de droite. Il y a de forts soupçons de fraudes électorales. Alors, elle participe à un cabinet fantôme (formé non officiellement par l’opposition) dans lequel elle est ministre de la défense du patrimoine. Elle se bat pour que le secteur de l’énergie reste dans le domaine public (le Mexique est un gros producteur de pétrole). Elle a empêché que Pemex (Petroleos Mexicanos) soit privatisé en 2008. Pour obtenir satisfaction, elle a participé à une manifestation qui a bloqué le Sénat pendant 20 jours. En 2012, c’est une nouvelle campagne électorale. AMLO est encore battu par Enrique Pena Nieto. Mais elle poursuit son ascension politique et rejoint le mouvement de Régénération nationale. En 2018, elle est la première
femme à être élue cheffe du gouvernement de la ville de Mexico.
Le 5 décembre 2018, elle fait partie des « 100 Women », classement établi par la BBC. Elle s’intéresse aux questions écologiques et à la politique sociale, aux quartiers démunis, aux traitements des déchets, aux énergies propres, à la déforestation. Elle dissout le régiment à l’origine du massacre du mouvement étudiant de Tlatelocolo en 1968. Conformément à ses idées, elle pratique une politique féministe (lutte contre les féminicides, les violences faites aux femmes). Et là encore, ces actions ont eu un certain succès puisque la criminalité a été divisée par 2 à Mexico. Un drame est venu entacher sa gouvernance de Mexico. Le 3 mai 2021, un accident de métro a fait 15 morts et 80 blessés.
Le 16 juin 2023, Claudia Sheinbaum démissionne pour préparer l’élection présidentielle de 2024. Et le 6 septembre 2023, elle est désignée candidate ; elle a le soutien de MORENA, du Parti du Travail, du Parti Vert Ecologiste du Mexique (PVEM). Elle représente une gauche moderne, progressiste, dans un pays conservateur, catholique, machiste. En face d’elle, c’est l’opposition de droite, anti révolutionnaire constitutionnelle, représentée par Xochitl Galvez, qui la décrit comme un danger pour la démocratie : elle ne serait qu’une marionnette d’Obrador. Pardi, une femme, ça ne peut pas être pris au sérieux. En plus, elle est d’origine étrangère, de famille juive, même si elle ne pratique pas.
Ce qui ne l’empêche d’avoir un programme pour sa campagne :
– Sur le plan économique et social :
. Poursuivre la politique de son prédécesseur ;
. Multiplier par 2 le salaire minimum ;
. Aides sociales pour les personnes âgées et les jeunes ;
. Combattre la pauvreté ;
. Construction de logements ;
. Renforcer le secteur public dans les domaines de l’énergie, de la santé, de l’éducation ; . Soutenir les sciences ;
. Assurer l’autosuffisance énergétique ;
. Stimuler le tourisme ;
– Ecologie :
. Interdire la fracturation hydraulique ;
. Développer les énergies durables ;
. Interdire les OGM ;
. Soutien à Pemex.
– Sécurité :
. Réduire les crimes de 30% ;
. Coordonner les enquêtes ;
. Installation de caméras ;
. Renforcement de la police.
– Féminisme :
. Lutte contre les violences faites aux femmes ;
. Légaliser l’avortement ;
. Pension pour les femmes de plus de 60 ans.
– Lutte contre la corruption :
. Faire élire les juges de la Cour Suprême au suffrage universel ;
. Créer une Cour disciplinaire pour punir les juges corrompus.
Vaste programme, sans doute pas aisé à concrétiser, mais au moins, il y a des intentions. Il reste à essayer de l’appliquer.
Elle va s’y employer puisque le 2 juin 2024, Claudia Sheinbaum est élue présidente du Mexique avec 60% des voix. Elle est investie le 1er octobre. Quelles sont donc ses réalisations ?
– En politique intérieure :
. Gouvernement composé pour moitié de l’ancien gouvernement ;
. Création d’un ministère de la Science et des Innovations ;
. Mesures pour renforcer les droits des femmes : égalité salariale, parité ;
. Investissements dans le secteur énergétique ;
. Développement du secteur ferroviaire ;
. Fermeté face à la criminalité ;
Au printemps 2025, cette politique est approuvée par plus de 80% des Mexicains, surtout les pauvres et même 57% de la droite ! Un bémol : cette situation est gênée par la politique commerciale de Trump. – En politique extérieure :
. Polémique avec Trump justement, à propos du Golfe du Mexique. Elle ironise en proposant que l’Amérique du Nord soit appelée Amérique mexicaine, se référant à une carte de 1607 ; . Le 31 octobre 2025, elle envoie une lettre à Google qu’elle menace d’un procès et pour lui rappeler qu’un changement de nom ne peut être décidé que par une organisation internationale.
On imagine qu’elle a tout pour énerver Trump qui déclenche une guerre commerciale en imposant des tarifs douaniers de 25%. Mais le Mexique obtient un sursis, car Claudia Sheinbaum envoie 10 000 soldats supplémentaires à la frontière pour lutter contre l’émigration vers les Etats-Unis et les trafics de drogue.
Vu de notre (petite) fenêtre, c’est-à-dire de France, le Mexique, c’est loin. Et à force d’avoir les yeux fixés sur notre nombril, ça rend myope. Si on regardait plus loin, on s’apercevrait que c’est un grand pays de 2 millions de km2, où vivent 130 millions d’habitants (double de la France). C’est une puissance agricole, même si la productivité y est faible. Outre l’industrie des hydrocarbures, le Mexique a attiré les grands groupes automobiles européens et nord-américains. Il fait partie de l’ALENA (Accords de Libre Échange Nord-Américain) depuis 1994, que le grand blond avec une cravate rouge vient de torpiller avec ses histoires de tarifs douaniers. Ce pays réputé pour son insécurité et sa pauvreté, sa nouvelle Présidente, par une politique audacieuse, a su les faire reculer. Il est à noter que ce pays dit machiste a placé à sa tête trois femmes : Claudia Sheinbaum (Présidente des Etats-Unis du Mexique), Kenya Lopez Rabadan (Présidente de la Chambre des députés), Laura Itzel Castillo (Présidente du Sénat).
GÉRARD MERCATOR
Le 2 décembre 1594, Gérard Mercator est mort à Duisbourg (Allemagne). Né à Rupelmonde, près d’Anvers, le 5 mars 1512, il a donné son nom à un type de projection géographique. C’est un pionnier de l’histoire et de la géographie, fondateur de l’école de cartographie flamande du XVIème siècle. II a aussi fabriqué des globes. Mercator est aussi graveur et calligraphe. Il a écrit des ouvrages de géographie, de philosophie, de théologie. À partir de 1585, il est le premier à parler d’atlas.
Ses premières années, il les passe à Gangelt (Rhénanie du nord-Westphalie) et il revient à Rupelmonde en 1518 pour aller à l’école. En 1526, Hubert son père meurt. Un dénommé Gisbert est son tuteur et l’éduque pour devenir prêtre. À 15 ans, il est envoyé chez les Frères de la commune de Bois-le-Duc (actuels Pays-Bas). L’enseignement est basé sur l’étude de la Bible et de thèses proches de celles de Luther.
En 1530, Mercator est à l’université de Louvain où il rencontre des étudiants issus de grandes familles parmi eux, André Vésale , médecin anatomiste. En 1532, il est reçu maître Es arts. À Louvain, il se forme à la scolastique (systématisation des connaissances pratiques du raisonnement).
De 1532 à 1534, il est à Anvers où il fait la connaissance du moine franciscain du monastère de Malines (province d’Anvers), qui avait contribué à créer une collection de cartes. Ce fut donc une rencontre déterminante pour sa vocation de cartographe.
A la fin de 1534, Mercator retourne à Louvain pour étudier la géographie, les mathématiques, l’astronomie. Avec Gemma Frisius (1508-1555), ils avaient fait un globe en 1529. En 1536, ils achèvent un nouveau globe. Mercator acquiert une solide réputation dans le monde des enseignants, des marchands, des prélats, de l’aristocratie. Tout le monde lui commande des globes.
En 1537, il épouse Barbara Schellekens. De cette union naîtront 6 enfants dont 2 seront des cartographes. Sans transition, l’année suivante, il grave sa première carte, celle de la Terre Sainte. En 1540, il fait la carte des Flandres pour l’Empereur Charles-Quint (1500-1558). En 1541, il réalise un nouveau globe terrestre. Il reçoit de nombreux éloges et son travail connaît un grand succès commercial. En même temps que des cartes, il écrit un traité sur la calligraphie.
Dans les années 1543-1544, il a des difficultés avec les autorités ecclésiastiques qui le soupçonnent d’hérésie. On ne rigole pas avec ça au XVIème siècle. Il est persécuté et mis en prison ! Ensuite, il doit quitter Louvain. Mercator manifeste de l’intérêt pour les Franciscains de Malines qui pratiquent la « devotio moderna » (la dévotion moderne), forme de spiritualité chrétienne. Ce mouvement se consacre à la prière, à la lecture, à l’étude des Saintes Ecritures, ce qui attire la curiosité de l’Inquisition (juridiction catholique qui combat les hérétiques). On les appellerait ultras aujourd’hui. Comme on n’a pas de véritables preuves contre lui, il est libéré et peut revenir à Louvain. A ce moment-là il a des commandes de la part de l’Empereur. Il construit des compas, des globes, des astrolabes (instruments qui permettent de voir la hauteur des étoiles et de connaître l’heure de l’observation, la direction du soleil).
En 1547, Mercator crée une nouvelle carte de l’Europe. Il rencontre John Dee, mathématicien, astrologue, géographe britannique. Ce qui lui permet d’avoir une aide financière de la Cour d’Angleterre. En 1551, il termine un globe terrestre. On peut se demander comment sont représentées bien des terres encore inconnues.
En 1552, il s’installe à Duisbourg, dans le Saint Empire Romain Germanique. Il y fabrique des globes, des cartes, des instruments, bien accueilli par l’Empereur qui lui commande un globe terrestre et un globe céleste.
Sa nouvelle carte de l’Europe de 1554 est très demandée. En 1559 il obtient la chaire de mathématique et de cosmographie à l’Akademisches Gymnasium de Duisbourg. En 1564, ce sont des cartes des îles Britanniques, puis la cartographie de la Lorraine.
En 1563, Mercator élabore une projection de la Terre à partir d’un cylindre tangent à l’équateur. Aux basses latitudes (disons entre les tropiques), la projection est relativement précise. Par contre au-delà, la déformation s’accroît au fur et à mesure qu’on monte en latitude. Ainsi sur un planisphère tel qu’on en utilise dans les atlas et dans les classes des écoles, on voit que le Groenland (2,2 millions de km2) apparaît presque aussi grand que le continent africain, alors qu’en réalité, il est 15 fois plus petit (30,4 millions de km2).
Malgré cet inconvénient, un planisphère accroché à un mur permet au public – le plus souvent scolaire – de localiser les Etats, les villes, les reliefs, les espaces maritimes. Il est possible de pratiquer à l’infini la tangence selon un parallèle pour établir des cartes relativement précises, au-delà des zones de basses latitudes. Ainsi pour la France traversée par le 45ème parallèle nord, on s’aperçoit que Bordeaux, Aurillac, Valence, Briançon sont à la même latitude. Et si on fait le tour de la planète, ce même parallèle passe par Turin, le nord de la Bosnie, Simféropol (en Crimée), Krasnodar (Russie), la Mer d’Aral, le sud du lac Balkhach Kazakhstan), le sud de la Mongolie, Harbin (Chine),le au nord de Vladivostok (Russie), la pointe nord de Hokkaido (Japon), au sud
de Portland (État d’Oregon aux Etats-Unis), la frontière entre le Montana et le Wyoming, Minneapolis-Saint-Paul (Etats-Unis), sud de la province d’Ontario (Canada), l’État de New York, le Vermont.
On peut s’amuser à faire quelques comparaisons. Naples et New York sont à la même latitude (40°N). À Naples, les températures de janvier oscillent entre +6° et +13°, celles de New York entre -8° et +6°. Autre comparaison : Amiens (France) et Khabarovsk (Sibérie) sont à la même latitude (50°N). À Amiens, les températures de janvier oscillent entre +1° et +6°, celles de Khabarovsk entre -16° et -24°.
Quant au méridien 0°, celui de Greenwich, il passe par Caen (Calvados), Angers (Maine-et-Loire), Angoulême (Charente), la limite entre les départements de la Gironde et de la Dordogne, Marmande, à l’ouest de Tarbes (Hautes-Pyrénées), puis en Espagne à l’est de Valence, au Cap de la Nao. En Algérie, il passe à Mostaganem (ouest de l’Algérie), à l’est du Burkina Faso et enfin Accra (Ghana).
Le globe a l’avantage de montrer la planète à échelle (très) réduite. Mais il a l’inconvénient d’être peu maniable : un globe peut difficilement avoir plus de 50 cm de diamètre, sauf dans certains observatoires. En outre, les petits Etats sont difficilement repérables. Il faut avoir de bons yeux pour repérer le Luxembourg. Mais il donne les vraies proportions entre l’Afrique et le Groenland.
Suivant l’usage que l’on en fait, à chacun de choisir le planisphère ou le globe. Dans le calendrier républicain, le 2 décembre est le jour du raifort.
LA LOI DOMBREVAL
Le 30 novembre 2021 a été promulguée la loi Dombreval pour lutter contre la maltraitance animale. Elle vise aussi à conforter le lien entre les animaux et les humains ainsi que les conditions de détention des animaux de compagnie.
Cette loi est le fruit du travail du député LoÏc Dombreval, né en 1966. Il est de formation vétérinaire, passé à personnalité politique. En 2014, il est élu maire de Vence (Alpes-Maritimes), puis vice-président de la métropole Nice- Côte d’Azur. En 2015, il est élu conseiller départemental des Alpes-Maritimes. Dombreval est élu macroniste en 2017, puis battu en 2022 (le macronisme n’ayant plus la cote).
Pour compenser, le 2 décembre 2022, il est nommé Inspecteur général de l’administration et du Développement durable. Il faut dire qu’il est très engagé dans la lutte pour le bien-être animal et les droits des animaux.
Loïc Dombreval est très hostile à la corrida, à la vénerie, au déterrage des blaireaux. Son objectif est de faire cohabiter chasseurs, promeneurs et vététistes. Il rejette la radicalité du débat.
Loïc Dombreval a proposé un RIP (référendum d’initiative partagée) sur le bien-être animal. En décembre 2019, le Premier Ministre (Edouard Philippe) lui confie une mission parlementaire sur le bien-être des animaux de compagnie et sur les équidés. Voici les mesures qu’il propose :
– Interdiction des élevages intensifs …d’ici 2040 !
– Interdiction des élevages en cage pour 2025 ;
– Interdiction des élevages pour la fourrure pour 2025 ;
– Interdictions des expérimentations sur les animaux (sauf si une alternative n’est pas possible) ;
– Interdiction d’animaux sauvages pour les spectacles de cirque.
Ces propositions sont soutenues par 3 grands chefs d’entreprise, par le journaliste spécialisé dans l’écologie Hugo Clément, par 57 associations dont la SPA (société de protection des animaux), la LPO (ligue pour la protection des oiseaux), par la Fondation Brigitte Bardot. Le 6 mars 2021, elles sont appuyées par 151 parlementaires.
Aux élections européennes de 2019, le parti animaliste-créé en 2016-obtient ….2,2% des suffrages !
Un article du quotidien « Le Monde » du 19 août 2020, fait le constat que la France est en retard sur les autres pays européens. Mais ils ne sont pas nombreux ceux qui lisent ce journal en plein mois d’août.
Le 6 juillet 2021, Jean Castex est désigné Premier Ministre. Dans son gouvernement, le ministre de la Justice s’appelle Eric Dupont-Moretti, fervent défenseur de la chasse, qui considère les écologistes comme des intégristes. Willy Schraen, président de la Fédération française de la chasse, les traite même de terroristes ! Pas moins ! Celui-ci se targue d’avoir de bonnes relations avec le Président Macron. Un résultat concret a été obtenu : le prix du permis de chasse a été divisé par 2.
A l’annonce de ce projet, les réactions ne se font pas attendre, principalement de la part des chasseurs, des syndicats d’éleveurs, des lobbys de l’agro-alimentaire. Le 28 juillet, une lettre est envoyée à Gérard Larcher, Président du Sénat, qui soutient les chasseurs. W. Schraen dénonce une « dictature de l’émotion ». Ce dernier
incite les signataires pour le RIP à se démettre de leur mandat, intention soutenue par la FNSEA (Fédération Nationale des Syndicats des Exploitants Agricoles). La Coordination rurale (proche de l’extrême droite) appelle Joël Giraud, secrétaire d’Etat à la Ruralité et partisan du RIP, à démissionner.
Dans une interview, en 2021, Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, confie : « Le Président Macron a de la sympathie pour les chasseurs ». Elle veut interdire la chasse à la glu (c’est une demande de la Convention européenne). W. Schraen menace d’engager des poursuites judiciaires !! Finalement, le 26 août, ce type de chasse est quand même interdit. Mais le même jour, on constate que 18 000 tourterelles de bois (espèce protégée) sont tuées.
Un sondage IFOP des 16 et 17 juillet montre que 73% des Français sont favorables à la tenue d’un référendum d’initiative populaire sur la cause animale. 86% souhaitent que les bêtes destinées à l’abattage soient préalablement étourdies. 73% sont d’accord pour aider les cirques à faire des spectacles sans animaux.
La loi est promulguée depuis le 30 novembre 2021. Il reste à la faire appliquer et ce n’est pas simple quand on voit toutes les oppositions, les lobbys. On a compris qu’il ne faut pas compter sur le Président Macron, ni sur le Président du Sénat (2ème personnage de l’Etat). Les opposants à cette loi avancent l’argument des traditions. Celles-ci ont bon dos, pour se donner bonne conscience, alors que l’animal est un être qui peut aussi souffrir. Quant aux chasseurs, ils avancent l’argument que le droit de chasse est un acquis de la Révolution de 1789 (abolition des privilèges dans la nuit du 4 août). A ceci près que le paysan (80% de la société) n’avait pas le droit d’avoir une arme et qu’il n’avait pas les moyens de s’en procurer une (ses seules armes étaient la fourche ou la faux). Le paysan ne chassait pas, il braconnait, à ses risques et périls. Il cherchait tout simplement à capturer un lièvre ou une grive, pour améliorer un ordinaire bien maigre, fait de pain et de soupe. Il ne faisait pas des « tableaux » avec des dizaines d’animaux abattus.
Dans le calendrier républicain, le 30 novembre est le jour de la pioche (qui pouvait aussi servir d’arme pour les paysans).
VIOLETTE NOZIÈRE
Violette Nozière est morte le 26 novembre 1966 au Petit-Quevilly (Seine-Maritime). Elle est née le 11 janvier 1915 à Neuvy/Loire (Nièvre). C’était une jeune femme qui a défrayé la chronique judiciaire et criminelle dans les années 30 à la suite de l’empoisonnement de son père.
Fille unique de Baptiste Nozière qui travaille sur les chemins de fer de la ligne Paris-Lyon-Méditerranée et de Germaine Hazard (mariage 17 août 1914).
La famille vit à Paris, dans un logement exigu, sans véritable intimité. Baptiste n’est pas envoyé au front pendant la guerre, car comme chauffeur de trains, on a besoin de lui pour convoyer les soldats.
Violette, qui est loin d’être sotte, obtient son certificat d’études primaires et continue à l’école supérieure de jeunes filles dans le VIIème arrondissement, puis au lycée Voltaire (XIème arrondissement) et enfin au lycée Fénelon dans le Quartier latin. Tous ces changements l’ont déstabilisée et ses résultats se dégradent. Elle est jugée paresseuse, sournoise, hypocrite, dévergondée. Rien de bon donc ! Elle fait plus vieille que son âge, elle a une réputation de coureuse ; sa copine Madeleine Debize (1915-1995) a une grande influence sur Violette. Toutes deux ont très tôt des amants. Elle explique ses retards par des mensonges. Un sacré numéro, aurait dit ma grand-mère !
Violette se veut indépendante. Elle ne se voit pas en épouse parfaite, avec mari et enfants. Elle veut une vie de liberté, de plaisirs. D’ailleurs, elle dépense beaucoup en toilettes, restaurants, bars, hôtels. Mais pour cela, il faut de l’argent. Comment ? C’est simple : vols, prostitution (qu’elle appelle « passages utilitaires »). Comme c’est joliment dit ! Elle pose nue pour une revue. Oui mais voilà qu’en 1932, elle apprend qu’elle est syphilitique. Elle fréquente les milieux étudiants et ment sur ses origines car elle a honte de ses parents. Le 4 décembre de cette même année, Violette, qui a commis un vol dans une librairie, se dispute avec son père et menace de se jeter dans la Seine.
En 1933, son cas s’aggrave et elle se voit dans l’obligation d’informer ses parents. Elle se fait délivrer un certificat de virginité de complaisance par le docteur Henri Déron. Sa syphilis serait une maladie héréditaire. Cette découverte entraîne une dispute familiale entre les parents et la fille : elle estime qu’ils seraient responsables de sa maladie : c’est ce qu’on appelle de l’hérosyphilis… Le 23 mars 1933, Violette achète un tube de somnifère (soménal), que le docteur Déron lui aurait prescrit pour éviter la contagion. C’est une tentative d’empoisonnement de la famille. Voilà qu’à 2 heures du matin, un incendie se déclare dans l’appartement. Violette alerte les voisins. Sa mère est envoyée à l’hôpital qui assure que c’est
un malaise dû à la fumée.
La famille part en vacances dans la Haute-Loire où habite le grand-père paternel. Eclate une dispute entre lui et son fils, à propos des relations supposées ambigües avec sa belle-fille. La famille retourne à Paris le 26 juin 1933. Violette a un amant qu’elle entretient par des emprunts. En juillet 1933, Baptiste a une belle promotion : il est chargé de conduire le train du président de la République, Albert Lebrun (1871-1950). Mais le 14 juillet, il tombe de sa locomotive. Il est hospitalisé et a 2 semaines de convalescence.
En août, Violette veut retrouver son amant en Bretagne. Pas n’importe comment : en Bugatti, s’il vous plaît. L’argent ? Elle le trouve dans le coffre de la famille au Crédit Lyonnais. Le 21, elle fait une nouvelle tentative d’empoisonnement avec une dose plus forte de soménal. Elle s’arrange pour rédiger une fausse ordonnance qui lui permet de s’en procurer 3 tubes. Elle réduit les cachets en poudre et les répartit dans 3 sachets dont un est marqué d’une croix. À la suite d’une dispute parce que l’argent de la famille a disparu, son père avale un des sachets dans un verre d’eau, d’un seul trait. La mère, trouvant que c’est amer, rejette la boisson. Violette avale le sachet marqué d’une croix.
Baptiste s’effondre, Germaine tombe et se blesse. Pendant ce temps, Violette prend la paie de son père (3 000 francs). Elle part en ouvrant le gaz pour faire croire que ses parents ont tenté de se suicider. Les pompiers arrivent, suivis par la police. Baptiste est mort, son épouse est transportée à l’hôpital. L’enquête montre que le compteur à gaz n’avait pas fonctionné suffisamment pour asphyxier. Violette s’enfuit avant d’être interrogée. Ce qui fait un aveu de culpabilité. Arrêtée le 28 août 1933, après une semaine de cavale, elle est accusée d’homicide volontaire et fait l’objet d’un mandat d’amener (personne amenée pour être placée en détention). La presse dénonce « le monstre en jupons, traqué par la police ».
L’affaire fait la une des quotidiens et commence le mythe de Violette Nozière. Tout le monde s’en mêle – et s’emmêle – journalistes, laboratoire de toxicologie, quotidiens, hebdomadaires, préfecture de police, institut médico-légal. Il faut du sensationnel, ça fait vendre. On connaît ça aujourd’hui ! Et d’août à octobre 1933, du sensationnel, il y en a : reportages, titres chocs, photos, etc… Le reste de l’actualité passe au second plan : les avancées d’Hitler en Europe, la crise économique, on ne s’en préoccupe pas. Quand on transfère Violette Nozière chez le juge, la foule se déplace pour la voir. Les chansonniers utilisent ce fait divers pour en faire des sketchs satiriques et humoristiques.
L’affaire est si sérieuse qu’elle est confiée au plus célèbre commissaire, Marcel Guillaume (1872-1963). La défense doit être assurée par un avocat célèbre aussi, Henri Gérard (1872-1962), qui avait défendu l’assassin de Jaurès, puis celui du président Paul Doumer. Mais il se désiste et il est remplacé par René Vésine-Larue (1903-1969), réputé également.
Cette affaire a des conséquences qui, toutes proportions gardées, rappelle l’affaire Dreyfus du début du siècle. On retrouve, bien marqué, le clivage gauche-droite. Il ne s’agit plus d’antisémitisme. La droite y voit une jeunesse dévoyée et demande un rappel aux valeurs morales. Pour la gauche, c’est le symbole de la lutte contre les dérives de la société. Violette est victime du patriarcat. Les artistes prennent fait et cause pour elle. Les surréalistes en font leur égérie et parlent d’ange noir. Tandis que la presse réactionnaire parle d’une influence étrangère.
Le 28 août 1933, elle accuse son père d’inceste, c’est grave. Le 31, Baptiste est inhumé à Neuvy/Loire et la foule assiste aux obsèques. Le 1er septembre, Violette est confrontée à sa mère à l’hôpital, à qui elle demande un pardon qui sera rejeté. Le 5 septembre, Germaine se constitue partie civile contre sa fille. Le 27 février 1934, Violette Nozière est envoyée à la Cour d’assise de la Seine (actuellement à Paris). Après le procès, le 12 octobre 1934, qui a rempli la salle d’audience, elle est condamnée à mort pour parricide et empoisonnement. Le 4 janvier 1935, elle est envoyée en prison où les conditions de détention sont si dures qu’elle se raccroche à la religion. En octobre 1937, Violette se rétracte sur les accusations d’inceste contre son père. Germaine avait fini par pardonner.
Pour sa conduite exemplaire en détention, le président Lebrun commue sa peine en travaux forcés à perpétuité. Pétain la réduit à 12 ans. Le 29 août 1945, elle est libérée puis graciée par de Gaulle. Le 13 mars 1963, la Cour d’appel de Rouen prononce sa réhabilitation.
L’affaire Violette Nozière a inspiré des œuvres. En 1977, Claude Chabrol en a fait un film qui a eu pour titre, tout simplement : « Violette Nozière ». Le rôle était incarné par Isabelle Huppert. Ce film a été présenté au festival de Cannes en 1978. En 1984, un groupe de rock s’est appelé « Violette Nozière », mais il n’a pas duré. Elle a été l’objet de nombreux documentaires et même d’études.
L’écrivaine Colette (1873-1953) a montré son hostilité contre Violette, dans un quotidien de droite : «L’Intransigeant ».
Le personnage et l’affaire Violette Nozière n’ont pas laissé la société indifférente et l’a même divisée.
Dans le calendrier républicain, le 26 novembre est le jour de la mâche.
HELMUT KOHL
Helmut Kohl est un homme politique allemand (1930 – 2017), membre de la CDU Christisch Demokratische Union Deutschlands = Uniondémocratique chrétienne d’Allemagne) depuis 1946. Il a été chancelier du 1er octobre 1982 au 27 octobre 1998.
En 1950, il obtient l’Abitur (équivalent du bac). En 1960, il se marie avec Hannelore Renner qui se suicide en 1963, souffrant de photophobie (intolérance à la lumière). En 2008, Helmut Kohl se remarie avec Maika Richer qui a 34 ans de moins que lui.
En 1959, il est député du Landstag de Rhénanie- Palatinat. L’année suivante, il est président du groupe chrétien-démocrate de Ludwigshafen. Puis le 19 mai 1969, il est ministre-président de Rhénanie-Palatinat. Après les élections législatives du 3 octobre 1986, Kohl qui préside le groupe CDU-CSU (grosso modo, la droite conservatrice allemande) au Reichstag, est candidat à la Chancellerie. Il est le principal opposant au chancelier fédéral Helmut Schmidt, leader du SPD (Sozialdemokratische Partei Deutschlands), qui serait la gauche progressiste.
En 1991, Kohl est à nouveau désigné Chancelier de l’Allemagne réunifiée, mais le SPD de Gerhard Schröder se fait menaçant. C’est ce dernier qui lui succédera en 1998. C’est le début de la fin de sa carrière politique. La CDU-CSU aura alors pour leader Angela Merkel, originaire de l’ex RDA.
La fin de carrière de Kohl sera entachée par un scandale politico-financier (comptes occultes alimentant des caisses noires de la CDU), ce qui a provoqué sa démission de la présidence d’honneur du parti en janvier 2000 et fait l’objet d’une enquête judiciaire. Angela Merkel, qui fut sa protégée, ne lui pardonnera pas cette trahison.
Malgré tout, Helmut Kohl a largement contribué à la construction européenne en essayant de créer les Etats-Unis d’Europe et également à l’Acte unique, signé en février 1986, qui doit créer des dispositions communautaires supranationales, ainsi que des ententes intergouvernementales entre les 12 pays européens (à ce moment-là, la CEE ne comprend que 12 membres).
Le 17 septembre 1982, la coalition CDU-CSU (Christllich Sozialen Union)-FDP (Freie Demokratische Partei) est majoritaire au Reichstag (Parlement allemand). Kohl est alors désigné Chancelier à partir du 1er octobre 1982.
En 1982, après les chocs pétroliers de 1974 et 1979, Helmut Kohl et le Président français
François Mitterrand cherchent à relancer le couple franco-allemand, en résolvant le problème posé par la Première Ministre britannique Margaret Thatcher qui demande un allègement de la contribution de son pays au budget européen.
Le 22 septembre 1984, Mitterrand et Kohl se retrouvent au mémorial de Verdun. Là, ils posent pour la postérité main dans la main pendant la cérémonie. Cette image représente le symbole de la réconciliation franco-allemande. A la mort de Mitterrand (8 janvier 1996), Kohl se rendra à la messe à Notre-Dame de Paris. En 1998, tous deux recevront le prix Charlemagne (pour ceux qui ont contribué à la construction européenne).
Helmut Kohl contribue à des projets de réformes de la CEE :
– Rénovation de la PAC (Politique agricole commune) ;
– Projet de traité de l’Union Européenne et du SME (Système monétaire européen) ;
– Droit de citoyenneté européenne pour créer un espace européen sans frontière ;
– Coopération européenne pour la politique étrangère.
En 1984, c’est le congrès de Fontainebleau (Seine-et-Marne). Il y est question du budget de la CEE et de la demande de rabais des Britanniques. Puis l’année suivante au Conseil de Milan, c’est la mise en place d’une politique étrangère et de sécurité commune. Helmut Kohl a engagé l’Allemagne dans le projet de monnaie unique.
L’Acte unique de la fin de 1992, achève la mise en place d’un marché intérieur : – Libre circulation des marchandises et des services ;
– Suppression des taxes douanières entre l’ensemble des membres ;
– Liberté pour les entreprises voulant s’installer dans le pays de leur choix. Helmut Kohl a ouvert la voie au traité de Maastricht, signé le 7 février 1992, qui élargit les compétences de la CEE dans les domaines du développement, de l’environnement, de la politique étrangère, le renforcement du Parlement européen. La CEE devient UE (Union Européenne).
En 2009, Helmut Kohl est victime d’une fracture de la hanche, ce qui l’oblige à se déplacer en fauteuil roulant. Puis il est victime d’un AVC qui lui paralyse le bas du visage. Le 31 octobre 2009, il peut encore recevoir Mikhaïl Gorbatchev pour le 20ème anniversaire de la chute du Mur.
Le 2 juin 2015, à 95 ans, il est hospitalisé au CHU de Heidelberg. En avril 2016, il reçoit encore le Hongrois Viktor Orban, à propos de la question migratoire (Merkel vient d’accepter l’entrée de nombreux réfugiés syriens). Il meurt quelque temps après, le 16 juin 2017 dans sa maison de Ludwighafen.
Le 1er juillet 2017, un hommage lui est rendu au Parlement européen de Strasbourg. Il a reçu
aussi de nombreux éloges de Clinton, du Polonais Donald Tusk, Président du Conseil européen, du Luxembourgeois Jean-Claude Juncker (Président de la Commission européenne), de l’Italien Antonio Tajani (Président du Parlement européen) , aussi des 22 anciens chefs d’Etat et même d’Angela Merkel.
Le 14 juin 1994 est ouverte la Maison de l’histoire de la RFA : Helmut Kohl en avait été à l’origine. Bien sûr, il a reçu de nombreuses décorations de nombreux pays, dont la Grand Croix de la Légion d’honneur française. Il a été désigné docteur honoris causa de l’université de Keio (Japon), de celles de Cambridge, de Louvain (Belgique), d’Aix-la-Chapelle (Allemagne). De nombreux ouvrages ont été écrits sur Helmut Kohl.
MARJANE SATRAPI
Marjane Satrapi, de son vrai nom Marjane Ebrahimi, est née le 22 novembre 1969 à Rasht dans le nord-ouest de l’Iran. C’est une artiste franco-iranienne, auteure de bandes dessinées, réalisatrice de films depuis 2005.
Elle grandit à Téhéran, dans l’atmosphère de la révolution islamique. En 1984, elle suit des cours au lycée français de Vienne (Autriche). Militante communiste, elle se bat pour le respect des valeurs humaines. Néanmoins en 1988, elle retourne en Iran où elle obtient une maîtrise de communication visuelle, à l’école des beaux- arts de Téhéran. En 1994, elle est à l’école supérieure des arts décoratifs de Strasbourg.
Marjane Satrapi a été membre du Festival de Cannes en 2008 et fait partie du collectif de création de bandes dessinées contre le sexisme. Elle est rendue célèbre par la publication de « Persépolis », bande dessinée en 4 volumes, qui est une autobiographie. Elle y décrit sa jeunesse, la révolution islamique des années 80-90. En 2003, cette bande dessinée a été publiée en France, à plus de 1 million d’exemplaires et a fait l’objet de nombreuses traductions. Marjane Satrapi publiera 2 autres bandes dessinées se passant en Iran. C’est d’abord « Broderies » : sorte de commérages d’Iraniennes, à l’heure du thé sur les rapports difficiles entre hommes et femmes. C’est aussi « Poulet aux prunes » : intrigue qui a lieu en Iran en 1958 : le grand-oncle de l’autrice, musicien, se laisse mourir à cause de la casse de son instrument de musique (le târ). Cette bande dessinée a reçu le prix du meilleur album au Festival d’Angoulême (Charente) en 2004.
Puis à partir de 2005, elle s’oriente vers le cinéma. Elle tourne 2 films avec Vincent Paronnaud (cinéaste et auteur de bandes dessinées) : Persépolis, inspiré de la bande dessinée. Le film sort le 27 juin 2007. En 2010, c’est « Poulet aux prunes qui est adapté au cinéma, l’année suivante, il reçoit le prix de la Mostra de Venise, ainsi que celui du festival international du film d’Abou Dhabi (Emirats Arabes Unis) puis le prix du public de Sao Paulo. Le 28 février 2024, Marjane Satrapi est élue membre de l’académie des Beaux-Arts.
De la bande dessinée au cinéma, elle passe à la peinture. Comme ça, pour le simple plaisir. Mais un plaisir qui l’amène à exposer à la galerie de Jérôme Noirmont (producteur d’art contemporain), à Paris, sur le thème de la femme. Ce qui ne veut pas dire qu’elle ne peint que des femmes. En 2020, elle expose dans une autre galerie, celle de Françoise Livinec sur le thème : « Femme ou rien ».
En mars 2016, Marjane Satrapi signe le manifeste du Printemps républicain, mouvement créé pour lutter contre l’extrême droite et l’islamisme. L’année suivante, elle s’engage à soutenir le
candidat Macron pour la présidentielle de 2017.
En juillet 2021, la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, lui demande un triptyque sur les J.O. à venir en 2024. Il sera reproduit en tapisserie par la Manufacture des Gobelins. Proposée en 2025, pour la Légion d’honneur, elle la refusera à cause de la politique qu’elle juge hypocrite envers l’Iran. En effet, elle accepte mal les visas accordés trop parcimonieusement à ceux qui sont en danger et veulent émigrer.
Outre ses divers talents, elle parle le persan (sa langue maternelle), le français, l’anglais, l’allemand, l’italien, le suédois (elle est mariée à un Suédois).
Ses œuvres :
– Persépolis en 4 volumes (2000 à 2003) ;
– Sagesse et malices de la Perse (2001) ;
– 6 films comme réalisatrice ;
– Films comme actrice ;
– Musiques de films.
Marjane Satrapi a été faite Officière (2015), puis Commandeure (2022) de l’ordre des Arts et Lettres. Elle a reçu de nombreux prix et a participé à divers jurys. Elle est docteure honoris causa de l’université catholique de Louvain (Belgique).
A ceux qui prétendent que l’immigration n’est pas une chance, Marjane Satrapi prouve exactement le contraire. Et ils sont nombreux tous ceux venus d’ailleurs, qui ne sont pas forcément des terroristes ou des profiteurs. Ils ont un autre regard sur nous, sur notre culture, à laquelle il leur arrive même d’ajouter leurs talents. Ils sont nombreux aussi, ces étrangers devenus fil(le)s de France par l’école, le travail, le sport, les loisirs, etc… Nombreux encore ceux qui sont venus construire nos maisons, nos routes, travailler dans les hôpitaux, nous servir dans les restaurants. Pas plus que nous, tous ceux qui viennent, ne sont pas tous des anges, pas plus, pas moins que nous…
Dans le calendrier républicain, le 22 novembre est le jour du turneps (variété de chou fourrager ou potager).
SOFIA CORRADI
Sofia Corradi est une Italienne considérée comme l’initiatrice du programme Erasmus. On l’a même surnommée « Mamma Erasmus ». Elle est née à Rome en 1934. Elle a commencé par étudier le droit à l’université « La Sapienza », de Rome et qui est la principale université italienne.
En 1957, Sofia Corradi obtient une bourse pour continuer le droit à la « Graduate School of Law », à l’université de Columbia (à New York, dans le quartier de Manhattan). Lorsqu’elle revient en Italie en 1958, son diplôme américain n’est pas reconnu par le ministère de l’Éducation italien. Dès lors, elle s’implique afin que les étudiants puissent aller à l’étranger et que leurs diplômes soient reconnus. Ce sera son combat.
A l’université de Rome III, fondée récemment en 1952, elle est professeure de sciences de l’éducation. En 1959, elle rédige un mémorandum pour l’équivalence des diplômes internationaux et qui est accepté par le ministère de l’Education. L’idée est reprise par l’exécutif européen qui crée le programme Erasmus. On aurait pu penser qu’il se référait à Erasme (1466-1536), philosophe, théologien, humaniste de Rotterdam, qui a correspondu avec tout ce que l’Europe comprenait de princes, de hauts ecclésiastiques, d’érudits et qui a voyagé. Pas du tout, l’aura de ce personnage ne semble pas assez évocateur. Alors, un crâne d’œuf des institutions européennes s’est creusé les méninges pour trouver « EuRopean Action Scheme for the Mamma ErasmUS ». Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?
Sofia Corradi utilise ses compétences en droit pour l’Académie internationale de droit de La Haye, pour la Convention des droits de l’homme à l’ONU, pour la London School of Economics, université londonienne.
Grâce à l’action de Sofia Corradi, lycéens, étudiants, apprentis, enseignants peuvent prétendre à un échange avec un autre pays, pas nécessairement européen. Le principal objectif est l’apprentissage de la langue, d’une activité, la réciprocité et en fin de compte, de partager son expérience. Les échanges Erasmus ne se sont pas limités à des échanges culturels, puisqu’il y a eu de nombreux couples mixtes, qui auraient donné environ 1 million d’enfants Erasmus. D’une certaine manière, Erasmus est aussi un moyen de rencontres…
A 82 ans, elle est récompensée par le prix Charles Quint, décerné aux personnalités qui ont contribué à construire l’Europe. Il lui a été attribué par le roi d’Espagne. En 2024, elle est docteure honoris causa de l’université de Paris Panthéon-Sorbonne.
NADIA COMANECI
Nadia Comaneci est née le 12 novembre 1961, à Oresti, dans la Moldavie roumaine. Elle est considérée comme la meilleure gymnaste de tous les temps. Aux Jeux olympiques de Montréal en 1976, elle a obtenu la note parfaite de 10, à à peine 15 ans (14 ans et 8 mois). Pour Nicolae Ceausescu, le Président dictateur de la Roumanie, c’est une icône du régime. Puis les relations se sont dégradées et Nadia s’est installée aux Etats-Unis.
Elle a fait ses débuts de gymnastique à l’école maternelle. A 6 ans, elle est repérée par Bela Karolyi, un Hongrois de Roumanie. Elle est très volontaire. La jeune Nadia préfère 4 heures de gymnastique à 4 heures de cours scolaire. En 1969, à 8 ans, elle est déjà championne nationale junior (en principe, junior c’est 17- 18 ans).
En 1971, à 10 ans donc, elle participe à sa première compétition internationale. Elle contribue à la victoire de son équipe contre la Yougoslavie. En 1974, on la fait passer dans la catégorie séniors (au-delà de 18 ans). En 1975, elle remporte les championnats d’Europe à Kien (Norvège). En mars 1976, elle obtient la note maximale au Madison Square Garden de New York et elle renouvelle l’exploit à Tokyo. Pendant l’été 1976, ce sont les Jeux Olympiques de Montréal (du 21 juillet au 1er août) : Nadia obtient 10 (note maximum) aux barres asymétriques. Elle obtient 10 à sept reprises. Bilan : elle est médaille d’or aux barres asymétriques et à la poutre, médaille d’argent avec son équipe, médaille de bronze pour les exercices au sol. Nadia passera au total 5 fois sur le podium, première Roumaine à être dans un classement aux J.O. . Actuellement, ces performances ne seraient plus possibles, car pour participer, il faut avoir 16 ans dans l’année.
Ses succès et sa précocité attirent les médias ; elle est désignée « meilleure athlète de l’année ». Sous le régime de Ceausescu, elle est la plus jeune à recevoir la médaille de « héros du travail socialiste ». En 1977, elle est championne d’Europe mais sa fédération lui impose de rentrer, de se séparer de son entraîneur Karolyi et de rester à Bucarest, au complexe sportif. En 1979, elle remporte encore le championnat du monde à la poutre, puis un 3ème titre aux championnats d’Europe.
Mais Nadia doit se faire opérer d’une main, à la suite d’une infection. Elle peut quand même participer aux J.O. de Moscou pendant l’été 1980 où elle ne remporte «que » la médaille d’argent au concours général mais la médaille d’or à la poutre et pour les exercices au sol.
En 1981, à 20 ans, Nadia Comaneci prend sa retraite (ça ferait rêver nos syndicats !). Ce sera l’objet d’une cérémonie officielle. Elle devient membre du CIO (Comité International Olympique). A partir de là, elle participe à des exhibitions de gymnastique aux Etats-Unis. Ses entraîneurs y sont déjà installés.
Le jour de ses 20 ans (12 novembre 1981), elle est en exhibition à Anvers et à son retour, elle commence à être surveillée. D’ailleurs, le fils Ceausescu, Nicu entretenait des relations avec elle. C’était un drôle de loustic, ce Nicu : Individu complètement dépravé, alcoolique. On raconte que lors d’une fête de Nouvel An, il a fait venir des huîtres de France, par avion. Mais bourré, il a pissé dessus. On comprend que la jolie Nadia n’ait pas été spécialement séduite.
Lors des J.O. de 1984, à Los Angeles, elle a envisagé de fuir, mais elle était toujours très surveillée. Elle a encore effectué des voyages à Cuba et à Moscou et puis elle a été interdite de sortir de Roumanie. De 1984 à 1989, Nadia Comaneci entraîne les gymnastes roumains juniors.
Le 26 novembre 1989, elle parvient à quitter clandestinement son pays, juste un mois avant la révolution roumaine qui a vu l’exécution du couple Ceausescu (25 décembre 1989). Elle a réussi à s’exiler grâce à l’aide de Constantin Palnit dont elle était amoureuse. L’évasion a été rocambolesque. Ils ont passé la frontière vers la Hongrie de nuit, dans la neige. De là, ils ont rejoint à pied l’Autriche avant de prendre un vol pour New York. En fait, Palnit n’était qu’un aigrefin ; déjà marié il voulait profiter de la notoriété de Nadia Comaneci. Finalement, c’est Bart Conner, un athlète américain rencontré aux J.O. de Montréal, qui la tire de ce mauvais pas. Il l’installe chez lui dans l’Oklahoma. Ils se fiancent en 1994 et se marient le 27 avril 1996, dans le palais présidentiel de Bucarest.
En 1999, Nadia Comaneci s’est impliquée dans des organisations de charité. A Bucarest, elle a mis en place une clinique pour soigner gratuitement les enfants. Le 29 juin 2001, elle revient aux Etats-Unis, se fait naturaliser, tout en gardant sa nationalité roumaine. En décembre 2003, elle publie une autobiographie et elle est l’objet de documentaires télévisés.
En 2003, elle est nommée consul honoraire aux Etats-Unis, puis présidente honoraire de la fédération roumaine de gymnastique, ainsi que consultante à la télévision. En 2007, elle participe à l’émission de téléréalité aux Etats-Unis : « The celebrity Appentice », animée par…. un certain Donald Trump.
En 2012, Nadia ouvre à Bucarest, un centre sportif pour enfants de 3 à 7 ans. En 2024, on la retrouve à Paris pour la cérémonie d’ouverture des J.O. Il serait bien trop long et fastidieux d’énoncer son palmarès prestigieux, avec les nombreux titres glanés ici et là. En 1999, elle avait été élue gymnaste du siècle. C’est l’histoire d’une petite fée, devenue une grande dame.
Dans le calendrier républicain, le 12 novembre est le jour de l’azerole (variété d’aubépine du bassin méditerranéen, encore appelée pommette).
ALFRED ROQUES
Alfred Roques est mort le 7 novembre 2004 à Cahors (Lot). Il était né le 17 février 1925 à Cazes-Mondenard (Tarn-et-Garonne). C’était un joueur de rugby international de 1958 à 1962, au poste de pilier droit (n°3). Il a commencé sa carrière internationale à seulement 33 ans, à un âge où d’autres la finissent.
Il a même été surnommé le « Pépé du Quercy ».
Alfred Roques a commencé par le football à Moissac (Tarn-et-Garonne puis à Cahors. Il n’est venu au rugby qu’à 26 ans. Il a eu 30 sélections en équipe de France qui a remporté le Tournoi de 5 Nations (devenu Tournoi des 6 Nations à partir de 2000) en 1959, 1960, 1961, 1962.
Il était réputé pour sa force herculéenne, un hercule rural et placide. Il a commencé sa vie dans la ferme familiale, à une époque où le travail de la terre exigeait du courage et de la force physique : porter les sacs de blé (en général 80 kg), manipuler le matériel, marcher beaucoup, etc…). Dans sa ferme, Alfred, surnommé Alfrédou pour sa bonhommie, s’était distingué : lors d’une séance de battage, la batteuse s’est enlisée et le cric pour la soulever n’a pas tenu le choc. Calmement, sans rien dire, Alfred est passé sous la machine, se mettant à quatre pattes, il a soulevé la batteuse que les autres ont pu ainsi caler. Autre exploit : il fallait châtrer un jeune poulain un peu rebelle, pour en faire un cheval de trait docile. Or l’animal ne se laissait pas maîtriser. C’est alors qu’Alfred l’a pris par le licol, l’a couché et l’opération a pu se faire ; on ne parlait pas encore de souffrance animale dans les campagnes. Parfois, on ne souciait même pas de souffrance humaine….
Alfred Roques avait donc la réputation d’un costaud. Or au rugby, pour être pilier, en première ligne, il faut être costaud. C’est donc tout naturellement que le club de Cahors (Stade cadurcien) l’a mis à ce poste. Et là, il a fait souffrir et reculer bien des piliers adverses ; y compris sur le plan international, comme par exemple, le terrible pilier gallois Ray Prosser, qui a plié face à lui.
Pendant l’été 1958, il est sélectionné pour participer à la tournée en Afrique du Sud pour affronter les terribles Springboks (équipe d’Afrique du Sud), réputés par la violence de leur jeu. Pendant les matchs, contre des sélections régionales, l’arbitrage – fait par des arbitres sud-Africains – n’est pas toujours réglementaire. C’est alors que lors d’un match un peu houleux, le capitaine de l’équipe de France, Lucien Mias (1930-2024) est allé voir l’arbitre et lui a déclaré : « Je lâche les chiens », voulant dire qu’ils répondraient à la violence. Il a dit à Alfredou : « on y va ! ». Et ils y sont allés, ce qui a donné de dures échauffourées. Un joueur français avait reçu un choc et titubait. Des infirmiers sud-africains ont voulu intervenir par la manière forte pour le faire sortir : ils l’ont assommé ! C’est là que le bon Alfredou est allé en
voir un, lui a décoché un bon coup de poing. La victime s’est redressée et a crié : « Vive la France ! ». Cette mêlée est restée mémorable, on l’a appelée : « La mêlée fantastique ». Les Sud-Africains l’ont surnommé « The wild one » (Le sauvage), ce qu’il n’était pourtant pas. Ce n’était pas un grand joueur ballon en main. On lui demandait surtout de pousser en mêlée et ça il le faisait très bien.
Aujourd’hui, le rugby est professionnel et de tels actes seraient sévèrement réprimés. Le gabarit des joueurs et leurs qualités athlétiques peuvent rendre dangereux certains gestes, que les caméras repèrent et sur lesquels elles font des ralentis. Dans le rugby actuel, beaucoup de joueurs atteignent ou dépassent les 100 kg et sont capables de courir vite, ce qui rend les chocs dangereux (Alfred Roques pesait 100 kg, pour 1,76 m). Depuis que le rugby est professionnel, les joueurs s’entraînent quasiment chaque jour, font de la musculation. Si bien que certains dépassent même les 120 kg.
Au cours de cette tournée en Afrique du sud qui a duré plusieurs semaines, Alfred a pris du poids, estimant que pour lui, c’était presque des vacances : il n’avait rien d’autre à faire que de jouer au rugby. C’était une autre époque. Au total, il a participé à 9 des 10 matchs. A la surprise générale, tant les Springboks étaient redoutables, le bilan a été positif ; il y a eu 2 test-matchs, contre l’équipe nationale qui se sont soldés par un match nul et une victoire.
S’il a pu participer à la tournée en Argentine en 1960, Alfred Roques n’a pas voulu participer à la tournée en Nouvelle-Zélande et en Australie en 1961, parce qu’il construisait sa maison. Comme les rugbymen étaient amateurs, il fallait bien qu’ils aient un métier. En général, les dirigeants de clubs leur trouvaient un travail qui leur permettait de s’entraîner (1 à 2 soirs par semaine). Mais parmi les joueurs, on trouvait aussi des étudiants, des enseignants, des médecins (Lucien Mias était médecin). Alfred Roques a eu un emploi comme chef de service d’entretien du stade de Cahors.
Lorsqu’il a mis fin à sa carrière sportive, Alfred Roques et son épouse ont tenu un restaurant à Cahors, qui avait pour enseigne « La poule au pot ». Personnage calme et pacifique, ce fils de paysan a connu la gloire grâce à son extraordinaire force physique, doublée d’une grande simplicité. Il s’est éteint à l’hôpital de Cahors le 7 novembre 2004.
Dans le calendrier républicain, le 7 novembre est le jour du cresson.
LE CLOWN CHOCOLAT
Le 4 novembre 1917 meurt à Bordeaux, celui qu’on appelait le « Clown Chocolat« . En fait, il s’appelait Rafael Padilla, né vers 1868, probablement à La Havane (Cuba). C’était un artiste noir spécialisé dans le rôle d’auguste (victime de service qui fait des parodies comiques). Son duo avec l’Anglais Foottit (1864-1921) dans le rôle de clown blanc a connu un grand succès. C’est un artiste de la « Belle Epoque » (approximativement 1880-1914), qui sera oublié après sa mort. Il en restera quand même l’expression : « être chocolat » = « se faire avoir ». Cela donne une idée du rôle de cet artiste. Rafael est un prénom espagnol. Il est issu d’une famille d’esclaves d’origine africaine, à Cuba. Ce qui explique les incertitudes sur le lieu et la date de naissance : on ne tenait pas de registre d’état-civil pour les esclaves. En 1878, ses parents s’évadent de la plantation où ils étaient exploités. Ils confient leur fils, âgé d’une douzaine d’années à une Cubaine pauvre. Celle-ci le vend pour l’équivalent d’un mois de salaire (18 onces) à un fonctionnaire de La Havane. Il est ensuite engagé comme garçon de ferme chez la mère d’un négociant de Bilbao en Espagne. Lorsque celle-ci vient au Pays basque espagnol, elle emmène Rafael. Voyant un jeune Noir, les paysans locaux envisagent …de le blanchir….avec une brosse à chevaux ! On imagine ce qu’il a dû subir…Evidemment, il s’enfuit. Il se retrouve dans des villes des alentours et fait chanteur de rue, groom, mineur et même docker.
On ne sait s’il a sollicité ou a été découvert par un clown, Tony Grice qui lui demande de devenir son aide. Il a remarqué que Rafael est adroit, costaud, souple. Il en fait un partenaire. Chocolat se fait même cascadeur. En octobre 1886, Grice l’emmène au Nouveau Cirque (cirque construit en dur, avec bassin aquatique amovible, situé rue St-Honoré dans le 1er arrondissement, il sera fermé en 1926). On est à la Belle Epoque, la société a envie de se divertir sur un fond de cosmopolitisme. Foottit et Chocolat conquièrent le public parisien. On n’a pas encore conscience d’une forme de racisme, en appelant un Noir Bamboula (ça se dit encore !) ou Chocolat. D’ailleurs, c’est Grice qui a donné ce pseudonyme à Rafael. Désormais, il est le clown Chocolat.
En 1888, Henri Agoust (1840-1901) est le régisseur du Nouveau Cirque. Pour lui, Chocolat est un excellent mime, doublé d’un bon danseur. Pendant 5 ans, il connaît un grand succès, en faisant équipe avec d’autres clowns dont Geronimo Medrano (1849-1912). Chocolat rencontre Marie Hecquet, une Picarde mère de 2 enfants et qui divorce pour refaire sa vie avec Rafael, celui-ci adopte ses 2 enfants. En 1895, Raoul Derval (1852-1898) l’associe à George Foottit (1864-1921). Tous deux forment un duo comique : un clown blanc et un auguste noir. Le public rit de ses excès, de ses ahurissements, de son agilité. Les claques qu’il reçoit, pour la société de l’époque, c’est conforme : le Noir naïf, puéril, souffre-douleur bon enfant. Dans les sketchs, Chocolat représente le personnage soumis. Cocteau dira : «Chocolat était le nègre de service qui recevait les claques ». En 1905, son contrat n’est pas renouvelé. Est-ce une conséquence indirecte de l’affaire Dreyfus qui a politisé le racisme ? Peut-être aussi l’arrivée d’artistes noirs américains avec une nouvelle danse populaire : le « cake walk » ?. En 1909, George est de retour au Nouveau Cirque, avec un spectacle : « Chocolat aviateur ». La première a lieu le 30 octobre et connaît un grand succès.
Le 18 novembre, un journal annonce la mort du clown Chocolat. Mais dès le lendemain, le journal « Le Temps » rectifie et publie la lettre que Rafael leur a envoyée :
« Monsieur,
« le diresteur dans votre journal que monsieur Mile, l’intelijean journaliste a écri que je suis more comme Auguste. Je vous pri de dire que je suis vivan, et que je joue chaque soir Chocolat aviateur au Nouveau Cirque. Vous pouvez ajouté que je nai pas même blanchit. Je vous pri d’acepté mon respét. Je vous prie de rectifié car ça me fait tor ».
Ne rions pas, nos enseignants de 2025 ont probablement rencontré ce type d’orthographe, avec de jeunes gens qui n’ont pas été esclaves !
Après leur séparation, Foottit et Chocolat font carrière chacun de leur côté, sans succès. Chocolat court les cachets. Alors, il essaie le théâtre, mais il maîtrise mal le français et peine à apprendre des textes longs. En 1911, il est au Cirque de Paris (ouvert en 1906), dans la rue de La Motte-Piquet (VIIème et XVème arrondissements). Dans les années 20, Chocolat est le premier clown à aller faire rire les enfants des hôpitaux, pratiquant la thérapie par le rire.
La suite est triste. Chocolat vit un drame personnel – la mort de sa fille de 19 ans, à la suite d’une tuberculose – il sombre dans l’alcoolisme. Il ne travaille plus que dans de petits cirques, mais le cœur n’y est plus. En tournée à Bordeaux, il meurt subitement le 4 novembre 1917. Le lendemain, il est inhumé dans le carré des indigents du cimetière protestant.
Le personnage du Clown Chocolat a inspiré des films, ainsi que des affiches publicitaires pour le chocolat Félix Potin, les pneus Michelin, Le Bon Marché. En 2016 est sorti le film « Chocolat » avec Omar Sy. Le 20 janvier 2016, Anne Hidalgo, maire de Paris a fait poser une plaque sur une façade de l’Hôtel de Ville. De même, une plaque a été mise au cimetière protestant de Bordeaux. En 2017, cette ville a appelé une place, Rafael Padilla, réservée aux cirques de passage. La même année, son nom a été donné à une aire de jeux pour enfants.
C’est la triste fin d’un personnage atypique et généreux, qui a fait rire la société de la Belle Epoque.
Dans le calendrier républicain, le 4 novembre est le jour de l’endive.
MARIA CORINA MACHADO : PRIX NOBEL DE LA PAIX 2025
Maria Corina Machado est une femme politique venezuelienne qui vient d’obtenir le prix Nobel de la Paix le 10 octobre 2025. Elle s’est opposée à la dictature socialiste de Hugo Chavez (1954-2013) et actuellement à celle de Nicolas Maduro, élu Président de la République bolivarienne du Venezuela le 10 octobre 2013, réélu le 20 mai 2018, puis le 28 juillet 2024.
Comme opposante active, elle est menacée et doit vivre dans la clandestinité. Ce qui ne l’empêche pas de faire des tournées dans le pays. En 2024, Maria Corina Machado a eu le prix Vaclav Havel, décerné par le Conseil de l’Europe aux personnalités qui s’engagent à faire respecter les droits humains et la primauté du droit. Elle a reçu aussi le prix Sakharov, créé en 1988 par le Parlement européen pour honorer des personnes ou associations qui se battent pour la défense des droits humains.
Son père était un homme d’affaires dont la famille avait créé la Compagnie d’électricité de Caracas et dirigeant d’une entreprise sidérurgique. Quant à sa mère, elle était psychologue. Maria Corine fréquente une école catholique de filles, puis envoyée en pension à Wellesley, petite localité dans l’Etat de Massachusetts aux Etats-Unis. Elle revient au Venezuela, à l’université catholique de Caracas. Elle en sortira diplômée en ingénierie et en finance. Elle commence par travailler dans l’entreprise sidérurgique familiale Sivensa, puis avec sa mère dans un foyer pour enfants abandonnés.
C’est en 2002 que Maria Corina entre en politique. Elle contribue à créer le mouvement « Sumate » (= « Rejoins-nous »), pour concrétiser un coup d’Etat pacifique, mais ce sera un échec. En 2004, elle obtient 3 millions de signatures pour le départ de Chavez. Comme c’est encore un échec, elle est interdite de sortie du territoire.
En 2005, accusée de trahison pour avoir reçu des fonds d’une organisation américaine prônant la démocratie libérale, elle est alors menacée de mort et envoie sa famille aux Etats-Unis. En 2010, Maria Corina Machado est candidate à l’Assemblée nationale du Venezuela. Elle est élue dans la circonscription de Miranda (au nord du pays), mais en mars 2014, elle est destituée, par l’organisation des Etats américains, créée en 1948. C’est une organisation intergouvernementale, dont le siège est à Washington. Son but est de réaliser des projets communs, dans le respect de chaque nation (et surtout de celle des Etats-Unis). Or, la préoccupation principale était l’entrée du communisme à Cuba. Cela leur paraît impardonnable et Cuba est exclu en 1962. Dans cette réunion de 2014, Machado faisait partie d’une autre délégation, celle de Panama. C’est pour cela qu’elle a été destituée.
En cette même année 2014, avec Leopoldo Lopez – homme politique venezuelien – elle organise une manifestation contre Maduro. En 2018, elle milite pour le boycott de l’élection pour ne pas légitimer un pouvoir autoritaire.
Le 22 octobre 2023, Maria Corina Machado obtient 93% des voix pour la primaire de 2024. Mais le contrôleur général de la République est chargé de surveiller les comptes publics. Il lui interdit d’accéder à toutes fonctions publiques jusqu’en 2030 car elle est accusée de fraude fiscale et de soutien aux sanctions économiques imposées par Trump. Le 27 janvier 2024, sa candidature est interdite par le Tribunal suprême de justice. Le 24 mars 2024, elle annonce qu’elle sera remplacée par Edmundo Gonzalez Urrutia de la « plateforme unitaire » (coalition politique fondée en 2020, rassemblant les partis politiques divers qui s’entendent pour stopper Maduro).
En avril 2024, des sondages donnent 50% des intentions de vote à Gonzalez Urrutia, contre 18% à Maduro, pour l’élection présidentielle. Si l’opposition se félicite de la faible participation, Maduro l’emporte quand même avec 52% des suffrages. Bien sûr, il est clair que le scrutin a été entaché de fraudes.
Machado plaide pour une intervention des Etats-Unis, qui prennent prétexte que le pays est gangréné par la corruption et les trafics de drogue. Elle espère que cela permettrait de dégager Maduro. En fait, la défenseure des droits humains attend une aide du « vieux beau » de la Maison Blanche, qui se moque des droits humains comme de sa première cravate rouge. Il aurait même tendance à les combattre, comme on le voit dans son propre pays. Il est curieux de constater qu’elle a dédié son prix Nobel de la Paix à Trump, pour le remercier de son soutien. Or, ce dernier réclamait haut et fort l’attribution de ce prix qui, selon lui, devait lui revenir pour toutes les fins de conflits qu’il s’attribue. Même s’il n’a pas réglé le cas de l’Ukraine, ni celui des Palestiniens (son plan ne dit rien de la Cisjordanie), entre autres… Aussi peu fair play que possible, il a affirmé que le jury Nobel a choisi la politique plutôt que l’action.
Surprenant aussi que Maria Corina Machado soit signataire en 2020, de la charte de Madrid, contre le crime organisé. Cette charte a été lancée par VOX, parti d’extrême droite espagnole. En 2023, elle félicite Javier Milei pour sa victoire à la présidentielle argentine, et dont le parti vient de remporter les législatives du 26 octobre 2025. Or, comme défenseur des libertés, on fait mieux que Milei. Elle a même affirmé que c’est « le triomphe de la liberté ! ». Elle a également soutenu l’annexion par la force de l’annexion de l’Essequibo, territoire de la Guyana voisine. De la même façon, elle estime Israël dans son droit de se défendre contre Gaza, arguant ses bonnes relations avec Netanyahou.
En plus du prix Nobel, du prix Vaclav Havel, du prix Sakharov, Maria Corina Machado a reçu en
2018 le prix « 100 women » décerné par la BBC, pour son rôle de femme du XXIème siècle). On peut très bien comprendre que son Nobel récompense son combat contre la dictature de Maduro. Par contre, ses prises de positions sur le plan international posent problème. Ce n’est pas pour autant que Trump le méritait. Lui, qui aujourd’hui bombarde des navires dans la Mer des Caraïbes (qu’il n’a pas encore appelée Mer américaine !), sans vérifier s’ils transportent de la drogue. Lui, qui lors de sa première campagne électorale (2018) affirmait avec élégance que « les femmes se tiennent par la chatte ».
Trump ne se servirait-il pas de Machado pour renverser Maduro et lorgner sur les énormes réserves pétrolières du Venezuela ? Avec lui, l’histoire n’est jamais écrite à l’avance…
JACQUES DELORS
Jacques Delors est un homme politique, un militant syndical qui a largement contribué à la construction de l’Europe. Il est né à Paris en 1925, d’un père régisseur à la Banque de France et d’une mère d’origine cantalienne. Il grandit dans le quartier de Ménilmontant (XXème arrondissement). Après avoir passé le certificat d’études primaires, il poursuit ses études au collège Voltaire du XIème arrondissement, puis à Aurillac (Cantal) et Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme).
En 1943, il est à la faculté de droit de Strasbourg. Mais avec la guerre, il doit interrompre ses études. Jacques Delors entre alors à la Banque de France, comme rédacteur. C’est là, qu’en 1945, il s’engage à la CFTC (Confédération Française des Travailleurs Chrétiens), qui deviendra CFDT (Confédération Française Démocratique du Travail) en novembre 1967.
De 1959 à 1965, Jacques Delors dirige « Citoyens 60 », qui est un mouvement de la « Vie nouvelle », association d’éducation populaire, parrainée par le PSU (Parti Socialiste Unifié) initié par Michel Rocard (1930-2016).
En 1962, il est commissaire au Plan quinquennal (1er plan quinquennal de 1946 à 1950), dans lequel, il est chargé de réfléchir sur les affaires sociales et culturelles jusqu’en 1969.
En 1970, il est chargé de mission auprès de Jacques Chaban-Delmas (1915-2000), nommé premier Ministre. Il l’influence pour son projet de « nouvelle société ». C’est alors qu’il adhère au Parti socialiste en 1974.
En 1979, il est élu député européen. Lorsque François Mitterrand a été élu Président de la République, le 10 mai 1981, Jacques Delors est désigné ministre de l’Economie et des Finances du gouvernement du premier Ministre Pierre Mauroy, de 1981 à1984. Il y prône une politique de rigueur.
En 1983, il est à l’origine de nationalisations, d’une dévaluation pour avoir des prix attractifs. Il veut pratiquer une politique de relance et maintenir la France à l’intérieur du SME (Serpent monétaire européen), destiné à limiter les fluctuations monétaires entre pays de la CEE.
En 1983, il décline la proposition de Mitterrand de le nommer Premier Ministre, mais accepte de se présenter aux élections municipales à Clichy (Hauts de Seine), où sa liste l’emporte de justesse.
De 1985 à 1995, il préside la Commission européenne (le gouvernement de l’Europe).
Il contribue à de nombreuses actions :
– Création de l’euro ;
– Acte unique européen (signé à Luxembourg, puis à La Haye) qui entre en vigueur le 2 juillet 1987 ;
– Accord de Schengen (commune luxembourgeoise de 5 200 habitants, à la frontière de France et d’Allemagne). Il permet la libre circulation des biens et des personnes entre les Etats membres ;
– Programme Erasmus : échanges entre enseignants et étudiants ;
– Institut de recherche « Notre Europe » devenu institut « Jacques Delors ».
En 1995, la fin du septennat de Mitterrand s’annonce. Des candidats se déclarent. Mais dans les sondages, le favori, c’est Jacques Delors qui est sollicité par le Parti socialiste, qui voit en lui le candidat idéal. Mais le 11 décembre 1994, devant les bureaux de la journaliste Anne Sinclair, qui l’interviewe, lors de l’émission « 7/7 », très suivie, il annonce qu’il ne se présentera pas. Il avance son âge : 69 ans (ça ferait rire aujourd’hui !), sa longévité politique (ça aussi, ça ferait rire). Et ce qui ferait moins rire, c’est le constat des divisions de la gauche, et qu’il n’aurait pas le soutien nécessaire pour appliquer sa politique. Avec beaucoup de lucidité, il avoue : « Les déceptions de demain, seraient pires que les regrets d’aujourd’hui ». Car, c’est vrai, la déception a été grande et pas seulement parmi les adhérents du PS.
Cet épisode marque le commencement de la fin de la vie politique de Jacques Delors. Le 22 janvier 1995, Jacques Delors quitte la présidence de la Commission européenne. Il se contente du comité de soutien à Jospin, qui sera battu à l’élection présidentielle de 2002. Toujours en 1995, il reçoit le prix Charles Quint, qui récompense les initiatives ayant contribué à l’intégration européenne. En 2004, il signe la pétition lancée par Pierre Larroturou (spécialiste d’économie), pour le partage du travail, la semaine de 4 jours, la lutte contre le réchauffement climatique (déjà !), pour une Europe sociale. Il continue de militer pour poursuivre la construction européenne. En 2007, il se montre favorable à une Communauté européenne de l’énergie.
Le 26 juin 2015, il est fait « Citoyen d’honneur de l’Europe ». Lors du covid en 2020, il encourage à plus de coopération et de coordination entre Européens.
Le 27 décembre 2023, il meurt à Pari dans son sommeil, à 98 ans. On imagine facilement que les hommages ont été nombreux, après une vie si bien remplie pour la cause européenne, avec beaucoup de droiture. Son héritage est difficile et on peut se demander comment on est passé de Jacques Delors à Ursula von der Leyen. Un hommage personnel a été présidé par Emmanuel Macron le 25 septembre 2023. Les funérailles se sont déroulées à Fontaine-la-Gaillarde (Yonne) où il avait une résidence secondaire.
Jacques Delors a été Commandeur de la Légion d’honneur. Il a reçu de nombreuses décorations européennes d’Allemagne, Autriche, Espagne, Estonie, Hongrie (avant Orban), Pologne, Portugal et même d’un pays non européen : le Pérou. Il a été docteur honoris causa de l’université d’Anvers. On a donné son nom au bâtiment du Comité économique et social. En France, de nombreuses rues portent son nom et aussi une rue en Allemagne (Herford), à l’école européenne de Lille-Métropole, située à Villeneuve-d’Ascq. Il a publié de nombreuses publications et de nombreux documents ont été faits sur lui.
L'ACCIDENT DE LA GARE MONTPARNASSE
Le 22 octobre 1895 ; la gare Montparnasse de Paris a vécu un accident peu banal. Il s’est produit à l’arrivée du train venant de Granville (Manche).
Cette ligne avait été construite par la Compagnie des chemins de fer de l’Ouest. Elle était à l’origine d’autres lignes vers Le Mans, Nantes, Saumur, Niort, Bordeaux. A cette époque, où l’automobile n’existait pas encore, c’était un moyen de transport rapide, à grande capacité et à longue distance. Les trains arrivaient par Vanves et Malakoff. Le hall de la gare de Montparnasse comprenait 6 quais et avait la particularité de dominer le boulevard Montparnasse de 9 mètres.
Le 22 octobre 1895, le train parti de Granville à 8h45, doit arriver à Paris à 15h55 (les trains étaient généralement à l’heure). Il comprend : une locomotive et son tender (là où i y a le charbon), 10 voitures (on ne dit pas wagons) de voyageurs, dont une voiture-salon (très confortable et avec restauration), une voiture de queue. Dans la voiture-salon, se trouvait entre autres Albert Christophe (1830-1904), gouverneur du Crédit Foncier (pour aider les entreprises immobilières), créé en 1852.
En passant à Versailles-Chantiers, le train a 7 minutes de retard (ça ne choquerait pas aujourd’hui). Il regagne 2 minutes avant d’aborder la gare de Montparnasse. Il roule encore à 40 km/h et il est impossible de l’arrêter. La locomotive percute le butoir qui est pulvérisé, elle franchit le terre-plein en béton, défonce le mur de la façade, puis le balcon. Et finalement, la locomotive bascule dans le vide, sur une station de tramway. Au moment de la chute, les horloges de la gare indiquent 16 heures.
Dans sa chute, la machine, avec ses wagons derrière, a tué la pauvre marchande de journaux qui se trouvait là dans son kiosque. Elle avait 37 ans et était mère de 2 enfants. Le chauffeur (celui qui alimente la machine en charbon) et le mécanicien (celui qui s’occupe des réglages) ne sont que blessés. Les voitures sont presque toutes restées sur les rails, grâce au freinage actionné depuis le wagon de queue. Trois députés, qui étaient dans le train, ainsi qu’Albert Christophe ont été contusionnés par le choc.
Le chauffeur et le mécanicien ont parlé d’un problème de freinage. Ils ont essayé d’intervenir en inversant la vapeur, mais cela s’est avéré insuffisant.
Le ministre des travaux publics Dupuy-Dutemps (1847-1928) et le préfet de police Lépine (1846-1933) sont présents sur les lieux dès 17h30. Il faut installer un service d’ordre avec des gardes municipaux à cheval, car des curieux viennent acheter des billets bon marché pour être au plus près. Le fait divers a été connu jusqu’aux Etats-Unis.
Désormais, il faut dégager cette locomotive qui pèse 50 tonnes. Après plusieurs tentatives qui ont échoué, le 25 octobre l’opération a réussi, avec un treuil et de puissants vérins. Finalement la machine n’a pas été trop abîmée. Elle a été transportée sur un charriot (on imagine le nombre de chevaux pour tirer 50 tonnes), jusqu’aux usines Cail (du nom de son fondateur 1804 – 1871), situées quai de Javel dans le XVème arrondissement. Le tender est remonté dans la gare et remis sur rails. La circulation est rétablie le 28 octobre.
La compagnie des Chemins de fer de l’Ouest a reconnu sa responsabilité dans le décès de Mme Sigillard, la marchande de journaux. Elle a proposé un arrangement très humain, pour ne pas dire humanitaire : une indemnité pour son compagnon, prise en charge de l’éducation des enfants, promesse de les employer lorsqu’ils seront adultes. Le 25 janvier 1896, le mécanicien a été envoyé en tribunal correctionnel du département de la Seine (actuellement Paris intra-muros). Le jugement a fait remarquer que ce mécanicien avait travaillé pendant 6 h3/4. Tandis que le conducteur en chef était absorbé par des tâches administratives (ça existait déjà ?). Le 31 mars, le mécanicien a été condamné pour homicide et blessures par imprudence. Il a finalement écopé de 2 mois de prison avec sursis et 50 francs d’amende. Le tribunal s’est montré relativement clément.
Il y a bien eu une enquête. Celle-ci a révélé qu’il n’y avait rien d’anormal, sauf un dysfonctionnement dans le système de freinage.
Cette histoire a inspiré un poème à Paul Eluard et un dessin à Man Ray. Une réplique de l’accident a été faite dans un musée brésilien. En 2011, elle a inspiré un film de Martin Scorsese. La photo de la locomotive en mauvaise posture existe en cartes postales, vendues dans les magasins de souvenirs et chez les bouquinistes le long des quais de la Seine.
Dans le calendrier républicain, le 22 octobre est le jour de la pomme.
ZOHRAN MAMDANI
Le 18 octobre 1991 naît Zohran Mamdani à Kampala, capitale de l’Ouganda. Il est membre du Parti démocrate des Etats-Unis, et il est apparenté aux socialistes démocrates de l’Amérique. Depuis 2021, il est membre de l’Assemblée de l’Etat de New York.
Le 24 juin 2025, il remporte la primaire démocrate de l’État. Personnage singulier qui a tout pour énerver Trump. En effet, outre qu’il soit né en Afrique, sa mère Mira Naïr est une cinéaste indo-américaine qui a obtenu la Palme d’or au Festival de Cannes de 1988. Quant à son père Mahmood Mamdani, c’est un professeur de lettres à l’université de Columbia (New York), spécialiste de sciences politiques et d’anthropologie. Il est d’origine indienne et a été chancelier de l’université internationale de Kampala.
La famille Mamdani s’est installée en Afrique du Sud, au Cap en 1996 où Mahmood enseignait à l’université. Zohran est inscrit à la St-George’s Grammar School of science (lycée préparatoire aux études scientifiques). Puis, il étudie au Bowdoin College (enseignement supérieur) de Brunswick dans l’Etat du Maine aux Etats-Unis.
Là, Zohran fonde l’école des «Students for Justice in Palestine ». En 2014, il est licencié en études afro-américaines. Il a d’autres cordes à son arc, puisqu’avant la politique, il a été joueur de cricket et aussi rappeur dans des stations de métro de New York. Il avait même un nom de scène : Mr Cardamom.
C’est à partir de 2017 que Zohran s’engage en politique comme directeur de campagne des Démocrates pour les élections à l’Assemblée de l’Etat de New York. En 2019, il annonce sa candidature à cette Assemblée. En plus des Démocrates, il est soutenu par les socialistes démocrates d’Amérique. Son programme de campagne est le suivant : contrôler les loyers, mettre fin aux incarcérations de masse. Et ça marche, puisqu’aux primaires de juin 2020, il est désigné candidat. Aux élections de novembre 2020, il est facilement élu. Compte-tenu de son parcours, c’est un vrai coup de tonnerre à New York, d’autant qu’il est réélu en 2022, puis en 2024 ! C’est encore plus surprenant, quand on sait qu’il est membre des Socialistes d’Amérique et du club des Muslims démocrates. En 2023, il prend position sur la politique internationale avec son projet «Not on one dime », qui consiste à interdire aux organisations caritatives de faire des dons pour soutenir les colons israéliens.
Le 23 octobre 2024, il est donc officiellement le candidat démocrate pour la mairie de New York. Il annonce son programme:
– Construction de logements à bas prix ;
– Gel des loyers ;
– Gratuité dans les bus publics ;
– Gratuité dans les épiceries municipales ;
– Gratuité pour les gardes d’enfants de 6 semaines à 5 ans.
– Fourniture aux nouvelles familles de « paniers bébés » contenant des couches et des produits pour l’allaitement.
– Aide aux sans-abris ;
– Améliorer la sécurité publique par une stabilité économique (que chacun ait un travail) plutôt que de renforcer la police et les prisons.
Avec un tel programme, il se fait traiter de « petit communiste » par l’inénarrable Donald Trump. Pour lui , « communiste » est un gros mot qu’il aggrave en y ajoutant de façon méprisante l’adjectif « petit ». Or le « petit communiste » est capable de parler en anglais, en hindi, en espagnol dans ses meetings. Chacun est conscient que le scrutin du 4 novembre 2025 est d’importance nationale et que l’enjeu dépasse le cadre de la mairie de New York. Trump cherche à mettre en doute la légalité de son arrivée aux Etats-Unis et menace même de l’expulser, car à ses yeux, Mamdani (naturalisé en 2018) a l’outrecuidance de critiquer les arrestations de migrants.
Que se passera-t-il si Zohran Mamadani est élu maire de New York (municipalité de près de 10 millions d’habitants) le 4 novembre prochain ? Sera-t-il expulsé ? Trump enverra-t-il l’armée comme il l’a fait en Californie ? Réponse le 4 novembre 2025 !
Dans le calendrier républicain, le 28 septembre est le jour de la carotte.
ALICE-ERNESTINE PRIN
Alice-Ernestine Prin est née le 2 octobre 1901 à Châtillon/Seine (Côte-d’Or). Surnommée la « Reine de Montparnasse », elle pose nue pour des artistes dont elle était la muse et souvent l’amante. Elle a aussi été comédienne, chanteuse, danseuse, gérante de cabaret et même artiste peintre.
Pourtant sa vie commence mal : elle est la fille illégitime d’Alice Prin qui est très pauvre. Elle est envoyée à Paris chez sa grand-mère, Marie Prin, qui est linotypiste. En 1914, elle est retirée de l’école pour être apprentie. Elle enchaîne les petits boulots, nombreux, variés et qui n’ont pas forcément un lien entre eux : brodeuse, fleuriste, laveuse de bouteilles chez Félix Potin (enseigne de distribution créée par Félix Potin lui-même), visseuse d’ailes d’avions !
En 1917, Alice-Ernestine se retrouve bonne à tout faire dans une boulangerie du IXème arrondissement. Maltraitée, elle se révolte : elle est renvoyée. Alors, il lui faut un moyen de gagner sa vie. Comme elle est bien faite de sa personne, elle pose nue pour des peintres, sculpteurs ou photographes. Sa mère n’est pas contente et l’expulse. Elle est recueillie par le peintre russe Chaïm Soutine (1893-1943). Evidemment, elle pose pour lui.
Alice est souvent à la Rotonde (célèbre café littéraire du quartier Montparnasse). Là, se retrouvent beaucoup d’artistes : peintres, sculpteurs, écrivains. Elle pose pour Amedeo Modigliani (1884-1920), le peintre japonais Tsougouharu Foujita (1886-1968). C’est le peintre d’origine polonaise Moïse Kisling qui l’a peinte et la surnomme Kiki. Désormais, elle sera Kiki de Montparnasse. Elle connaît un grand succès grâce à son maquillage, sa croupe charnue, son pseudonyme de Kiki.
En 1921, elle est la compagne et le modèle de Man Ray. Il s’appelle en fait Emmanuel Rednitsky (1880-1976), peintre et photographe américain, naturalisé français. Il juge son physique « irréprochable de la tête aux pieds ». La célèbre photo « Le Violon d’Ingres » faite en 1924, c’est lui.
Kiki est consacrée la « reine de la Rotonde » par ceux qui la voient évoluer avec Man Ray. Dans ce lieu, elle fait de nombreuses rencontres du mouvement « dada » issu de la guerre (Tristan Tzara, Francis Picabia), qui remet en cause toutes les conventions. A ce mouvement succèdent au milieu des années 20, les surréalistes : Louis Aragon, André Breton, Paul Eluard, Max Ernst, Philippe Soupault. Man Ray oublié, elle vit un moment avec un danseur russe (né à Kiev), Vaslav NijinsKi.
Elle se met à peindre et expose dans des galeries parisiennes entre 1927 et 1930. En 1929, Kiki est la maîtresse du journaliste Henri Broca qui crée le magazine : « Paris-Montparnasse », dans lequel il publie « Les souvenirs de Kiki ». Il veut le publier aux Etats-Unis. Mais dans les années 20, on est en plein délire de prohibition et de pudibonderie. Alors, la vie sulfureuse de Kiki, ça ne passe pas. Il est refusé.
La mère de Kiki est malade, Broca aussi. Pour les soigner, il faut de l’argent. Alors elle chante dans les cabarets. Son grand succès, c’est « Nini, peau de chien », écrit par Aristide Bruant. Elle doit tourner un film à New York, dans les studios de « Paramount Pictures ». Mais ce sera un échec. Kiki commence à avoir des problèmes. En 1934 -à 31 ans- elle pèse 80 kg parce qu’elle picole et se nourrit mal. En 1936, elle réussit à descendre à 57 kg, ce qui est plus raisonnable. Elle peut poser pour le peintre norvégien Per Krohg, qui trouve sa « croupe très belle ». Il ne l’avait pas vue quand elle faisait 80 kg !!
De 1935 à 1937, elle chante régulièrement dans les cabarets de Montparnasse, son royaume.
En 1937, elle ouvre son propre établissement « Chez Kiki », dans le VIème arrondissement. Cette fois, c’est son musicien, André Laroque qui est son amant. L’histoire ne dit pas s’il lui jouait du violon… ou du pipeau ? Kiki tape elle-même à la machine à écrire, son second livre « Souvenirs retrouvés » qui sera publié en ….2005 !
De 1939 à 1943, elle chante encore dans les cabarets.
Le 23 mars 1953, elle s’éteint à l’hôpital Laënnec de Paris et elle est inhumée au cimetière de Thiais (actuellement dans le Val-de-Marne).
La misérable Alice Prin est devenue la célèbre Kiki de Montparnasse, en profitant de sa beauté et en multipliant les activités… et les amants.
Dans le calendrier républicain, le 2 octobre est le jour de la pomme de terre (connue en Europe, depuis le XVIème siècle seulement).
LA PREMIÈRE LIGNE FERROVIÈRE BRITANNIQUE
Le 27 septembre 1825 a été inaugurée la première ligne de chemin de fer avec une locomotive à vapeur, entre Stockton et Darlington, sur une distance de 40 km dans le comté de Durham en Angleterre. Elle a été promue par un marchand de laine Edward Pease (1767 – 1858). En fait, cette ligne existait depuis 1821 mais elle était hippomobile.
L’ingénieur George Stephenson (1781 – 1848) propose dès 1812 de tracter les wagons avec une locomotive à vapeur qu’il met au point dès 1817 : « La Fusée ». L’Angleterre étant le 1er producteur mondial de charbon, la desserte des houillères se faisait déjà par un canal (tiré depuis la rive par des chevaux). L’autorisation de créer une ligne est accordée le 19 avril 1821, avec un écartement de 1,37 mètre.
Les difficultés ne manquent pas : franchir les rivières, surmonter les dénivellations de 91 à 198 mètres (c’est une région de collines). Un pont métallique ferroviaire permet de franchir la rivière Wear. Stephenson construisit 3 locomotives. La première circula pour la compagnie S&DR (Stockton&Darlington Railway). Au début, elles étaient peu fiables et lentes (2 heures pour faire 19 km !). Ces trains ne comprenaient qu’un wagon de voyageurs qui étaient à l’air libre. Et encore, seuls des personnalités et des dirigeants de la compagnie y avaient accès. Ces wagons étaient en bois.
Il n’y avait pas d’horaires. Chaque compagnie qui utilisait la voie, faisait ce qu’elle voulait. On imagine sans peine que les conflits étaient fréquents, sans parler des risques de collisions. A partir de 1837, sur les voies ferrées, il n’y aura plus que des locomotives à vapeur, la traction hippomobile ayant complètement disparu. Puis, on a doublé les voies, créé des horaires et un début de signalisation. Le réseau s’allonge, ce qui fait les affaires de S&DR qui connaît un grand succès commercial dans les années 1840.
Grâce au savoir-faire de Stephenson, une nouvelle ligne est construite de Liverpool à Manchester. En 1863, la S&DR est absorbée par Eastern Railway qui fusionne avec London et North Eastern Railway en 1922. Jusqu’au milieu du XXème siècle, le chemin de fer à vapeur règne en maître pour les transports, peu à peu remplacé par la traction diesel, puis à la traction électrique dans la seconde moitié du XXème siècle.
En France, c’est le 30 juin 1827 qu’a été créée la première ligne à vapeur, entre Saint-Etienne et Andrézieux (département de la Loire) sur 23 km, puis en 1829 de Saint-Etienne à Lyon. Le 18 août 1837 a été ouverte la première ligne de voyageurs de Paris à Saint-Germain-en-Laye.
Depuis, le train a vapeur a fait son chemin, sifflant, hurlant, crachant une fumée épaisse qui venait salir le linge que la garde-barrière faisait sécher. Et pourtant, on l’aimait bien ce train à vapeur, chargé de petites histoires parfois tragiques et souvent drôles. Il était bien plus ponctuel que nos trains modernes ultra rapides. Autres temps, autres mœurs. Aujourd’hui, chacun prend sa voiture….ou l’avion qui s’avère moins cher que le train !!
Dans le calendrier républicain, le 27 septembre est le jour de la balsamine, encore appelée ne-me-touchez-pas, car lorsqu’elle est mûre, sa capsule explose et projette ses graines à plusieurs mètres.
KAJA KALLAS
Kaja Kallas est une femme d’Etat estonienne, membre du Parti de la Réforme.
Elle est représentante de l’Union Européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. Elle a été députée et première ministre de son pays, puis députée européenne de 2011 à 2018.
Elle est née le 18 juin 1977. Mariée en 2002, puis divorcée en 2014 et remariée en 2018 avec Arvo Mallik, banquier et investisseur.
En 1995, Kaja Kallas est diplômée de l’enseignement secondaire à Tallinn, capitale de l’Estonie.
Elle entame des études de droit à l’université de Tartu, qui est la principale du pays.
Pour parfaire sa formation, elle passe quelques temps en France et en Finlande.
En 2003, elle est avocate, membre du conseil de surveillance de sociétés estoniennes.
En 2007, elle crée une école de commerce estonienne et elle est élue députée européenne.
En 2019, elle est élue députée aux élections législatives d’Estonie et en 2021, elle est désignée Première ministre le 26 janvier 2021. Après avoir remporté les élections de 2023, elle renonce à son mandat pour entrer dans la diplomatie de l’Union Européenne. Elle ne cherche pas à cumuler les mandats. Exemple à donner à nos élus français !
Au Parlement européen, elle fait partie de l’Alliance des démocrates et libéraux pour l’Europe (à situer au centre droit). Elle est désignée membre de la commission industrie, recherche et énergie. Elle est aussi suppléante de la commission du marché intérieur de la protection des consommateurs.
A partir de 2015, elle travaille sur le marché du numérique unique européen. Dans ce domaine, l’Estonie est très en pointe.
Le 14 avril 2018, Kaja Kallas est élue à la tête du parti de la Réforme d’Estonie. La présidente Kersti Kaljulaid la charge de former un gouvernement. Mais elle ne trouve pas de majorité (on connaît ça), car – selon elle – elle estime que l’ego masculin empêche certains hommes à renoncer à leur poste, et amène le parti du centre à s’allier avec l’extrême droite. En Estonie aussi, ça existe ? Kaja Kallas ne mange pas ce pain-là. Pourtant la présidente la rappelle pour la désigner Première ministre le 26 janvier 2021 . Cette fois, son équipe obtient la confiance de la coalition du Parti démocrate, du Parti de la Réforme, du Parti social-démocrate.
En novembre 2022, elle apporte son soutien à la Pologne et aux Pays baltes, face à l’afflux de migrants du Moyen-Orient que la Biélorussie fait passer allégrement pour déstabiliser ces pays. Elle soutient aussi l’aide militaire à l’Ukraine envahie depuis février 2022. On l’appelle même « La nouvelle dame de fer de l’Europe » et réclame des sanctions contre la Russie. Ce qui a des conséquences sur sa popularité puisque son parti arrive en tête aux législatives du 6 mars 2023. Et le 17 avril, elle doit former un gouvernement avec le Parti de la Réforme et les sociaux-démocrates. Sur le plan social, elle fait adopter le mariage entre personnes du même sexe (mariage pour tous).
Néanmoins, si elle a une large majorité au Parlement, il y a des mécontents qui demandent son départ. Sur le plan international, le 13 février 2024, la Russie la place sur la liste des personnes recherchées pour destruction de monuments en l’honneur de soldats de l’Armée rouge. Un rappel historique est nécessaire. Du temps de l’URSS, sa mère et sa grand-mère, comme bien des Estoniens ont été déportés en Sibérie. Or, avec l’indépendance acquise en 1991, des Estoniens ont voulu se débarrasser de mauvais souvenirs en détruisant des monuments. Il n’est jamais bon d’effacer l’histoire. En outre, l’Estonie, petit pays de 1, 360 millions d’habitants, sur 45 300 km2 (équivalent de la région Midi-Pyrénées), avec environ ¼ de russophones, et 300 km de frontière avec la Russie. Il y a donc des tensions et l’Estonie, comme les autre Etats baltes (et la Moldavie) craignent pour leur sécurité.
Kaja Kallas quitte le gouvernement le 15 juillet 2024, car elle a été pressentie pour être Secrétaire générale de l’OTAN, et surtout, elle est devenue haute représentante de l’UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. Mais comme rien n’est parfait, on lui reproche de ne se soucier que de la question russe et de sa non condamnation implicite d’Israël à propos de Gaza.
Compte tenu de l’histoire et de la géostratégie de l’Estonie, il n’est pas surprenant qu’une femme politique de ce pays se tourne résolument vers l’Union Européenne.
Kaja Kallas a reçu des récompenses :
- Grand-croix de l’Ordre de l’Etoile de Roumanie ;
- Commandeur (existe-t-il un féminin ?) Grand-croix de l’Ordre de l’Etoile polaire de Suède ;
- Ordre du prince Iaroslav le Sage d’Ukraine.
MASHA AMINI
Masha Amini est morte le 16 septembre 2022, à Téhéran. Elle avait 22 ans (née le 21 septembre 1999 à Saqqez, dans le Kurdistan iranien). Elle a fait une hémorragie cérébrale après une arrestation violente par la police des mœurs.
Cette version est évidemment contestée par les autorités iraniennes qui évoquent une fragilité cardiaque ou une maladie du cerveau. En clair, pour le pouvoir, cette pauvre fille n’était pas en bonne santé.
Le problème pour le pouvoir est que lorsque la population a appris ce décès, elle n’a pas cru à la version officielle. Conséquence : de nombreuses manifestations se sont organisées. Comme on pouvait s’y attendre dans un pays comme l’Iran, la répression a été féroce. Menée par le général Salami – je ne l’invente pas – elle a fait des morts par centaines et des arrestations par milliers.
Il faut dire que 2022 est l’année de l’élection présidentielle et l’ambiance est électrique. C’est drôle comme ce genre d’élections excite tout le monde. On en sait quelque chose chez nous en France, en espérant que ça ne conduise pas à la même violence… Raïssi qui est élu, appartient au parti conservateur soutenu par le clergé. Or, le Guide Ali Khamenei est très âgé (86 ans), de santé précaire et est au pouvoir depuis 1985… Ca suscite des ambitions…
Lorsque Masha a été arrêtée, elle était en vacances à Téhéran avec des membres de sa famille. Elle s’apprête à suivre des études universitaires. Le 13 septembre 2022, elle est arrêtée par la police des mœurs. C’est une police religieuse qui existe depuis 2005 (elle n’est donc pas dans le Coran !) et qui se charge de faire respecter les mœurs islamiques, c’est-à-dire celle de l’humeur des « barbus » qui s’arrogent ce pouvoir. Quelles sont donc ces règles islamiques ?
– Port du hidjab : foulard que portent les musulmanes ;
– Pas de vêtements aux couleurs vives (des fois que ça leur ferait mal aux yeux !) ; – Port d’un manteau court.
Ce que veulent ces islamistes, c’est se différencier de ces Occidentaux qu’ils considèrent comme dépravés, avec ces femmes en mini jupes et en décolletés. Ces règles ne concernent que les femmes.
Quant à Masha, on lui reproche des « vêtements inappropriés ». Non, elle n’avait pas une tenue indécente, ce n’était tout simplement pas « appropriée » selon la police des mœurs. Alors, elle est arrêtée et emmenée dans un centre de détention pour recevoir un cours de morale !!! Puis, elle est relâchée….et tombe dans le coma. Elle meurt 3 jours plus tard.
Alors de quoi est morte Masha Amini ? Les photos de l’hôpital montrent qu’elle saignait d’une oreille et qu’elle avait des hématomes sous les yeux, des yeux au beurre noir, quoi. Les photos
d’un scanner montrent une fracture osseuse, une hémorragie, un œdème cérébral.
Le 7 octobre, un rapport médical officiel indique qu’elle serait décédée d’une maladie du cerveau, à la suite d’une opération subie à l’âge de 8 ans. Tiens donc ! On pourrait même imaginer qu’elle aurait donné un violent coup de tête dans la matraque d’un policier….Pauvre matraque !
La famille, pas convaincue, porte plainte contre les policiers. C’est plutôt vain puisque ce sont les policiers qui reçoivent la plainte ! A la suite de cela, le père de Masha Amini reçoit des menaces de mort de la part des autorités.
Un journaliste kurde a enquêté et il affirme que le régime ment sur les causes du décès. L’arrestation officielle de la jeune Masha dit : « elle faisait de la propagande contre le régime islamique ». Ce qui lui valait 2 ans de prison + une forte amende + 5 ans d’interdiction de quitter le territoire.
Le 5 juillet 2023, le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, estime que la famille a droit à la vérité et que la justice n’a pas été respectée : A vrai dire, il fait de sacrées découvertes à propos de l’Iran !
Malgré la répression, il y a eu des réactions contre le régime dans les semaines qui ont suivi, au Kurdistan bien sûr, mais aussi à Téhéran. Des projectiles ont été lancés contre le portrait du Guide Ali Khamenei. Le 19 septembre 2022, partis politiques et syndicats appellent à la grève. Là, en Iran, faire la grève, au moins pour les femmes, ne signifie pas s’arrêter de travailler. Cela consiste à enlever le hidjab et à se couper les cheveux. Et ces dangereuses contestataires ont osé crier: « A mort le dictateur ! ». Résultat : le 30 septembre, la police a tiré à balles réelles faisant plus de 60 morts….
Et voilà que des hommes se mettent à soutenir la cause des femmes. Un jeune chanteur Shervin Hajipour avait écrit et publié une chanson : « Baraye » (=à cause de..) ; il est arrêté le 29 septembre, 2 jours après la publication de la chanson. On ne peut pas reprocher à la justice de traîner ! Il sera libéré, mais sous caution.
Le 11 octobre 2022, la ville de Paris accorde, à titre posthume, la citoyenneté d’honneur à Masha Amini. Le 17 mai 2023, la « Foundation for Defense Démocraties » estime qu’il y aurait eu 360 manifestations et rassemblements en Iran, dans le seul mois d’avril. Au total, il y aurait eu 556 morts dans ces manifestations dont 73 enfants.
En octobre 2023, le prix Sakharov (pour la liberté de l’esprit, fondé par Andrei Sakharov, créé
en 1988) est décerné à Masha Amini. Son nom est associé au mouvement « Femme, Vie,
liberté », qui est le slogan politique des Kurdes.
Mais le pouvoir iranien ne se laisse pas impressionner et durcit les règles pour le port du hidjab. Et si, en 2023, il redoute des manifestations pour l’anniversaire de la mort de Masha, par précaution, il applique une répression préventive..
On souhaite à ces femmes courageuses de parvenir à se libérer de ce carcan islamiste, qui semble être une interprétation particulière du Coran.
Dans le calendrier républicain, le 16 septembre est le jour du panier.
SICCO MANSHOLT
Sicco Mansholt est un homme politique néerlandais, qui a vécu de 1908 à 1995. Il appartenait au parti travailliste. Aux Pays-Bas, il a été ministre de l’agriculture, de la pêche et de l’approvisionnement alimentaire du 7 janvier 1958 au 22 mars 1972.
Sur le plan européen, il a été président de la Commission européenne (c’est le 1er ministre de l’Europe) du 22 mars 1972 au 5 février 1973. A cette époque, l’U.E. encore appelée C.E.E. comptait 9 membres avec les adhésions récentes (1er janvier 1973) du Royaume-Uni, de l’Eire et du Danemark.
Déjà en 1972, Sicco Mansholt, commissaire européen chargé de l’agriculture, préconise une politique écologiste, basée sur la décroissance. Cette prise de position, on l’imagine, a fait grand bruit. Il avait même publié « Halte à la croissance »! Dans le même temps, il prône un revenu minimum garanti à l’échelle européenne.
Ses opinions ont été très critiquées par la France en particulier : le Président Pompidou, puis Raymond Barre (vice-président de la Commission européenne du 7 juillet 1967 au 5 janvier 1973) et aussi par Georges Marchais, secrétaire général du Parti communiste français. Il faut considérer aussi que la France est la grande puissance agricole de la CEE, on n’avait pas envie de partager. Au diable la solidarité et on sait que les riches n’aiment pas partager.
Mais coup de théâtre : en 1974, Sicco Mansholt vire sa cuti, sans doute par des pressions politiques. Fini sa théorie sur la décroissance. Il reconnaît avoir contribué à la destruction de l’agriculture paysanne et favorisé l’agriculture industrielle.
Néanmoins, il était un Européen convaincu et après avoir reconnu s’être fourvoyé, il a reçu de nombreuses récompenses, dont entre autres :
– Grand-croix du Mérite de la République Fédérale allemande ;
– Grand-croix de l’ordre du roi Léopold de Belgique ;
– Grand-croix de la Légion d’honneur française.
Sicco Mansholt s’est éteint le 9 juin 1995 aux Pays-Bas.
ZOÏA KOSMODEMINASKAÏA
Zoia Kosmodeminaskaia est née le 13 septembre 1923 dans le village d’Ossino-Gaï, oblast de Tambov. Elle a été pendue à 18 ans par les Nazis pour acte de résistance. C’est une martyr de la Grande Guerre patriotique.
Son patronyme provient de saints orthodoxes. Son grand-père avait été assassiné en 1918 par des militants athées. Son père était bibliothécaire et sa mère, institutrice. En 1921, la famille part d’elle-même en Sibérie par crainte de persécutions: on est en pleine guerre civile. Elle revient à Moscou en 1930.
Zoia Kosmodemianskaia entre au komsomol (jeunesses communistes) en 1931. En octobre 1941, elle est lycéenne à Moscou et volontaire pour faire partie d’une unité de Partisans qui se livrent à des actes de résistance. Ce qui la motive, c’est son idole Tatiana Solomakha, femme soldat de l’Armée Rouge, torturée et tuée pendant la guerre civile.
Zoia Kosmodemianskaia est affectée sur le front de l’ouest. Avec d’autres Partisans, elle traverse la ligne de front et se retrouve en territoire occupé. Elle a pour mission d’incendier les maisons du village de Petruchtchevo où sont installés des Allemands. Ce qu’elle fait le 27 novembre 1941 avec deux autres Partisans. Après leur forfait, tous trois devaient se retrouver mais le rendez-vous est manqué et Zoia se retrouve seule. Elle retourne à Petruchtchevo pour incendier 3 maisons. Mais là, la surprise ne joue plus : elle est arrêtée. Peut-être qu’elle a été dénoncée ? En tout cas, les Nazis la déshabillent, l’interrogent, la frappent de 200 coups de fouet, elle ne parle toujours pas et son corps est brûlé.
Zoia est emmenée au village où elle est présentée comme « brûleuse de maisons ». Le 29 novembre, elle est pendue, sans autre forme de procès. Mais avant de mourir, elle jette à la face de ses bourreaux : «Vous ne pourrez pas pendre 170 millions de Russes ».
Dans leur folie meurtrière, les Nazis la laissent pendue au gibet pendant plusieurs semaines. Elle est alors jetée dans la neige et lardée de coups de baïonnettes, fureur sauvage et purement gratuite, vexés qu’ils furent d’être ainsi défiés par une jeune femme. Elle avait 18 ans ! Elle est inhumée au cimetière de Novodievitchi de Moscou, équivalent de notre cimetière du « Père Lachaise ».
Quand Staline apprend cette histoire par la « Pravda » du 27 janvier 1942, il déclare : « Voici l’héroïne du peuple ! ». En février 1942, elle reçoit, à titre posthume, « L’Ordre des Héros de l’Union Soviétique ».
En 1946, son ancienne école envoie un sac de terre de sa tombe, qui sera déposé dans la crypte de la Sorbonne à Paris. Son buste a été placé devant une école de Donetsk (Ukraine) et un autre devant une école de Dresde (Allemagne), ainsi qu’une statue à Krassiliv (Ukraine). Des écrivains et des artistes lui ont dédié des œuvres.
En 1944, un film « Zoia» raconte sa vie. Des kolkhozes et des Komsomols ont porté son nom. Un monument en l’honneur de Zoia, a été édifié à Petruchtchevo. Un autre monument a été placé dans la station de métro « Partizanskaia » de Moscou. Enfin, son nom est au sommet du point culminant du Kazakhstan, à 4 100 mètres d’altitude. On trouve encore le nom Zoia Kosmodemianskaia pour une planète découverte en 1968.
Sa jeunesse ne l’a pas empêché d’accomplir des actes héroïques et audacieux. N’en déplaise aux masculinistes.
Dans le calendrier républicain, le 9 septembre est le jour de la verge d’or. Ce n’est pas du tout ce que certains pourraient croire. Il s’agit d’une variété d’aster dont les fleurs sont jaunes. Cette plante, qui a tendance à être invasive, a des vertus médicinales, notamment pour les affections rénales.
REBECCA CHEPTEGÏ
Rebecca Cheptegei est décédée le 5 septembre 2024 à l’hôpital à Eldoret au Kenya près de la frontière ougandaise. En fait, elle a été assassinée par son ex-compagnon. Née le 22 février
1991, elle était la 2ème d’une fratrie de 13 enfants. Championne du monde en 2022 de course en montagne en montée et en descente, elle avait un palmarès long comme ses jambes de coureuse. Elle a participé et parfois remporté des médailles dans de nombreuses compétitions internationales : à Rio de Janeiro, en Pologne, des marathons en Espagne, à Padoue en Italie, à Abou Dhabi (Emirats Arabes Unis), à Budapest, aux Jeux Olympiques de Paris en 2024, etc…etc…
Mais le 1er septembre 2024, quelques jours après les Jeux Olympiques de Paris, Rebecca est
aspergée d’essence et enflammée par son ex, Dickson Ndiama Marangach, devant ses enfants. Elle est brûlée à 80%, et aussitôt hospitalisée à Eldoret. Elle meurt 4 jours plus tard. D’ailleurs, son compagnon, lui aussi brûlé, meurt le 10 septembre. On imagine ce qu’ont dû être les souffrances de cette jeune athlète.
Dès le 6 septembre, la maire de Paris, Anne Hidalgo annonce que le nom de Rebecca Cheptegei sera donné à un établissement sportif de la ville. Pantin (Seine-Saint-Denis) fera de même pour sa halle sportive.
Le 8 septembre, son nom a été très applaudi lors du marathon paralympique féminin, organisé pour lui rendre hommage.
Motif de cet assassinat ? Il semblerait que ce soit une sombre histoire familiale, pour une maison achetée au profit de sa fille. Rien n’est bien clair. Quoi qu’il en soit, une jeune femme de 33 ans, est morte dans des conditions atroces que rien ne justifiait, surtout pas le masculinisme de son ex.
Dans le calendrier républicain, le 5 septembre est le jour de la tagette : plante ornementale et médicinale, dont il existe une trentaine de variétés.
LE PARC NATIONAL DES CEVENNES
Le 2 septembre 1970 a été créé le Parc national des Cévennes.
Il occupe une superficie de 93 500 ha et se situe au sud-est du Massif Central. Il culmine à 1 700 mètres au mont Lozère et s’étend sur 4 départements : Ardèche, Aveyron, Gard, Lozère, à cheval sur 2 régions : Occitanie et Auvergne-Rhône-Alpes. Son siège se trouve dans la ville de Florac, petite sous-préfecture de Lozère de seulement 2 000 habitants.
Le parc national des Cévennes est le seul parc de moyenne montagne. Il est habité et exploité par des résidents permanents qui pratiquent l’agriculture, la chasse, la pêche comme dans le parc national des forêts qui se situe sur la Côte-d’Or et la Haute-Marne.
Ce parc est classé comme une zone protégée par la Commission mondiale des aires protégées. En 1985, il est retenu comme réserve de biosphère par l’UNESCO. Il est divisé en 2 zones : le cœur et l’aire optimale d’adhésion. Il englobe 152 communes pour 71 000 habitants permanents dont la principale activité est l’agriculture. Géologiquement, ce parc s’étend sur les Grands Causses (plateaux calcaires entre 700 et 1 200 mètres d’altitude), coupés de vallées schisteuses et des monts granitiques.
Le Parc comprend plusieurs entités géographiques :
– Le massif granitique de l’Aigoual ;
– Le causse calcaire de Méjean et son relief karstique ;
– Les gorges du Tarn et de la Jonte (affluent du Tarn) ;
– Le Mont Lozère et les vallées cévenoles schisteuses.
Les altitudes vont de 117 mètres à Anduze (Gard) à 1 700 mètres au Mont Aigoual. Le Tarn et la Jonte sont bordés de falaises verticales. Dans les parties les plus basses, le climat est méditerranéen : étés chauds et secs, hivers doux, intersaisons humides surtout l’automne (on parle d’épisode cévenol avec des pluies qui peuvent être diluviennes comme en 2002). Là, la végétation est faite de maquis et de forêts (chênes, châtaigniers). En altitude, on atteint l’étage subalpin avec des étés plus frais et des hivers rigoureux. La végétation est principalement composée de forêts.
Le Parc national des Cévennes est partagé entre deux bassins versants. D’un côté, la Céze, l’Hérault, le Gardon, le Gard, l’Ardèche sont tournés vers la Méditerranée via le Rhône tandis que le Tarn, la Jonte, la Dourbie se dirigent vers l’Atlantique via la Garonne. En montant en altitude, le climat devient subalpin (étés frais, hivers neigeux où s’est installée une forêt de feuillus (chênes, châtaigniers).
La loi Grenelle de 2010 précise que la chasse est maintenue mais réglementée. Pour avoir le droit de chasser, il faut adhérer à l’association cynégétique de l’établissement public du Parc. Favoriser l’agriculture est une priorité pour préserver les paysages inscrits au patrimoine mondial, ainsi que la biodiversité. Le Parc national des Cévennes rassemble à lui seul, 50% de la flore et de la faune françaises. L’agriculture est encouragée à pratiquer des méthodes respectueuses de l’environnement.
Des subventions sont accordées de la part de l’Europe, de l’Etat, de l’établissement public du Parc pour utiliser des variétés adaptées localement. Le but est de limiter l’érosion et la pollution, d’utiliser judicieusement l’eau. L’établissement public aide les agriculteurs à valoriser leurs produits, en particulier en protégeant l’abeille domestique pour la pollinisation avec l’appui d’apiculteurs.
En 2010, un bilan des 40 premières années a été fait : maintien d’une agriculture diversifiée, mais c’est encore fragile. On prévoit le développement d’un tourisme durable afin de définir une marque « Esprit Parc national ». Le Parc a créé plus de 3 000 emplois permanents. Les activités touristiques orientent les visiteurs vers :
– Le fameux chemin de Stevenson, avec son âne, en 1878. C’est devenu le G.R.70, du monastier/Gazeille (Haute-Loire) à Saint-Jean-du-Gard (Gard), sur une distance de 272 km ;
– Le belvédère des vautours créé en 1996, à Saint-Pierre-des-Tripiers (Lozère). Les vautours sont considérés comme les « éboueurs de la nature »;
– La sylviculture, car la forêt occupe 70% du Parc, avec une grande biodiversité ; – Le sous-sol du Causse permet la spéléologie ;
– Depuis le 13 août 2018, le Parc a le titre de « réserve de ciel étoilé », le second après celui du Pic du Midi de Bigorre (2013).
Entre 1967 et 1970, ont été signés les « contrats Mazenot » (du nom du sous-préfet de Florac) pour rémunérer les agriculteurs qui s’engagent à respecter l’Environnement. Mais l’actuelle ministre, Agnès Pannier-Runacher, a-t-elle beaucoup de moyens ? Est-elle écoutée ? car l’environnement n’est pas dans l’air du temps en 2025…. Quoi qu’il en soit, le Parc est géré par un Conseil d’administration de 52 membres :
– 7 personnalités de l’Etat ;
– 23 représentants des collectivités territoriales (conseillers régionaux, départementaux, maires) ;
– 21 personnes qualifiées (professionnels de différents secteurs) ;
– 1 représentant des personnels (apparemment, ils n’ont pas trop droit à la parole !).
Le Parc national des Cévennes participe à des jumelages avec d’autres Parcs nationaux :
– Jumelage avec le Parc national du fjord de Saguenay au Québec, depuis le 5 juillet 1984 ;
– Réserve de biosphère de Montseny en Catalogne, depuis le 25 juillet 1987.
Dans les Cévennes, il a été constaté que si des espèces disparaissent, d’autres s’installent. Les sangliers sont en augmentation, la loutre, les vautours et le loup sont revenus. L’élevage de brebis laitières atteint 400 000 et alimente la fabrique de roquefort à Roquefort/Soulzon (Aveyron) de réputation mondiale, malgré seulement 500 habitants. Il y en a aussi 14 000 pour la viande.
Au total, si les sites touristiques sont nombreux, l’histoire n’est pas oubliée. Outre la légende de la bête du Gévaudan, il y a la réalité. Les Cévennes ont été un fief du protestantisme, lorsque Louis XIV a aboli l’Edit de Nantes le 18 octobre 1885. Beaucoup de protestants victimes des « dragonnades » se sont réfugiés dans cette région et y ont laissé leur empreinte.
La France (métropole et Outre-Mer) a déterminé 11 Parcs nationaux et 59 Parcs régionaux. Dans tous ces parcs, la préoccupation principale est la protection du patrimoine. Formidable. Seulement voilà, une fois sortis de ces parcs, on n’est plus tenus de respecter ces idéaux. Parfois, il en est même qui vont jusqu’à les combattre. Pourtant, rêvons un peu. Et si ces généreux principes étaient généralisés sur tout le territoire ?
J’en connais qui pousseront les hauts cris en estimant que ça coûterait bien cher. Mais n’est-il pas coûteux de
subventionner une agriculture qui détruit le vivant, à l’aide de matériel hors de prix qui endette les agriculteurs ? N’est-il pas coûteux de dépenser dans les pesticides, les herbicides qui impactent notre santé ? Dans un pays comme la France qui dispose d’une grande diversité de sols, de climats, de reliefs, n’est-on pas capable de diversifier les productions, au lieu de se lancer dans de vastes monocultures qui épuisent les sols, et ne nous nourrissent pas forcément, comme les champs de sapins de Noël. Par exemple….Mais je rêve….
Dans le calendrier républicain le 2 septembre est le jour du citron.
FRANCO MARIA MALFATTI
Franco Maria Malfatti est un homme politique italien, du parti de la démocratie chrétienne. Il est né à Rome en 1927. Il a été député de Perugia (Ombrie) et plusieurs fois ministre. C’est un journaliste qui est entré pour la première fois au gouvernement en 1969 comme ministre de la Participation de l’Etat.
Franco Maria Malfatti a été le 1er président de la Commission européenne, en quelque sorte le Premier Ministre de la CEE. Cette Commission rassemble les 27 chefs d’Etat ou de gouvernements des membres de l’UE (la CEE compte 9 membres dans les années 70, avec les adhésions du Danemark, du Royaume-Uni et de l’Eire).
Franco Maria Malfatti a reçu la médaille du Mérite de la Culture et de l’Art. Il a été Chevalier Grand Croix de l’ordre du Mérite de la République italienne.
C’est à Rome qu’il meurt le 10 décembre 1991.
HONORÉ D'ESTIENNE D'ORVES
Le 29 août 1941, Honoré D’Estienne d’Orves a été exécuté au Mont Valérien. Il était officier de marine et un héros de la 2de guerre mondiale. Il était à Verrières-le-Buisson (actuellement dans l’Essonne) le 5 juin 1901.
Sa famille, du côté maternel, est cousine des Vilmorin, le célèbre botaniste et grainetier. Du côté paternel, c’est une vieille famille d’origine royaliste, légitimiste (pour les descendants d’Hugues Capet). Une famille très traditionnelle donc.
Honoré d’Estienne d’Orves entre en octobre 1910 au lycée Louis de Gonzague (certains lycées avaient des sections en primaire, on parlait de petit lycée). C’était un lycée catholique situé dans le XVIème arrondissement. En 1919, il est dans un vrai lycée : Louis-le-Grand (Vème arrondissement). Après des études supérieures à Polytechnique, il en sort en 1923, pour être élève officier à l’Ecole navale. En 1925, il est enseigne de vaisseau de 2ème classe (équivalent de sous-lieutenant) et embarque sur le croiseur « Jules Michelet » dans les forces navales en Extrême-Orient.
En 1929, il épouse Eliane de Lorgeril, issue d’une famille de la noblesse. Ils auront 5 enfants. On reste dans la tradition. Sans rapport avec sa situation matrimoniale, en 1930, il est promu lieutenant de vaisseau (équivalent de capitaine). En 1939, il est sur le croiseur « Duquesne ».
1940 : la France vaincue, envahie et la politique de collaboration, ce que n’accepte pas Honoré d’Estienne d’Orves. En août il décide de regagner Londres, n’y arrive qu’en fin septembre 1940, après un long périple qui lui a fait contourner l’Afrique. Là, il se présente à De Gaulle qui l’affecte aux forces navales françaises libres.
Le 21 décembre 1940, il est envoyé en mission en France. Il débarque à Plogoff, petit port du Finistère. De là, il se rend à Nantes et organise un réseau secret du nom de code « Nemrod », avec Alfred Gaessler. Mais voilà, il est trahi par le fameux Gaessler qui s’avérait finalement être un agent double. On ne pouvait faire confiance à personne… Évidemment, Nemrod est démantelé.
Le 22 janvier 1941, d’Estienne d’Orves est arrêté avec 23 autres membres du réseau. Bravo Gaessler !! Tous sont envoyés à Berlin, puis retour à Paris où ils sont condamnés à mort par la Cour martiale allemande. Mais l’amiral pétainiste Darlan s’émeut qu’on condamne à mort un officier, il demande sa grâce. Les Allemands pensent le faire parler pour avoir des informations sur la flotte britannique.
Le 22 juin 1941, c’est « Barbarossa » : invasion de l’URSS par les nazis malgré le pacte germano-soviétique du 23 août 1939. Jusque-là, les communistes français ne bougeaient pas. Désormais, ils se lâchent et l’un d’eux assassine un officier de la Kriegsmarine, à l’entrée du métro Barbès. Les Allemands réagissent en décidant que les prisonniers sont des otages. Ils en exécutent 100 d’entre eux dont d’Estienne d’Orves le 29 août au Mont-Valérien. Sur son journal, il avait exprimé sa foi catholique. Ses enfants ont été aidés par des anciens de Polytechnique.
Il n’a pas été oublié par la postérité. A titre posthume, il lui a été décerné la Légion d’honneur et fait Compagnon de la Libération le 30 octobre 1944. Son nom a été donné au hall de Polytechnique, ainsi qu’à une station de métro. Un aviso (petit navire de guerre) s’appelle d’Estienne d’Orves ainsi qu’un patrouilleur hauturier. Un groupe de scouts et guides (scouts au féminin) de France ont pris son nom. Deux bateaux de la SNSM (Société Nationale des Sauveteurs en Mer), l’un en Méditerranée, l’autre dans l’Atlantique, se dénomment d’Estienne d’Orves. Louis Aragon (1897- 1982) lui a dédié son poème « La rose et le réséda ». On ne compte plus les villes qui ont une place, une rue, une avenue à son nom. En 1957, les PTT (aujourd’hui La Poste) ont émis un timbre à son effigie.
Honoré d’Estienne d’Orves, aux origines très traditionnelles, pour ne pas dire traditionalistes, a été un grand résistant, victime de la confiance qu’il avait accordée à un (faux) compagnon de route.
Dans le calendrier républicain, le 29 août est le jour du fenouil.
TASLIMA NASREEN
Le 25 août 1962 nait Taslima Nasreen à Mymensingh (Bangladesh). C’est une femme de lettres qui se bat pour l’émancipation des femmes et contre l’obscurantisme religieux au Bangladesh.
Sa famille est d’origine paysanne. Adolescente, elle écrit déjà des
poésies et publie même dans un magazine littéraire « Lumières des ténèbres » entre 1978 et 1983. Poursuivant des études, en 1984, elle obtient la qualification de docteure en gynécologie. Elle exerce alors dans une clinique du Planning familial à Mymensingh, puis à Dhaka (capitale du Bengladesh) à partir de 1990.
Son premier recueil de poésies, écrit en 1986, connaît un certain succès. Puis elle se met à écrire des romans. Mais dès le 27 septembre 1983, elle a été l’objet d’une fatwa (jugement édicté par la loi islamique : sa tête est mise à prix pour avoir critiqué l’islam dans son pays, à la suite de la parution de son livre « Lajja » qui dénonce l’oppression sur une famille hindoue. On ne rigole pas avec ça ! D’autant que le livre a inspiré un film qui sortira en 2001.
Taslima Nasreen est obligée de s’exiler en 1995. Elle se retrouve en Europe : Berlin, Stockholm, et finit à New York (Trump n’est pas encore là). Elle avait demandé la nationalité indienne qui lui a été refusée. Les musulmans n’ont jamais été bien vus en Inde. Il lui arrive quand même d’y faire des conférences. A la suite de l’une d’elles, un groupe islamiste offre 800 000 roupies (environ 7 800 euros) pour sa décapitation ! Étant à Calcutta, sa présence provoque des incidents violents, on est obligé de l’exfiltrer pour ses propos considérés blasphématoires. Et il est interdit de publier sa simple biographie. Il y a intérêt à faire attention à ce qu’on dit !
En face d’elle, on ne fait guère preuve de courage. La jugeant encombrante, on ne lui délivre plus de visas temporaires. En 2008 , elle reçoit le prix « Simone de Beauvoir, qui vient juste d’être créé pour défendre la liberté des femmes, après avoir rencontré la jeune association « Ni putes, ni soumises ». C’est à ce moment-là que le 7 juillet 2008, elle est faite « citoyenne d’honneur de la ville de Paris ».
Le 2 octobre 2010, elle est scandalisée que sa publication dans le « Kanadda daily (organe ougandais) soit suivie d’émeutes, faisant 2 morts. Elle en est amenée à nier être l’auteure de ces écrits !! Le 17 août 2022, lorsque Salman Rushdie est durement agressé, elle écrit dans le journal « Le Monde » qu’elle n’est en sécurité nulle part. C’est pire après la mort de Masha Amini en septembre 2022.
Le 30 avril 2010, dans le « Figaro Madame », elle énonce ses trois grandes idées :
– Les récits religieux sont oppressifs à l’égard des femmes ;
– La misogynie des fondamentalistes ;
– Les conflits idéologiques sont surtout entre fondamentalisme et laïcité. Taslima Nasreen doit faire preuve de courage et de sang-froid face à ces menaces permanentes. Pourtant, chacun et chacune devrait se battre à ses côtés pour défendre les libertés des femmes, donc de tout le monde.
Elle a publié plus de 130 livres : poésies, essais, romans, nouvelles, traduits dans plus de 20 langues. Certaines poésies ont été mises en musique, rassemblées dans « The cry ». En 2011, elle a été faite docteure « honoris causa » de l’université catholique de Louvain (Belgique).
Dans le calendrier républicain, le 25 août est le jour de l’apocyn, variété d’asclépiade, encore appelée herbe à ouate ou herbe à perruches.
LOUISE WEISS
Louise Weiss était une femme de lettres, féministe, femme politique. Entre 1979 et 1989, elle a été la doyenne du Parlement européen, élu pour la première fois au suffrage universel.
Née en 1893, d’une famille aux racines alsaciennes, elle obtient dès l’âge de 21 ans, l’agrégation de lettres féminine (jusqu’au début des années 60, il existait une agrégation masculine et une agrégation féminine). À 23 ans, elle est diplômée de l’université d’Oxford, une référence ! Louise s’intéresse plus particulièrement aux relations internationales.
Mais voilà qu’en 1914, c’est la guerre. On n’a guère besoin de littéraires : elle s’engage comme infirmière. Après 1918, elle revient à l’écriture et s’engage en politique. Elle écrit dans « Radical » (quotidien politique et littéraire) et dans « L’Europe nouvelle » (hebdomadaire qui aborde des sujets économiques). Dans ces deux organes de presse, elle y développe des idées pacifistes. Puis de « L’Europe nouvelle », elle passe au « Petit Parisien » qui l’envoie faire des reportages dans les pays de l’Europe de l’est, toujours avec des convictions pacifistes. Mais pour écrire, elle s’entoure de personnalités, telles que :
– Louis Joxe (1909-1991), député et ministre ;
– Henri de Jouvenel (1876-1935) journaliste et diplomate,
– Wladimir d’Ormesson (1888-1973) journaliste et écrivain ;
– Aristide Briand (1862- 1932): député puis ministre, pacifiste ;
– Léon Blum (1872-1950) : Président du Conseil du Front populaire de 1936 ; – Paul Valéry (1871-1945): écrivain.
Elle savait s’entourer pour la coacher comme on dirait aujourd’hui. Seulement en janvier 1933, quand Hitler arrive au pouvoir, des dissensions se font jour dans « L’Europe nouvelle » qu’elle quitte. Son dernier article date du 3 février 1933.
Au printemps 1936, lorsque la gauche arrive au pouvoir, Louise Weiss est sollicitée pour un poste ministériel. Elle refuse arguant qu’elle préfèrerait être élue que nommée. Elle n’en est pas moins très active en participant ou organisant des manifestations qui se veulent pacifistes :
– Au stade Yves du Manoir, lors de la finale de la coupe de France de football : des femmes brandissent des banderoles féministes ;
– Distribution de myosotis aux députés. Or le myosotis signifie : « Ne m’oubliez pas ! » (« Forget me not » en anglais) ;
– Offre de chaussettes aux sénateurs pour leur signifier qu’il y a toujours une femme pour les raccommoder ;
– Occupation du champ de courses de Longchamp avec des slogans féministes ; – Des femmes s’enchaînent place Royale (VIIIème arrondissement).
Le 31 décembre 1938, elle crée un comité d’accueil pour les réfugiés espagnols en guerre civile. Lorsque la France est envahie en mai 1940, Louise Weiss propose d’utiliser des femmes pour la défense passive. Elle ne rejoint pas de Gaulle parti à Londres en juin, mais elle reste une opposante résolue à Pétain. Elle va aux Etats-Unis récupérer des médicaments pour les plus démunis.
Après la guerre, elle fait de nombreux voyages à l’étranger. Elle sera parmi les journalistes qui couvrent le procès de Nuremberg (30 novembre 1945-1eroctobre 1946).
En 1971, Louise Weiss crée une fondation pour contribuer à faire avancer la paix. Parmi les lauréats, on trouve : Helmut Schmidt (chancelier allemand), Anouar el Sadate (Président de la République d’Egypte), l’ONG « Médecins sans Frontières ».
Fidèle à ses convictions européennes, elle se présente aux élections européennes en 1979 qui, pour la première fois, se font au suffrage universel. Elle est élue et se trouve être la doyenne à 76 ans. C’est à elle de faire le discours d’ouverture. Pour lui répondre, un député se lance dans un laïus soporifique. Elle lui envoie un « Silence, jeune homme ! » qui lui clôt le bec.
Louise Weiss s’éteint le 26 mai 1983, à 90 ans. Sa sépulture est à Magny-les-Hameaux (Yvelines). Son nom a été donné à une allée du château de Rohan, sur la commune de Saverne (Bas-Rhin). Sa correspondance a été conservée à la Bibliothèque nationale de Paris, ainsi qu’à la bibliothèque universitaire de Strasbourg. La Poste a émis un timbre à son effigie le 15 mai 1993.
Louise Weiss a marqué son temps par son parcours politique appuyé sur le pacifisme et la défense de la cause des femmes.
SUZANNE COINTE
Suzanne Cointe a été guillotinée le 20 août 1943 à la prison de Plötzensee de Berlin. Elle était née à Paris le 27 juillet 1905d’un père , commandant de l’Ecole Polytechnique, muté à Versailles en 1909 et ensuite à Besançon d’une mère d’origine polonaise.
Suzanne a suivi des cours dans un pensionnat. Lorsque son père meurt en 1917, la famille s’installe à Paris. Au début des années 1920, elle est à l’École Normale de musique. Son frère François a été dirigeant d’une entreprise de chemin de fer. Son autre frère, Jacques, était Saint-Cyrien. Elle a fait une carrière de pianiste, de musicienne. C’était aussi une militante communiste dans le cadre de « l’Orchestre rouge » qui est un ensemble de réseaux d’espionnage en contact avec l’URSS. Elle a donné des cours de musique et a aussi enseigné l’allemand et le français.
En 1928, elle est la compagne de Paul Dreyfus, cinéaste connu sous le nom de Jean-Paul Le Chanois (1909-1985). Le couple fréquente des artistes, comme le poète Jacques Prévert (1900 -1977). Suzanne s’intéresse aussi à la politique, notamment au communisme, comme on pourrait s’en douter. Elle est membre de l’AEAR (Association des Ecrivains et Artistes Révolutionnaires). Elle participe à une chorale qui se réclame du réalisme soviétique. Par exemple, elle a chanté « L’appel au Kommintern » de Peters Rosset, musicien et compositeur, « le chant des chômeurs » du compositeur Hans Hessler.
Comme Suzanne servait de boîte aux lettres à des organisations communistes, elle était surveillée par la police. Le 15 décembre 1934, elle peut déclarer qu’il y a une musique écrite pour les prolétaires, inspirée par leurs vies, leurs luttes. En juin 1935, l’AEAR devient la FMP (Fédération Musicale Populaire) dont elle est la secrétaire. En octobre 1936 est créée la Chorale populaire de Paris, à laquelle elle appartient. Ses contemporains ont noté son aspect froid, mais qu’elle était très proche des musiciens.
Suzanne vivait de ses cours de musique, en faisant la promotion de la Chorale populaire de Paris. C’est elle qui dirige cette chorale pour le film de Jean Renoir (1894-1979) : « La vie est à nous », sorti en 1936.
Solidaire des Républicains espagnols en lutte contre Franco, elle reçoit des réfugiés dans sa maison de St-Germain-en-Laye. Mais le 6 novembre 1938, elle démissionne de son poste de secrétaire à cause de dissensions à l’intérieur du parti communiste dont dépend la FMP.
A l’arrivée des Allemands en mai 1940, elle se réfugie à Bressuire (Deux-Sèvres), puis revient à Paris au cours de l’été. Les Allemands réquisitionnent les locaux de la Maison de la culture qu’ils détruisent. Mais dans leur délire, ils oublient de détruire les partitions. Néanmoins, des Juifs appartenant à la chorale sont déportés. Elle est entrée dans la clandestinité et doit se
trouver une planque. Ce sera la société SIMEX où elle entre en 1941. Il s’agit d’une entreprise qui fabrique du matériel industriel que se procure l’occupant. Elle garde son aspect austère pour bien jouer le rôle de fondée de pouvoir. Elle le joue d’autant mieux qu’elle parle allemand.
En juillet 1942, l’Orchestre rouge est chargé de centraliser les réseaux soviétiques d’Europe. L’ennemi retrouve la piste de SIMEX à Paris. Suzanne est alertée. Le 12 novembre 1942, des agents de SIMEX sont arrêtés à Marseille. Elle fait disparaître les documents compromettants, avant d’être arrêtée et conduite au QG de la Gestapo. Interrogée, elle reste muette. On la met au secret à Fresne et est condamnée à mort, avec d’autres membres de SIMEX. Le 17 avril 1943, elle arrive à Berlin, tandis que d’autres, dont 7 femmes, sont envoyés dans des camps de concentration.
Le 19 août 1943, elle est transportée à Plötzensee (prison de Berlin), est guillotinée le lendemain après avoir été tondue.
Femme courageuse et passionnée, Suzanne Cointe a payé de sa vie son militantisme communiste.
Dans le calendrier républicain, le 20 août est le jour de la vesse de loup, ou pet de loup (sorte de champignon qu’on trouve dans les prés ou dans les bois).
NAYIB BUKELE
Nayib Bukele est président de la République de San Salvador depuis le 1er juin 2019. Le San Salvador est un petit pays (21 000 km2, à peu près deux fois le département de la Gironde) d’Amérique centrale. Là vivent 6,3 millions d’habitants, soit une densité de 300 habitants/km2(France : 107 hab/km2). C’est un pays au climat tropical, bordé par l’océan Pacifique au sud. Sa capitale est El Salvador qui compte 330 000 habitants.
Hayib Bukele né en 1981, est le fils d’un homme d’affaires palestinien (converti à l’islam, il a même été imam) et d’une mère chrétienne. Il se veut libéral sur le plan économique et conservateur sur le plan social. Dans ce pays régnait la violence créée par les gangs. Durant sa présidence très autoritaire, les crimes ont considérablement diminué. Ce qui lui vaut une grande popularité. Les gens peuvent désormais sortir à peu près tranquilles dans la rue.
Il fait de la politique depuis 2015. C’est là qu’il a été élu maire de San Salvador. Mais en 2017, il est exclu du parti pour avoir agressé une conseillère municipale (il lui a jeté une pomme au visage). La galanterie ne fait pas partie de son programme politique.
C’est vite oublié puisqu’en 2019, il est candidat de la Grande Alliance pour l’Unité Nationale (ce qui donne GANA en espagnol). Il se déclare candidat « anti système ». On sait ce que ça veut dire. Trump se dit aussi anti système ! Il axe sa propagande sur la lutte contre la criminalité et contre la pauvreté. Vaste programme ! Le 3 février 2019, il est élu au 1er tour avec 53% des voix. Le 1er juin, c’est la prise de pouvoir. Il charge l’armée d’assurer la sécurité dans les quartiers où sévissent les gangs.
Dans la foulée, il s’en prend aux valeurs démocratiques : opposition menacée, hostilité à la liberté de la presse, favoritisme et corruption. Nayib Bukele crée un nouveau parti : NI (Nouvelles Idées) qui remportera les élections législatives de 2021.
La Cour suprême, dont il a renouvelé les membres, l’autorise à un second mandat avant même d’avoir terminé le premier. Oh, on lui demande gentiment de céder temporairement ses fonctions avant le scrutin Il les confie à Claudia Rodriguez Guevara, sans pour autant démissionner. De 2019 à 2021, les meurtres passent de 2 000 à 147 ! Les homicides ne représentent plus que 2,5 pour 100 000 habitants, au lieu de 151. On soupçonne Nayib Bukélé d’avoir conclu des accords avec les principaux gangs : de meilleures conditions de détention contre soutien électoral. Il choisit ses copains sans se poser de questions. Si bien qu’à l’élection de 2024, il obtient 84% des suffrages ! Son parti (NI) obtient 54 sièges sur 60 à l’Assemblée nationale. Bukele a les mains libres. Mais tout ne marche pas comme il veut. En mars 2022, la trêve est rompue : 87 assassinats en 3 jours. En plus, les ONG (Organisations Non gouvernementales), comme Amnesty International ou la Croix Rouge dénoncent les conditions de détention. Si on ne meurt pas de crimes, on meurt des violences en prisons qui sont surpeuplées (1 086 détenus pour 100 000 habitants en 2023).
Il faut dire qu’on arrête à tout va : 70 000 personnes en 2023. Parmi les victimes, il se trouve bon nombre d’innocents. Un simple tatouage vous assimile à un gang : allez hop au trou ! Si les homicides baissent, les disparitions augmentent. Mais la population a un sentiment de sécurité. Peu lui importe que les membres de la Cour suprême aient été remplacés, que des membres des anciens gouvernements aient été arrêtés, que la Constitution ait été amendée pour que Bukele puisse assurer autant de mandats qu’il veut. Or, il est relativement jeune. Les informations publiques sont systématiquement classées secrets d’Etat. Les indésirables sont amenés à s’exiler au Costa Rica.
Quant à la politique contre la pauvreté qui a augmenté de 2019 à 2022, c’est carrément un échec. Pour Bukele, l’avenir est dans le bitcoin ! A partir de 2022, des avantages fiscaux sont accordés à ceux qui investissent dans le bitcoin. Mais dès l’année suivante, les commerces refusent cette monnaie qui s’effondre rapidement. En 2024, il faut le soutien du FMI pour empêcher la faillite. Il abandonne le bitcoin en décembre 2024.
En 2025, il propose à Trump d’accueillir les criminels condamnés aux Etats-Unis… contre rémunération. Et comme son modèle, il communique par tweets. Il se veut décontracté dans sa tenue vestimentaire, histoire d’être proche du peuple. Et sa popularité actuelle tourne autour de 80%. En bon masculiniste, il est opposé au mariage gay et à l’avortement.
Très populaire, mais pour combien de temps encore ?
YVETTE LEBON
Yvette Lebon est née le 14 août 1910 à Paris. C’était une comédienne qui avait commencé par faire de la figuration, ce qui lui avait permis d’être remarquée par le photographe Marc Allégret (1900-1973). Celui-ci l’engage dans un film, où elle tourne avec Joséphine Baker (1906 -1975), Jean Gabin (1904-1976) et Ilia Meery(1915-2010), chanteuse d’origine russe. Ce film « Zouzou » sort en 1934.
Elle tourne ensuite pour Max Ophuls (1902-1957), cinéaste d’origine allemande. Puis elle a un rôle dans « Marinella », sorti en 1936, avec Tino Rossi (1907-1983), jeune premier qui en a fait une chanson à succès que ne peuvent pas connaître les moins de 70 ans !
« Romance de Paris » est un film musical sorti en 1941, où elle tourne aux côtés de Charles Trenet (1913-2001). En 1943, Yvette Lebon rencontre Sacha Guitry (1885-1957), scénariste d’origine russe. Elle devient sa maîtresse et en échange, il lui offre un rôle, échange de bons procédés !
Pendant l’occupation, Yvette Lebon s’occupe. Elle s’occupe en étant la maîtresse de Jean Luchaire (1901-1944). Ce n’est pas n’importe qui, c’est le patron de la presse collaborationniste. Elle fréquente donc le chef de la Gestapo française, Henri Lafont qui sera fusillé en 1944. Elle peut côtoyer les « comtesses de la Gestapo », femmes protégées par la Gestapo et qui peuvent se livrer à des trafics de marché noir sur Paris. Pas joli, joli tout ça…
Elle sera jugée : tout sourire dehors, elle a plaidé l’insouciance. Elle a même raconté que c’était bien : « il y avait du champagne à volonté, on ne manquait de rien ». Elle n’est pas condamnée. Par contre, Luchaire sera fusillé le 22 février 1946, pour « intelligence avec l’ennemi ».
Après la guerre, elle épouse un producteur américain, Nathan Wachsberger (1914-1992) qui la fait tourner dans des productions italiennes. Puis, progressivement, elle disparaît des écrans, jusqu’à ce qu’elle rencontre Serge Gainsbourg et Jane Birkin. Ils la font tourner dans «Cannabis » sorti en 1970. Tout un programme….
Ayant dépassé les 100 ans, elle meurt le 28 juillet 2014. Elle a été la doyenne des comédien(ne)s français. Doit-elle sa longévité à ses gènes ou au fait qu’elle n’ait pas subi de privations pendant la guerre ?
Dans le calendrier républicain, le 14 août est le jour du colza.
STELLA KYRIAKIDES
Née en 1956, Stella Kyriakides est une femme politique chypriote, ministre de la santé de 1976 à 2006. Ensuite, elle a été présidente de l’Assemblée parlementaire du Conseil européen, pendant quelques mois en 2017 et 2018. L’Assemblée parlementaire du Conseil européen est une organisation de 46 pays européens qui se sont engagés à respecter les droits
humains, la démocratie, la primauté du respect de la vie. Cette organisation existe depuis le 10 août 1949 et comprend 612 membres.
A Chypre, Stella Kyriakides a été membre du parti démocrate. Elle a fait des études de psychologie à l’université de Reading puis à Manchester au Royaume-Uni. Elle a obtenu un master sur les troubles de l’enfance inadaptée. Elle a été commissaire européenne à la santé et à la sécurité alimentaire depuis le 1er décembre 2019 jusqu’en 2024. Stella Kyriakides est principalement attentive au problème de cancer du sein, ayant elle-même été victime. Elle travaille sur le plan européen sur ce sujet.
Mais en 2020 se pose la question de la vaccination contre le Covid. Or, elle a un contrat avec le groupe pharmaceutique Asta Zenenca pour l’achat de 300 millions de doses. Et il est clair que le contrat n’était pas clair. Stella Kyriakides a même été plus que soupçonnée de conflit d’intérêts (prêts privés à son mari par une banque publique).
Stella Kyriakides a été sincèrement européenne, en se battant pour les problèmes de santé pour lesquels elle a des compétences. Il est regrettable que cette affaire de conflit d’intérêts vienne ternir son image ainsi que celle de l’UE qui n’a pas besoin de ça.
LES SPARTAKIADES
Le 12 août 1928 débutent à Moscou, les premières Spartakiades. Il s’agit d’un évènement sportif international créé par le Conseil suprême de Culture physique de l’URSS. Elles se veulent en opposition avec les Jeux olympiques d’Amsterdam, la même année. Elles représentent l’internationalisme prolétarien et tirent leur nom d’un gladiateur romain, appelé Spartacus qui s’est révolté contre ses maîtres.
Les premières se sont donc déroulées à Moscou du 12 au 24 août 1928. Les suivantes auront lieu à Berlin en 1931 et à Paris en 1934. Leur but est de montrer le caractère révolutionnaire de la culture physique en URSS par opposition aux Jeux olympiques, considérés comme sport bourgeois.
La cérémonie d’ouverture des Spartakiades s’est déroulée à Moscou sur la place Rouge où 25 000 sportifs venus de tout le pays, étaient présents. La fermeture, le 24 août, a vu défiler les Jeunesses communistes en uniforme (garçons et filles). Pour terminer, ce sont les discours politiques et syndicaux, comme on les aime dans le système communiste, encore plus qu’ailleurs.
Comme on peut s’en douter, la délégation soviétique a été la plus importante avec 3 000 hommes et 880 femmes. Les délégations étrangères n’ont représenté que 542 hommes et 70 femmes. L’Allemagne a envoyé la délégation la plus importante. Les disciplines sont à peu près les mêmes que pour les J.O., sauf qu’il y a en plus, une épreuve de motocyclisme.
Ces Spartakiades sont un important moyen de propagande politique. L’URSS ne rejoindra les J .O. qu’en 1952. On ne conservera plus que les Spartakiades du peuple soviétique jusqu’en 1956. Mais d’autres Etats ont organisé leurs Spartakiades pour être dans la ligne de Moscou : Tchécoslovaquie (en 1955, pour fêter le 10ème anniversaire de la libération … par l’Armée rouge), la RDA, l’Albanie. Il y aura aussi des Spartakiades militaires de l’Amitié de tous les pays du Bloc de l’Est.
L’URSS a édité de très beaux timbres pour illustrer cet évènement sportif. Dans le calendrier républicain, le 12 août est le jour de la loutre.
L'APPEL AUX FEMMES DU 7 AOÛT 1914
Le 7 août 1914, le Président du Conseil, René Viviani (1863 – 1925) lance un appel aux femmes de France. En effet, la guerre a été déclarée le 3 août et a commencé par l’invasion du nord de la France par les Allemands. Tous les hommes valides sont mobilisés et de la gare de l’Est, partent des trains pour envoyer les soldats au front. Les photos de propagande de l’époque montrent l’enthousiasme des partants pour une « guerre fraîche et joyeuse » qui sera forcément courte. Sur les wagons, certains ont inscrit « A Berlin ». Tandis que dans l’enthousiasme apparent, on se donne rendez-vous à Berlin pour boire une bière.
Du côté allemand, on n’est pas en reste. On part avec le même enthousiasme, d’autant que le général Eric Ludendorff a promis une «Blitzkrieg » (une guerre-éclair). Sur les wagons, ont été inscrits : « Nach Paris über Metz (à Paris en passant par Metz). Et de se donner rendez-vous pour conquérir les « petites mamazelles de Paris » qu’on dit accueillantes. Ainsi vont les propagandes. Car peu savent et admettent, que du côté français au moins, certains appelés s’étaient enfuis pour se cacher dans les bois, dans les montagnes. Et souvent, ce sont leurs épouses ou leurs mères, qui par patriotisme, allaient les rechercher.
La guerre est déclarée le 3 août et commence par l’invasion du nord de la France par les troupes de l’Empire qui arrivent vite à proximité de Paris, sauvé par le fameux épisode des « Taxis d la Marne ». Mais la France se dit dans son bon droit, puisqu’elle est agressée. Elle est soutenue par ses alliés : Royaume-Uni et Russie.
Donc, dès le 7 août, des affiches sont placardées dans les préfectures, chargées de les diffuser dans les lieux publics (mairies). On savait aller vite….Ces affiches sont destinées à inciter les femmes – et même les jeunes de plus de 12 ans (âge du certificat d’études) à pallier l’absences des hommes dans les campagnes où vit une large majorité de Français. C’est donc une France encore très rurale, vivant essentiellement de l’agriculture.
Alors les femmes doivent terminer la moisson (en août, on commence les battages du blé), en attendant les vendanges de septembre – octobre, quand les hommes seront rentrés. Car, on en est sûr, la guerre sera courte. Sans penser qu’on sait quand commence une guerre, mais on ne sait pas quand elle finira…
Seulement voilà, à l’automne, les hommes ne sont toujours pas rentrés. Et même, on comprend que beaucoup ne reviendront jamais, laissant des veuves, des orphelins. Il faut donc faire les vendanges sans les hommes. Il ne suffit pas de souper les grappes, mais aussi porter les caisses de raisin vers les charrettes, conduire les chevaux ou les bœufs.
Et puis, il y aura les labours, avec des charrues adaptées à la taille des hommes, travail que les femmes n’avaient pas l’habitude de faire. Enfin, tous les travaux de la terre incombent aux femmes qui, en plus sont chargées du quotidien : ménage, lessive, éducation des enfants. Tout le monde doit prendre sa part. les vieux (qu’on n’appelait pas encore 3ème âge) participaient à leur façon : préparer les repas, accomplir les tâches ménagères pour grand-mères, soigner la basse-cour pour les grands-pères et les enfants. La vie est bouleversée à laquelle vient s’ajouter le drame des deuils. Les fêtes de village, quand elles existent encore, n’ont plus le même goût.
Les citadines aussi sont concernées, du moins les ouvrières. En effet, on manque aussi de main-d’œuvre dans les usines, alors que les besoins sont immenses, surtout en armement. Des femmes sont appelées à remplacer les hommes manquants, même pour des travaux difficiles. Ces femmes ont été appelées « les munitionnettes ». Toujours un diminutif, certes gentil, mais quelque peu condescendant.
Mais l’enfer, ce n’était pas pour tout le monde. Une fois le danger de la « Grosse Bertha » éloigné à partir de fin septembre 1914, la vie parisienne reprend ses droits. Et quelle n’était pas la surprise des «Poilus » passant par Paris pour leur permission ! On y vivait presque comme avant, à la « Belle époque ». Eux qui étaient quotidiennement confrontés au danger, à la boue, à la faim et surtout à la mort, parlaient d’un monde de « planqués » d’«embusqués» de l’arrière. Par dérision, ceux qui avaient une coupe de cheveux tirés vers l’arrière, étaient appelés « coupe à l’embusqué » !
Cette guerre la plus meurtrière qu’on n’ait jamais connue jusque-là (plus de 10 millions de morts) a irrémédiablement bouleversé les mentalités. Les femmes confrontées à de nouvelles responsabilités, ont pris conscience de leurs capacités. De fait, au moins le temps de cette guerre, elles sont devenues cheffes de famille. En outre, par la force des choses, elles ont acquis des savoir faire pour le travail de la terre, dans les usines. On a pu assister à des scènes insolites. Ainsi, lorsqu’un « poilu » venait en permission, sa femme l’attendait à la gare avec la charrette. Pour rentrer au bercail, c’était elle qui tenait les guides du cheval : c’était elle qui conduisait. A Paris, elles conduisaient les tramways. Ce qui aurait été quasiment impossible quelques années auparavant.
D’ailleurs la mode suivra le mouvement, par la couturière Coco Chanel qui créera la mode « à la garçonne » : robe moins longue, cheveux plus courts, silhouette plus svelte, par exemple.
Ainsi va le monde. La guerre a eu besoin des femmes. Le mouvement sera irréversible.
Dans le calendrier républicain, le 7 août est le jour de l’écluse.
PAUL-HENRI SPAAK
Paul-Henri Spaak est un homme politique belge. Il a fait partie de plusieurs gouvernements belges de 1936 à 1964. Il est aussi considéré comme un des pères de l’Europe.
Paul-Henri Spaak est issu d’une famille aisée d’origine suédoise. Dès 1916, à 17 ans, ce fils de bonne famille s’engage dans la guerre, son pays étant vaincu et occupé par les Allemands. D’ailleurs, il est arrêté et fait prisonnier. À son retour fin 1918, il fait des études de droit à Bruxelles pour devenir avocat, il se spécialisera dans la défense des objecteurs de conscience.
Sportif, il est champion de tennis ; il commence une carrière politique en se faisant élire député de Bruxelles en 1925. Il a des convictions socialistes et il est antimilitariste.
1940, c’est encore la guerre et la Belgique est encore envahie. Le 28 mai, Spaak se réfugie en France qui accepte la défaite le 10 juin et même collabore. Il doit à nouveau s’exiler, en Espagne cette fois à Barcelone et parvient à échapper aux troupes de Franco. Il arrive à Londres le 25 octobre 1940. Là, il constitue un gouvernement belge en exil. Il y rencontre les autres gouvernements en exil, dont celui de la France avec De Gaulle.
En 1944, le roi des Belges, Léopold III est emmené en résidence surveillée en Allemagne. Paul-Henri Spaak revient et joue vraiment un rôle politique en Belgique, mais aussi sur le plan international. En effet, en 1946, il est élu président de l’Assemblée générale des Nations unies qui siège à Londres. Le 21 août 1949, il jette les bases d’une construction européenne en signant le traité économique du Bénélux. En juillet 1950, le roi revient et abdique au profit de Baudouin Ier. Le 25 mars 1957, Spaak est parmi les signataires du traité de Rome qui instaure la CEE (Communauté Economique Européenne) avec 6 Etats : outre le Bénélux, ont signé l’Allemagne fédérale, la France, l’Italie.
Le Parlement belge adopte le traité du Bénélux, l’adhésion à l’OTAN, la participation au Conseil de l’Europe, la CECA, la CEE, l’Euratom, la CED (Communauté Européenne de Défense qui sera torpillée par la France). Dans tous ces actes, on peut y voir la patte de Paul-Henri Spaak, dès lors considéré comme un des pères de l’Europe. En 1955, il participe à la conférence de Messine qui doit justement relancer la construction européenne et qui contribuera à aboutir au traité de Rome de 1957.
Paul-Henri Spaak se retire de la vie politique en 1966, après avoir été secrétaire général de l’OTAN de 1957 à 1961. En 1969, il publie ses mémoires. Malade, il s’éteint le 31 juillet 1972, à la suite d’une rupture d’anévrisme. Il est inhumé dans le cimetière de Braine-L’Alleud, dans la province du Brabant, en Wallonie.
La postérité n’a pas oublié Paul-Henri Spaak. Une haute école de Bruxelles porte son nom qui a été donné aussi à quelques places publiques en Belgique et en France. Il a reçu le Grand Cordon de l’ordre de Léopold et du côté français, il avait été fait Grand Croix de la Légion d’Honneur. Un bâtiment du Parlement européen de Bruxelles, inauguré n 1993, porte son nom.
HENRI 1er
Le 4 août 1060 meurt Henri Ier, roi des Francs. Il était né vers 1008, on ne sait pas trop. C’était le troisième de la dynastie capétienne qui avait commencé en 989 avec Hugues Capet. Il est le fils de Robert II le Pieux.
En 1016, il reçoit le duché de Bourgogne en apanage (ce qui signifie que ce duché n’a pas d’héritier et reviendra à la couronne de France). Le couronnement a lieu à Reims le 14 mai 1027 mais la maman et les grands vassaux ne sont pas contents. Ah, les histoires de familles, il n’y a pas que chez les pauvres qui n’ont rien à partager. Donc, on lui préfère son frère cadet Hugues. Mais il n’est pas isolé : Henri a l’appui de l’empereur du Saint Empire germanique, Conrad II et du duc de Normandie. Ce qui fait des soutiens de poids.
Malgré ça, il doit à son tour laisser le duché de Bourgogne à son frère en apanage. En 1035, le duc de Normandie, Robert le Magnifique part en croisade en terre sainte ; Henri Ier devient le tuteur de son fils Guillaume. À la mort du père de Guillaume, ce dernier et Henri vainquent les seigneurs de Normandie qui leur sont hostiles. Guillaume épouse en 1051 Mathilde de Flandre (celle de la fameuse tapisserie de Bayeux) qui est la nièce d’Henri. Vous me suivez ?
Seulement, Guillaume devient si puissant que cela inquiète Henri. Et finalement, tous deux se brouillent. Les évêques français aimeraient instaurer la « paix de Dieu ». En 1060, pour faire plaisir au pape (Léon IX), Henri crée l’abbaye Saint-Martin.
Un roi doit avoir une descendance et doit donc se marier. Il est prévu qu’Henri épouse, Mahaut fille de l’empereur Conrad II. Mais elle meurt à l’âge de 7 ans. Pas de chance ! En 1035, il épouse Mathilde de Frise (îles au nord des actuels Pays-Bas). En 1044, il est veuf sans enfant. Décidément….
Henri est alors informé que là-bas loin en Ukraine, il y a une princesse disponible. C’est Anne de Kiev, issue d’une famille prestigieuse car elle est la fille d’Iaroslav le Grand, grand prince de Kiev (mort le 20 février 1054). A cette époque, la « Rous » kiévienne est une grande puissance. Donc, Anne est un bon parti. D’autant que venant de si loin, on ne risque pas la consanguinité. Et ça arrange Iaroslav qui souhaite élargir ses relations vers l’ouest. Le mariage est célébré à Reims le 19 mai 1051. Je ne sais s’ils furent heureux, mais ils ont eu 4 enfants, dont l’aîné, succédera à Henri sous le nom de Philippe Ier, à partir de 1060, jusqu’en 1108.
Avec Anne de Kiev, comme reine de France, on peut dire que tous nos rois, jusqu’en 1830, ont du sang ukrainien. Certes mêlé, puisqu’il y aura aussi du sang espagnol, autrichien, polonais, italien.
Henri Ier a été l’objet de nombreux ouvrages, notamment de l’historien Dominique Barthélémy, membre de l’Académie des Inscriptions et des Belles Lettres.
Dans le calendrier républicain, le 4 août est le jour du lin.
LIDIA LITVIAK
Lidia Litviak a disparu le 1er août 1943 du côté de la région du Donetsk en Ukraine. Jeune aviatrice (née le 18 août 1921 à Moscou), Lidia s’est très tôt engagée comme pilote de chasse dans l’aviation soviétique. On l’a surnommée le «Lys blanc », fleur peinte sur son avion ou aussi la « Rose de Stalingrad » car elle faisait peindre une rose sur le nez de son avion après chaque victoire sur l’ennemi.
Son père, conducteur de train a été victime des purges de 1936-37.
Quant à Lidia, elle a été très tôt attirée par l’aviation. A 14 ans, elle s’inscrit dans un aéro-club de Moscou. Un an plus tard, elle fait son premier vol en solo. A 15 ans, on sent la motivation : elle peut alors intégrer l’école d’aviation de Kherson (Ukraine).
Après l’invasion nazie de juin 1941, elle veut rejoindre une unité de combat. Elle a à peine 20 ans. C’est la combinaison de la passion pour l’aviation et le patriotisme. Seulement voilà, on la trouve trop jeune et surtout inexpérimentée. Sans se démonter, elle s’ajoute 100 heures – rien que ça – à son bilan d’heures de vol. Et ça passe !
Dès 1942, elle est affectée au 586ème régiment de chasse créé par Marina Raskova (1912- 1943) qui est une héroïne de l’aviation soviétique. C’est un régiment féminin stationné dans la région de Saratov, à plus de 500 km au sud-est de Moscou. Il vole sur des Yaks (du nom de leur constructeur, Yakovlev). C’est sur cet avion qu’elle accomplit ses missions de janvier à août 1942.
En septembre 1942, avec d’autres femmes, elle est affectée dans une unité masculine : le 437ème régiment de chasse, basé dans le secteur de Stalingrad, donc au cœur des combats. Son atterrissage est parfait, au point que dans la salle d’opérations, plus bunker que salle d’ailleurs, les pilotes chevronnés qui y ont assisté se disent que ce doit être un « moustachu » qui dans leur langage imagé signifie que c’est un sacré pilote. Quel n’est pas leur étonnement lorsqu’ils voient une longue chevelure sortir du casque. Le « moustachu » est une jeune femme qui les regarde bien en face et leur lance : «Je suis le lieutenant Litviak et je viens d’être mutée dans votre unité ». Un grand silence suit pendant que Lidia s’installe dans les lieux.
Elle volera désormais sur de LA3 (du constructeur Lavotchkine). Dès le 13 septembre, elle abat un avion allemand. Lidia Litviak est donc la première femme à abattre un avion ennemi. Mieux encore, elle abat un avion d’Erwin Maier, un as de la Luftwaffe. Récupéré sain et sauf, il ne veut pas croire qu’il a été abattu par une jeune femme. Il a fallu lui présenter les plans de vols pour qu’il admette ce qu’il considérait comme une humiliation.
En février 1943, Lidia Litviak est affectée au 296ème régiment de chasse. Le 22 mars, elle abat un JU 88, avion allemand, mais elle est blessée. Elle a dû se poser en catastrophe et elle est secourue par un collègue. Elle est hospitalisée jusqu’en mai. Remise, entre mai et juillet elle abat 2 avions allemands. On a beau être une excellente aviatrice, on n’en a pas moins un cœur. Elle est très affectée par la mort de son leader, Alexei Solomakine, dont on dit qu’elle était amoureuse.
Le 16 juillet 1943, elle est à nouveau blessée, mais elle refuse de prendre du repos. Et puis, c’est le drame. Le 1er août, Lidia est portée disparue, alors qu’elle devait intercepter un bombardier, du côté de Donetsk. C’est la disparition de l’as féminine la plus performante de la Grande Guerre patriotique. On lui attribue de 12 à 16 victoires.
Sa disparition et son bilan ont fait polémique. Vraies questions ou jalousie ? Allez savoir! En 1969, des enfants découvrent dans la campagne, l’épave d’un avion avec les restes d’un corps de petite taille. En 1979, une professeure, Valentina Vaschenko fait exhumer le corps : il s’agirait bien de Lidia Litviak. Elle monte un musée qui lui est consacré. Elle était l’idole de son jeune frère que sa disparition laisse inconsolable.
Il faut attendre le 5 mai 1990, pour que Mikhail Gorbatchev (1931-2022), Président du Soviet suprême de ce qui est encore l’URSS, la nomme «Héroïne de l’URSS ».
Les historiens sont divisés sur la disparition de Lidia Litviak. Plusieurs versions s’affrontent : – Elle aurait sauté en parachute et aurait été capturée par les Allemands ? – Elle aurait été vue dans un camp de prisonniers ?
– En 2 000, une ex-pilote Nina Raspopova dit l’avoir reconnue ?
Quoi qu’il en soit, cette personnalité au parcours bref mais romanesque a suscité des mystères. Des ouvrages en anglais ont été écrits sur elle. La journaliste et romancière Valérie Bénaïm a écrit : «La rose de Stalingrad ».
Dans le calendrier républicain, le 1er août est le jour du basilic.
VALTESSE DE LA BIGNE
Le 29 juillet 1910, Valtesse de La Bigne est décédée à Ville d’Avray (actuels Hauts-de-Seine). Elle est née Emilie-Louise Delabigne le 31 juillet 1848 à Paris, fille illégitime d’un père alcoolique et d’Emilie-Victoire Delabigne, lingère.
À 10 ans, Emilie-Louise travaille dans un atelier de confection. Elle est violée par un vieux sous un porche : pas très glamour comme entrée dans l’adolescence. Mais comme c’est un joli brin de fille, comme on disait, elle va poser pour le peintre Jean-Baptiste Corot (1796-1875). Elle fait déjà partie de ce qu’on appelle les lorettes (femmes vivant de leurs relations avec des hommes). Autrement dit, c’est une forme de prostitution. De plus, elle est rapidement employée car elle a la réputation d’être facilement accessible, si vous voyez ce que je veux dire….
Elle n’est pas encore une demi-mondaine, c’est-à-dire la maîtresse d’hommes riches. Elle s’apprête à progresser cette petite. Elle pratique la prostitution clandestine de rue ou sous les porches. Mais gare à celle qui se fait prendre par la police : la punition est humiliante, on lui coupe les cheveux ! Pour la femme, pas pour l’homme….
C’est au bal Mabille (qui avait fondé une école de danse) qu’elle commence à faire des rencontres intéressantes, c’est-à-dire, d’hommes riches. Elle travaille dans une brasserie des Champs Elysées où de hauts gradés militaires se retrouvent. Elle y rencontre un jeune homme de 20 ans, Richard Fossey, dont elle tombe amoureuse et avec qui elle aura 2 filles, ce qui ne l’empêche pas de continuer à se prostituer. Comme on pouvait s’en douter, ils se séparent au bout de 2 ans et elle confie ses filles à sa mère.
Comme beaucoup de demi-mondaines, elle aime bien avoir une particule. Elle prend donc comme pseudonyme Valtesse (contraction de Votre Altesse) et y ajoute la particule, ce qui donne Valtesse de La Bigne ! Sa devise devient : « Ne jamais prendre de mari. Gagner de l’argent pour sortir de la misère ». C’est clair !
Elle est repérée par le compositeur Jacques Offenbach (1819-1880) qui lui donne un rôle au théâtre des Bouffes Parisiens (IIème arrondissement) et elle devient sa maîtresse. Valtesse sait joindre l’utile et l’agréable. Ce qui lui permet aussi de faire de belles rencontres comme Zola, Paul Claudel, Maupassant. Tout ce beau monde se retrouve au café de Foy (VIIIème arrondissement).
La belle Valtesse est aussi réputée pour son humour cinglant pendant le siège de Paris du 20 septembre 1870 au 28 janvier 1871. Mais c’est à l’écrivain Aurélien Scholl (1837-1902) qu’on doit cette formule à propos des «grandes horizontales» : «Pendant le siège de Paris, toutes les
femmes ont mangé du chien. On aurait pu penser que cela leur inculquerait de la fidélité. Au contraire, elles ont exigé des colliers ».
Après 1871, Valtesse de La Bigne se consacre à la prostitution de luxe. Elle quitte Offenbach et séduit le prince polonais Lubomirski qui l’installe dans un appartement de la rue Saint-Georges (IXème arrondissement). Elle le quitte à son tour et après lui, elle ruine de nombreux amants.
Valtesse est une femme si raffinée qu’on la surnomme : «Rayon d’or». Elle s’intéresse aux arts, à la littérature. Elle s’achète un carrosse, habite une belle maison à Ville d’Avray où elle reçoit de nombreux artistes et y accroche des tableaux de ses amis peintres. En 1876, elle publie un roman autobiographique qui n’a guère connu de succès.
Le jugement du 3 juin 1882 lui donne le droit d’être orthographiée «de La Bigne ». Forte de ce nouveau patronyme, elle est fière de montrer son hôtel particulier à Emile Zola. Elle a surtout montré le lit dont il dira qu’il inspire la volupté à l’ombre des rideaux. Elle lit « Nana », le roman de Zola. A la lecture de la description de sa chambre, elle est indignée. L’écrivain se serait inspiré d’elle pour « Nana ». Valtesse trouve que ce n’est qu’une «vulgaire catin, sotte et grossière ». Même chez les prostituées, on a des principes…
Lorsque l’écrivain Alexandre Dumas Fils (1824-1895) a demandé à visiter sa chambre, elle a répondu avec aplomb : « Cher maître, ce n’est pas dans vos moyens ! ». Elle avait le sens des valeurs. Le peintre André Gervex (1852-1929) a pris Valtesse de La Bigne pour un tableau intitulé : « Mariage civil », tableau plein de sensualité qui trône dans la salle des mariages du XIXème arrondissement de Paris. De quoi inspirer les nouveaux mariés
Amie d’Edouard Manet (1832-1883), d’Henri Gervex, d’Edouard Détaille (1848-1912), de Gustave Courbet (1819-1877), d’Eugène Boudin (1824-1888), on l’appelle « l’union des peintres » ou encore « Altesse de la Guigne ». On savait s’amuser en ce temps-là ! Non seulement les peintres, elle fréquente aussi des écrivains comme Octave Mirbeau (1858- 1917), Théophile Gautier (1811- 1872), Edmond de Goncourt (1822-1896). Là, on ne lui a pas donné de surnom.
Elle connaît bien des hommes, mais sans complexe, elle a aussi pour amante une autre « grande horizontale », la jeune Liane de Pougy (1869-1950) . Valtesse de La Bigne rencontre aussi des politiques. En particulier Léon Gambetta (1811-1872). Motif ? Elle veut l’inciter à ce que la France conserve le Tonkin, là-bas loin en Indochine parce qu’un de ses ex-amants, Alexandre de Kergaradec, est consul à Hanoï. Et le Tonkin passe sous protectorat français (et en même temps l’Annam). Elle qui a ruiné tant d’amants, a parfois défendu leur cause. D’ailleurs de Kergaradec lui en sera très reconnaissant puisqu’il lui enverra de nombreux cadeaux.
Valtesse avait accumulé une belle collection d’art. Celle-ci sera vendue aux enchères à l’Hôtel Drouot le 27 juin 1902. Son lit est légué au musée des Arts décoratifs de Paris. Elle a une voiture, une villa à Monte-Carlo. Elle vend son hôtel particulier de la rue Malesherbes (VIIIème arrondissement) et se retire à Ville d’Avray où elle reçoit des jeunes filles pour les «former ». Elles auront une très bonne maîtresse de stage ! Car sortie de la misère, elle a eu pour devise : « coucher pour réussir ».
En 1910, elle est victime d’un accident vasculaire (éclatement d’une veine) et elle décède le 29 juillet. C’est la fin d’une vie bien remplie.
Valtesse de La Bigne est représentée dans un tableau d’Edouard Manet et d’Henri Gervex. Elle est inhumée dans le cimetière de Ville d’Avray. On n’a pas osé donner son nom à des sites publics…
Dans le calendrier républicain, le 29 juillet est le jour du panic (une graminée).
ANN LINDH
Anna Lindh est une femme politique suédoise. Elle est née à Enskede (district de Stockhom) le 19 juin 1957. Elle a fait ses études de droit à l’université d’Uppsala, la plus ancienne de Suède (fondée en 1427). Elle fut membre du Parti social-démocrate, considérée comme la ersonnalité politique la plus brillante de sa génération, notamment par son influence sur le plan nternational.
Elle a soutenu le référendum prévu le 14 septembre 2003, pour le passage de la Suède à l’euro. Malgré son action, le non l’emporte (55% de non) et la Suède n’est toujours pas dans la zone euro, bien qu’étant membre de l’UE depuis le 1er janvier 1995.
Anna Lindh est assassinée quelques jours avant le référendum le 11 septembre 2003 par un immigré serbe (naturalisé suédois). Le crime s’est produit devant un grand magasin du centre de Stockholm. Il est à rapprocher de l’assassinat le 26 juin 2016 d’Helen Cox, opposée à la sortie du Royaume-Uni de l’UE, par un militant d’extrême-droite.
Anna Lindh s’était aussi signalée par son opposition à la guerre en Irak déclenchée par les Etats-Unis.
Anna Lindh, comme Helen Cox ont payé de leur vie de se vouloir européennes.
LOUIS BLÉRIOT
Le 25 juillet 1909, Louis Blériot traverse la Manche en avion. On devrait plutôt dire le Pas-de-Calais, la partie la plus étroite de la Manche entre Calais et Douvres (35 km à vol d’oiseau…. ou d’avion). Nous, Français, l’appelons « Pas-de-Calais ». Les Anglais qui ne sont pas comme nous, l’appellent «Straight of Dover ».
Chacun sa langue, chacun son point de vue.
Revenons à Louis Blériot : il est né le 1er juillet 1872 à Cambrai (Nord), là où on fabrique les fameuses bêtises (et autrefois de la dentelle). Le jeune Louis-Charles-Joseph entre à l’école de sa ville en 1882. Cinq ans plus tard, il entre au lycée d’Amiens (Somme), puis au lycée privé Sainte-Barbe à Paris. En 1892, à 20 ans donc, il intègre l’Ecole centrale des Arts et Manufactures, créée en 1829 et communément appelée «Centrale » pour former des ingénieurs. Une fois le diplôme en poche, en 1895, il doit accomplir son service militaire (qui dure 3 ans, on est à l’époque où il faut récupérer l’Alsace et la Lorraine). Il le fait à Tarbes (Hautes-Pyrénées) dans l’artillerie. Il en sort lieutenant de réserve.
Il crée alors les établissements Louis Blériot où il construit des lanternes, des autos, des avions, des motocyclettes, des chars à voile. Un sacré bricoleur qui devait avoir une belle boîte à outils. Mieux que chez Castorama, où on nous dit pourtant qu’il y a tout ce qu’il faut.
A propos d’avion, on a longtemps parlé d’aéronef ou d’aéroplane. Le mot avion vient du latin « avia » (= oiseau), et on y a ajouté le suffixe « on » ; il est dû à Clément Ader (1841-1925), pionnier de l’aviation , le premier à faire décoller un engin motorisé plus lourd que l’air (12 et 14 octobre 1897).
Louis Blériot se lance dans la fabrication d’aéroplanes. Il commence toute une série de «Blériot I », puis « Blériot II » qui fera son premier vol le 27 mai 1909. Il commence avec un appareil qui ressemble à une gigantesque chauve-souris. Il s’agit d’une sorte d’oiseau mécanique à ailes battantes. À cause de ses nombreux échecs, on l’appelait le roi des pâquerettes ou encore Blériot la casse mais il finit par trouver la bonne formule avec le «Blériot XII », avec le bon moteur et les bons associés, notamment Gabriel Voisin (1880-1973). Il améliore progressivement les distances parcourues, la vitesse, l’altitude de vol. Ainsi, le 31 octobre 1908, il réalise un vol touristique entre Thoury (Loir-et-Cher) et Arthenay (Loiret) et retour, soit 52 km au total, en….2 heures. Ne souriez pas, c’était déjà grandiose. Avec cet avion, il gagne, le 9 juillet 1909, le prix de l’Aéro-club de France, prime de 4 500 francs, après avoir parcouru 51,5 km en 56 minutes. Mais le temps presse pour Blériot car il y a des concurrents, notamment Alberto Santos-Dumont (1873-1932) et Hubert Latham (1883 et mort le 25 juin 1912 en
tentant de traverser la Manche). Un journal britannique, le Daily Mail, a promis une jolie prime.
Louis Blériot multiplie les exploits. Le 12 juin 1909, il effectue un vol avec 2 passagers (2 courageux ou 2 inconscients ?). Le 28 août, il battra le record du monde de vitesse sur 10 km. Il a atteint 77 km/h à Reims.
Le 19 juillet, Blériot s’inscrit pour la course à travers la Manche. Le 25, il s’installe à Buc (Seine-et-Oise, actuellement Yvelines) pour y créer un aérodrome privé et une école de pilotage. Puis, il va à Calais. Le 25 juillet, avec son « Blériot XII » moteur Anziani, il décolle tôt le matin. Dans l’avion, il a mis sa canne, car dans un crash précédent, il s’est blessé un pied. Pour cette tentative, il est escorté par deux navires. Il lui faudra 57 minutes pour franchir les 35 km, en volant à 100 mètres d’altitude entre Calais et Douvres. Le dernier obstacle était de franchir les falaises de Douvres. Il est donc le premier à traverser la Manche avec un engin motorisé. Il est un héros !
Il était parti du hameau des Baraques, sur la commune de Sangatte, proche de Calais. Depuis, ce lieu s’appelle Blériot-Plage.
A la suite de cet exploit, il crée une école de pilotage à Pau (Basses-Pyrénées, devenues Pyrénées-Atlantiques). Puis fin août 1909, il organise la « Grande semaine d’aviation en Champagne ».
Le 7 octobre 1909, l’Aéro-club de France décerne 16 brevets de pilotes. Blériot est le premier sur la liste alphabétique. Ca tombe bien : il aura le brevet n° 1. Fort de sa réputation, il crée la « Blériot Aéronautique» qui s’installe dans le XVIème arrondissement de Paris et sa firme prospère entre 1910 et 1913. Il vend des avions à l’armée britannique. En 1914, il monte la société SPAD (Société de Production des Aéroplanes Deperdussin). On est à la veille du conflit contre l’Allemagne, le général Hirschauer (il est français) veut renouveler la flotte aérienne militaire et lui commande 400 avions. Pendant la guerre, dans son usine de Suresnes, il fabrique jusqu’à 23 avions par jour. Au total, sa société aura produit 10 000 avions avec un nouveau moteur «Gnome et Rhône ».
Après la guerre, en 1921, il fusionne avec la SPAD et s’appelle « Blériot-SPAD ». En 1925 – 1926, ses avions s’affirment comme les meilleurs chasseurs. Il devient progressivement un marchand de prototypes, mais il commence à avoir des problèmes d’argent. A sa mort, ses affaires passent entre les mains de Farman (aviateur et constructeur d’avions) et se décentralise à Bègles (Gironde).
Avec sa mort le 1er août 1936 et l’avènement du Front Populaire le même été, sa société est
nationalisée et devient la SNCASO (Société Nationale des Constructions Aéronautiques du Sud-Ouest), ancêtre de Sud-Aviation qui fusionne en 1990 avec Nord-Aviation, puis avec Matra en 2000.
On imagine facilement que Louis Blériot a été honoré. Ainsi, en 1929, il est Commandeur de la Légion d’honneur, officier d’Académie (titre honorifique). En 1927, il avait été contacté par Charles Lindbergh (1902-1974) qui a été le premier à traverser l’Atlantique le 21 mai 1927.
En 1936, on a créé la médaille Louis Blériot qui récompense un aviateur méritant dans l’aviation légère. En 2015, l’école Centrale en fait son parrain. En 2022 sort une pièce de 10 € à son effigie. Son portrait a illustré des timbres – poste en 1934, 1972, 2009. En 1990, on a même appelé un rosier grimpant « Aviateur Blériot ». On ne compte plus les villes qui ont donné son nom à des rues, des places, des établissements scolaires.
Dans le calendrier républicain, le 25 juillet est le jour de l’armoise.
ROBERT SCHUMAN
Robert Schuman a été président de l’Assemblée européenne du 19 mai 1958 au 28 mars 1960.
C’était un homme politique français, né au Luxembourg le 29 juin 1886. Pourtant, au début de sa carrière politique, il n’a pas été du bon côté. En effet, le 12 juillet 1940, il a été de ceux qui ont voté les pleins pouvoirs à Pétain. Ce qui lui a valu d’être frappé d’indignité nationale. Mais il a été réhabilité en juillet 1945 par De Gaulle, dans un souci de réconciliation des Français.
Dès 1946, Robert Schuman devient ministre des Finances, du 24 juin au 16 novembre 1946, puis 22 janvier au 24 novembre 1947. Du 6 au 11 septembre 1948, puis du 26 juillet 1949 au 8 janvier 1950, il est président du Conseil. Ca change vite sous la IVème République.
Robert Schuman a une convergence de vue avec Jean Monnet (1888-1979), partisan de l’atlantisme, du libre-échange, d’une alliance avec l’Allemagne. Leur objectif est de créer une Fédération européenne.
C’est ainsi que le 9 mai 1950, en fin de matinée, Schuman déclare placer la production franco-allemande de charbon et d’acier sous le contrôle d’une haute autorité commune ouverte à d’autres Etats. Ce plan Schuman entraîne la signature du traité de Paris du 18 avril 1951, qui crée la CECA (Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier), à laquelle se joindront la Belgique, l’Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas. Ce premier pas de l’Europe espère le soutien des Etats-Unis pour aller vers un fédéralisme.
Pour développer les structures, Maurice Schuman sera Président du Mouvement Européen international. Mais surtout, il préside le Parlement européen (composé d’élus de chaque Etat) de 1958 à 1960. C’est lui qu’on appellera le « Père de l’Europe ».
En 1962, il se retire de la politique et s’installe dans sa maison de Scy-Chazelles dans la Moselle, tout en s’intéressant à la politique européenne, mais sans intervenir. Il meurt le 4 septembre 1963. Les obsèques ont lieu le 7 septembre.
Robert Schuman a reçu de nombreuses distinctions de beaucoup de pays, pas forcément européens. En son honneur, on a créé un prix Robert Schuman pour l’Europe. Depuis 1991 plusieurs centres d’art portent son nom : à Luxembourg, à Metz, à Trèves, à Strasbourg. Le 20 octobre 2012, un monument a été érigé devant sa maison de Scy-Chazelles. Inutile de préciser que de nombreuses rues, avenues de France portent son nom. L’Institut Universitaire de Technologie de Strasbourg s’appelle Robert Schuman, ainsi que bon nombre d’établissements scolaires, même un établissement hospitalier à Luxembourg. Les ouvrages le concernant ne manquent pas.
NELSON MANDELA
Le 18 juillet 1918, est né Rolilahla Mandela, dit Madiba, nom d’un clan tribal du Transkei, au nord-est de l’Afrique du sud. Il est mondialement connu sous le nom de Nelson Mandela. Après avoir combattu, pacifiquement ou non l’apartheid (politique discriminatoire en fonction de la couleur de peau) en Afrique du Sud, il a fait 27 ans de prison, pour devenir le premier président noir de ce pays en 1994.
Il fut d’abord avocat, avant de devenir l’emblème de la lutte contre l’apartheid. Durant une bonne partie de sa vie, il a subi la répression et le harcèlement policiers qui l’ont obligé à vivre dans la clandestinité. Son objectif était de faire respecter les Noirs et les « Coloureds » (formule utilisée par le pouvoir sud-africain pour désigner tous ceux qui n’étaient pas blancs), d’aboutir à la démocratisation.
Depuis l’arrivée des Européens (principalement Hollandais, mais aussi Anglais, Français) à partir du XVIème siècle au sud de l’Afrique, ceux-ci ont chassé les populations indigènes pour s’installer et faire une étape pour l’exploration de l’océan Indien et l’Asie. D’abord colonisée par les Hollandais qui ont imposé leur langue qui a donné l’afrikaner, puis les Anglais qui ont ensuite ajouté la leur. Les populations locales ont conservé les leurs selon les ethnies. D’une manière générale, les Européens ont imposé leurs lois aux populations noires. En clair, la minorité blanche s’est imposée face à la majorité de « coloureds » (populations noires, plus immigrés venus d’Asie du sud-est).
Eduqué par des séminaristes protestants anglais, Mandela est amené à choisir un prénom à consonnance anglo-saxonne. Ce sera Nelson. Il entre à l’université à 20 ans pour étudier l’anglais et l’histoire des civilisations occidentales. C’est en 1941, qu’avec Oliver Tambo (militant anti apartheid), il participe à une première grève et adhère à l’ANC (African National Congress) en 1943. Il se marie en 1944 avec Evelyn Mase qui lui donnera 4 enfants. Pour gagner sa vie et se former, il travaille dans un cabinet d’avocats blancs à Johannesburg. Il finit par être diplômé, après avoir pris des cours par correspondance de l’université de Fort Kane (près du Cap). Mais en 1958, il divorce d’Evelyn Mase, puis épouse Winnie Madituzela qui devient donc Winnie Mandela.
En 1952, Nelson Mandela participe à la rédaction de la charte de la liberté pour l’égalité de tous les Sud-Africains. Il est un adepte de la lutte non violente, conformément à l’idéal de Gandhi, auquel il se réfère. Il mène une campagne de désobéissance civile. Il est arrêté -avec la complicité des services secrets américains – et harcelé par la police, puis finalement acquitté après un long procès. Mais face à la répression, il en arrive à utiliser et préconiser la violence en organisant des attentats, des sabotages. Avec l’indépendance de l’Afrique du Sud, le 31 mai 1961, le pouvoir applique officiellement la politique ségrégationniste de l’apartheid: les Noirs ne peuvent accéder à la propriété, ils sont inéligibles, créations de quartiers noirs dans les villes (townships), mariages mixtes interdits.
Poursuivant son combat contre ce pouvoir et pour le respect de tous les individus, Mandela finit par être arrêté le 11 juin 1964, condamné à perpétuité et envoyé avec ses camarades de combat dans la prison de de l’île de Robben Island à quelques kilomètres au large du Cap. A ce moment-là, le Commonwealth, ainsi que l’Allemagne, la France, les Etats-Unis prennent leurs distances avec les actions de Mandela. En effet, le monde occidental n’a guère envie de voir l’Afrique du Sud déstabilisée car ce pays est riche en matières minérales…. exploitées à bon compte par des Noirs sous-payés: or (1er producteur du monde), uranium, manganèse, charbon, etc… En outre, l’Afrique du Sud est dans position géostratégique de première importance avec le fermeture de Suez en 1956 puis le gigantisme des supertankers qui ne peuvent pas y passer. Pour aller vers l’Amérique du Nord et l’Europe, ils sont obligés de passer par le Cap de Bonne Espérance. Et il ne faut surtout pas embêter l’Afrique du Sud, des fois qu’elle serait tentée de regarder vers Moscou. Oh, bien sûr, on boycotte les oranges Outspan, les compétitions sportives, notamment le rugby, sport roi et qui est celui des Blancs. L’Afrique du Sud ne sera pas la bienvenue aux JO de Montréal en 1976. En 1974, l’équipe de France de rugby y est allée faire une tournée, mais en imposant un joueur noir (Roger Bourgarel). Celui-ci soulevait l’enthousiasme des Noirs parqués dans un coin du stade, chaque fois qu’il touchait la balle.
Pendant ce temps, Mandela croupit dans sa prison de Robben Island, mais il ne reste pas inactif. Malgré les humiliations, la dureté de la détention, le travail forcé, il en profite pour apprendre l’histoire des Afrikans. Il veut comprendre leur mentalité. Par correspondance, il étudie avec l’université de Londres, dont il sera diplômé. Des échanges ont lieu entre prisonniers. On apprend le poème « Invictus » (invincible) de William Ernest Henley (1849 – 1903). On parle d’université Mandela.
Le 16 juin 1976, éclatent les émeutes de Soweto, township de Johannesburg. Des élèves noirs se soulèvent, soutenus par « Conscience noire ». Ils se révoltent contre l’afrikans qu’on veut leur imposer comme langue officielle. Bilan : entre 180 et 700 morts ! D’ailleurs, Mandela au pouvoir à partir de 1994, en fera un jour férié. Bien sûr, l’ONU et la communauté internationale condamnent cette violence. En pure perte, car le gouvernement crée des « Vlakplaas », escadrons de la mort. Cela n’empêche pas les émeutes, les guérillas, les sabotages.
En février 1985, il rejette une proposition de liberté conditionnelle du 1er ministre Pieter Botha devenu président. Mandela n’est pas seul au monde. Pour ses 70 ans, en 1988, un concert est organisé à Wembley. Enfin, le 2 février 1990, le président Piet De klerk annonce la libération de Nelson Mandela qui sera effective le 11 février, au bout de 27 ans et 6 mois d’emprisonnement. Dans son discours de libération, il présente son programme : droit de vote à tout le monde, une nouvelle constitution, la fin de la lutte armée. Après des négociations avec Piet De Klerk, tous deux sont désignés prix Nobel de la Paix 1993. En avril 1994, Mandela est élu Président de l’Afrique du Sud. Une nouvelle ère commence. Pas forcément facile. Il s’entoure de 2 vice-présidents : un Blanc, Piet De Klerk, et un Noir, Thabo Mbeki. Le 27 avril est décrété jour férié, comme étant le jour de la liberté. Cette même année, il publie son autobiographie : « A long way to freedom ».
Son avènement marque la fin de l’isolement de l’Afrique du Sud qui devient la « Nation arc-en-ciel ». L’aura de Mandela fait de lui un médiateur dans les conflits que l’Afrique a avec les anciens colonisateurs. Mais dans son propre pays, il fort à faire. Car si la grande majorité (près de 90%) de la population est composée de « Coloureds », c’est la minorité blanche qui détient le pouvoir financier et économique. Conscient et réaliste, Mandela considère qu’il aura besoin de tout le monde pour construire le pays. Mais tout le monde n’est pas d’accord. Certains, profitant d’un président noir, aimeraient régler les comptes avec les Blancs. Mandela s’y refuse, bien entendu. Mais il est accusé de trahison et il faut assurer sa sécurité, pour laquelle il avait symboliquement choisi des Noirs et des Blancs.
Il sait aussi que le rugby est le sport national, mais qu’il est pratiqué presque exclusivement par des Blancs. Or après la libération de Mandela, les fédérations sportives ne boycottent plus l’Afrique de Sud, si bien que celle de rugby lui attribue la coupe du monde 1995. Alors, Mandela entame des négociations avec François Pienaar, le capitaine de l’équipe, un Blanc. Avec lui, et toute l’équipe dans laquelle il y a des joueurs noirs, commencent des tournées dans les townships. Cela se révèle être un grand succès. A l’approche de cette coupe du monde qui doit avoir lieu du 25 mai au 24 juin 1995 (fin d’automne), la tension monte dans le pays et Mandela parvient à rassembler tout le pays, y compris les « Coloureds », derrière l’équipe nationale.
Le jour de la finale, l’Ellis Park Stadion de Johannesburg est plein à craquer, ce qui rend les problèmes de sécurité plus compliqués : pour les joueurs, pour les spectateurs et surtout pour Mandela qui a tenu à assister au match, revêtu du maillot vert de l’équipe avec le numéro 7, celui du capitaine François Pienaar. La finale a lieu contre la Nouvelle-Zélande, autre temple du rugby, mais qui a toujours eu des joueurs de couleur (Maoris) dans son équipe. Pour la première fois, il y a un Noir dans l’équipe d’Afrique du Sud, appelée depuis longtemps Springboks (sorte de gazelle). Le match est âpre, et ce ne fut pas d’une qualité exceptionnelle. L’Afrique du Sud en sort vainqueur. Elle n’aura pas à se plaindre de l’arbitrage. Politiquement, fallait-il absolument que l’Afrique du Sud gagne, histoire de souder ce pays nouveau derrière Mandela qui est à l’apogée de son mandat ? Sportivement, ça se discute…. Enfin, ce n’est qu’une supposition… Avec lui, est née la nation arc-en-ciel, avec le seul drapeau au monde qui inclut 6 couleurs qui ont toutes un sens.
Le mandat de Nelson Mandela commencé le 10 mai 1994, se termine le 16 juin 1999. S’estimant trop vieux, il ne se représente pas (un salut à Biden au passage….). Il a alors 81 ans et Il faut reconnaître qu’il a été quelque peu usé par la vie. Il meurt le 5 décembre 2013, à l’âge de 95 ans. Sa mort provoque une grande émotion dans le monde entier. En Afrique du Sud, 10 jours de deuil sont décrétés. Son corps est exposé dans le stade de Soweto. Son nom est donné, en France à plusieurs établissements scolaires, à des places, à des rues. A l’inverse, on peut regretter qu’une ONG comme Amnesty International, dont l’objectif est de défendre les droits humains, partout dans le monde, et de lutter contre les discriminations, n’ait jamais soutenu Nelson Mandela. Au prétexte que son combat n’a pas toujours été pacifique, sans chercher à comprendre les raisons de l’utilisation de la violence, que Mandela avait longtemps rejetée.
C’est Thabo Mbeki qui lui succède jusqu’en 2008. Même s’il est un ancien compagnon d’armes (et de prison à Robben Island), ce n’est pas le même personnage qui n’a pas le même charisme. Sous ses deux mandats, la situation sociale se dégrade. Des Noirs rêvent encore de prendre leur revanche sur les Blancs. Assassinats, viols se multiplient car les « Coloured » écoutent moins le successeur de Mandela. Il y a de plus en plus d’insécurité en Afrique du Sud qui s’efforce pourtant d’attirer les touristes par ses paysages et ses grands parcs nationaux. Après Mbeki, vient Jacob Zuma, aux idées particulièrement originales pour lutter contre le SIDA qui, comme dans toute l’Afrique, fait des ravages. Il est président jusqu’en 2018. Actuellement, le président est Cyril Ramaphosa.
Dans le calendrier républicain, le 18 juillet est le jour de la chalémie (ancien instrument de musique à vent).
INDÉPENDANCE DE LA BELGIQUE
Le 21 juillet, c’est fête nationale en Belgique, depuis la loi du 27 mai 1890. On y célèbre l’indépendance acquise le 21 juillet 1830.
Ce jour-là, le roi des Belges est Léopold de Saxe-Cobourg- Gotha (1790-1865) qui est un prince allemand. Il jure fidélité à la Constitution le 21 juillet 1831. La Belgique indépendante est donc une monarchie constitutionnelle et parlementaire. C’est sous Léopold II (1835-1909) qu’a été décrété le jour de fête nationale. Cette indépendance a été acquise aux dépens du royaume des Pays-Bas.
Au XVIème siècle, les actuels Pays-Bas et la Belgique sont des colonies espagnoles. Les 17 provinces issues de l’époque de Charles-Quint (XVIème siècle) empereur, mais aussi roi d’Espagne, deviennent les Provinces-Unies. A la suite de la réforme de Luther (après 1517), le nord (approximativement Pays-Bas actuels) adopte le protestantisme (version Calvin) et le sud reste catholique.
Face à l’expansion française (période napoléonienne), les Alliés (adversaires de la France), sous l’impulsion des Anglais, décident de réunir toutes ces provinces. Le 21 juillet 1814, Guillaume I, d’Orange-Nassau en accepte la souveraineté. Mais cette construction s’avéra instable, car elle avait été faite sans tenir compte de la séparation religieuse à la suite de la Réforme de Luther. En outre, on n’avait pas tenu compte non plus qu’il s’était formé deux peuples différents. L’opposition entre Belges et Hollandais se manifesta à propos de la langue officielle, le néerlandais, imposé comme langue de l’administration et de la justice entre 1819 et 1822.
La révolution française de 1830 (3 « Glorieuses des 27-28 et 29 juillet) fut le signal pour les catholiques associés aux libéraux depuis 1828, de la révolution belge. Celle-ci éclate le 25 août 1830. A la suite d’une bataille dans Bruxelles, l’armée hollandaise doit se retirer. Un gouvernement provisoire proclame l’indépendance de la Belgique le 4 octobre. Un congrès est chargé de rédiger une constitution. Les grandes puissances de l’époque (Angleterre, Autriche, Russie et …France) reconnaissent la séparation le 20 décembre 1830. La constitution est votée le 7 février 1831. On a proposé comme roi, le duc de Nemours, fils Louis-Philippe Ier, nouveau roi de France. Bien sûr, les Anglais ne sont pas d’accord. Le congrès désigna alors le prince Léopold de Saxe-Cobourg-Gotha, le 4 juin 1831 qui fonda la monarchie parlementaire. C’est le 18 avril 1839 qu’est actée officiellement la séparation entre la Belgique et les Pays-Bas.
Actuellement, la Belgique est un pays de 30 500 km2, sur lesquels vivent 11,7 millions d’habitants, ce qui donne une densité élevée : 376 hab/km2(la plus élevée après Malte et les Pays-Bas). Le taux de natalité est de 11,4%0 (France : 9,7) et le taux de mortalité est de 9,7%0 (France : 10). Le taux de fécondité (nombre d’enfants par femme en âge de procréer, statistiquement de 15 à 48 ans) : 1,8 (France : 1,7). La capitale Bruxelles compte 1,235 million d’habitants.
La Belgique a 3 langues officielles : néerlandais, français, allemand. Bruxelles, bien qu’en pays flamand, est bilingue. La Wallonie francophone, au sud, occupe 17 000 km2(56% du territoire), avec 3,7 millions d’habitants, soit 32% du total. C’est une monarchie constitutionnelle, parlementaire. Le pouvoir exécutif se partage entre le roi, actuellement Philippe, depuis le 21 juillet 2018 et le Parlement. Le pouvoir législatif appartient à 2 chambres élues.
La Belgique fait partie des 6 Etats à l’origine de la construction européenne avec l’Allemagne fédérale, la France, l’Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas :
– 23 juillet 1952, création de la CECA- Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier ; – 25 mars 1957 : création de la CEE – Communauté Economique Européenne ; – Bruxelles est de fait la capitale de l’UE, car elle est le siège du Parlement européen (en partage avec Strasbourg) et de plusieurs instances européennes dont le Conseil européen (gouvernement de l’UE) et le Conseil de l’Union européenne (réunion des chefs d’Etat des pays membres).
Dans le calendrier républicain, le 21 juillet est le jour du melon.
ALCIDE DE GASPERI
Alcide de Gasperi a été président du Conseil d’Italie de 1945 à 1953. Il est né en 1881, à Pieve Tesino dans le Trentin. A cette époque, cette province appartenait à l’Empire d’Autriche-Hongrie.
Avec Robert Schuman et Jean Monnet, on le considère comme un des pères de l’Europe alors qu’il a grandi en dehors de l’Italie. Néanmoins de 1896 à 1900, étudiant à Vienne, il est membre du mouvement chrétien social.
Dès 1904, il y joue un rôle important. Si bien qu’à Innsbruck, il manifeste pour l’irrédentisme, mouvement suscité par des groupes qui réclament l’intégration dans le royaume d’Italie de tous les territoires dominés par des étrangers et où vivent des italiens.
En 1905, Alcide de Gasperi obtient son doctorat de philosophie. La même année, il devient directeur d’un journal catholique, qui est en fait, le journal du Trentin à partir de 1906. Il est élu à la Chambre du Parlement austro-hongrois en juin 1911.
Le 28 juin 1914, c’est l’attentat de Sarajevo (assassinat de l’archiduc d’Autriche par un Serbe en territoire bosniaque) qui déclenche ce qu’on appellera « la 1ère guerre mondiale ». En résumé, ce coup de pistolet aura fait plus de 10 millions de morts ! En ce qui concerne Alcide de Gasperi, il se déclare pour la paix. Mais son avis, comme celui de bien d’autres, n’a pas pesé lourd. Son journal « Il Trentino » est censuré. En signe de protestation, il a fait publier un numéro composé…uniquement de pages blanches. Il se consacre alors aux réfugiés de guerre.
En mai 1918, il signe un texte sur le droit à l’autodétermination des peuples. Et justement l’Autriche-Hongrie est particulièrement visée. Elle rassemble plusieurs peuples très différents par la langue, les coutumes, les intérêts, les religions. En effet, on y trouve, outre les Italiens du Trentin, des Autrichiens bien sûr, des Hongrois, des Roumains, des Bosniaques (depuis 1908), des Tchèques, des Slovaques, des Slovènes et même des Polonais (région de Cracovie).
Avec le traité de paix de Saint-Germain-en-Laye (20 septembre 1919), l’Autriche-Hongrie faisant partie des vaincus, doit céder le Trentin à l’Italie. De Gasperi revient en Italie et s’installe à Rome où il préside le parti populaire, inspiré de l’Eglise.
Alcide de Gasperi se marie en 1922 et le couple aura 4 filles. Ça c’est pour la vie privée. Mais sur le plan politique, à partir de 1923, il se lance dans l’opposition au fascisme, face à la montée de Mussolini, surtout après l’assassinat par des fascistes du député socialiste Giacomo Matteotti, le 10 juin 1924.
Fatalement, il est arrêté le 11 mars 1927 (Mussolini avait décrété la dictature le 3 janvier 1925). Il est relâché en 1928. Dans ce contexte, il parvient à trouver un emploi à la bibliothèque du Vatican en 1929.
A la chute de Mussolini et du régime fasciste, il est Président du Conseil du dernier royaume d’Italie. La République est proclamée le 2 juin 1946. Son action permet de limiter les sanctions contre l’Italie. Si elle perd l’Istrie (au profit de la Yougoslavie), elle conserve le Haut Adige, Trieste et le Val d’Aoste (qui est francophone).
Alcide de Gasperi s’attelle à la reconstruction de son pays, bien aidé il est vrai par le Plan Marshall du 20 septembre 1947. Il signe des accords pour la reconstruction et la reprise économique. Il reste chef du gouvernement jusqu’en août 1953. Il est convaincu de la nécessité d’une intégration européenne. En 1950, il répond favorablement à l’appel de Robert Schuman du 9 mai. Il donne son appui pour la création de la CECA, souhaite un fédéralisme européen, y compris pour la défense. Ce que la France a refusé. On aimerait en avoir une aujourd’hui….
De Gasperi meurt le 19 août 1954. En 1952, il avait été lauréat du Prix Charlemagne, attribué à une personnalité qui a œuvré pour la construction de l’Europe. Il a fait partie de ces visionnaires européens qui n’ont pas été suivis.
MARIE DE GOURNEY
Le 13 juillet 1645, Marie de Gournay meurt à Paris.
Elle y est née le 6 octobre 1565. C’était une femme de lettres et philosophe du XVIème siècle, fille spirituelle de Michel de Montaigne. Elle a publié la 3ème édition de ses « Essais », œuvre qui traite de nombreux sujets. Très tôt, elle choisit de vivre de ses propres écrits. Son père, Guillaume Le Jars, conseiller et trésorier du roi (Henri II) était propriétaire du château de Gournay/Aronde, dans le Beauvaisis (actuellement dans le département de l’Oise). Sa mère, Jeanne de Hacqueville, travaillait dans le domaine de la justice. Marie est l’aînée de 6 enfants. La famille installée à Gournay, lui donne une éducation très classique pour l’époque : catéchisme, couture…. Mais Marie préfère nettement les livres. Au point qu’elle apprend elle-même le latin et le grec. Un petit bonjour à nos ados actuels….
En 1583, elle a 18 ans et découvre la 1ère édition des « Essais » de Montaigne qui la transporte d’admiration (la « transisse »). Elle rêve de rencontrer l’auteur. La rencontre a lieu à Paris en 1586. Elle a 21 ans et lui 55 ans, autant dire que pour l’époque, il est déjà vieux. Montaigne vient faire des séjours au château de Gournay. Avec Marie, ils font des promenades, où elle raconte cette histoire publiée en 1594 : « Le promounoir de Monsieur de Montaigne ». On dit qu’ils auraient eu une relation amoureuse. Mais que ne dit-on pas ? En fait, l’ambiguïté vient de Montaigne lui-même, quand il écrit : « L’aimer beaucoup plus que paternellement », «Je ne regarde plus qu’elle au monde », «La véhémente façon dont elle m’aime et me désire longtemps ». On peut au moins parler de coup de foudre intellectuel et d’admiration mutuelle. Il parle de sa « fille d’alliance ».
Dans les mois et années qui suivent, ils ne se voient plus, mais continuent de correspondre. Montaigne meurt le 13 septembre 1592, mais Marie ne l’apprend que 11 mois plus tard. Sa veuve, Françoise de Montaigne lui envoie une copie manuscrite des « Essais » de 1588 et lui demande de les publier. Elle en fait paraître la première édition posthume, où elle a ajouté une longue préface pour défendre les idées de Montaigne.
Après la mort de sa mère en 1594, Marie voyage en Espagne avec le magistrat Jean d’Espagnet (1564-1637) et son épouse. Ensuite, elle séjournera 15 mois à Montaigne (en fait Saint-Michel de Montaigne, situé dans le sud-ouest de l’actuel département de la Dordogne). Elle y retrouve son épouse et sa fille.
Mais elle rencontre des difficultés financières et avec son frère Charles, ils doivent vendre la propriété de Gournay en 1608. Alors, elle vit à Paris où elle suit la politique. Elle fait aussi des rencontres, comme Henri-Louis de Montimor (1600-1679), érudit et homme de lettres. Marie
fait aussi la connaissance de Juste Lipse (1547-1606), philologue et humaniste. Celui-ci la présente à toute l’Europe. Mais comme beaucoup de femmes, elle a du mal à être reconnue. Elle se lance dans des traductions d’auteurs latins, comme Salluste, Ovide, Virgile, Tacite. Elle écrit des vers sur les chats, sur Jeanne d’Arc, adapte Ronsard (1524-1586).
Curieusement, elle a été beaucoup calomniée sur son œuvre, mais aussi sur sa vie personnelle. Néanmoins, il lui reste de vrais amis. Elle a écrit pour Marguerite de Valois, Marie de Médicis, Louis XIII, Richelieu. En 1622, elle publie « Egalité des hommes et des femmes », puis en 1626, ce sera : « Grief des Dames » où elle dénonce le sexisme. Contrairement aux femmes de son époque où les familles arrangeaient les mariages, elle a choisi de rester célibataire et vit de sa plume. Catholique convaincue, elle est hostile aux protestants (de 1562 à 1598, on est en pleine guerre de religion).
Marie de Gournay a légué sa bibliothèque à François de La Mothe Le Vayer (1588-1672), philosophe et historien. Elle avait hérité de celle de Montaigne. Elle meurt le 13 juillet 1685, à 79 ans.
Dans le calendrier républicain, le 13 juillet est le jour de la pintade.
CORA PEARL
Le 8 juillet 1886, Cora Pearl est décédée à Paris. Elle était née à Plymouth (sud-ouest de l’Angleterre) le 17 décembre 1836 et s’appelait Eliza Emma Crouch. C’était une de ces demi-mondaines, comme il y en eut au XIXème siècle. À son palmarès, elle a du beau monde dont le prince Napoléon, frère de l’empereur Napoléon III et le duc de Morny, demi-frère du même Napoléon III.
Au départ, il y a un problème de falsification de son acte de naissance, ce qui a créé une certaine confusion. Son père, Frederick Crouch était violoncelliste et compositeur.
Mais il abandonne sa famille. Sa mère, Lydie Pearson se trouve alors un autre compagnon. Emma est envoyée dans une école religieuse en France. Elle sera pensionnaire à Boulogne/Mer (Pas-de-Calais), puis à Calais où elle reste 7 ans. Puis, elle est hébergée 2 ans, chez sa grand-mère dans l’île de Jersey. Cette mamie la place ensuite chez une modiste de Londres où elle vit avec un baron. Puis elle prend pour amant, Robert Bignell qui a 10 ans de plus qu’elle, et surtout qui est propriétaire d’un cabaret londonien. En mars 1858, Bignell la ramène à Paris pour lui faire visiter cette belle capitale. Luirevient à Londres, mais Emma veut rester à Paris. Et pas seulement pour ses charmes, c’est là qu’elle se transforme en « femme galante », comme ça pour le simple plaisir charnel. Mais si en plus, elle peut gagner de l’argent….pour faciliter les choses – et la chose ! – elle a besoin d’un protecteur, en clair, un proxénète, dénommé Roubise. Ce qui lui permet d’avoir de nombreuses relations, à tous les sens du mot. Oh, Emma est consciencieuse : elle tient un registre de ses clients. Elle y note leurs noms, des détails de leur vie intime, de ce qu’elle apprend sur leur vie privée, et….leurs « performances » !
En 1864, pas de chance : Roubise meurt. Emma est libre et doit se débrouiller seule comme une grande pour trouver des clients. Elle s’installe rue de Ponthieu (VIème arrondissement) avec une amie : Carole Hassié. C’est à ce moment-là qu’elle prend le pseudonyme de Cora Pearl. Ce sera son nom de « femme galante », pour ne pas dire vulgairement : prostituée. Mais de luxe, car elle rencontre du beau monde : Victor Masséna (1836-1910), duc de Rivoli qui la présente à Achille Murat (1847-1895). Jusqu’en 1867, elle vit avec ces deux hommes , histoire de ne pas s’ennuyer sans doute. Cora Pearl gravit les échelons, quand en 1864, elle fait la connaissance du duc de Morny (1811-1865) qui, rappelons-le est le demi-frère de l’empereur. On serait tenté de rire : forcément, elle devient sa maîtresse et la petite futée, devient aussi amie avec son épouse.
Grâce à la générosité du duc, elle peut être locataire du château de Beauséjour qui se trouve dans un cadre charmant à Olivet, près d’Orléans (Loiret). De 1875 à 1885, elle en sera même propriétaire. Et là, elle se lâche : elle organise des fêtes, fait des travaux, dépense sans compter : marbres, cuivres, baignoire en bronze gravée à ses initiales CC (Cora Crouch). Elle s’amuse à prendre des bains au champagne. Elle fait teindre son caniche en bleu, assorti à sa robe. Pauvre bête ! Cora est une des premières femmes à se maquiller. Dans les documents tombés aux mains de la police, on apprend qu’elle était surnommée « la grande horizontale » ou encore « le plat du jour » ! On voit qu’elle était prête à toutes les excentricités.
Cela ne l’empêche pas de fréquenter les lieux à la mode, en particulier le « Café anglais », restaurant parisien situé boulevard des Italiens (sur les IIème et IXème arrondissements). On raconte même qu’elle s’y est fait servir nue sur un grand plat d’argent. On dit tellement de choses, les gens sont méchants…. Lors de dîners entre femmes, enfin entre dames plutôt, elle aimait montrer ses seins. Comme ça pour le simple plaisir de se mettre en avant.
Le 10 mars 1865, le duc de Morny meurt. Qu’à cela ne tienne, elle est abordée par un officier Emmanuel de Grammont de Caderousse pour une relation qu’on dit purement «professionnelle»! Mais Cora ne perd pas de temps, elle rencontre le prince Napoléon, le cousin de l’autre. Il est son amant pendant quelques années et lui offre deux hôtels particuliers. Il n’est pas regardant, le prince.
Les années de 1865 à 1870 voient Cora Pearl à l’apogée de sa fortune. Mais elle dépense beaucoup, beaucoup trop. Par exemple, elle achète 60 chevaux ! même si ce sont que des chevaux crottin et pas encore des chevaux vapeur, c’est déjà une fortune. En clair, elle veut mener le même train de vie que les hommes qu’elle fréquente.
Même si elle n’en a pas le talent, elle se produit au théâtre des Bouffes Parisiens (IIème arrondissement), dans « Orphée aux enfers », une production de Jacques Offenbach (1819 – 1880). Dans le rôle de « Cupidon », elle fait encore preuve de ses extravagances. Sur scène, elle est seulement vêtue de ses diamants. Chaque soir, un diamant tombe, sans qu’elle ne le ramasse. « Ce sera le pourboire du machiniste » disait-elle. C’était ça, Cora Pearl. Napoléon III l’aimait bien. Son œil frisait et sa moustache brillait….ou l’inverse !
Patatras ! 1870, c’est la guerre contre la Prusse et la défaite rapide. Paris est assiégé. A ce moment-là, Cora Pearl est à Paris. Généreusement, elle transforme ses hôtels en hôpitaux où elle fait l’infirmière. Mais lorsque le peuple se révolte et constitue la Commune qui amène une « semaine sanglante » du 21 au 28 mars 1871, cette fois, elle quitte Paris. Mais elle dépense toujours plus, tellement qu’elle finit par connaître la précarité. En 1872, Cora rencontre Alexandre Duval, fils d’un entrepreneur qui avait ouvert une chaîne de restaurants à bon
marché (eh oui, ça existait déjà). En 1873, Alexandre est à la tête des restaurants. Il n’a que 25 ans et devient son amant. Vous la connaissez : elle va vite le ruiner. Il lui paie l’entretien de son hôtel et d’une maison de campagne à Maisons-Laffitte (Seine-et-Oise, actuellement Yvelines). Il lui offre de nombreux cadeaux : voitures avec attelages, un livre relié avec des billets de 100 francs. Si bien que criblé de dettes, la famille d’Alexandre lui coupe les vivres. Cora met fin à la liaison…. Alexandre ne le prend pas comme ça. Le 19 décembre 1872, il force la porte de Cora et armé d’un révolver, il fonce vers la chambre où il soupçonne qu’il y a un amant. Il tire et manque sa cible. Alors dépité, il tente de se suicider…et se manque. Décidément !
A la suite de ce scandale, Cora est expulsée du territoire français (déjà OQTF ?). Elle se réfugie – oh pas bien loin – à Monte-Carlo, puis à Nice, enfin à Milan. Une fois partie, ses biens, meubles sont saisis. Elle porte plainte et finalement, on les lui rend en 1873. Elle vend Maisons-Laffitte. Elle en profite pour y passer une dernière nuit avec le prince Napoléon ! Elle revient à Paris et reprend son activité de prostitution, mais ne gagne plus autant d’argent. Elle n’est plus toute jeune, elle est quinquagénaire. Au XIXème siècle, on est vieux à 50 ans.
En 1877, Cora Pearl vend son argenterie et se sépare de Beauséjour. Elle est atteinte d’un cancer de l’estomac. Malgré ça, en 1886, elle inaugure une publication « Les femmes du jour » qui se veut revue littéraire et satirique.
Le 8 juillet, elle meurt dans son appartement, en grande partie oubliée par tous ceux qui l’ont honorée ou qu’elle a honorés. Elle est inhumée au cimetière des Batignolles (XVIIème arrondissement). Ses biens sont mis aux enchères.
On peut citer un extrait de ses mémoires : « Je n’ai jamais trompé personne et je n’ai jamais été à personne. Mon indépendance fut ma honte et ma fortune. Je n’ai pas connu d’autre bonheur ». Sa vie a inspiré de nombreux ouvrages.
C’était grandeur et décadence d’une « grande horizontale ». Dans le calendrier républicain, le 8 juillet est le jour du parc.
KONRAD ADENAUER
Konrad Adenauer, né en 1876, a commencé sa carrière politique sous le République de Weimar (1919-1933) et fut maire de Cologne, sa ville natale, dès 1917. A partir de 1921 jusqu’en 1933, il est Président du Conseil d’Etat. Il préside la société coloniale allemande pour la défense de la pensée coloniale.
Seulement, avec l’arrivée d’Hitler au pouvoir (30 janvier 1933), il est arrêté et même interné, après la « nuit des longs couteaux » (29 au 30 juin 1934, quand les SS ont éliminé les SA). A partir de là, il devient un fervent opposant au nazisme, jusqu’à sa chute en 1945.
Le 15 septembre 1949, Konrad Adenauer est le premier Chancelier de la République Fédérale Allemande (RFA), communément appelée Allemagne de l’Ouest, issue du partage l’Empire allemand d’Hitler. Il le sera jusqu’au 16 octobre 1963. Il appartient au CSU-CDU (droite chrétienne et démocratique). Il est partisan – déjà – d’une Europe de la défense, une CED (Communauté Européenne de Défense). Mais en 1954, elle est rejetée par la France, notamment par les gaullistes et les communistes. Chacun, pour des raisons diverses, craint un réarmement de l’Allemagne.
Le 9 mai 1950, le ministre français des Affaire étrangères, Robert Schuman prononce un discours afin d’établir une coopération avec l’Allemagne. Il fallait oser cinq ans seulement après la dernière guerre contre les peuples allemands, conflits qui avaient commencé depuis les Carolingiens (IXème siècle). On considère que ce 9 mai est la date fondatrice de ce qu’est aujourd’hui l’Union Européenne.
C’est ainsi que le 18 avril 1951, naît la CECA (Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier). En ce milieu du XXème siècle, le charbon est encore l’énergie principale et la France et l’Allemagne ont de belles ressources. Quant à l’acier, il est encore le matériau de base de l’industrie métallurgique.
Le 25 mars 1957 est signé à Rome, la création de la CEE (Communauté Economique Européenne) par 6 Etats : Allemagne Fédérale, Belgique, France, Italie, Luxembourg, Pays-Bas. Dans le même temps est créé l’Euratom pour l’utilisation du nucléaire civil.
A la suite du putsch d’Alger, le 13 mai 1958, le Président de la République, René Coty, fait appel à De Gaulle pour former un gouvernement. Quelques mois plus tard, le 15 septembre 1958, il invite le chancelier Konrad Adenauer dans sa résidence privée de La Boisserie, à Colombey-les-Deux-Eglises (Haute-Marne). Rencontre privée mais très médiatisée et qui est restée dans l’histoire (on retrouve la photo dans tous les manuels scolaires). L’objet est de
renforcer la coopération entre les deux Etats et de jeter les bases d’une Europe solidaire et pacifique.
Cette rencontre a été complétée très officiellement par le traité de l’Elysée, le 22 janvier 1963, De Gaulle étant devenu Président de la République. Cette fois, on confirme la coopération dans différents domaines : économie, affaires étrangères, éducation. A partir de là, se sont établis de nombreux échanges entre villes, voire villages de part et d’autre du Rhin. Un bon nombre existe encore. Le but était aussi de favoriser l’apprentissage du français pour les Allemands et de l’allemand pour les Français (Erasmus) . Il faut bien avouer que c’est un semi échec, puisque l’anglais s’est imposé dans les deux pays.
Si ce traité doit favoriser la coopération, malgré l’amitié que se portent mutuellement De Gaulle et Adenauer, il reste des divergences dans ce contexte de guerre froide. De Gaulle souhaite une indépendance vis-à-vis des Etats-Unis et de l’URSS. Or l’Allemagne est coupée en deux, la partie est, la RDA (République Démocratique Allemande) vit sous le régime communiste imposé par Moscou. Tandis que la RFA, pour sa sécurité a besoin de la force militaire américaine. Par ailleurs, Adenauer souhaitait que le Royaume-Uni fasse un jour partie de l’Europe. De Gaulle y était foncièrement hostile.
Adenauer fait installer la capitale de la RFA à Bonn, non loin de Cologne, où il a une résidence (ce devait être temporaire). Il a été désigné chancelier durant 4 législatures (du 15 septembre 1949 au 16 octobre 1963). Il a marqué l’histoire de la jeune RFA et de l’Europe.
Konrad Adenauer s’est éteint le 19 avril 1967, à la suite d’une crise cardiaque. Il avait 91 ans. Il fut un ardent artisan de la réconciliation franco-allemande et de la construction européenne.
CLARA ZETKIN
Le 5 juillet 1857 est née Clara Eiszner à Wiederau (près de Chemnitz dans le royaume de Saxe). C’était une enseignante, une journaliste, une femme politique marxiste, une figure du féminisme socialiste. De 1907 à 1917, elle a été résidente de l’Internationale socialiste des femmes. Elle adhère à un parti politique : SPD (Parti Social Démocrate), puis à l’USPD qui a une ligne plutôt spartakiste (mouvement d’extrême gauche, inspiré
par Spartacus, gladiateur romain qui a mené la rébellion contre la République romaine au Ier siècle avant Jésus-Christ).
En 1872, la famille s’installe à Leipzig. Clara est inscrite à l’institut Steyber, un des meilleurs pour l’éducation des filles. Ce qui lui permet d’atteindre un bon niveau d’éducation et ainsi avoir accès à l’université. A partir de là, elle fréquente les milieux féministes et fait partie de l’association générale des femmes allemandes. Elle est introduite par une jeune Russe dans la communauté « Narodnik » (mouvement populaire marxiste russe de la fin du XIXème siècle). Elle y découvre les idées socialistes révolutionnaires. Elle obtient son diplôme de professeure de langues étrangères, après la mort de son père en 1875. Elle s’éloigne du féminisme bourgeois et adhère au SPD : Sozialdemokratische Partei Deutschlands (Parti Social démocratique Allemand). Or le chancelier Bismarck (1815 – 1898) a interdit ce parti. Sans être mariée, elle prend le nom de son compagnon Ossip Zetkin (1850-1889), russe membre du mouvement « Narodnik » venu se réfugier à Leipzig.
Elle participe clandestinement à la diffusion du journal du SPD. Mais Ossip est arrêté et expulsé de Saxe et se réfugie à Zurich. En 1882, Clara et Ossip se retrouvent à Paris. Lui, est secrétaire du premier mouvement d’ouvriers immigrés de Paris, principalement des Roumains et des Russes. Clara rencontre Louise Michel (1830-1905), militante anarchiste, Jules Guesde (1845-1922), leader socialiste, fondateur du parti ouvrier, Laura Marx (1845-1911), militante socialiste, fille de Karl Marx. Quant à Ossip, il fait la connaissance de Paul Lafargue (1842-1911), écrivain et responsable socialiste.
Clara Zetkin influence l’Union suisse des ouvrières, en opposition avec le féminisme bourgeois. Au milieu de toutes ces activités, avec Ossip, ils auront 2 enfants : Maxime né en 1883 et Constantin né en 1885. Mais en 1886, elle revient à Leipzig pour se soigner car elle atteinte par la tuberculose. Trois ans plus tard, Ossip meurt. Néanmoins, elle va à Paris au congrès de la fondation de la IIèmeInternationale socialiste. Les socialistes sont divisés sur la question du travail des femmes. S’opposent deux tendances :
– La vision conservatrice qui considère que la place de la femme est au foyer ; – Emancipation par l’accès au travail, ce qui est la version de Clara.
Mais le système capitaliste a des conséquences néfastes sur les travailleurs. Elle plaide pour une union des travailleurs et le KPD (Kommunistische Partei Deutschlands = Parti communiste
allemand) des travailleuses au sein du socialisme. Or, l’Etat allemand a décrété des lois antisocialistes. Ce qui aboutit à des grèves violentes en 1890. En 1891, Clara rentre en Allemagne et crée l’année suivante, un journal : « Die Gleichheit » (« L’Egalité ») dont elle est rédactrice en chef. Ce journal sera publié jusqu’en 1917. En principe, il doit servir d’éducation populaire pour les ouvrières. Sous l’Empire allemand, l’adhésion à un parti politique est interdite aux femmes. Pour contourner l’interdit, elle crée une structure parallèle au SPD et l’organise. A la tête de ce mouvement, elle place Ottilie Baader (1847-1925), féministe socialiste, Rosa Luxembourg (1871-1919), militante communiste et théoricienne marxiste et Hellen Stöcker (1869-1943), militante féministe pacifiste. A chaque congrès du SPD, elle tient à ce que des femmes soient déléguées. A partir de 1900, la conférence des femmes peut se tenir hors congrès. Mais elle est critiquée pour son autoritarisme et sa rigidité doctrinaire. Ainsi, elle s’oppose à Lily Braun (1865-1916) , écrivaine féministe plus modérée. On lui reproche que son journal contient un vocabulaire pas forcément accessible par la base.
Après 1906, les femmes peuvent adhérer à un parti, donc au SPD entre autres. En 1907, Clara organise à Stuttgart, la première conférence internationale des femmes socialistes. Cette conférence consacre Clara Zetkin qui devient présidente de l’internationale socialiste des femmes. Elle est même réélue à la conférence de Copenhague de 1910. Elle y propose de soutenir Alexandra Kollontaï (1872-1952), militante soviétique féministe marxiste. Cette conférence connaît un certain succès, des militantes viennent de 17 pays. Les objectifs sont de trois ordres : obtenir le droit de vote, égalité entre les sexes, développer le socialisme. C’est à la suite de ces actions que le 8 mars est devenu la journée internationale des femmes.
Après avoir été hostile à la guerre qui s’est déclarée en août 1914, Clara est élue députée du KPD en 1920 et le restera jusqu’en 1933. Cette année-là voit Hitler accéder au pouvoir (30 janvier 1933), elle doit fuir car le KPD est interdit. Elle part en exil à Moscou où elle meurt quelques mois plus tard le 20 juin 1933, à 76 ans.
La postérité est loin de l’avoir oubliée. Il est question d’elle dans tous les manuels scolaires d’histoire de France et de Navarre. A Moscou, au pied du Kremlin, on trouve sa tombe parmi les grands personnages de l’URSS. Les billets de 10 marks de la RDA étaient à l’effigie de Clara Zetkin. Un timbre a été émis pour le 100ème anniversaire de sa naissance. Berlin a donné son nom à une place. Il y a même eu une rue de 1951 à 1995. A Leipzig, un parc lui est consacré, ainsi qu’une rue à Eisenach (Thuringe). En France, on ne l’a pas oubliée non plus. Dans le XIIIème arrondissement de Paris, un jardin porte son nom. A Rennes (Ille-et-Vilaine), c’est une place. A Montreuil (Seine-Saint-Denis), c’est un square. Elle a une rue à Montpellier (Hérault) et en Espagne à Séville, une école maternelle à Guyancourt (Yvelines). Des films et des émissions de télévision lui ont été consacrés.
Dans le calendrier républicain, le 5 juillet est le jour de la groseille.
LIANE DE POUGY
Le 2 juillet 1869 est née à La Flèche (Sarthe), Anne-Marie-Olympe Lassaigne, dite Liane de Pougy.
Connue comme demi mondaine, devenue princesse Ghika par son mariage. Elle a fini religieuse. Elle avait été élevée chez les sœurs de Ste-Anne d’Auray (Morbihan). Liane de Pougy a plusieurs cordes à son arc : danseuse, courtisane, femme de lettres de la Belle Epoque (fin XIXème, début XXème siècle), puis tertiaire dominicaine (laïcs inspirés par la spiritualité dominicaine).
Fille d’officier de cavalerie et d’une mère d’origine espagnole, le 15 juillet 1886, elle épouse un officier de marine, Armand Pourpe, né en 1862. Le 17 mai 1887, à Lorient (Morbihan), elle donne naissance à un fils, Marc-Henri qui sera un des pionniers de l’aviation et qui tombera au début de la guerre, le 2 décembre 1914.
Le mari de Liane est muté à Toulon. Les marins : ils sont absents longtemps ; alors, elle prend un amant. Pas content, quand il la retrouve, Armand lui tire un coup de feu dans le bas du dos ! Liane, pas contente non plus, part à Paris et demande le divorce. Elle a 19 ans, d’où honte et scandale dans la famille. Le fils, encore petit, est confié aux grands-parents paternels qui sont à Suez, en Egypte.
A Paris, Anne-Marie prend des leçons de piano, de danse en cabaret et devient une courtisane très en vue. On dit qu’elle aime le luxe intime d’une « horizontale ». Elle se lie d’amitié avec Sarah Bernhardt qui lui donne des cours, mais ne lui trouve aucun talent et lui donne ce conseil perfide : « N’ouvrez la bouche que pour sourire ! ». Elle rencontre Henri Meilhac (1831 -1897), auteur dramatique et d’opérettes. Il est vieux, mais ça ne l’empêche pas d’aimer les jolies formes ! Et il succombe à ses charmes. En récompense, il la fait engager aux Folies Bergères (établissement inauguré le 2 mai 1869). Elle y débute en avril 1894, puis joue à l’Olympia. Aux Folies Bergères, elle fait un triomphe en 1896. L’écrivain en conclut : « La plus jolie femme du siècle ! ».
Parmi ses adorateurs, on compte du beau linge : Charles de Mac Mahon (1856-1894) qui est membre de la Chambre des Pairs (Sénat aujourd’hui) et qui sera Président de la République, Roman Potocki (1851-1915) noble polonais et homme politique, Maurice de Rothschild (1881 -1957), banquier. Tout ce joli monde la couvre de bijoux, lui procure des équipages luxueux, enfin tout ce qu’il faut pour être une grande courtisane. Sa notoriété grandit encore avec la concurrence d’une autre célèbre courtisane et chanteuse espagnole, Carmen Otero (1868-
1965), dite « La belle Otero ». Quant à Liane, elle est connue pour ses bijoux et sa vie tumultueuse, jusqu’à une tentative de suicide. Elle aurait eu une liaison avec le lithographe Antonio de Gandera (1861-1917) qui en a fait un tableau, allongée langoureusement sur une
duchesse (chaise longue capitonnée, avec un dossier) et aussi de nombreux dessins. Jean Cocteau (1889-1963) la classait parmi les « reines de France ». Lorsqu’elle défilait au grand restaurant « Chez Maxim’s », les hommes se levaient et la saluaient.
Selon l’historien Jean Chalon (né en 1935), vers ses 30 ans, elle était ouvertement bisexuelle, avec des amants des deux sexes. Il la désignait comme une « reine du demi monde ». Parmi ses relations, on trouve une autre demi mondaine Valtesse de la Bigne (1848-1910), Emilienne d’Alençon (1870-1945), comédienne et demi mondaine aussi. Et surtout, en 1899, elle rencontre la jeune américaine Nathalie Clifford Barney (1876-1972), poétesse et salonnière à Paris. « Un don du ciel, un rayon lumineux qui dore tout sur son passage » dira d’elle, Liane. Elle écrit à Nathalie des mots on ne peut plus tendres, qu’on ne peut reproduire ici. Elles envisagent de se retrouver dans l’île de Lesbos où était née Sappho, poétesse de l’Antiquité grecque. Leur liaison a duré une année. Mais Nathalie n’est pas fidèle et elle va à Lesbos ….avec Renée Vivien (1877-1909), poétesse britannique, surnommée « Sappho 1900 ». On voit le genre !
Liane a écrit en 1901 un livre sur sa liaison avec Nathalie, « Idylle saphique ». Cet ouvrage a eu un grand succès de librairie. À Jean Chalon, elle dira que c’était son souvenir le plus voluptueux. En 1898, elle a écrit un roman « L’Insaisissable » où elle parle de la courtisane. Entre 1899 et 1908, elle a une nouvelle idylle saphique. Elle en écrit une comédie : « L’Enlizement ». Liane écrit encore cinq autres romans où elle décrit la souffrance de la vie de courtisane. En 1908, elle est au sommet de sa carrière et c’est là qu’elle rencontre Georges Ghika (1884-1945), peintre roumain et neveu de la reine de Serbie. Ils se marient le 8 juin 1910 en l’église Saint Philippe du Roule. La voilà princesse Ghika. Le mariage est heureux pendant 16 ans, au moment où Ghika la quitte pour une artiste de 23 ans, Manon Thiébaut. Pour se consoler, Liane retrouve Nathalie Barney.
En juillet 1904, Liane se retrouve à la direction d’une revue féminine : « L’art d’être jolie », où elle décrit ce qui fait le charme féminin. Puis à partir de 1919, elle tient un journal qu’elle avait appelé : « Mes cahiers bleus », où elle décrit sa propre évolution. Elle en enverra, en 1942, une copie au Révérend Père dominicain Alex-Ceslas Rzewuski (1893-1983). Après lecture, celui-ci en a conclu qu’elle « n’avait jamais cessé de chercher Dieu ».
En décembre 1914, son fils unique Marc Pourpe, aviateur tombe au front. Liane en est très affectée, «la plus poignante des douleurs », dira-t-elle. Mais la vie continue. Dans sa maison de Roscoff (Finistère), elle reçoit Max Jacob (1876-1944), poète, romancier et peintre et aussi Jean Cocteau (1889-1963), poète, dramaturge, cinéaste. En 1928, la princesse Ghika s’est liée d’amitié avec la Mère supérieure de l’asile Sainte-Agnès à Saint-Martin du Vinoux (Isère).
Celle-ci la juge digne d’entrer dans le monde de Saint-Dominique. Si bien que le 14 août 1943, l’ancienne étoile des Folies Bergères, la demi-mondaine scandaleuse prononce ses vœux en prenant le nom de Anne-Marie de la Pénitence et vit selon la règle dominicaine (faire le vœu d’obéissance à l’ordre, de pauvreté, de chasteté, de prêcher dans les couvents, de lutter contre l’hérésie). Dans cet institut, elle récupère des fonds pour son entretien. Parmi les donateurs, la couturière Gabrielle Chasnel (1893-1980), dite Coco Chanel, a été particulièrement généreuse.
Après la mort de Ghika, le 27 avril 1945, Liane devenue sœur Anne-Marie s’installe à Lausanne dans une chambre de l’hôtel Carlton (le vœu de pauvreté est un peu oublié). Mais Dieu lui aura-t-il pardonné ? Elle souhaitait mourir le jour de Noël : elle est décédée le 26 décembre 1950. Elle a été un sujet de l’émission « Secrets d’histoire » de Stéphane Bern (« Les reines de Paris »). De nombreux auteurs ont écrit sur elle, notamment Jean Chalon : « Portait d’une séductrice » en 1976 et « Liane de Pougy, courtisane, princesse et sainte » en 1994. Max Jacob a publié en 1980 : « Lettres à Liane ». Les mémoires de Liane : «Mémoires d’un grande horizontale » sont sorties en 2021. Il semble que seule la ville de Lorient (Morbihan) ait donné son nom à une rue, car, en 1921, Liane lui avait un don important de 100 000 francs (qui serait de 14 500 euros actuels environ) ayant pour but de remercier Lorient d’avoir donné le nom de son fils, Marc Pourpe, à une rue. Cette somme a servi à construire un parc des sports, inauguré en 1924.
Dans le calendrier républicain, le 2 juillet est le jour de la lavande.